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04/12/2003 | FRANCE | N°98MA01143

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 04 décembre 2003, 98MA01143


Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 août 1998, sous le n° 98MA01143, la requête présentée pour la SOCIETE DES AUTOROUTES ESTEREL PROVENCE COTE D'AZUR (ESCOTA), dont le siège est situé 13674 Aubagne, par Me Aiache-Tirat, avocat ;

La société ESCOTA demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Nice du 12 juin 1998 qui l'a condamné à verser 120.000 francs TTC à Mme Z, et 53.000 francs TTC à Mme A en réparation du préjudice qu'elles continuent à subir du fait des nuisances sonores, et qui a mis à

sa charge les frais d'expertise ;

- de condamner les intimées à reverser les...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 août 1998, sous le n° 98MA01143, la requête présentée pour la SOCIETE DES AUTOROUTES ESTEREL PROVENCE COTE D'AZUR (ESCOTA), dont le siège est situé 13674 Aubagne, par Me Aiache-Tirat, avocat ;

La société ESCOTA demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Nice du 12 juin 1998 qui l'a condamné à verser 120.000 francs TTC à Mme Z, et 53.000 francs TTC à Mme A en réparation du préjudice qu'elles continuent à subir du fait des nuisances sonores, et qui a mis à sa charge les frais d'expertise ;

- de condamner les intimées à reverser les sommes perçues à tort de la société ESCOTA ;

- de condamner Mmes Z et A à verser 15.000 francs à la requérante en application des dispositions de l'article L8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;

Classement CNIJ : 67-03-03-05

C

Elle soutient :

- que le rapport d'expertise Bardet concluait à un niveau sonore des propriétés concernées, inférieur aux normes réglementaires ; qu'aucun préjudice né et actuel n'existait ;

- que le préjudice subi par les requérantes n'est pas anormal et spécial, tous les riverains de l'autoroute supportent un bruit désagréable qui reste cependant inférieur à la norme maximale de 70 dBA fixée par la circulaire du 2 mars 1983 ;

- que la construction de Mme Z se situe à 80 mètres en dessous de l'autoroute et que Mme A a fait édifier en zone non aedificandum, une cuisine protégeant la face nord de sa maison préexistante à l'autoroute ; que dans des circonstances analogues, la juridiction administrative refuse de considérer qu'il y a préjudice indemnisable ;

- que le juge ne peut pas s'opposer à la définition d'un norme réglementaire ;

- que le jugement du tribunal administratif n'est pas motivé en ce qui concerne l'existence d'un préjudice anormal et spécial ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense présenté le 9 décembre 1998 pour Mme Z et Mme A qui demandent à la Cour de confirmer le jugement du Tribunal administratif de Nice en ce qu'il retient la responsabilité de la société ESCOTA et de le réformer pour porter à 200.000 francs la somme due à chaque requérante, au titre des divers préjudices ; de condamner la société ESCOTA à leur verser 20.000 francs au titre des frais irrépétibles de l'article L8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appels ;

Elles soutiennent :

- que contrairement à la version du rapport, l'expert n'a effectué qu'un seul relevé le samedi 13 août 1990 et non plusieurs comme l'avait demandé le tribunal administratif ; que l'expert s'appuie au surplus sur une étude non contradictoire effectuée par la société ESCOTA en 1992 ;

- qu'elles subissent un préjudice anormal et spécial ; qu'il n'existe que des préjudices spécifiques compte tenu de la situation de chaque riverain au regard de l'ouvrage ;

- que le positionnement des instruments de mesure minore le niveau sonore réel ; que sur les façades exposées directement à l'autoroute, le niveau sonore est nettement supérieur à la norme réglementaire ;

- que le permis de construire accordé à Mme A Revel n'a pas été contesté ;

- que les sommes allouées sont trop faibles pour financer des mesures antibruit ; que l'indemnité ne couvre pas les préjudices causés à leur santé ; que les propriétés sont invendables ; que le trafic progresse continuellement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2003 :

