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07/11/2023 | FRANCE | N°23LY00018

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 07 novembre 2023, 23LY00018


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... et Mme A... E... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 7 juin 2022 par lesquels le préfet de l'Isère leur a refusé, à chacun, la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n°s 2204497 et 2204500 du 14 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le

ur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 janvier 2023,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... D... et Mme A... E... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 7 juin 2022 par lesquels le préfet de l'Isère leur a refusé, à chacun, la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n°s 2204497 et 2204500 du 14 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 janvier 2023, M. et Mme D..., représentés par Me Huard, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 novembre 2022 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de l'Isère du 7 juin 2022 leur refusant un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français et prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour, ou subsidiairement, d'examiner à nouveau leur situation et, dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de leur conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. et Mme D... soutiennent que :

- les décisions litigieuses méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles méconnaissent l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'ils ne se sont pas maintenus irrégulièrement en France au-delà du délai de départ volontaire imparti par ces décisions en litige et le jugement est irrégulier faute d'avoir répondu à ce moyen.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas présenté d'observations.

Par ordonnance du 30 août 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 14 septembre 2023.

M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Vinet, présidente-assesseure ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... et Mme A... D..., de nationalité kosovare, nés respectivement le 29 mai 1974 à Cernicë (Kosovo) et le 1er octobre 1975 à Bilinicë (Kosovo), sont entrés à plusieurs reprises sur le territoire français pour y demander, en vain, le bénéfice de la protection internationale puis des titres de séjour en raison de l'état de santé de leur fille née le 16 septembre 2010 au Kosovo, et ils ont fait l'objet de mesures d'éloignement en 2012 et 2013. M. et Mme D... soutiennent être revenus en France le 11 décembre 2017. Leurs nouvelles demandes d'asile ont été rejetées par des décisions du 31 octobre 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 14 juin 2019. Le 11 mars 2019, M. D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions alors applicables du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 11 septembre 2019, Mme D... a demandé un titre de séjour en tant que parent d'enfant malade au titre de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des arrêtés du 22 juin 2020, le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé leur pays de destination. La légalité de ces arrêtés a été confirmée par jugements n°s 2004111 et 2004113 du tribunal administratif de Grenoble du 15 octobre 2020. Le 19 octobre 2021, ils ont, chacun, sollicité la délivrance d'un titre de séjour au regard de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant à nouveau valoir l'état de santé de leur fille née en 2010. Par deux arrêtés du 7 juin 2022, le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer ce titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé leur pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de ces deux arrêtés. Ils relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes après les avoir jointes.

Sur les décisions de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

3. Si M. et Mme D... se prévalent de leur présence en France depuis 2017 et de leurs séjours précédents, il ressort des pièces du dossier que leurs séjours en France ont été discontinus, en majeure partie irréguliers et ponctués de diverses décisions de refus de séjour assorties d'obligations de quitter le territoire français. S'il ressort des pièces produites en première instance, auxquelles ils ne se réfèrent même plus en appel, que M. D... souffre de la maladie de Behçet, a bénéficié de plusieurs opérations vasculaires et reste suivi pour sa maladie thromboembolique veineuse, et que la fille des requérants, B..., est suivie depuis la petite enfance pour une malformation veineuse du segment jambier et du pied droit avec, à l'examen clinique, des lésions capillaro-veineuse pour lesquelles elle reste prise en charge, les documents médicaux produits en première instance ne permettent pas à eux seuls d'établir que leur état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour eux des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'ils ne pourraient bénéficier d'une prise en charge dans leur pays d'origine. Par ailleurs, la seule présence d'amis ou des frères et sœurs de M. D... ne s'oppose pas à ce les requérants poursuivent leur vie familiale au Kosovo avec leurs enfants. La seule production de promesses d'embauche ne permet pas de considérer, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour en France, que les décisions de refus de titre de séjour en litige porteraient une atteinte disproportionnée à leur vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

5. Ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, les décisions en litige n'ont pas pour effet de faire obstacle à la reconstitution de la cellule familiale dans le pays d'origine des requérants, le Kosovo, et il ne ressort d'ailleurs pas des pièces du dossier qu'ils ne pourraient pas y être scolarisés en cas de retour. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que leur fille, B..., ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié dans ce pays au sens des dispositions l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an :

6. Aux termes des dispositions de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour ".

7. En appel, les requérants font valoir que ces dispositions sont méconnues dès lors qu'il ne se sont pas maintenus irrégulièrement en France au-delà du délai de départ volontaire imparti par les arrêtés en litige. Toutefois, les dispositions précitées font nécessairement référence à leur maintien irrégulier sur le territoire français suite à une précédente mesure d'éloignement, comme c'est le cas en l'espèce ainsi que cela ressort des faits rappelés au point 1 ci-dessus. Par suite, le moyen tiré de ce que les requérants ne s'étaient pas maintenus sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire imparti par les décisions en litige est inopérant. Le jugement attaqué n'est, par suite, pas irrégulier faute d'avoir répondu à un tel moyen.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., à Mme D... née E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

La rapporteure,

C. Vinet

La présidente,

M. F...La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00018


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00018
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-11-07;23ly00018 ?
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