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05/10/2023 | FRANCE | N°21LY03544

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 05 octobre 2023, 21LY03544


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... Martin a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Savoie a rejeté sa réclamation dirigée contre les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2016 à 2018 et d'annuler " la proposition de redressement fiscal ".

Par une ordonnance n° 2104257 du 6 septembre 2021, le président de la 7ème chambre du tribunal administra

tif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... Martin a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Savoie a rejeté sa réclamation dirigée contre les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2016 à 2018 et d'annuler " la proposition de redressement fiscal ".

Par une ordonnance n° 2104257 du 6 septembre 2021, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2021, M. Martin, représenté par Me Jay, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler la décision de rejet de sa réclamation préalable du 30 avril 2021 et " la proposition de redressement fiscal " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que sa requête a été rejetée comme irrecevable par le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble, dès lors que les contestations en matière fiscale relèvent de la juridiction administrative, en application des articles L. 190 et L. 199 du livre des procédures fiscales ;

- la décision du 30 avril 2021 a été signée par une autorité incompétente ;

- cette décision est insuffisamment motivée au regard des exigences posées par les articles L. 211-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration ;

- l'administration fiscale a commis une erreur en qualifiant le véhicule qu'il utilisait, qui appartenait à son employeur, de véhicule de fonction alors qu'il s'agissait d'un véhicule de service qu'il n'a jamais utilisé pour des déplacements privés ;

- il résulte de la doctrine mentionnée dans le mémento Francis Lefebvre social, édition 2018, n° 22715 que l'utilisation d'un véhicule mis à la disposition gratuite d'un salarié par l'employeur pour les trajets domicile-travail ne constitue pas un avantage passible de cotisations sociales ; il convient également de faire application de la circulaire de l'URSSAF référencée DSS n° 2005-389 du 19 août 2005, dès lors qu'il a des horaires de travail très particuliers et qu'il ne dispose pas de transports en commun adéquats ;

- les véhicules mis à sa disposition, en conformité avec l'article 45 du règlement intérieur de la chambre des métiers et de l'artisanat sont des véhicules de service utilisables pour des déplacements professionnels uniquement, les directeurs de service bénéficiant d'un ordre de mission permanent ;

- le contrôle effectué par l'URSSAF en 2012 n'a révélé aucun dysfonctionnement ;

- les kilométrages des véhicules confirment, au vu des données ressortant de son agenda professionnel, qu'ils n'ont été utilisés que pour des déplacements domicile-travail et des déplacements professionnels ; il justifie également de l'utilisation régulière des deux véhicules personnels qu'il possède, qui n'ont pas été utilisés par ses enfants, qui disposent de leur propre véhicule et résident dans d'autres départements ;

- en application de la doctrine administrative référencée BOI-RSA-CHAMP-20-30-50, pour constituer une rémunération, l'avantage en nature doit concerner un véhicule à l'usage personnel du salarié, ce qui comprend un usage au cours des week-ends, jours fériés et congés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bandosz, représentant M. Martin ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... Martin, alors secrétaire général de la chambre de métiers et de l'artisanat de la Haute-Savoie, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de son dossier fiscal, qui a porté sur les années 2016 à 2018, à l'issue duquel l'administration a estimé qu'il avait bénéficié d'un avantage en nature, non déclaré, correspondant à la mise à disposition d'un véhicule de fonction. Elle l'a, en conséquence, assujetti à des compléments d'impôt sur le revenu, assortis de pénalités, au titre de ces trois années, selon la procédure contradictoire. Par une ordonnance du 6 septembre 2021, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté comme irrecevable la demande de M. Martin tendant à l'annulation de la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Savoie a rejeté sa réclamation dirigée contre ces impositions et de " la proposition de redressement fiscal ". M. Martin relève appel de cette ordonnance.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".

3. Pour rejeter comme irrecevable la demande présentée par M. Martin, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a relevé que les actes dont le contribuable demandait l'annulation, à savoir la décision de rejet de sa réclamation préalable et la proposition de rectification, n'étaient pas détachables de la procédure d'imposition et qu'ils ne pouvaient, en conséquence, être déférés à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir.

4. Le contentieux fiscal, relatif à l'établissement de l'impôt, est un contentieux de pleine juridiction tendant à la décharge ou la réduction d'une imposition, introduit devant le juge de l'impôt, conformément à l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, après présentation d'une réclamation préalable auprès de l'administration fiscale, dans les conditions fixées aux articles R. 190-1 et suivants du même livre. En l'espèce, M. Martin a formé, le 12 février 2021, une réclamation auprès de la direction départementale des finances publiques de la Haute-Savoie par laquelle il a contesté les avis d'imposition supplémentaires qui lui ont été adressés au titre des années 2016 à 2018 au motif qu'il n'avait pas bénéficié, au cours de ces années, d'un véhicule de fonction. Il a joint à sa requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Grenoble, outre la décision du 30 avril 2021 par laquelle le directeur départemental a rejeté cette réclamation et la proposition de rectification du 7 novembre 2019 l'informant de la rectification opérée, dans la catégorie des traitements salaires, à raison d'un avantage en nature non déclaré, une copie de sa réclamation. Sa demande contenait, par ailleurs, des moyens contestant le bien-fondé de cette rectification, assortis de pièces justificatives. Dans ces conditions, en ne procédant pas, afin de leur conférer une portée utile, à la requalification des conclusions à fin d'annulation de M. Martin comme tendant à la décharge des impositions qu'il contestait et en rejetant sa requête comme irrecevable, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a entaché son ordonnance d'irrégularité.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Grenoble pour qu'il statue à nouveau sur la demande de M. Martin.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. Martin et non compris dans les dépens.

7. Aucun dépens n'ayant été exposé au cours de l'instance, les conclusions présentées à ce titre par M. Martin ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2104257 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble du 6 septembre 2021 est annulée.

Article 2 : M. Martin est renvoyé devant le tribunal administratif de Grenoble pour qu'il soit statué sur sa demande.

Article 3 : L'Etat versera à M. Martin la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Martin et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Laval, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 octobre 2023.

La rapporteure,

A. Courbon

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03544
Date de la décision : 05/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

54-07-01-03-01 Procédure. - Pouvoirs et devoirs du juge. - Questions générales. - Conclusions. - Interprétation de la requête.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : CDMF AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-05;21ly03544 ?
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