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07/03/2024 | FRANCE | N°22LY02017

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 07 mars 2024, 22LY02017


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



L'EURL CC Développement a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2015, des rappels de taxe sur les véhicules de société mis à sa charge au titre des années 2015 et 2016 et des rappels de crédit impôt recherche au titre de ces mêmes années, la décharge partielle des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2017 r

ésultant du refus de déductibilité du crédit d'impôt recherche d'un montant de 25 354 euro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'EURL CC Développement a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2015, des rappels de taxe sur les véhicules de société mis à sa charge au titre des années 2015 et 2016 et des rappels de crédit impôt recherche au titre de ces mêmes années, la décharge partielle des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2017 résultant du refus de déductibilité du crédit d'impôt recherche d'un montant de 25 354 euros outre l'octroi des intérêts moratoires ainsi que le remboursement d'un complément de crédit d'impôt recherche au titre des exercices clos en 2018 et 2019.

Par un jugement n° 2105577 du 3 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juin 2022 et 28 mai 2023, l'EURL CC Développement, représentée par Me Bocherel, demande à la cour :

1°) après avoir joint les instances pendantes de la SAS Colorey et l'EURL CC Développement et ordonné une médiation judiciaire, d'annuler ce jugement et lui accorder les décharges et restitution sollicitées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure menée est irrégulière dès lors qu'elle a été privée d'un débat oral et contradictoire et qu'elle n'a pas pu user de son droit de pouvoir régulariser les irrégularités constatées par l'administration dans les 30 jours suivant le contrôle ; en outre, aucune pièce versée ne démontre l'existence d'un choix laissé au contribuable pour l'emport de documents ;

- les rémunérations versées à M. A... afférentes à ses travaux de recherches et d'encadrement des recherches menées par lui et la doctorante salariée de la SAS Colorey sont éligibles au crédit impôt recherche de l'EURL CC Développement.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 27 janvier et 3 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- il refuse la proposition de médiation de la société ;

- et les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 16 août 2023 a fixé la clôture de l'instruction au 29 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Decaudin, substituant Me Bocherel, pour l'EURL CC Développement ;

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL CC Développement, qui exerce une activité de holding et dont le gérant et unique associé est M. A..., détient 96,80 % de la SAS Colorey, qui exerce une activité de vente et de production de colorants et pigments pour l'industrie. L'EURL CC Développement exerce également les fonctions de présidence de la SAS Colorey. Au titre des années 2015 et 2016, l'EURL CC Développement a déposé des déclarations de crédit d'impôt en faveur de la recherche (CIR) d'un montant respectif de 19 597 euros et de 28 525 euros, dont elle a obtenu le remboursement. Au titre de l'année 2017, elle a déposé au même titre une demande d'un montant de 25 354 euros qui a été rejetée le 5 décembre 2018. L'EURL CC Développement a fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017, étendue jusqu'au 3 mars 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. A l'issue de ce contrôle, l'administration lui a notifié, par proposition de rectification du 3 août 2018, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2015 et des rappels de taxe sur les véhicules de société et de crédit impôt recherche au titre des années 2015 et 2016. L'EURL CC Développement relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2015, des rappels de taxe sur les véhicules de société mis à sa charge au titre des années 2015 et 2016 et des rappels de crédit impôt recherche au titre des années 2015, 2016, d'autre part, à la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2017 résultant du refus de déductibilité du crédit d'impôt recherche et enfin à la restitution d'un crédit d'impôt recherche au titre des exercices clos en 2018 et 2019.

Sur la demande de jonction :

2. Le juge n'est jamais tenu de joindre un appel à un autre et, saisi de conclusions en ce sens, il n'a pas à motiver son refus. En l'espèce, il n'y a pas lieu de joindre la présente instance avec celle, enregistrée sous le numéro 22LY02015 concernant la SAS Colorey.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. (...) ". Aux termes de l'article L. 47 du même livre, dans sa rédaction applicable : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. (...). ". Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable où sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

4. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de l'EURL CC Développement s'est déroulée dans les locaux de la société et que le vérificateur a rencontré à trois reprises les 7 juin, 19 juin et 27 juillet 2018 le représentant de la société. La requérante n'établit pas, au regard de la loi fiscale comme vis-à-vis de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, que le vérificateur se serait effectivement refusé à tout débat et notamment que l'incendie subi par la SAS Colorey, filiale de l'EURL CC Développement, aurait eu une incidence sur la possibilité pour la société vérifiée d'échanger avec le vérificateur alors qu'il est également constant que plusieurs appels téléphoniques et échanges de courriels ont eu lieu au cours de la vérification. En outre, la circonstance que la vérification de comptabilité ait débuté le 7 juin 2018 pour se terminer le 27 juillet 2018 soit au début de la période estivale ne saurait en elle-même attester de l'impossibilité de mener un débat oral et contradictoire avec le vérificateur. Par suite, le moyen tiré de ce que l'EURL CC Développement aurait été privée d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur doit être écarté.

5. En deuxième lieu, l'EURL CC Développement ne peut utilement soutenir qu'elle n'a pas été en mesure de procéder à la régularisation des irrégularités constatées dès lors qu'elle ne justifie ni en première instance, ni en appel, avoir sollicité avant l'envoi de la proposition de rectification le bénéfice des dispositions de l'article L. 62 du livre des procédures fiscales.

6. En dernier lieu, si la requérante soutient qu'" aucune pièce versée ne démontre l'existence d'un choix laissé au contribuable pour l'emport de documents ", il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur aurait conservé et emporté irrégulièrement des originaux de documents, au demeurant non précisément identifiés par la requérante dans ses écritures. Par suite, le moyen tiré de l'emport irrégulier de documents doit être écarté.

Sur l'éligibilité des dépenses de personnel au crédit d'impôt recherche :

7. La société requérante réitère en appel le moyen tiré de ce que la quote-part de la rémunération qu'elle a versée à M. A... entre 2015 et 2019 afférente aux travaux de recherches et d'encadrement des recherches menées par lui et la doctorante salariée de la SAS Colorey est éligible pour chacune de ces années au crédit impôt recherche visé à l'article 244 quater B du code général des impôts. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 6 à 8 de leur jugement et qui ne sont pas utilement critiqués par la société requérante.

8. Il résulte de ce qui précède que l'EURL CC Développement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin de médiation :

9. Aux termes de l'article L. 213-7 du code de justice administrative : " Lorsqu'un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel est saisi d'un litige, le président de la formation de jugement peut, après avoir obtenu l'accord des parties, ordonner une médiation pour tenter de parvenir à un accord entre celles-ci ".

10. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a explicitement en défense rejeté la proposition de médiation formulée par l'EURL CC Développement en vertu de l'article L. 213-7 du code de justice administrative. Le ministre s'opposant à la demande de médiation, les conclusions présentées par la requérante, tendant à ce que la cour ordonne une médiation pour tenter de parvenir à un accord entre les deux parties, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à l'EURL CC Développement la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL CC Développement est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL CC Développement et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 15 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente,

Mme Burnichon, première conseillère,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mars 2024.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLa présidente,

P. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 22LY02017

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02017
Date de la décision : 07/03/2024
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme DECHE
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : TAX SUITS YOU

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-07;22ly02017 ?
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