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04/07/2023 | FRANCE | N°21LY02817

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 04 juillet 2023, 21LY02817


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... D... et Mme A... G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 février 2019 par lequel le maire de la commune de Quaix-en-Chartreuse a délivré un permis de construire une maison individuelle à M. C... F..., ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ainsi que le permis de construire modificatif tacite.

Par un jugement n° 1905312 du 25 juin 2021, le tribunal administratif a sursis à statuer sur la requête de M. et Mme L... dans l'attente

d'une mesure de régularisation à intervenir dans un délai de quatre mois à com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... D... et Mme A... G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 5 février 2019 par lequel le maire de la commune de Quaix-en-Chartreuse a délivré un permis de construire une maison individuelle à M. C... F..., ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ainsi que le permis de construire modificatif tacite.

Par un jugement n° 1905312 du 25 juin 2021, le tribunal administratif a sursis à statuer sur la requête de M. et Mme L... dans l'attente d'une mesure de régularisation à intervenir dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification du jugement.

Par un arrêté du 23 septembre 2021, le maire de la commune de Quaix-en-Chartreuse a délivré un permis de construire de régularisation à M. F... et Mme H....

Par un jugement n° 1905312 du 3 février 2022 le tribunal administratif a rejeté la requête de M. D... et Mme G....

Procédure devant la cour

I- Par une requête et des mémoires enregistrés sous le n° 21LY02817, les 17 août 2021, 17 février 2022, 8 avril 2022, 24 mai 2022 et 18 juillet 2022, de dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A... G... et M. E... D..., représentés par la SCP Lachat-Mouronvalle, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement avant-dire-droit du 25 juin 2021 ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de la commune de Quaix-en-Chartreuse du 5 février 2019 et 18 octobre 2019 portant permis de construire et permis de construire modificatif au profit de M. F... et l'arrêté du 23 septembre 2021 portant permis de construire de régularisation délivré à M. F... ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Quaix-en-Chartreuse le versement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir contre les permis litigieux ;

- le permis de construire initial et le permis de construire modificatif méconnaissent les dispositions des articles UB4 et UB13 du règlement du PLU et celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet en litige méconnaît les dispositions de l'article UB11 du règlement du PLU quant à son insertion paysagère et aux déblais engendrés et il est incompatible avec l'OAP paysagère du PLUi ; il méconnaît les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- les pétitionnaires ne disposent pas de la maîtrise foncière de l'assiette du projet, en méconnaissance de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, en ce que, d'une part, la parcelle cadastrée section D n° ... est en zone agricole sensible, accueille une terrasse de plus de 20 m² et un mur de soutènement, et n'est toujours pas vendue à la propriétaire du tènement par la mairie, et, d'autre part, s'agissant de la parcelle D n°..., le déplacement d'une partie de l'assiette de la servitude du parking du lotissement est entaché de fraude ; le projet méconnaît également les dispositions des articles R. 431-26 et L. 151-33 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, les actes notariés d'échanges de parcelles ne permettent pas de justifier d'une maîtrise foncière des parcelles concernées par la demande de permis de construire dès lors, concernant la parcelle D n°..., que seule la vente est autorisée par l'article L. 161-10 du code rural et qu'aucune délibération du conseil municipal n'a autorisé cet échange ; s'agissant de la parcelle D n°... issue de la division de la parcelle D n°..., cette parcelle a été classée dans le domaine public et sa vente ou son échange n'a pas plus été autorisée par le conseil municipal ;

- les places de parkings leur appartenant font partie de l'assiette foncière du projet, et, par suite, la parcelle cadastrée section D n°... et l'aliénation d'une partie de la voirie communale issue de la voirie du lotissement constituent une violation de l'arrêté de lotir ; ce projet induit la suppression des places de stationnement inclues dans la précédente demande de lotissement et, si les places P1 à P4 étaient réaffectées aux arrêtés déjà délivrés, leurs dimensions et assiette sont modifiées dans le seul intérêt des pétitionnaires, et la fraude est établie.

