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16/10/2003 | FRANCE | N°99MA02187

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 16 octobre 2003, 99MA02187


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 novembre 1999 sous le n°'99MA02187 présentée pour la SARL L'HERMITAGE, dont le siège social se situe ... LES PINS (13960) par Me Joseph LO PINTO, avocat à la Cour, et le mémoire complémentaire en date du

2 mars 2001 ;

SARL L'HERMITAGE demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 95-7318 en date du 28 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés aux

quelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 mars de chacune des ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 novembre 1999 sous le n°'99MA02187 présentée pour la SARL L'HERMITAGE, dont le siège social se situe ... LES PINS (13960) par Me Joseph LO PINTO, avocat à la Cour, et le mémoire complémentaire en date du

2 mars 2001 ;

SARL L'HERMITAGE demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 95-7318 en date du 28 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 mars de chacune des années 1989, 1990 et 1991 et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du

1er avril 1988 au 31 mars 1989, ainsi que la décharge des pénalités de mauvaise foi ;

2'/ de la décharger des dites cotisations, droits et pénalités ;

Classement CNIJ : 19-06-02-08-03-02

C+

Elle soutient : que la comptabilité ne comportait pas d'anomalies justifiant son rejet, que la méthode de reconstitution des recettes est viciée dans la mesure où les coefficients utilisés sont inexacts et où des recettes de vins ont été inexactement prises en compte, que la TVA relative aux frais d'édification de l'immeuble à usage d'hôtel affecté en définitive au logement du personnel doit être admise en déduction dès lors que l'administration n'établit pas qu'elle n'avait pas l'intention de réaliser effectivement un hôtel et que l'application de la jurisprudence de la CJCE du 19 septembre 2000 s'y oppose, qu'elle n'a fait preuve d'aucune mauvaise foi et que les pénalités doivent donc être déchargées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense enregistrés les 23 août 2000 et 26 mars 2003 présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient que la comptabilité doit être écartée, que la reconstitution de recettes a été faite conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et repose sur des bases objectives, que la taxe sur la valeur ajoutée ne peut être admise en déduction dès lors qu'aucune opération taxable afférente à la construction n'est jamais intervenue et que la législation ne prévoit aucune régularisation dans cette hypothèse, que la mauvaise foi de l'intéressée est établie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive du Conseil des communautés européennes, n° 77 / 388 / CEE, en date du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2003 :

- le rapport de M. MARCOVICI, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. TROTTIER, premier conseiller ;

Considérant que la SARL L'HERMITAGE, qui exploite un restaurant situé à SAUSSET LES PINS, dans les Bouches-du-Rhône, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er avril 1988 au 31 mars 1991 ; que l'administration

a écarté la comptabilité de la société et a procédé, d'une part, au redressement des bases imposables à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, au rappel de la taxe sur la valeur ajoutée que la société avait déduite au titre de travaux immobiliers réalisés au cours de l'année 1989 ;

Sur le rejet de la comptabilité :

Considérant que l'administration a relevé, au titre de chacun des exercices vérifiés, que les recettes journalières faisaient l'objet d'une comptabilisation globale non appuyée de pièces justificatives ; que si la société requérante fait valoir que les dispositions de

l'article 296-1 du code général des impôts autorisent l'inscription globale en fin de journée des opérations inférieures à 500 F, ces dispositions n'ont pas pour effet de dispenser le contribuable de conserver les pièces justificatives permettant le contrôle des recettes ; que si la SARL L'HERMITAGE, qui n'a pas conservé les doubles des factures clients, produit des doubles des commandes clients, ces documents ne sont pas datés et ne comportent pas un détail suffisant de nature à permettre de les regarder comme probants ; qu'ils n'ont dès lors pas la nature de pièces justificatives de la comptabilité ; que l'administration était donc fondée, en application des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales, à rejeter la comptabilité de la société en raison de cette irrégularité ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

Considérant que le vérificateur a utilisé la méthode dite des vins , laquelle permet de reconstituer les recettes de la société en appliquant à un coefficient calculé entre les recettes totales et les recettes issues de la vente de vin aux achats de vin de la société ; que l'administration, qui supporte la charge de la preuve dès lors que l'imposition n'a pas été établie conformément à l'avis de la commission, établit la validité de la méthode consistant à prendre en compte les doubles des bons de commande du seul mois de juin 1992, alors surtout que la société contribuable ne propose aucune autre méthode de reconstitution ;

