Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2201818 du 23 août 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, a renvoyé à la formation collégiale les conclusions portant sur la décision de refus de séjour et, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 septembre 2022, ensemble un mémoire complémentaire enregistré le 27 janvier 2023, M. A... C..., représenté par Me Berbagui, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2201818 du 23 août 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois, l'a signalé aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et l'a assigné à résidence ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de lui enjoindre sous astreinte de réexaminer sa demande de délivrance d'un titre de séjour, sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour.
M. C... soutient que :
- le jugement omet de statuer sur la légalité des décisions au regard des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; il n'est pas motivé ; c'est à tort que le tribunal a estimé que l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas applicable aux ressortissants algériens ;
- le refus de séjour n'est pas motivé ; il méconnait le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; il est entaché de vice de procédure en l'absence d'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ; il méconnait les articles 3 et 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de son état de santé et de l'indisponibilité des soins dans son pays d'origine ;
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ; elle méconnait le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'erreur d'appréciation compte tenu de son insertion professionnelle, de son état de santé et de sa situation personnelle ; elle n'est pas motivée ; elle méconnait le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- la fixation du pays de renvoi et le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen sont entachés d'erreur d'appréciation compte tenu de son insertion professionnelle, de son état de santé et de sa situation personnelle ; ils ne sont pas motivés ; ils méconnaissent le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; le choix de l'Algérie comme pays de destination est illégal compte tenu de son état de santé et de l'indisponibilité des soins, ainsi que des risques qu'il y encourt ;
- l'assignation à résidence est entachée d'erreur d'appréciation compte tenu de son insertion professionnelle, de son état de santé et de sa situation personnelle ; elle n'est pas motivée ; elle méconnait le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; elle méconnait sa liberté d'aller et de venir sans justification suffisante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête.
La préfète de l'Allier soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 14 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 janvier 2023 à 16h30. Par ordonnance du 13 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été reportée au 13 février 2023 à 16h30.
Par un courrier en date du 16 juin 2023, les parties ont été informées, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour est susceptible de se fonder sur les moyens, relevés d'office, tirés, d'une part, de ce que les conclusions dirigées contre les décisions du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier a fait interdiction de retour sur le territoire français à M. C... pour une durée de douze mois, l'a signalé aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et l'a assigné à résidence, sont nouvelles en appel et dès lors irrecevables et, d'autre part, de ce que les conclusions dirigées contre la décision du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour sont irrecevables dès lors que le jugement attaqué du 23 août 2022 ne se prononce pas sur cette décision mais renvoie les conclusions afférentes à la formation collégiale du tribunal.
Par un mémoire enregistré le 19 juin 2023, M. C..., représenté par Me Berbagui, a présenté des observations en réponse aux moyens d'ordre public.
Il soutient que, dès lors que le jugement attaqué a rejeté sa demande, il doit être regardé comme ayant rejeté ses conclusions dirigées contre la décision portant refus de séjour.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur ;
- et les observations de M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 21 août 1987, a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation des décisions du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par le jugement attaqué du 23 août 2022, l'intéressé ayant été assigné à résidence, la magistrate désignée par le président du tribunal, d'une part, a renvoyé à la formation collégiale les conclusions portant sur la décision de refus de séjour et, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Sur la recevabilité des conclusions de la requête :
2. En premier lieu, les conclusions dirigées contre les décisions du 19 juillet 2022 par lesquelles la préfète de l'Allier a fait interdiction de retour sur le territoire français à M. C... pour une durée de douze mois, l'a signalé aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et l'a assigné à résidence, sont nouvelles en appel et dès lors irrecevables.
3. En second lieu, les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de séjour sont irrecevables, dès lors que le jugement attaqué ne s'est pas prononcé sur cette décision mais s'est borné à renvoyer les conclusions dirigées contre la décision portant refus de séjour à la formation collégiale du tribunal.