Par des mémoires en défense enregistrés les 15 novembre 2021, 18 mars 2022 et 12 avril 2022, M. C... F... et Mme B... H..., représentés par Me Barichard, concluent au rejet de la requête, au besoin en faisant application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens invoqués ne sont pas fondés et qu'un permis de construire de régularisation leur a été délivré le 23 septembre 2021 suite au jugement avant dire-droit du tribunal administratif de Grenoble.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2022, la commune de Quaix-en-Chartreuse, représentée par la Selarl CDMF Avocats-Affaires Publiques, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge solidaire des requérants le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu que les requérants avaient intérêt à agir à l'encontre des permis en litige ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 mars 2023.

II- Par une requête enregistrée le 4 mars 2022 sous le n° 22LY00699, et des mémoires complémentaires enregistrés les 24 juin 2022 et 18 juillet 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A... G... et M. E... D..., représentés par la SCP Lachat-Mouronvalle, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 février 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de la commune de Quaix-en-Chartreuse du 5 février 2019 et du 18 octobre 2019 portant permis de construire initial et permis de construire modificatif au profit de M. F... et l'arrêté du 23 septembre 2021 portant permis de construire de régularisation délivré à M. F... ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Quaix-en-Chartreuse le versement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le vice tiré de l'absence de maîtrise foncière des pétitionnaires sur une portion de la parcelle D n°... et sur la parcelle D n°... était régularisé ;

- le permis de régularisation du 23 septembre 2021 méconnaît les dispositions de l'article 7.1 des règles communes et de la zone UD3 secteur 6 du PLUi de Grenoble Alpes métropole ;

- le projet méconnaît les dispositions des articles UB4 et UB13 du règlement du PLU et celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ainsi que celles de l'article UB 11 de ce règlement ;

- le projet induit la suppression des places de stationnement incluses dans la précédente demande de lotissement et, si les places P1 à P4 étaient réaffectées aux arrêtés déjà délivrés, leurs dimensions et assiettes sont modifiées dans le seul intérêt des pétitionnaires et la fraude est établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2022, M. C... F... et Mme B... H..., représentés par Me Barichard, concluent au rejet de la requête, au besoin en faisant application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les moyens tirés de l'illégalité de l'acte d'échange du 7 octobre 2021 et du défaut de maîtrise foncière sont irrecevables en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, ils ne sont pas fondés ;

- le moyen portant sur les places de stationnement n'est pas fondé en ce que le permis de régularisation n'a pas modifié le nombre de places de stationnement et qu'ils détenaient des droits acquis du permis de construire initial et du permis modificatif n°1.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2022, la commune de Quaix-en-Chartreuse, représentée par la Selarl CDMF Avocats-Affaires Publiques, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a retenu que les requérants avaient intérêt à agir à l'encontre des permis en litige ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 mars 2023.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Le Coq substituant Me Mouronvalle pour Mme G... et M. D..., de Me Punzano substituant Me Fiat pour la commune de Quaix en Chartreuse et de Me Barichard pour M. F... et Mme H....

Des notes en délibéré, enregistrées le 27 juin 2023 dans les deux requêtes, ont été présentées pour Mme A... G... et M. E... D....

Considérant ce qui suit :

1. M. F... a déposé une demande de permis de construire en vue de la construction d'une maison individuelle de type R+2, d'une surface de plancher de 185,33 m², sur des parcelles cadastrées section D nos667 et ... situées chemin du Bas Montquaix à Quaix-en-Chartreuse, ainsi que sur les parcelles cadastrées section D nos ..., ... et ..., ces deux dernières étant destinées à accueillir le système de traitement et de dissipation des eaux usées. Par un arrêté du 5 février 2019, le permis sollicité a été délivré. Suite au recours gracieux de M. D... et de Mme G..., une demande de permis modificatif a été déposée le 24 juillet 2019, laquelle, en l'absence de réponse expresse, a fait l'objet d'une décision tacite de permis de construire née le 24 juillet 2019. Les modifications ainsi autorisées consistent dans le remplacement de la toiture traditionnelle par une toiture-terrasse afin de limiter la hauteur du projet par rapport aux constructions voisines, l'abaissement de l'ensemble de la construction de 50 cm par rapport au terrain naturel, le déplacement de l'entrée du garage à l'ouest afin de conserver les places de stationnement existantes le long du chemin du Bas Montquaix, ainsi que l'élargissement de la façade nord et le changement d'orientation de la terrasse.

