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08/04/2003 | FRANCE | N°99MA01262

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4 eme chambre, 08 avril 2003, 99MA01262


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 juillet 1999, sous le n° 99MA01262, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par Me AGOSTINI, avocat à la Cour ;

M. Michel X demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement n° 94805 en date du 1er avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a diminué les bases des impositions sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988, 1989, et 1990 et a déclaré les services fiscaux fondés à imposer les sommes ainsi diminuées dans la catégorie des r

evenus des capitaux mobiliers ;

Classement CNIJ : 19-01-01-03-02

19-04-02-03...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 juillet 1999, sous le n° 99MA01262, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par Me AGOSTINI, avocat à la Cour ;

M. Michel X demande à la Cour :

1°/ de réformer le jugement n° 94805 en date du 1er avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a diminué les bases des impositions sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988, 1989, et 1990 et a déclaré les services fiscaux fondés à imposer les sommes ainsi diminuées dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers ;

Classement CNIJ : 19-01-01-03-02

19-04-02-03-01-01-02

C

2°/ de lui accorder la décharge de l'imposition restant en litige ;

3°/ d'ordonner le remboursement des frais exposés pour la constitution de garanties ;

Il soutient que les indemnités pour frais qu'il a perçues en qualité de président de l'Union Nationale pour la Pêche en France ne constituent pas une rémunération imposable ; que l'Union pour la Pêche est une association à but non lucratif ; qu'elle ne fait payer aucune prestation ; qu'elle ne verse aucune rémunération à ses administrateurs mais pouvait indemniser leurs frais ; qu'elle ne procédait à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfices ; qu'elle n'avait aucune activité commerciale ; que les indemnités perçues par le requérant couvraient les dépenses inhérentes à la fonction et étaient peu élevées ; que l'Union pour la Pêche est une association très importante qui exige de son président une activité à temps plein, étendue à l'ensemble du territoire national ; que, pour ses tâches, il n'était assisté que de deux secrétaires ; que ses fonctions entraînaient des dépenses importantes ; que, s'agissant d'allocations forfaitaires, le requérant n'a pas à obligatoirement fournir des pièces justificatives à concurrence de leur montant ; qu'il résulte de l'instruction du 15 décembre 1981 concernant les entreprises commerciales que les allocations pour frais peuvent être justifiées par toutes indications utiles ; que le personnel de l'Union pour la Pêche est trop restreint pour que soient archivées les pièces justificatives ; que le requérant a fourni des pièces justificatives de ses activités ; que l'appartement de l'association considéré comme un avantage en nature accordé au président est une simple pièce transformée en chambre, accompagnée d'une salle de bains et d'une kitchenette, d'une superficie totale de 30 m² ; que la résidence principale du requérant se trouve en Corse et qu'il n'avait pas l'usage exclusif de cette chambre ; que cette chambre lui était mise à disposition pour les seuls besoins du service et évitait des frais d'hôtel plus coûteux ; que les allocations forfaitaires ont toujours été fixées par le conseil d'administration en fonction des charges réellement supportées par l'intéressé ; que les activités de l'appelant en qualité de président de l'association n'étaient pas rémunérées par ailleurs ; que le tribunal administratif n'a pas tranché la question de la nécessité ou pas de fournir des pièces justificatives des dépenses ; que, pour imposer les indemnités du requérant en tant que revenus de capitaux mobiliers, l'administration doit avoir préalablement opéré un redressement du résultat annuel de la personne morale ; qu'en l'espèce l'administration s'est bornée à taxer à l'impôt sur les sociétés les excédents de l'Union Nationale pour la Pêche sans leur apporter de modification ; qu'à supposer qu'il y a lieu à imposition au titre des revenus de capitaux mobiliers, il ne pourrait y avoir bénéfices distribués qu'à hauteur des montants annuels des excédents que l'administration a taxés, soit, après déduction des avantages en nature, 76 410 F en 1988, 297 364 F en 1989 et 82 600 F en 1990 ; que l'appelant ne peut être par ailleurs taxé en qualité d'associé ; que la taxation de l'Union pour la Pêche à l'impôt sur les sociétés est en tout état de cause impossible en raison de son caractère non lucratif ; que l'administration a manqué de la prudence nécessaire rappelée par l'instruction du 27 mai 1977 ; que l'instruction du 15 septembre 1998 a depuis admis que les dirigeants d'associations pourraient percevoir des rémunérations ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour le rejet de la requête ;

