La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2003 | FRANCE | N°99MA00097

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 23 octobre 2003, 99MA00097


Vu, 1°/, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 janvier 1999, sous le n°99MA00097, présentée pour la SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE (SAEM) CITADIS, ayant son siège social Hôtel du Département, Place de la Préfecture à Avignon (84000), par Me B..., avocat ;

La SAEM CITADIS demande à la Cour :

1°/ d'annuler l'ordonnance n° 98-6049, en date du 22 décembre 1998, par laquelle la Présidente de la deuxième Chambre du Tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. et Mme Y, ordonné le sursis à exécution de l

a décision en date du 19 juin 1998 par laquelle elle a exercé le droit de préemp...

Vu, 1°/, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 janvier 1999, sous le n°99MA00097, présentée pour la SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE (SAEM) CITADIS, ayant son siège social Hôtel du Département, Place de la Préfecture à Avignon (84000), par Me B..., avocat ;

La SAEM CITADIS demande à la Cour :

1°/ d'annuler l'ordonnance n° 98-6049, en date du 22 décembre 1998, par laquelle la Présidente de la deuxième Chambre du Tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. et Mme Y, ordonné le sursis à exécution de la décision en date du 19 juin 1998 par laquelle elle a exercé le droit de préemption dont elle est titulaire ;

2°/ de rejeter la demande de première instance de M. et Mme Y ;

Classement CNIJ : 68-02-01-01-01

C

3°/ de condamner M. et Mme Y à lui verser une somme de 5.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient, en premier lieu, que la demande de première instance était irrecevable à défaut pour les demandeurs d'avoir satisfait aux exigences fixées par les dispositions de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, lesdites dispositions étant applicables à la décision contestée , contrairement à ce qu'a jugé le premier juge ;

Elle soutient, en deuxième lieu, que l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée ;

Elle soutient, en troisième lieu, que le premier juge n'a pas statué sur l'existence d'un préjudice difficilement réparable qui, en outre, n'était pas établi par les demandeurs de première instance ; que la demande de première instance ne comportait pas, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge de moyens sérieux d'annulation ; qu'en effet, contrairement à ce qu'il était soutenu en première instance, la décision contestée était suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme ; que les dispositions de l'article L.211-4 du même code n'ont pas été non plus méconnues ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 mars 1999, présenté pour M. et Mme Y, par Me X..., avocate, et par lequel ils concluent au rejet de la requête et à ce que la SAEM CITADIS soit condamnée à leur verser une somme de 10.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent, en premier lieu, que les dispositions de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme ne sont pas en l'espèce applicables dès lors que la décision contestée n'est pas une autorisation relative à l'occupation ou à l'utilisation des sols ;

Ils soutiennent, en deuxième lieu, que l'ordonnance attaquée, qui a relevé l'existence d'un préjudice difficilement réparable et d'un moyen sérieux d'annulation est suffisamment motivée ;

Ils soutiennent, en troisième lieu, qu'ils justifiaient, en leur qualité de propriétaires de lots dans l'immeuble faisant l'objet de la décision de préemption contestée, d'un préjudice difficilement réparable ; que, comme l'a à bon droit jugé le premier juge, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de préemption contestée au regard des dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme est un moyen sérieux d'annulation ; qu'en outre, la société appelante n'était pas délégataire du droit de préemption renforcé de la commune de Carpentras ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 1999, présenté pour M. et Mme Y et par lequel ils concluent aux mêmes fins que leur mémoire susvisé et par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 juin 1999, présenté pour la SAEM CITADIS et par lequel elle conclut aux mêmes fins que sa requête susvisée et par les mêmes moyens ;

Vu, 2°/, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 12 juin 2001, sous le n°01MA01324, présentée pour la SOCIETE ANONYME D'ECONOMIE MIXTE (SAEM) CITADIS, représentée par son représentant légal, ayant son siège social Hôtel du Département, Place de la Préfecture à Avignon (84000), par Me C..., avocat ;

La SAEM CITADIS demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 98-6048, en date du 26 avril 2001, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a, à la demande de M. et Mme Y, annulé la décision en date du 19 juin 1998 par laquelle elle a exercé le droit de préemption dont elle est titulaire sur des lots de copropriété dans un immeuble sis sur le territoire de la commune de Carpentras ;

2°/ de rejeter la demande de première instance de M. et Mme Y ;

3°/ de condamner M. et Mme Y à lui verser une somme de 6.000 F sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que la demande de première instance était irrecevable à défaut pour les demandeurs d'avoir satisfait aux exigences fixées par les dispositions de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, lesdites dispositions étant applicables à la décision contestée, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ainsi qu'il ressort d'ailleurs d'un avis du Conseil d'Etat en date du 3 novembre 1998 ;

Elle soutient, en deuxième lieu, que la motivation de la décision de préemption était suffisante au regard des dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme dès lors qu'elle indiquait précisément, et non selon une motivation stéréotypée comme l'ont à tort estimé les premiers juges, l'opération de restructuration urbaine en vue de laquelle le droit de préemption était exercé ; que la même motivation s'imposait pour chacun des immeubles concernés dès lors qu'il s'agissait d'une opération d'ensemble unique et homogène dans le même quartier ;

Vu le mémoire rectificatif, enregistré le 15 juin 2001, présenté pour la SAEM CITADIS ;