2. M. D... et Mme G... ont contesté ces deux permis devant le tribunal administratif de Grenoble, lequel, par un jugement avant-dire-droit du 25 juin 2021, a sursis à statuer sur leur requête dans l'attente d'une mesure de régularisation à intervenir dans un délai de quatre mois à compter de la date de notification du jugement. Ce jugement retient trois vices tirés, d'une part, de ce que les bénéficiaires des permis ne pouvaient pas être considérés comme propriétaires de la portion de la parcelle cadastrée section D n° ..., qui est un ancien chemin rural, sur laquelle était prévue une partie de la terrasse attenante à l'habitation ainsi qu'un mur de soutènement et des déblais, d'autre part, de ce que les volumes et le style contemporain de l'habitation projetée, notamment la toiture-terrasse prévue par le permis de construire modificatif, n'est pas comparable aux constructions environnantes caractéristiques du patrimoine naturel montagnard de la commune, en méconnaissance des dispositions alors applicables de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), et enfin, de ce qu'une partie de la terrasse, une partie du mur de soutènement sud-est et les déblais afférents étaient prévus sur une partie du terrain classée en zone agricole inconstructible.

3. M. F... et Mme H... ont obtenu un permis de régularisation par un arrêté du 23 septembre 2021 portant sur la reprise de l'implantation altimétrique de la construction, le déplacement de l'entrée du garage, l'adaptation de la terrasse à la zone constructible, la mise en œuvre d'une toiture à pans et la modification de l'emprise au sol et de la surface des espaces verts. Par un jugement du 3 février 2022 mettant fin à l'instance, le tribunal administratif a rejeté la requête de M. D... et Mme G.... Ces derniers relèvent appel tant du jugement avant-dire-droit du 25 juin 2021, par une requête n° 21LY02817, que du jugement du 3 février 2022, par une requête n° 22LY00699. Ces requêtes concernent un même projet et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur la légalité des permis de construire des 5 février 2019, 24 septembre 2019 et 23 septembre 2021 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. ".

5. D'une part, l'assiette du projet en litige porte sur des terrains cadastrés section D nos667, ..., ..., ... et ..., ces trois dernières parcelles étant en zone inconstructible. M. F... et Mme H..., bénéficiaires des permis en litige, justifient, suite au jugement avant dire droit susvisé du 25 juin 2021, qu'ils bénéficiaient d'une promesse de vente concernant ces parcelles, qui a été réitérée par un acte notarié du 7 octobre 2021.

6. D'une part, si les requérants contestent la maîtrise foncière de la parcelle cadastrée section D n° ... par la vendeuse, Mme J..., il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 25 avril 2018 prise après enquête publique, le conseil municipal de Quaix-en-Chartreuse a décidé, s'agissant du secteur du chemin des Côtes, qu'afin de permettre la construction d'une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section D n° ...(devenue les parcelles cadastrées D n° ... et n° 670), le chemin rural passant au sud des parcelles cadastrées section D nos ... et ... serait déplacé sur un linéaire de 70 mètres environ pour une superficie de 228 m². Par ailleurs, il a également décidé que cette partie, déclassée, serait vendue à Mme J..., et un nouveau tracé a été défini du côté est de la propriété, sur les parcelles cadastrées section D nos 633-634 (devenues, respectivement, les parcelles cadastrées section D nos ... et ... et D nos ... et ...). Il ressort du plan de division produit dans le dossier de première instance que le tènement cédé porte, notamment, sur la parcelle n° ... qui constituait le chemin rural traversant ces propriétés. Dans ces conditions, et alors même que la vente n'aurait pas encore été concrétisée par le maire, en exécution de la délibération du conseil municipal, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme en l'absence de qualité pour déposer une autorisation d'urbanisme sur cette parcelle et des dispositions de l'article L. 161-10 du code rural en ce qu'aucune vente ne serait intervenue, ne peuvent qu'être écartés.

