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26/03/2024 | FRANCE | N°23LY03052

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 26 mars 2024, 23LY03052


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de B... d'annuler l'arrêté du 6 juin 2023 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pour une durée de deux ans et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2303638 du 13 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de B... a rejeté sa demande.




Procédure devant la cour



Par une requête enregistrée le 25 septembre 2023, M. C..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de B... d'annuler l'arrêté du 6 juin 2023 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pour une durée de deux ans et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2303638 du 13 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de B... a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 septembre 2023, M. C..., représenté par Me Huard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 juin 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 juin 2023 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a fait interdiction de circulation pour une durée de deux ans et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) d'enjoindre au préfet de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les dispositions de l'article L. 251-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il bénéficie d'un droit au séjour permanent en application de l'article L. 234-1 du même code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de circulation sur le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Des pièces enregistrées le 14 novembre 2023 ont été produites par le préfet de l'Isère.

Par ordonnance du 27 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 12 décembre 2023.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Mauclair, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant italien né le 25 mai 2002 à Civitanova Marche (Italie), déclare être arrivé en France le 2 juin 2012. Par un arrêté du 6 juin 2023, le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant de deux ans et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 13 juin 2023, dont M. C... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de B... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 251-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 251-1 les citoyens de l'Union européenne ainsi que les membres de leur famille qui bénéficient du droit au séjour permanent prévu par l'article L. 234-1 ". Aux termes de l'article L. 234-1 du même code : " Les citoyens de l'Union européenne mentionnés à l'article L. 233-1 qui ont résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquièrent un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français ". Enfin, aux termes de l'article L. 233-1 du même code : " Les citoyens de l'Union européenne ont le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'ils satisfont à l'une des conditions suivantes : / 1° Ils exercent une activité professionnelle en France ; / 2° Ils disposent pour eux et pour leurs membres de famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / 3° Ils sont inscrits dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantissent disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour eux et pour leurs conjoints ou descendants directs à charge qui les accompagnent ou les rejoignent, afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; / 4° Ils sont membres de famille accompagnant ou rejoignant un citoyen de l'Union européenne qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° : / 5° Ils sont le conjoint ou le descendant direct à charge accompagnant ou rejoignant un citoyen de l'Union européenne qui satisfait aux conditions énoncées au 3° ".

3. Le requérant soutient être arrivé en France en 2012 à l'âge de dix ans et y vivre avec ses parents et ses frère et sœur. Cependant, il est constant qu'il n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 234-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'établit pas davantage qu'il y aurait résidé dans le respect de l'une des conditions énumérées à l'article L. 233-1 précité du même code. Ainsi, faute d'avoir acquis un droit au séjour permanent au sens de l'article L. 234-1 de ce code à la date de l'arrêté en litige, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. C... soutient être arrivé en France en 2012, à l'âge de dix ans, soit depuis onze ans à la date de l'arrêté en litige, et qu'il y vit avec ses parents et ses frère et sœur, dont la présence régulière en France n'est au demeurant pas attestée. Il ne justifie par ailleurs pas avoir poursuivi des études ni avoir une insertion professionnelle suffisante et il n'est pas établi par les pièces du dossier qu'il aurait noué des relations en France. En outre, M. C..., incarcéré depuis le 15 avril 2022, est défavorablement connu des services de police depuis le 1er juin 2016, et a été interpellé, à de nombreuses reprises, notamment pour détention non autorisée de stupéfiants ainsi que pour extorsion avec violence ayant entraîné une incapacité totale de travail n'excédant pas huit jours et violence dans un établissement d'enseignement et réitération à plus de trois reprises dans un délai de trente jours de violation des interdictions ou obligations édictées dans une circonscription territoriale où l'état d'urgence sanitaire est déclaré. Il a par ailleurs été condamné par jugement du tribunal pour enfants de B... du 19 novembre 2020, à quatre mois d'emprisonnement pour détention non autorisée, offre ou cession non autorisée de stupéfiants en récidive et port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D. Par un jugement du tribunal pour enfants de B... du 5 octobre 2021, il a été condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement pour vol aggravé par deux circonstances, recel et port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D, en récidive. Enfin, par un jugement du 19 avril 2022, le tribunal correctionnel de B... l'a condamné à une peine de seize mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis probatoire de deux ans, pour conduite d'un véhicule sans permis en récidive et vol aggravé par deux circonstances en situation de récidive. Dans ces circonstances, nonobstant la durée de sa présence sur le territoire français, le préfet de l'Isère n'a pas porté au droit de M. C..., célibataire et sans charge de famille, au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision portant obligation de quitter le territoire français. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant interdiction de circulation sur le territoire français :

6. Il y a lieu d'écarter, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de B... a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 par M. C... ne peuvent qu'être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressé au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Claire Burnichon, première conseillère,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.

La rapporteure,

A.-G. Mauclair

La présidente,

M. D...La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY03052


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03052
Date de la décision : 26/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Anne-Gaëlle MAUCLAIR
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-26;23ly03052 ?
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