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28/05/2024 | FRANCE | N°23LY00809

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 28 mai 2024, 23LY00809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 février 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a prolongé de deux ans l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 15 novembre 2022.



Par un jugement n° 2300845 du 7 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif a annulé l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 2 février 2023.



Procédure devant la cour>


Par une requête enregistrée le 1er mars 2023, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 février 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a prolongé de deux ans l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 15 novembre 2022.

Par un jugement n° 2300845 du 7 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif a annulé l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 2 février 2023.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er mars 2023, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 février 2023 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la requête de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2023 du préfet de la Seine-Maritime portant prolongation d'interdiction de retour d'une durée de deux ans.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté du 2 février 2023 en raison d'une insuffisance de motivation dès lors que cet arrêté précise la durée de présence en France, la nature et l'ancienneté des liens que M. B... y entretient, l'existence d'une précédente mesure d'éloignement et la menace à l'ordre public qu'il représente.

La requête a été communiquée à M. B..., qui n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 11 octobre 1987 à Tbilissi et de nationalité géorgienne, est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2018. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 28 septembre 2018, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 12 janvier 2021, et il a présenté une demande de titre de séjour en raison de son état de santé. Par un arrêté du 13 juillet 2021, le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et le recours introduit par l'intéressé a été rejeté par un jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Rouen (n° 2103898). Il n'a pas exécuté cette décision. Par des arrêtés du 15 novembre 2022, le préfet de la Seine-Maritime a prononcé à son encontre une nouvelle obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour d'un an, ainsi qu'une assignation à résidence d'une durée de quarante-cinq jours, qu'il a prolongée de quarante-cinq jours par un arrêté du 30 décembre 2022. Par des arrêtés du 2 février 2023, le préfet de la Seine-Maritime, d'une part, a prolongé pour deux ans l'interdiction de retour sur le territoire et, d'autre part, a prononcé le placement en rétention administrative de l'intéressé, qui a alors été placé au centre de rétention administrative de Lyon Saint-Exupéry. Le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 7 février 2023 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 2 février 2023 portant prolongation de l'interdiction de retour sur le territoire.

2. Aux termes de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prolonger l'interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans dans les cas suivants :/ 1° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était obligé de le quitter sans délai (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français./ Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".

3. Il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit, par ailleurs, faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de chacun de ces critères, cette autorité ne retient pas certains éléments correspondant à l'un ou certains d'entre eux au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

4. L'arrêté en litige vise, notamment, l'article L. 612-11, 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'arrêté du 15 novembre 2022 portant obligation de quitter le territoire sans délai assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Il précise la date d'entrée en France de M. B... et ses conditions de séjour, en relevant plus particulièrement les rejets de sa demande d'asile et les précédentes mesures d'éloignement prononcées à son encontre et qu'il n'a pas exécutées. Il examine également sa vie privée et familiale sur le territoire français et son absence d'insertion professionnelle, l'absence d'éléments particuliers sur son état de santé, et met l'accent sur son comportement, notamment au regard des faits ayant conduit à son placement en garde à vue. Il en déduit que, au regard des pièces du dossier et des déclarations de l'intéressé, aucune modification de droit n'est intervenue depuis le prononcé de la mesure d'éloignement et que, par conséquent, il convient de prononcer une prolongation de son interdiction de retour. Cette décision est ainsi suffisamment motivée en droit et en fait.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon.

6. En premier lieu, il ressort des motifs rappelés ci-dessus et qui fondent l'arrêté en litige que le préfet de la Seine-Maritime a examiné la situation personnelle de M. B....

7. En second lieu, l'arrêté en litige rappelle que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français malgré le rejet de sa demande d'asile et la notification de deux mesures d'éloignement. Cet arrêté précise également que la compagne de M. B..., de même nationalité, est également en situation irrégulière, et que le couple ne dispose pas d'attaches privées et familiales sur le territoire français. De plus l'intéressé, qui ne justifie d'aucune insertion professionnelle et est sans ressources déclarées, est connu défavorablement des services de police pour des faits de conduite d'un véhicule sans permis, faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, ou accordant une autorisation, conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique et port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D. Il a par ailleurs été placé en garde-à-vue le 1er février 2023 pour des faits de violences volontaires avec arme. Enfin, si M. B... invoque des problèmes de santé, de telles circonstances, qui ne sont justifiées par aucune pièce au dossier, ne sont pas de nature à emporter l'annulation de la prolongation de l'interdiction de retour en litige, laquelle en tout état de cause n'a pas pour effet ni pour objet de fixer le principe de son éloignement, lequel est désormais définitif. Il suit de là que l'arrêté en litige n'est pas entaché d'erreur d'appréciation au regard de sa situation personnelle et ne méconnaît pas l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 2 février 2023.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement de la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon du 7 février 2023 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY00809 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00809
Date de la décision : 28/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme MAUCLAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-28;23ly00809 ?
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