7. Enfin, la parcelle cadastrée section D n° ... a été divisée en trois parcelles cadastrées D nos ..., ... et .... La parcelle cadastrée section D n° ..., dont la vente à Mme J... a été décidée par une délibération du conseil municipal du 25 avril 2018 en tant qu'elle porte sur un chemin rural, a ensuite été divisée en deux parcelles, nos ... et ... constituant l'assiette du projet en litige, et la parcelle D n° ... a, quant à elle, été également divisée en deux parcelles, nos 679 et .... S'agissant de cette parcelle D n° ..., qui longe la route du Bas Montquaix, l'acte notarié de promesse de vente précité du 7 octobre 2021, antérieur au permis de régularisation, la concerne et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait intégrée au chemin rural ou appartiendrait au domaine public de la commune. Par ailleurs, si les requérants soutiennent que cette parcelle D n° ... correspondrait à l'assiette d'une servitude de droit privé portant sur des emplacements de stationnement dont ils bénéficient, une telle circonstance n'est pas de nature à faire perdre la qualité de propriétaire aux pétitionnaires, étant au surplus relevé qu'elle ne fait pas partie de l'assiette du lotissement approuvé en 2002, qu'il n'est pas plus établi que cette parcelle aurait supporté la voirie du lotissement que le lotisseur se serait engagé à rétrocéder à la commune ou qu'il aurait déjà rétrocédé, et que les requérants ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des dispositions des articles R. 431-26 et L. 151-33 du code de l'urbanisme concernant les deux places de parking qui leur auraient été attribuées sur cette dernière parcelle lors de la création du lotissement accueillant la maison des requérants.

8. Il résulte de ce qui précède qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... et Mme H... n'avait pas qualité pour déposer les demandes de permis en litige, et la fraude alléguée n'est pas non plus démontrée.

9. En deuxième lieu, une division parcellaire en deux lots a été autorisée par arrêté de lotir du 23 janvier 2002 sur les parcelles cadastrées section D nos ..., sans cahier des charges ni règlement de lotissement, et le programme des travaux du lotissement, ainsi que le plan de masse, matérialisaient l'existence de quatre places de stationnement, soit deux par lot, à réaliser en servitude sur la parcelle n° ..., extérieure à ce lotissement et située le long du chemin communal du Bas Montquaix. Le permis de construire délivré le 25 avril 2003 à Mme I... pour réaliser leur maison individuelle sur le lot n° 2 de ce lotissement, constitué des parcelles cadastrées D nos ..., matérialisait également ces places, mentionnées également dans la demande Cerfa, et prescrivait au pétitionnaire de se conformer aux clauses et conditions générales du lotissement approuvé, cette propriété ayant été acquise le 31 juillet 2018 par les requérants. Une décision de non-opposition du 13 septembre 2018 à une déclaration préalable de division présentée par Mme J... et portant sur les parcelles cadastrées section D nos ..., ..., ..., ..., ... mentionne également " NB : bien prendre en compte les places de parking lié au permis de lotir ". Un déplacement de la servitude de stationnement PL3 et PL4, transférée vis-à-vis de la parcelle cadastrée section D n° ..., dans la continuité des emplacements existants P1 et P2, a enfin été acté un accord du 20 juillet 2018 contracté entre M. et Mme I... et Mme J..., avec l'autorisation du maire de la commune, les requérants soutenant à cet égard que cet acte ne peut leur être opposé en l'absence de leur assentiment, mais les bénéficiaires relevant quant à eux que ce projet a finalement été abandonné. Si les requérants se prévalent de ce que le projet litigieux les priveraient de leurs emplacements de stationnement, qui ne seraient au surplus plus identifiés ou représentés de manière inexacte, ou qui auraient été déplacés sans leur autorisation ou auraient vu leur surface réduite par le permis modificatif, il résulte de ce qui vient d'être dit que ces derniers, situés sur une parcelle extérieure à l'ancien lotissement, dont le plan annexé n'aurait au demeurant, le cas échéant, qu'une valeur contractuelle, et ainsi uniquement prévus dans le cadre d'un permis de construire antérieurement délivré, ne sont grevés que d'une servitude de droit privé sur la parcelle n° ..., dont la méconnaissance ne peut être utilement invoquée, alors même que le plan de masse du permis de régularisation y matérialiserait ces places de stationnement, le permis étant délivré sous réserve du droit des tiers.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article UB 4 du règlement du PLU alors applicable, relatif à la desserte par les réseaux : " /(...) /c-Eaux pluviales : Les aménagements extérieurs des constructions doivent contribuer à limiter l'imperméabilisation des sols. /(...) ". Aux termes de l'article UB 13 du règlement du PLU alors applicable, relatif aux espaces libres et plantations : " Généralités : /(...)/ Les aménagements extérieurs et notamment ceux des espaces de stationnement l'article UB 12) doivent contribuer à limiter l'imperméabilisation des sols par l'usage de matériaux adaptés. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

