Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association culturelle cultuelle musulmane Lyon 8 a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision par laquelle le président de la métropole de Lyon a implicitement rejeté sa demande du 15 mai 2023 tendant à la rétrocession du bien préempté par une décision du 24 mars 2009 du président du conseil de la communauté urbaine de Lyon.
Par une ordonnance n° 2308054 du 25 octobre 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction manifestement incompétent pour en connaître.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 21 novembre 2023, et un mémoire enregistré le 10 avril 2024 et non communiqué, l'association culturelle cultuelle musulmane Lyon 8, représentée par Me Ferhat, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 25 octobre 2023 ;
2°) de renvoyer les parties devant le tribunal administratif de Lyon ;
3°) de saisir le Tribunal des conflits de la question de l'ordre de juridiction compétent pour connaître d'un refus de rétrocession lorsque la décision de préemption est devenue caduque ;
4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été signée par le magistrat qui l'a rendue, en méconnaissance de l'article R.742-5 du code de justice administrative ;
- l'ordonnance attaquée est irrégulière dès lors que le magistrat a excédé les pouvoirs qu'il tient du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, l'ordre de juridiction administratif n'étant pas manifestement incompétent pour connaître du litige ;
- dans l'hypothèse où l'ordre de juridiction judiciaire et l'ordre de juridiction administratif se déclareraient tous deux incompétents, il en résulterait un déni de justice, en méconnaissance des stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 28 mars 2024, la métropole de Lyon conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'association requérante sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 15 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mauclair, première conseillère ;
- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;
- les observations de Me Berset, représentant la Métropole de Lyon.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 24 mars 2009, le président du conseil de la communauté urbaine de Lyon a exercé le droit de préemption urbain au profit de la Société anonyme de construction de la ville de Lyon (SACVL) sur un bien situé 2 passage Comtois à Lyon, dans le 8ème arrondissement. La SACVL a acquis ce bien le 27 septembre 2010 en vue d'y réaliser des logements sociaux et de requalifier les espaces extérieurs. Par un jugement du 1er septembre 2011, confirmé par la cour administrative d'appel de Lyon le 13 novembre 2012, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête de l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 tendant à l'annulation de cette décision de préemption. Par un courrier du 15 mai 2023, l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 a demandé au président de la métropole de Lyon, laquelle a succédé à la communauté urbaine de Lyon, de lui rétrocéder ce bien. L'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 relève appel de l'ordonnance du 25 octobre 2023 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a, sur le fondement du 2° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction manifestement incompétent pour en connaître.
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 742-5 du code de justice administrative : " La minute de l'ordonnance est signée du seul magistrat qui l'a rendue (...) ".
3. Il ressort des pièces figurant au dossier de première instance que la minute de l'ordonnance attaquée a été signée par le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon, de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent manque en fait. La circonstance que l'ampliation de l'ordonnance qui a été notifiée à l'association requérante ne comporte pas cette signature est sans incidence sur la régularité de cette ordonnance.
4. En second lieu, d'une part, les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître des litiges relatifs aux demandes de rétrocession formées par les anciens propriétaires de biens ayant fait l'objet d'un droit de préemption urbain, leurs ayants cause ou les acquéreurs évincés. Si la juridiction administrative peut être conduite à déclarer que les biens litigieux ont été utilisés ou aliénés à d'autres fins que celles définies à l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, une telle déclaration ne peut intervenir que sur renvoi ordonné par l'autorité judiciaire.
5. D'autre part, la décision de préemption du 24 mars 2009 est devenue définitive après le rejet, par la cour administrative d'appel de Lyon dans un arrêt du 13 novembre 2012, du recours en annulation introduit à son encontre. Il est constant que l'immeuble de logements sociaux qui était initialement prévu n'a pas été réalisé par la SACVL, qui a acquis le bien en 2010, sans que ce dernier ne soit utilisé ou affecté à d'autres fins, étant relevé qu'il ressort des pièces produites que la métropole de Lyon mène, plus particulièrement à compter de 2020, des réflexions concertées renouvelées avec différents acteurs publics et privés sur la définition d'un projet urbain du quartier incluant ce bâtiment. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou règlementaire que, dans ces circonstances, la juridiction administrative serait compétente pour se prononcer sur un litige relatif au refus de rétrocession opposé à l'acquéreur évincé de cette préemption légalement prise et dont le bien a été vendu à la SACVL, alors même que l'objet initial de cette préemption n'aurait pas encore été réalisé en 2023.
6. Par suite, les conclusions à fin d'annulation du refus de rétrocession implicitement opposé à l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 ont été présentées devant un ordre de juridiction manifestement incompétent pour en connaître. Si l'association se prévaut enfin, dans le dernier état de ses écritures, d'un déni de justice en méconnaissance de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales si le tribunal judiciaire se reconnaissait également incompétent, il ne ressort, en tout état de cause, d'aucune pièce du dossier que le tribunal judiciaire, également saisi, se serait reconnu incompétent pour connaître d'un tel litige.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de faire droit à sa demande de renvoyer au Tribunal des conflits la question de l'ordre de juridiction compétent en l'absence de réalisation de l'objet de la décision de préemption, que l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme portée devant un ordre de juridiction manifestement incompétent pour en connaître.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Métropole de Lyon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la Métropole de Lyon et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 est rejetée.
Article 2 : L'association culturelle cultuelle musulmane (ACCM) Lyon 8 versera la somme de 2 000 euros à la Métropole de Lyon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association culturelle cultuelle musulmane Lyon 8 et à la métropole de Lyon.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024.
La rapporteure,
A.-G. Mauclair La présidente,
M. A...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 23LY03616 2