Vu la procédure suivante :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 7 octobre 2022, 16 novembre 2023 et 20 décembre 2023 (non communiqué), la SAS Distribution Casino France, représentée par Me Bolleau, demande à la cour :
1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, l'arrêté du 9 août 2022 par lequel le maire de Vichy a délivré à la société Lidl un permis de construire en vue de la démolition d'un magasin existant d'une surface de vente de 713 m² et de la construction d'un nouveau magasin d'une surface de vente de 1 405 m² ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Vichy la somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par deux mémoires, enregistrés les 11 janvier 2023 et 11 décembre 2023, la commune de Vichy, représentée par Me Martins Da Silva, conclut à l'irrecevabilité, au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par deux mémoires, enregistrés les 13 mars 2023 et 12 décembre 2023, la SNC Lidl, représentée par Me Bozzi, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un courrier du 26 janvier 2024, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, après avoir constaté l'illégalité du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale au vu du moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte (affichage irrégulier et imprécision du contenu de la délégation de signature du 20 mai 2022) de mettre en œuvre la procédure prévue à l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et les a invitées à présenter leurs observations.
Par un courrier du 26 janvier 2024, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office, tiré de l'imprécision du contenu de l'arrêté du 20 mai 2022 du maire de Vichy portant délégation de signature à Mme B... A..., première adjointe au maire, qui ne vise pas précisément les autorisations d'urbanisme.
Par un mémoire, enregistré le 29 janvier 2024, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.
Par un courrier du 31 janvier 2024, la commune de Vichy a répondu aux courriers qui lui ont été adressés le 26 janvier 2024.
Par un courrier du 1er février 2024, la SNC Lidl a répondu aux courriers qui lui ont été adressés le 26 janvier 2024 et a précisé qu'elle entendait solliciter le prononcé d'un sursis à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de régulariser les vices éventuellement constatés.
Par un arrêt avant-dire-droit du 7 mars 2024, la cour a sursis à statuer sur la requête, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois imparti au pétitionnaire pour justifier d'une mesure de régularisation, au regard du vice que cet arrêt a retenu.
Par deux mémoires, enregistrés les 17 avril 2024 et 3 juin 2024, la SNC Lidl persiste dans ses précédentes conclusions et indique avoir obtenu un arrêté du 15 avril 2024 portant permis de construire modificatif régularisant son projet.
Par un mémoire, enregistré le 30 avril 2024, la commune de Vichy persiste dans ses précédentes conclusions et indique qu'un arrêté du 15 avril 2024 portant permis de construire modificatif a régularisé le vice retenu.
Par un mémoire, enregistré le 29 mai 2024, la SAS Distribution Casino France demande l'annulation du permis de construire modificatif obtenu en soutenant que le pétitionnaire ne disposait d'aucune qualité pour solliciter une autorisation d'urbanisme modificative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- et les observations de Me Ducros pour la société Distribution Casino France, de Me Juilles pour la commune de Vichy et de Me Juliac-Degrelle pour la SNC Lidl.
Considérant ce qui suit :
1. Le 21 décembre 2021, la société Lidl a déposé auprès de la mairie de Vichy une demande de permis de construire valant démolition et autorisation d'exploitation commerciale portant sur la démolition totale d'un magasin existant d'une surface de vente de 713 m² et la construction d'un bâtiment destiné à accueillir un magasin à dominance alimentaire de l'enseigne " Lidl " d'une surface de vente de 1 415 m² sur le territoire de la commune. La commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) de l'Allier a rendu un avis favorable au projet le 15 février 2022. Saisie d'un recours contre cet avis favorable de la CDAC de l'Allier, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a rejeté ce recours et émis, le 16 juin 2022, un avis favorable au projet. Par un arrêté du 9 août 2022, le maire de Vichy a délivré à la SNC Lidl un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour le projet considéré. La société Distribution Casino France, qui exploite une supérette à l'enseigne " Casino Shop " sur la commune de Vichy et une supérette sur la commune de Cusset, situés au sein de la zone de chalandise du projet, demande l'annulation de cet arrêté en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.
2. Par un arrêt avant dire-droit du 7 mars 2024, la cour a retenu que l'arrêté du 9 août 2022 du maire de Vichy portant permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré à la SNC Lidl était illégal en raison de l'absence de délégation de signature régulière délivrée par le maire de la commune à Mme B... A..., signataire de l'arrêté en cause, faute de publication ou d'affichage de cette délégation et en raison de l'imprécision de cette délégation quant à son étendue. Faisant application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la cour, au motif que ce vice était susceptible d'être régularisé, a sursis à statuer sur la requête de la SAS Distribution Casino France jusqu'à l'expiration du délai de quatre mois imparti au pétitionnaire pour justifier de l'intervention d'une mesure de régularisation.
3. Il ressort des pièces du dossier que le maire de Vichy a délivré le 15 avril 2024 à la SNC Lidl un permis modificatif, en vue de régulariser le vice affectant le permis litigieux, signé par le maire lui-même. Si la requérante, dans ses dernières écritures, conteste la légalité de ce permis modificatif au regard des dispositions de l'article R. 441-1 du code de l'urbanisme dès lors que la parcelle cadastrée section AD n°589, sur laquelle s'implante une partie du projet litigieux, a fait l'objet d'une promesse de vente au bénéfice du pétitionnaire qui est devenue caduque au 6 mars 2023, il ressort des pièces produites par le pétitionnaire que la SNC Lidl était propriétaire de ladite parcelle au 3 mars 2023 et ainsi, en tout état de cause, à la date de demande du permis de construire modificatif déposée le 15 mars 2024. Par suite, le permis de construire modificatif accordé le 15 avril 2024, qui n'est pas entaché d'illégalité, a régularisé le vice entachant le permis initial.
4. Il résulte de ce qui précède que la société Distribution Casino France n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 9 août 2022 susvisé en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ni celle de l'arrêté du 15 mars 2024 portant permis de construire modificatif.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Vichy, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Distribution Casino France au titre des frais exposés à l'occasion de cette instance.
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Distribution Casino France le versement de sommes à la commune de Vichy et de la SNC Lidl au titre des mêmes frais exposés par elles dans cette instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Distribution Casino France est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Vichy et par la SNC Lidl en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Distribution Casino France, à la SNC Lidl, à la commune de Vichy et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la présidente de la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
M. Gros, premier conseiller,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2024.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
La présidente,
P. Dèche
Le greffier en chef,
C. Gomez
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N°22LY02945
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