Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.
Par un jugement n° 2208675 du 17 février 2023, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 15 mars 2023, M. C... B..., représenté par la Selarl BS2A Bescou et Sabatier Avocats Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 février 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'une année portant la mention " vie privée et familiale " ou, à tout le moins, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois courant à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans les mêmes conditions, de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen résultant de l'interdiction de retour prononcée ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en l'absence de réponse aux conclusions avant-dire droit ;
- le refus de titre de séjour a été rendu à la suite d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas démontré que l'avis médical sur lequel s'est fondé la préfète du Rhône ait été rendu par le collège de médecins de l'OFII et par une délibération collective, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est illégale compte tenu de l'illégalité des précédentes décisions ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale compte tenu de l'illégalité des précédentes décisions ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de six mois est illégale du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ; elle est entachée d'une erreur d'appréciation dans son principe et sa durée.
La requête a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas présenté d'observations.
M. C... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 1er janvier 1996 à Conakry (Guinée) et de nationalité guinéenne, déclare être entré sur le territoire français le 23 mai 2016. Suite au rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) le 17 septembre 2018 et par la Cour nationale du droit d'asile le 20 novembre 2020, il a sollicité le 14 juin 2021 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 17 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de six mois.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le tribunal, qui a examiné l'état de santé de M. B... à partir des pièces médicales fournies par l'intéressé et l'avis du collège de médecins de l'OFII produit par le préfet en défense, pouvait, sans irrégularité, s'estimer suffisamment informé par les pièces produites et se prononcer en conséquence " sans qu'il soit besoin d'ordonner avant dire droit la production du rapport médical " sollicité par M. B..., étant au demeurant relevé que rien ne faisait obstacle à ce que l'intéressé demande lui-même ce rapport à l'OFII pour le produire à l'instance s'il l'estimait utile.
Sur la légalité de l'arrêté du 28 octobre 2022 :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, M. B... se borne à exiger du préfet du Rhône qu'il apporte la preuve de la régularité de la consultation du collège médical de l'Office français de l'immigration et l'intégration (OFII), sans apporter d'éléments suffisamment précis sur ce qui le conduit à soutenir qu'elle serait viciée. Il suit de là, et alors que le défendeur n'est tenu de verser des éléments au débat que si les moyens invoqués sont appuyés d'arguments ou de commencements de démonstration appelant une réfutation par la production d'éléments propres à l'espèce, que le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis ne peut qu'être écarté comme insuffisamment précisé.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
5. Par un avis du 15 octobre 2021, dont le préfet s'est approprié les termes, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé peut voyager sans risque vers son pays d'origine.
6. M. B... qui se prévaut de son intervention chirurgicale du 29 juillet 2021 portant sur une ostéosynthèse de la rotule droite, à la suite de laquelle il a contracté une infection nosocomiale nécessitant une reprise chirurgicale et une antibiothérapie jusqu'en mars 2022 inclus, relève qu'il suivait toujours, à la date de l'avis de l'OFII, cette antibiothérapie, et en déduit que les conséquences liées à une absence de traitement auraient été d'une exceptionnelle gravité puisqu'une septicémie était à craindre. Toutefois, si le certificat de l'interne du service orthopédique des Hospices civils de Lyon du 2 février 2022 confirme la présence de cette infection et la mise en place d'une antibiothérapie, en revanche le certificat du 20 juin 2022 confirme que les antibiotiques ont été arrêtés vers la mi-mars 2022, soit environ six mois avant l'arrêté en litige, et aucune des pièces médicales ne donne des éléments sur d'éventuelles conséquences sur l'état de santé de M. B... de l'absence de traitement et notamment d'antibiothérapie. Par ailleurs, si M. B... produit en appel un certificat du 8 décembre 2022 attestant de la nécessité d'un soutien médicopsychologique et d'un traitement médicamenteux, ce certificat, peu circonstancié quant à la nature des troubles dont souffre le requérant et les soins qu'ils induiraient, ou encore le certificat du 9 décembre 2022 de son médecin traitant affirmant la nécessité d'un suivi par un kinésithérapeute, ne démontrent pas que le défaut de soins risquerait d'emporter des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de M. B... à la date de l'arrêté en litige. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le refus de délivrance de titre de séjour en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En troisième lieu, l'arrêté en litige n'examine la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'au regard de la mesure d'éloignement. Dans ces conditions, et en l'absence de demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale, M. B... ne peut utilement invoquer, comme l'ont retenu les premiers juges, la méconnaissance de ces stipulations à l'encontre du refus de titre de séjour en litige.
8. En dernier lieu, si M. B... est entré six ans avant l'intervention de l'arrêté en litige, il ne s'est maintenu sur le territoire français de manière régulière que pendant l'examen de sa demande d'asile ou de sa demande de titre de séjour pour soins. Il est célibataire, n'a aucune famille en France et ne fait état d'aucune insertion sociale ou professionnelle, et il ne conteste pas avoir des attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où résident notamment ses parents. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
En ce qui concerne les autres décisions :
9. M. B... soutient, en premier lieu, que l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et qu'elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il soutient, en deuxième lieu, que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est illégale compte tenu de l'illégalité des précédentes décisions et qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Il soutient, en troisième lieu, que la décision fixant le pays de destination est illégale compte tenu de l'illégalité des précédentes décisions et qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il soutient, en dernier lieu, que l'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de six mois est illégale du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français et qu'elle est entachée d'une erreur d'appréciation dans son principe et sa durée. Ces moyens doivent, en l'absence d'éléments nouveaux en appel, être tous écartés par les motifs retenus par les premiers juges, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 23 avril 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024.
La rapporteure,
C. BurnichonLa présidente,
M. D...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 23LY00948 2