Considérant que le vérificateur a réintégré, pour déterminer le montant des recettes servant de base à la reconstitution du chiffre d'affaires de la SARL L'HERMITAGE,

vingt-six factures d'achats de vin émises par les établissements LIBERATI dont la brigade de contrôle et de recherche avait mis à jour des pratiques de facturation codées permettant à ses clients de se livrer à des achats non déclarés ; que si la SARL L'HERMITAGE a admis avoir omis une facture de la société LIBERATI en comptabilité, l'administration n'établit pas que les vingt-cinq autres factures auraient été omises par la société requérante ; que, dès lors, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que les recettes de la société ont été reconstituées en prenant en compte lesdites factures ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déduite au titre des travaux immobiliers :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 271 I du code général des impôts : La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ; qu'aux termes de l'article 221-1 de l'annexe II du même code : Le montant de la taxe dont la déduction a déjà été opérée doit être reversé dans les cas ci-après : (...) Lorsque les biens ou services ayant fait l'objet d'une déduction de la taxe qui les avaient grevés ont été utilisés pour une opération qui n'est pas effectivement soumise à l'impôt ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, et particulièrement de celles de l'article 221-1 précitées telles qu'interprétées au regard des objectifs de la 6ème directive du Conseil des communautés européennes n° 77 / 388 du 17 mai 1977, qu'un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée est en droit de déduire la taxe dont il est redevable pour des biens qui lui ont été livrés ou pour des services qui lui ont été fournis aux fins de travaux d'investissement destinés à être utilisés dans le cadre d'opérations taxées ; que ce droit à déduction reste acquis lorsque, en raison de circonstances étrangères à sa volonté, l'assujetti n'a jamais fait usage desdits biens et services pour réaliser des opérations taxées ;

Considérant que la société a entrepris au cours de la période litigieuse des travaux immobiliers afin d'étendre son activité de restauration à l'hôtellerie ; que le projet n'a pas abouti et que les logements ont été utilisés par la suite pour loger le personnel du restaurant ; que la société fait valoir qu'elle avait l'intention de se livrer à l'activité économique taxable qu'elle prévoyait de développer et dont elle affirme qu'elle ne l'a abandonnée qu'en raisons de difficultés financières et de litiges avec les constructeurs ; que ces affirmations ne sont démenties ni par l'administration, ni par l'instruction ; que dans ces conditions, la société doit être regardée comme ayant renoncé à son projet en raison de circonstances étrangères à sa volonté ; que les droits de la taxe sur la valeur ajoutée étaient dès lors déductibles ; que la société est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Marseille a refusé de faire droit à sa demande en décharge ;

Sur les pénalités :

Considérant que ni l'importance des sommes imposées d'office, ni l'insuffisance de justifications fournies par la société l'HERMITAGE, ne suffisent à établir la mauvaise foi du contribuable ; qu'il en résulte que la société est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des pénalités de mauvaise foi qui lui ont été assignées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le montant des recettes de la SARL L'HERMITAGE de la période en litige sera calculé en faisant abstraction des vingt-cinq factures de la société LIBERATI.

Article 2 : Les bases des impositions mises à la charge de SARL L'HERMITAGE seront calculées compte tenu de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : La SARL L'HERMITAGE est déchargée des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des droits complémentaires de la taxe sur la valeur ajoutée résultant de la différence entre le montant du redressement en litige et le montant du redressement calculé compte tenu de l'article 1er du présent arrêt.

Article 4 : La SARL L'HERMITAGE est déchargée des pénalités de mauvaise foi qui lui ont été assignées.

Article 5 : La SARL L'HERMITAGE est déchargée des compléments de taxe sur la valeur au titre de la remise en cause de son droit à déduction de la taxe ayant grevé les dépenses de travaux immobiliers.

Article 6 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date

du 29 juin 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL L'HERMITAGE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est, et à Me Lo Pinto.

Délibéré à l'issue de l'audience du 18 septembre 2003, où siégeaient :

M. DARRIEUTORT, président de chambre,

M. GUERRIVE, président assesseur,

M. MARCOVICI, premier conseiller,

assistés de Melle MARTINOD, greffier.

Prononcé à Marseille, en audience publique le 16 octobre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Jean-Pierre DARRIEUTORT Laurent MARCOVICI

Le greffier,

Isabelle MARTINOD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 99MA02187 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA02187
Date de la décision : 16/10/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : LO PINTO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-10-16;99ma02187 ?
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