Vu les notifications par voie postale et par voie administrative de la requête et du mémoire susvisé effectuées à M. et Mme Y et restées sans effet ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2003 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- les observations de Me A..., substituant Me B..., pour la SAEM CITADIS ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur la jonction des requêtes :

Considérant que les requêtes susvisées, enregistrées sous les n° 99MA00097 et 01MA01324 sont relatives à une même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même décision ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme alors en vigueur : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation... ;

Considérant que la décision de préemption contestée devant le tribunal administratif, qui a pour seul effet de substituer un acquéreur à un autre à l'occasion de la vente d'un immeuble déterminé, ne peut être regardée comme une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol au sens des dispositions législatives précitées ; que, par suite, la société CITADIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a écarté la fin de non-recevoir qu'elle avait opposée à la demande de première instance et tirée de ce que M. et Mme Y n'avaient pas respecté les formalités de notification de ladite demande prévues par l'article L.600-3 précité du code de l'urbanisme ;

Sur la légalité de la décision de préemption en date du 19 juin 1998 :

Considérant que, pour annuler la décision susvisée, le tribunal administratif s'est fondé sur le moyen tiré de son insuffisante motivation au regard des dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L.300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. Toutefois, lorsque le droit de préemption est exercé à des fins de réserves foncières dans le cadre d'une zone d'aménagement différé, la décision peut se référer aux motivations générales mentionnées dans l'acte créant la zone. ; que l'obligation ainsi instituée a le caractère d'une formalité substantielle dont la méconnaissance entache d'illégalité la décision de préemption ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 20 novembre 1997, le conseil municipal de la ville de Carpentras a décidé d'engager une opération de restructuration urbaine en vue de permettre la réalisation d'actions de restauration immobilières, la création de logements, la création et la restructuration d'espaces publics, la réhabilitation de logements et de commerces, ainsi que le ravalement de façades ; que pour mener à bien cette opération, la commune a conclu le 3 février 1998 une convention de concession d'aménagement avec la SAEM CITADIS ; que, par une délibération en date du 30 mars 1998, le conseil municipal de la ville de Carpentras a délégué le droit de préemption urbain à la SAEM CITADIS à l'intérieur du périmètre de la concession d'aménagement ; que, par la décision contestée en date du 19 juin 1998, la société CITADIS a exercé ce droit de préemption sur les lots de copropriété n° 2, 9 et 12 d'un immeuble situé rue Barriot et rue de l'Observatoire à Carpentras , appartenant à M. et Mme Z... et à l'égard desquels M. et Mme Y étaient titulaires d'une promesse de vente ;

Considérant qu'en se bornant à faire référence, dans la décision de préemption contestée, à l'objet de la délibération du 20 novembre 1997 ainsi qu'à l'existence de la convention d'aménagement, qui, au demeurant n'étaient pas jointes à la décision de préemption, et en relevant uniquement que l'immeuble dans lequel se situaient les lots de copropriétés concernés était situé dans le périmètre de la concession sans préciser en quoi l'acquisition de ces lots s'inscrivait dans cette opération de restructuration, la société CITADIS n'a pas satisfait à l'obligation fixée par les dispositions sus-rappelées de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme ; qu'il lui appartenait en effet, contrairement à ce qu'elle soutient, d'indiquer pour les lots considérés les motifs particuliers justifiant l'exercice du droit de préemption sur ces lots alors même que l'opération d'aménagement envisagée constituerait une opération d'ensemble définie à l'échelle d'un quartier ; que si dans la notification de la décision contestée, la société CITADIS faisait également référence à la constitution de réserves foncières, il est constant que la constitution desdites réserves ne s'inscrivait pas dans le cadre d'une zone d'aménagement différé et que le motif ainsi avancé ne répondait pas aux conditions de forme fixées par le dernier alinéa in fine de l'article L.210-1 du code précité ; qu'il suit de là que la société CITADIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision susvisée du 19 juin 1998 ;

Considérant que, par la présente décision, la Cour de céans a statué sur l'appel formé à l'encontre du jugement annulant la décision de préemption du 19 juin 1998 ; que, par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions formulées dans la cadre de la requête n° 99MA00097 par la société CITADIS et tendant à l'annulation de l'ordonnance par laquelle la présidente de la deuxième Chambre du Tribunal administratif de Marseille a ordonné le sursis à exécution de ladite décision ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. et Mme Y, qui ne sont pas les parties perdantes dans les présentes instances, soient condamnés à payer à la société CITADIS une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner la société CITADIS à payer à M. et Mme Y la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de l'ordonnance en date du 22 décembre 1998 de la présidente de la deuxième Chambre du Tribunal administratif de Marseille formulées par la SAEM CITADIS dans la requête n° 99MA00097.

Article 2 : La SAEM CITADIS est condamnée à payer à M. et Mme Y la somme de 1.000 euros (mille euros) sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La requête n° 01MA01324 et le surplus des conclusions de la requête n° 99MA0097 sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAEM CITADIS, à M. et Mme Y, à la commune de Carpentras et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 9 octobre 2003, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. Y... et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mme GUMBAU, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 23 octobre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

Signé

Lucie GUMBAU

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 99MA00097 01MA01324 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA00097
Date de la décision : 23/10/2003
Sens de l'arrêt : Non-lieu
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : TARTANSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-10-23;99ma00097 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award