Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation des décisions du 22 décembre 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de renvoi.
Par un jugement n° 2200445 du 20 octobre 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 mars 2024, M. B... A..., représenté par Me Faure Cromarias, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2200445 du 20 octobre 2023 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et l'arrêté préfectoral du 22 décembre 2021 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée vie familiale ", à tout le moins de procéder à un nouvel examen de sa situation, en lui délivrant un récépissé avec autorisation de travail, l'ensemble dans le délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, la somme de 1 500 euros au titre des " frais irrépétibles ", incluant la somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie, d'autre part, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. A... soutient que :
- les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation de son pays de renvoi sont entachées d'un vice d'incompétence de leur auteur ;
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ; elle a été prise en méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la mesure d'éloignement, illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et se trouve entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision désignant son pays de destination, illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Le préfet du Puy-de-Dôme a produit des pièces enregistrées le 8 août 2024.
La clôture d'instruction a été fixée au 16 août 2024 par une ordonnance du 11 juillet précédent.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
* la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
* l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
* le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
* le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Gros, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant algérien né en 1986, est entré en France le 27 août 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Après avoir épousé, le 10 mars 2018, une ressortissante française, il a sollicité le certificat de résidence d'un an prévu par les stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, certificat qui lui a été délivré pour un an jusqu'au 9 août 2020. Mais, par décisions du 22 décembre 2021, le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de renouveler ce titre de séjour, a obligé M. A... à quitter le territoire français sous trente jours et a désigné son pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 20 octobre 2023 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions préfectorales du 22 décembre 2021.
Sur le refus de séjour :
2. En premier lieu, l'arrêté en litige du 22 décembre 2021, qui contient les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi, a été signé par M. Laurent Lenoble, secrétaire général de la préfecture du Puy-de-Dôme, auquel le préfet de ce département avait délégué sa signature pour prendre de tels actes par un arrêté du 24 septembre 2021, publié le 27 septembre suivant au recueil des actes administratifs spécial de cette préfecture. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire du refus de séjour doit dès lors être écarté.
3. En deuxième lieu, l'arrêté en litige comporte les éléments de droit et de fait qui fondent le refus opposé à la demande de renouvellement du certificat de résidence qui avait été délivré à M. A... en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française. Cette décision est par suite suffisamment motivée même si le préfet n'a pas fait état de l'aide apportée par le requérant à son père, qui l'héberge, lequel souffrant de problèmes de santé, serait isolé en France.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. A... est séparé depuis le 25 juillet 2020 de Mme C..., de nationalité française, qu'il avait épousée le 10 mars 2018. Il n'est pas isolé en Algérie où, selon l'enquête administrative de communauté de vie, résident sa mère et ses huit frères et sœurs, où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans. Son père, né en 1943, titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, réside en France depuis 1959. Si M. A... lui apporte une aide ménagère et l'assiste dans la prise de son traitement médical, cette présence du requérant auprès de son père n'est toutefois pas démontrée indispensable, eu égard notamment au caractère ancien des pathologies de ce père, pris en charge sur le plan psychologique depuis 1990 selon un certificat d'un médecin psychiatre du 10 janvier 2022 réitéré le 28 septembre suivant. Enfin, entre décembre 2019 et décembre 2021, M. A... a occupé divers emplois dans le cadre de missions d'intérim, qui lui ont procuré des revenus déclarés de 388 euros en 2019 et 8 606 euros en 2021, et qui ne suffisent pas à témoigner d'une particulière insertion par le travail durant les sept années et quatre mois de son séjour en France. Dans ces conditions, en refusant de délivrer à M. A... le certificat de résidence sollicité, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Doit en conséquence être écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ces dernières au surplus n'ayant pas été invoquées à l'appui de la demande de titre de séjour. Le préfet n'a pas davantage entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. En dernier lieu, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour, instituée par l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues pour l'obtention d'un titre de séjour de plein droit en application des dispositions de ce code, ou des stipulations équivalentes de l'accord franco-algérien, auxquels il envisage de refuser la délivrance d'un tel titre de séjour. En l'espèce, le requérant n'allègue pas remplir les conditions de délivrance de plein droit du certificat de résidence en qualité de conjoint d'une ressortissante française prévu par le 2) de l'article 6 et le a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien, et, conformément à ce qui a été exposé précédemment, il ne remplit pas les conditions de délivrance de plein droit du certificat de résidence prévu par le 5) de l'article 6 de cet accord. Le préfet n'était dès lors pas tenu de consulter la commission du titre de séjour. Le moyen tiré d'un vice de procédure doit en conséquence être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que doit être écartée l'exception d'illégalité du refus de séjour articulée à l'encontre de la mesure d'éloignement.
8. Pour les motifs exposés au point 2, cette décision n'a pas été prise par une autorité incompétente pour ce faire.
9. Pour les motifs exposés au point 5, et en l'absence d'argument particulier, cette mesure n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le pays de renvoi :
10. Il résulte de ce qui précède que doivent être écartées les exceptions d'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement, articulées à l'encontre de la décision désignant le pays de renvoi du requérant.
11. Pour les motifs exposés au point 2, cette décision n'a pas été prise par une autorité incompétente pour ce faire.
12. Pour les motifs exposés au point 5, et en l'absence d'argument particulier, cette décision n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
14. Les conclusions présentées par le requérant tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie, qui n'est pas au nombre des dépens énumérés à l'article R. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse une quelconque somme au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
M. Gros, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.
Le rapporteur,
B. Gros
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY00625