Il soutient que l'instruction du 15 septembre 1998 annexe II, d'ailleurs postérieure aux faits, n'est pas applicable au cas de l'espèce ; que l'octroi de rémunérations au président de l'Union pour la Pêche suffit pour considérer que l'association ne remplissait pas les conditions relatives à une gestion désintéressée ; que l'association, agréée, avait l'obligation de présenter des pièces justificatives à l'appui de sa comptabilité ; que les documents fournis ne permettaient pas de justifier les sommes attribuées à M. X ; que l'instruction du 15 décembre 1981 ne s'applique qu'aux seuls salariés qui ne sont pas astreints à tenir une comptabilité au jour le jour de leurs dépenses ; que les rémunérations non déclarées et non justifiées de M. X constituent également des rémunérations occultes ; qu'à défaut d'être imposés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les rémunérations de M. X devraient l'être dans la catégorie des traitements et salaires ; qu'en l'absence de litige né et actuel, les conclusions aux fins de remboursement des frais de constitution de garanties sont irrecevables ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 2 mai 2000, présenté pour M. X par Me AGOSTINI ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que l'instruction du 15 septembre 1998 est également applicable à M. X ; que l'Union pour la Pêche n'est pas agréée mais simplement déclarée ; que l'article L.14 du livre des procédures fiscales n'exige pas la production des pièces justificatives des dépenses ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que les pièces annexes prévues à l'article L.14 du livre des procédures fiscales ne sauraient se limiter à la production de courriers ou de notes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2003 :

- le rapport de M. POCHERON, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant qu'il résulte du jugement du Tribunal administratif de Bastia en date du 1er avril 1999 que les bases d'imposition de M. X restant en litige s'élèvent à 282 945 F au titre de l'année 1988, 224 185 F au titre de l'année 1989 et 217 405 F au titre de l'année 1990 ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Sur le caractère lucratif des activités de l'Union Nationale pour la Pêche en France :

Considérant qu'en vertu de l'article 206 du code général des impôts sont passibles de l'impôt sur les sociétés toutes les personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service vérificateur a constaté d'une part que l'association Union Nationale pour la Pêche en France et la Protection du Milieu Aquatique (U.N.P.F) avait, au cours des années 1988, 1989, et 1990, versé à son président, M. X, à titre d'allocations forfaitaires annuelles la somme de 210 000 F pour chacune des trois années, à titre de frais de séjour les sommes de 142 945 F, 84 185 F et 77 045 F et à titre de frais de déplacement les sommes de 5 412 F, 3 179 F et 11 454 F et d'autre part, qu'elle avait mis gratuitement à la disposition de son président un logement de 50 m² sis à Paris ; que M. X fait valoir que les indemnités qu'il a perçues, dont il admet et même revendique ne pouvoir justifier par des notes de frais, présentent le caractère de dépenses inhérentes à sa fonction et non de revenus imposables ; qu'il indique que leur montant n'est pas exagéré compte tenu de l'ampleur des tâches qu'il exerçait, étant le président national de 4 230 associations locales de pêche, regroupées en 92 fédérations départementales, elles-mêmes fédérées en 6 unions régionales, et des fréquents déplacements qu'il était contraint d'effectuer dans l'exercice de ses fonctions, tant pour se rendre de son domicile corse au siège parisien de l'association que pour présider des réunions en province ;