- le rapport de M. CHAVANT, premier conseiller ;

- les observations de Me ABEILLE ;

- et les conclusions de M. TROTTIER, premier conseiller ;

Vu, en date du 20 novembre 2003, la note en délibéré présentée par Me ABEILLE pour la société ESCOTA ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme Z est propriétaire d'un immeuble situé à une dizaine de mètres, légèrement en contrebas de l'autoroute Nice-frontière italienne, au lieu dit les Cabrolles ; que Mme A est riveraine de la même autoroute en surplomb à 7 mètres de haut et 10 mètres du bord de l'autoroute ; que les constructions dont s'agit préexistaient à la construction de l'autoroute à l'exception d'une cuisine réalisée par Mme A face à l'autoroute qui a fait l'objet d'un permis de construire définitif délivré en 1986 ;

Considérant que si les conclusions de l'expert indiquent que les valeurs relevées sont inférieures à la réglementation en vigueur qui impose des mesures de protection spéciales dès lors que le seuil de 70 dbA est atteint, il ajoute que ces mesures comportent une marge d'incertitude de 2 à 3 dbA ; que les requérantes indiquent sans être contredites que le relevé des mesures s'est effectué à l'arrière des bâtiments, et le seul samedi 16 août 1996, jour où ils circulent peu de véhicules poids lourds générateurs de bruit ; que dès lors, la société ESCOTA n'est pas fondée à soutenir que le Tribunal administratif de Nice, dont le jugement est suffisamment motivé, a fait une appréciation erronée des circonstances du litige en retenant qu'il existait du fait de l'autoroute, un préjudice anormal et spécial dont Mme Z et Mme A étaient fondées à demander réparation ;

Sur les préjudices :

Considérant que le Tribunal administratif de Nice a entendu condamner la société ESCOTA pour des troubles dans les conditions d'existence subis par les requérantes, ainsi que pour les frais d'insonorisation selon les dires de l'expert ; que si les requérantes soutiennent que les sommes allouées ne permettraient pas de couvrir les frais d'une insonorisation satisfaisante, elles n'apportent à l'appui de cette allégation aucun élément précis ; que si elles font état de divers troubles de santé générés par le bruit, elles ne produisent aucune attestation, aucune ordonnance, aucun acte médical laissant supposer l'existence d'un préjudice corporel ; que s'il est fait état d'une perte de valeur vénale des immeubles, celle-ci n'est pas chiffrée ; que par suite, le Tribunal administratif de Nice a fait une exacte appréciation des préjudices supportés par Mesdames Z et A ; qu'il y a lieu, dès lors, de confirmer le jugement du tribunal administratif en toutes ses dispositions ;

Sur les conclusions relatives aux frais irrépétibles :

Considérant qu'aux termes de l'article L761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à l'accueil des conclusions de la société ESCOTA, partie perdante, tendant à la condamnation de Mme Z et de Mme A aux frais irrépétibles ;

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner la société ESCOTA à verser à Mesdames Z et A, parties partiellement gagnantes, une somme de 1.000 euros à chacune d'elles ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la société ESCOTA et l'appel incident de Mesdames et sont rejetés.

Article 2 : La société ESCOTA est condamnée à verser 1.000 euros à Madame et 1.000 euros à Madame au titre des frais d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société ESCOTA, à Mme Z, et à Mme A.

Copie en sera adressée à l'expert R. Baret, Me Lebretton, Me Abeille, au préfet des Alpes-Maritimes, et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 novembre 2003, où siégeaient :

M. DARRIEUTORT, président de chambre,

M. GUERRIVE, président assesseur,

M. CHAVANT, premier conseiller,

assistés de Melle MARTINOD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 4 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Jean-Pierre DARRIEUTORT Jacques CHAVANT

Le greffier,

Signé

Isabelle MARTINOD

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 98MA01143


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98MA01143
Date de la décision : 04/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. CHAVANT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : AIACHE-TIRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-04;98ma01143 ?
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