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02/07/2024 | FRANCE | N°23LY02860

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 02 juillet 2024, 23LY02860


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... G... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 24 août 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, en lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours, et a désigné le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2207231 du 27 avril 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté s

a demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 5 septembre 2023, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... G... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 24 août 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, en lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours, et a désigné le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2207231 du 27 avril 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 septembre 2023, Mme B... G... épouse C..., représentée par Me Mathis, demande à la cour :

1°) d'annuler jugement n° 2207231 du 27 avril 2023 du tribunal administratif de Grenoble ainsi que les décisions préfectorales du 24 août 2022 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et désignant le pays de renvoi ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative.

Mme C... soutient que :

- la décision de refus de séjour n'a pas été précédée d'un examen sérieux de sa situation, a été prise en méconnaissance des stipulations du 2) et du 5) de l'article 6 et de celles du a) de l'article 7bis de l'accord franco-algérien, méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la mesure d'éloignement est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- la décision désignant son pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 9 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Gros, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... G..., de nationalité algérienne, a, en France, épousé Mme A... C..., le 2 mars 2019, à la suite de quoi le préfet de l'Isère lui a délivré un certificat de résidence d'un an valable à compter du 31 juillet 2019. Par décisions du 24 août 2022, le préfet a opposé un refus à la demande de renouvellement de ce certificat d'un an et de délivrance d'un certificat de dix ans, que Mme G... épouse C... avait déposée plus de deux ans auparavant, et il a assorti ce refus d'une mesure d'éloignement en désignant le pays de renvoi de l'intéressée. Mme B... C... relève appel du jugement du 27 avril 2023 rejetant ses conclusions dirigées contre ces décisions préfectorales du 24 août 2022.

Sur le refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté du 24 août 2022 en litige, ni des pièces du dossier, que le préfet aurait manqué de procéder à un examen sérieux de la situation de la requérante, même s'il n'a pas fait état d'un courrier du 4 août 2022 que lui avait adressé la requérante, bien après une enquête de communauté de vie menée par les services de gendarmerie.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 2°) Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français / (...) / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ". Aux termes de l'article 7bis du même accord : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) ".

4. La décision de refus de séjour attaquée est fondée sur l'absence de communauté de vie entre les épouses. Il ressort des pièces du dossier que, dans sa demande de titre de séjour, Mme B... C... a déclaré résider, avec son épouse, à Crolles, au domicile de la mère de celle-ci, Mme E... D.... Mais les services de gendarmerie ont, en juillet 2020, constaté l'absence de Mme B... C... du domicile conjugal et ont relevé le nom de Mme B... G... sur la boîte aux lettres du domicile de son oncle, lequel réside également à Crolles. Par un courrier du 4 août 2022 adressé au préfet, Mme B... C..., qui affirme maintenir une communauté de vie avec son épouse, explique cette situation de résidences séparées par la circonstance que Mme D..., hostile au mariage de sa fille, aurait chassé la requérante de son domicile et elle indique que son couple serait en attente de l'attribution d'un logement social sollicitée en mai 2020. Toutefois, d'une part, une telle hostilité ne ressort pas des pièces du dossier, d'autre part, et surtout, la requérante n'apporte pas d'éléments de nature à établir le maintien, malgré les contraintes matérielles, de la communauté de vie avec son épouse, ce à quoi ne saurait suffire la seule production en appel de diverses photographies du couple. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 6, 2°) et 7bis a) de l'accord franco algérien ne peuvent qu'être écartés.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) ".

6. Comme il a été dit précédemment, Mme B... C... ne justifie pas d'une communauté de vie avec son épouse. Si l'état de santé de cette dernière, bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés depuis août 2021, requiert l'assistance d'une tierce personne, il n'est pas démontré que cette aide devrait être apportée exclusivement par la requérante. Si son fils, M. H... F..., réside en région parisienne sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans, la requérante, entrée en France en janvier 2016 selon ses déclarations, a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans en Algérie, où elle n'est pas dépourvue d'attaches et n'apparaît pas se trouver dans l'impossibilité d'y mener une vie normale. A cet égard, elle ne peut pas utilement se prévaloir, à l'appui de sa contestation du refus de séjour, qui ne fixe pas le pays de renvoi, de la circonstance que le code pénal algérien réprime l'homosexualité et de risques de discrimination auxquels elle serait exposée. Enfin, son activité professionnelle, d'auxiliaire de vie principalement, débutée en décembre 2019, ne suffit pas à caractériser une particulière insertion dans la société française. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de séjour du 24 août 2022 ne porte pas au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Cette décision, dès lors, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, lesquelles, en outre, ne constituent pas le fondement de la demande de titre de séjour de Mme B... C....

7. En dernier lieu, pour les mêmes motifs exposés aux points 4 et 6, en refusant d'admettre la requérante au séjour, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur les autres décisions :

8. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour au soutien de ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et, ensuite, de l'illégalité de cette mesure d'éloignement au soutien de ses conclusions à fin d'annulation de la décision désignant le pays de destination.

9 Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Stillmunkes, président de chambre,

M. Gros, premier conseiller,

Mme Vergnaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

Le rapporteur,

B. Gros

Le président,

H. Stillmunkes

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY02860


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02860
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. STILLMUNKES
Rapporteur ?: M. Bernard GROS
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : MATHIS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;23ly02860 ?
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