Sur la régularité du jugement :
4. En premier lieu, la magistrate désignée par le président du tribunal n'a pas omis de statuer, dans le cadre des conclusions dont elle était saisie et concernant les décisions relevant de sa compétence, c'est-à-dire les conclusions relatives aux décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, sur le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6, 7° de l'accord franco-algérien, qui n'était invoqué que contre la seule décision portant obligation de quitter le territoire français, dans le cadre d'une exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour.
5. En deuxième lieu, le jugement est régulièrement motivé. La circonstance que le requérant conteste l'appréciation portée par le tribunal ne caractérise pas un défaut de motivation.
6. En troisième lieu, en relevant, à juste titre, que le moyen tiré de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant dès lors que le séjour des ressortissants algériens est entièrement régi par l'accord franco-algérien susvisé, la magistrate désignée par le président du tribunal n'a en tout état de cause entaché son jugement d'aucune irrégularité.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français est prise sur le fondement de l'article L. 611-1, 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après que la préfète de l'Allier a refusé à M. C... la délivrance d'un titre de séjour, au terme de l'examen de sa demande et de sa situation personnelle. Elle expose ainsi les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Le moyen tiré du défaut de motivation doit, en conséquence, être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit ; / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Lorsque la loi ou une convention bilatérale prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français.
9. En l'espèce, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, en invoquant son état de santé. La préfète de l'Allier a régulièrement consulté le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui lui a indiqué que l'état de santé de M. C... n'appelait pas une prise en charge médicale dont le défaut serait de nature à entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. La préfète de l'Allier s'est appropriée ce motif pour opposer un refus à la demande de séjour. Si M. C... reproche à la préfète de l'Allier de ne pas avoir suffisamment pris en considération le droit au séjour prévu par les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien avant de décider son éloignement, il ne fournit aucune précision dans sa requête d'appel sur son état de santé. En première instance, il avait produit des pièces faisant état d'une prise en charge en Algérie pour une ostéopoécilie. Ces documents précisent que la pathologie se traduit par des raideurs modérées des épaules Il a produit également des pièces sur la prise en charge chirurgicale en France d'une hernie discale, qui font état en dernier lieu de bons résultats, ne laissant subsister que des gênes et douleurs limitées. Il résulte ainsi d'un certificat hospitalier du 17 juillet 2019 produit devant le tribunal que les douleurs sont largement maitrisées, que les gênes ne sont que résiduelles et que la reprise d'activités sportives est même envisagée. Un certificat du 2 février 2022 se borne à faire état d'une simple surveillance et d'un suivi. Un compte rendu du même jour précise que le patient indique aller mieux et que son état lui permet d'exercer une activité professionnelle, le praticien faisant état d'une évolution satisfaisante. Compte tenu de ces éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. C... à la date de la décision relèverait des prévisions des stipulations précitées du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. La préfète de l'Allier n'a, dès lors, pas commis d'erreur de droit ou d'erreur d'appréciation en lui faisant obligation de quitter le territoire français. Elle n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. C....
Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi :
10. En premier lieu, la décision expose les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Elle est dès lors régulièrement motivée.
11. En deuxième lieu, M. C... ne peut utilement, pour contester la fixation du pays de renvoi, se prévaloir d'une insertion professionnelle alléguée en France, ce moyen concernant le principe de l'éloignement et non la fixation d'un pays de destination.
12. En troisième lieu, eu égard à ce qui a été dit sur l'état de santé de M. C..., il n'est pas fondé à soutenir que son état de santé ferait obstacle à ce qu'il soit renvoyé en Algérie. Il ne peut utilement invoquer la méconnaissance du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ce moyen étant en tout état de cause infondé pour les motifs qui ont été précédemment exposés.
13. En quatrième lieu, en se bornant à alléguer, sans fournir la moindre précision ni le moindre élément, que des Algériens revenant dans leur pays seraient susceptibles de subir " des persécutions et maltraitances de la part des autorités de police ", M. C... n'établit pas au-delà de tout doute raisonnable qu'il encourrait en Algérie des risques de nature à faire obstacle à ce qu'il y soit renvoyé.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
M. Gros, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2023.
Le rapporteur,
H. Stillmunkes
Le président,
F. Pourny
La greffière,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02843