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30/05/2024 | FRANCE | N°23LY01704

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 30 mai 2024, 23LY01704


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 9 février 2022 par lesquelles la préfète de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par une ordonnance du 7 mars 2022, la présidente du tribunal administratif de Lyon a transmis l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand.


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 9 février 2022 par lesquelles la préfète de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par une ordonnance du 7 mars 2022, la présidente du tribunal administratif de Lyon a transmis l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

Par un jugement n° 2200514 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 mai 2023, M. A..., représenté par la SCP d'avocats Blanc-Barbier-Vert-Remedem et associés, agissant par Me Remedem, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du 14 avril 2023 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) d'annuler les décisions de la préfète de la Loire du 9 février 2022 ;

4°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles L. 421-1 et suivants, L. 423-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué motive insuffisamment la réponse à son moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- ce jugement est entaché d'erreur de droit et d'erreur de fait ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- la décision fixant le pays de destination n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ;

- cette décision viole également l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant de la République de Guinée né en 1989, déclare être entré irrégulièrement en France en décembre 2014. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile. Le 16 décembre 2014 il a déposé une demande de titre de séjour qui a été rejetée par un arrêté du 23 juin 2016 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, par un jugement du 27 juin 2016, a renvoyé en formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour et rejeté le surplus des conclusions de l'intéressé. Par un arrêté du 21 octobre 2016, la préfète du Puy-de-Dôme a toutefois abrogé l'arrêté du 23 juin 2016. Des récépissés ont été délivrés à l'intéressé à compter du 18 janvier 2018, mentionnant le dépôt d'une demande de délivrance d'un premier titre de séjour portant la mention " salarié " puis " vie privée et familiale ", le dernier de ces documents ayant expiré le 5 février 2021. Le 9 février 2022, M. A... a été interpellé par les services de la gendarmerie de la Loire et par des décisions prises le jour même, la préfète de ce département lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 14 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. M. A... soutient que le jugement attaqué n'a pas motivé sa réponse au moyen qu'il tirait de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Toutefois, d'une part, après avoir cité ces stipulations au point 4, le jugement, expose à son point 5 que les pièces produites par le requérant ne revêtent pas un caractère suffisamment probant permettant d'établir qu'il entretiendrait des relations effectives et particulières avec les deux aînés de ses enfants, qui résident chez leur mère, et qu'il contribuerait à leur entretien et leur éducation. D'autre part, la légalité d'une décision administrative s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise. A la date du 9 février 2022, le troisième enfant du requérant n'était pas encore né. Par suite, en ce qui le concernait, le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant était inopérant et le tribunal n'était pas tenu d'y répondre. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé doit être écarté.

4. En second lieu, eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation sont inopérants.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " (...) 2. Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu'ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... déclare être entré irrégulièrement sur le territoire français le 15 décembre 2014, alors qu'il était âgé de vingt-cinq ans. Deux enfants sont nés, en 2016 et 2018, de la relation qu'il a entretenue avec une compatriote, dont il s'est séparé en février 2020. Il déclare avoir été en concubinage avec une autre compatriote qui était enceinte de lui à la date des décisions attaquées. Il invoque également sa grande implication dans un club de football, et son emploi en qualité de plongeur-commis de cuisine depuis septembre 2019. Toutefois, le requérant n'allègue pas être dépourvu d'attaches en Guinée, où il ne conteste pas que vivent notamment sa mère et sa sœur. Si le requérant soutient qu'il entretient des liens avec les deux aînés de ses enfants nés en France, les tickets de caisse portant notamment sur l'achat de vêtements, lesquels ne mentionnent pas l'identité de l'acheteur, et les factures de restauration scolaire et d'activités périscolaires, qui ne justifient pas de l'acquittement des sommes qu'elles mentionnent, n'établissent pas sa contribution à l'entretien et l'éducation de ses enfants, qui résident chez leur mère. En outre, si M. A... se prévaut d'un jugement rendu le 8 avril 2022 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, qui homologue l'accord des parents relatif à l'exercice de l'autorité parentale sur ces deux enfants, et fixe sa contribution à leur entretien et leur éducation, ce jugement, qui est postérieur aux décisions attaquées, ne suffit pas à établir qu'à la date de ces décisions, le requérant exerçait régulièrement un droit de visite et d'hébergement de ses enfants. Par ailleurs, M. A... ne justifie ni de l'ancienneté, ni de la réalité de la vie commune qu'il invoque avec sa nouvelle compagne, titulaire d'une attestation de demande d'asile portant la mention " procédure Dublin ". Dans ces circonstances, en obligeant M. A... à quitter le territoire français, la préfète de la Loire n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Elle n'a pas davantage méconnu l'intérêt supérieur des deux aînés des enfants du requérant, qui ne peut utilement invoquer l'intérêt de l'enfant né plusieurs mois après les décisions attaquées. Les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 24, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doivent dès lors être écartés. Pour les mêmes motifs, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En second lieu, M. A... reprend en appel le moyen, qu'il avait invoqué en première instance et tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 et ceux tirés de ce que la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement n'aurait pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle et violerait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand aux points 6 à 9 de son jugement.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

9. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

M. Joël Arnould, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.

Le rapporteur,

Joël ArnouldLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Michèle Daval

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 23LY01704


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01704
Date de la décision : 30/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Joël ARNOULD
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : REMEDEM

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-30;23ly01704 ?
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