Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 août 2020 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2009350 du 5 avril 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 25 novembre 2022, Mme D..., représentée par Me Galichet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 avril 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 août 2020 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour, à titre principal sur le fondement des dispositions de l'article
L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 423-23 de ce code, et, à titre encore plus subsidiaire, sur le fondement de l'article L. 435-1 dudit code ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros, à titre principal, au profit de la requérante au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, à titre subsidiaire, au profit de son conseil, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens.
Elle soutient que :
- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les articles L. 424-1 et L. 424-3 du même code ;
- il méconnaît l'article L. 425-8 dudit code ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas produit de mémoire.
Par ordonnance du 22 septembre 2023, le président de la cour a annulé la décision du 26 octobre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle et a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme A....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mauclair, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., née le 20 février 1991 à Boké (Guinée) et de nationalité guinéenne, déclare être entrée irrégulièrement sur le territoire français le 4 avril 2011. Sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le 22 juin 2012, que par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 30 janvier 2013, et elle a fait l'objet le 29 avril 2013 d'un arrêté de la préfète de la Loire l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par un arrêté du 7 août 2020, la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme A... relève appel du jugement du 5 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur et désormais codifié à l'article L. 423-23 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Mme A... se prévaut de ce que sa vie privée et familiale se situe en France, où elle réside depuis le mois d'avril 2011, où sont nés ses trois enfants mineurs les 18 novembre 2012, 20 avril 2015 et 23 juillet 2020, et où elle se trouve isolée du fait de sa séparation, en avril 2020, avec son conjoint en situation régulière, qu'elle a épousé en 2012 et qu'elle présente comme violent. Mme A... s'est toutefois maintenue irrégulièrement sur le territoire français, en dépit de la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet en 2013. Ses trois enfants ne possèdent pas la nationalité française et ne vivent plus avec leur père, dont Mme A... est séparée depuis le mois d'avril 2020 et divorcée depuis le 24 juin 2022. Elle ne se prévaut d'aucune intégration sociale ou professionnelle. Dans ces conditions, la préfète de la Loire n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A... une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision de refus de titre de séjour en litige. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11, désormais codifiées à l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent, dès lors, être écartés.
4. En deuxième lieu, la décision de refus de séjour opposée à Mme A... n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de ses enfants mineurs, dont il ressort des pièces du dossier qu'elle s'occupe seule, les pièces du dossier ne permettant pas au demeurant d'établir l'existence de liens avec leur père, lequel a rejeté sa famille, alors même que le jugement de divorce fait état d'un exercice en commun de l'autorité parentale et qu'il dispose d'un droit de visite et d'hébergement. Cette décision ne fait pas plus, par elle-même, obstacle à la poursuite de la scolarité de ses enfants en France, qui restent au demeurant pris en charge dans le cadre d'un dispositif d'urgence. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour ne porte pas atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
5. En troisième lieu, les circonstances dont Mme A... fait état, exposées aux points 3 et 4, ne sont pas suffisantes pour constituer des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur et désormais codifiées à l'article L. 435-1 du même code, permettant son admission exceptionnelle au séjour. Le moyen, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions, doit être écarté.
6. En quatrième lieu, si le dernier enfant de la requérante a obtenu la qualité de réfugié, par une décision de la CNDA du 29 avril 2022 postérieure à l'arrêté en litige, il appartiendra à Mme A..., si elle s'y croit fondée, de présenter une demande de titre sur le fondement des dispositions des articles L. 424-1 et L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-8 de ce même code, à le supposer invoqué, ne peut qu'être écarté, l'intéressée, qui fait état de violences conjugales, n'établissant pas avoir déposé une demande de titre de séjour sur ce fondement.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en litige. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige et au titre des dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2023.
La rapporteure,
A.-G. Mauclair
La présidente,
M. C...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03478