Considérant qu'en raison de l'importance des sommes que l'association a versées à son président et en l'absence de tout justificatif permettant de déterminer le montant correspondant au simple remboursement des frais de séjour ou de déplacement exposés par M. X, dont le service vérificateur était en droit de demander la production en application de l'article L.14 du code général des impôts, l'association doit être regardée comme ayant accordé au requérant des avantages dont l'allocation n'est pas compatible avec une gestion désintéressée ; que, par ce seul fait, l'activité présentant le caractère d'une exploitation lucrative au sens de l'article 206 du code général des impôts, l'U.N.P.F était en vertu de ce texte passible de l'impôt sur les sociétés au titre des années 1988, 1989 et 1990 ; que le communiqué du premier ministre annexé à l'instruction 4-H-5-98 du 15 septembre 1998 annonçant l'abandon des redressements mis à la charge des associations à caractère lucratif de bonne foi ne constitue pas une interprétation de la loi fiscale au sens des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; que M. X n'est donc pas en tout état de cause fondé à invoquer son contenu, qui ne constitue que l'annonce de mesures prises ou à prendre par l'administration ; qu'il n'est en tout état de cause pas davantage fondé à demander le bénéfice de l'instruction administrative 4-H-2-77 du 27 mai 1977, complétée par celle du 30 novembre 1988, dans la mesure où l'activité de l'U.N.P.F n'était pas désintéressée au regard des dispositions applicables du code général des impôts ; qu'il suit de là que le requérant ne saurait soutenir que les sommes que lui a allouées l'association n'avaient pas la nature de distribution en raison du caractère non lucratif des activités de l'association en cause ;

Sur la caractère de distributions des sommes allouées à M. X par l'Union Nationale de la Pêche en France :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital... ; et qu'aux termes de l'article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués...c. les rémunérations et avantages occultes ;

Considérant qu'il est constant que les sommes susmentionnées ont été effectivement allouées à M. X ;

Considérant que l'administration, qui est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier l'imposition en substituant une base légale à une autre, soutient en appel, que les indemnités perçues par M. X, initialement imposées dans la catégorie des traitements et salaires, puis sur le fondement de l'article 109-1-1° précité, constituent des avantages occultes au sens de l'article 111-c du code général des impôts ; qu'il est constant que l'association n'a pas inscrit en comptabilité comme avantages en nature le montant des allocations pour frais et les remboursements accordés à M. X ; que lesdites dépenses doivent par suite être regardées comme des rémunérations ou avantages occultes versés par l'association à son dirigeant ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les bénéfices distribués retenus par l'administration pour le calcul des droits et pénalités ne pouvaient, en application des dispositions des articles 109-1-1° et 110 du code général des impôts, être de montants supérieurs à ceux des excédents annuels de l'U.N.P.F soumis à l'impôt sur les sociétés est inopérant et doit être écarté ; que M. X ne saurait utilement se prévaloir de l'instruction administrative 5(F-2442 du 15 décembre 1981 relative à la justification des frais dans la mesure où il n'entre pas dans les prévisions de cette instruction qui concerne le régime des frais réels et des allocations forfaitaires dont les salariés peuvent demander la déduction en vertu des dispositions de l'article 83-3 ter du code général des impôts ; qu'il ne peut, enfin, invoquer l'instruction de la direction générale des impôts du 15 septembre 1998 inapplicable, en tout état de cause, aux années d'imposition en litige ; qu'ainsi c'est à bon droit que l'administration analyse les sommes restant en litige, déboursées par l'association en faveur de M. X, comme des bénéfices distribués à l'intéressé, imposables au nom de ce dernier dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions précitées de l'article 111-c du code général des impôts, sans que le requérant puisse valablement opposer l'absence d'un redressement préalable se traduisant par une modification du résultat annuel de l'U.N.P.F ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia n'a que partiellement satisfait à ses demandes ;

Sur les conclusions aux fins de remboursement des frais de constitution des garanties :

Considérant que les conclusions sus-analysées, qui sont présentées devant le juge de l'impôt sans avoir été préalablement exposées au trésorier payeur général, sont par ce motif irrecevables et doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Michel X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 25 mars 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur

M. POCHERON, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 8 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Michel POCHERON

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

7

N° 99MA01262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4 eme chambre
Numéro d'arrêt : 99MA01262
Date de la décision : 08/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. HERTGEN
Rapporteur ?: M. POCHERON
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : AGOSTINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-08;99ma01262 ?
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