11. Les requérants soutiennent que ces dispositions ont été méconnues, eu égard à l'importance de la pente du terrain, à l'instabilité du talus en aval immédiat, à la nécessité d'importants travaux de terrassements et de soutènements, à la hauteur du talus à l'est situé au-dessus de la rampe d'accès, qui est supérieure à celle préconisée par l'expert et ne lui a pas été présentée, induisant également un risque pour le nouveau chemin rural, et ils ajoutent enfin que les plans produits des permis initial et modificatif sont contradictoires sur la réalité des pentes effectives.

12. S'il est constant que le terrain d'assiette du projet présente une sensibilité aux glissements de terrains compte tenu de sa pente, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'étude géotechnique réalisée dans le cadre de la demande de permis de construire, que cette dernière reste superficielle. Cette étude, qui a été précédée de plusieurs sondages du sol, précise que le terrain d'assiette est vierge de toute construction et qu'il existe une butte en pente forte et régulière de l'ordre de plus de 30 % orientée vers le nord au droit du projet, la présence d'un talus de 2 à 4 mètres de hauteur en pente de 60 % en bordure nord de la parcelle et un indice d'instabilité visible le long du talus en aval immédiat. Elle relève aussi l'absence d'indices de circulations d'eaux de ruissellement ou de résurgence d'eaux souterraines. Si le terrain d'assiette du projet est situé en risque d'aléa faible de glissement de terrain et de la carte des argiles selon le PPR Multirisques prescrit le 29 septembre 2006, l'étude précitée décrit la nature des sols comme étant composée de terre végétale limoneuse brune reconnue sur 0,2 mètre d'épaisseur, de sable limoneux marron à galet-graviers observé dans les sondages à la pelle mécanique jusqu'à 0,7 à 2,0 mètres de profondeur et d'un sol de résistance élevée mesuré jusqu'à 0,6 à 1,2 mètres de profondeur, pour en conclure que le sol a une résistance très élevée. L'étude relève également que le projet nécessite des travaux de terrassements, notamment provisoires en déblais de 7 à 8 mètres de hauteur en amont, ou encore définitifs en remblais de 2 à 3 mètres de hauteur du côté aval, nécessitant, selon le géotechnicien, que les murs amont du projet de maison qui serviront de soutènement définitif soient dimensionnés dans cette mesure en prenant en compte les efforts des poussées de terres, et que tous les talus définitifs soient dressés avec une pente de 3H/2V pour une hauteur minimale de 2 mètres, dans les formations meubles superficielles et protégées du ravinement. Si les requérants soutiennent que la hauteur du talus qui se trouve au sud du chemin d'accès à la maison, entre cette dernière, à l'ouest, et la limite de propriété, à l'est, et les déblais et remblais en résultant, méconnaît ses préconisations, pour en déduire que ces talus sont soumis à un ruissellement sans être protégés par le bâti et induiront à terme des glissements de terrains, cette circonstance, qui n'est pas établie, ne traduit en tout état de cause ni une méconnaissance des dispositions précitées ni une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, eu égard aux constatations du géotechnicien quant à la nature du terrain, aux cotes retenues sur le plan de masse des permis en litige, à la circonstance que le talus en cause abouti uniquement sur le chemin d'accès interne à l'habitation, lequel sera pourvu d'un revêtement, ou encore au fait que le risque de glissements de terrain est qualifié de faible. Il ne ressort enfin pas des pièces du dossier que les plans produits seraient entachés d'inexactitudes et n'auraient pas permis à l'expert ou aux services instructeurs d'apprécier la réalité du terrain ou des travaux projetés au regard des risques encourus.

13. Par ailleurs, si les requérants relèvent la faible perméabilité du sous-sol et l'aggravation du ruissellement en résultant et soutiennent à cet égard que l'aménagement du terrain d'assiette entraîne l'imperméabilisation presque intégrale du terrain d'assiette du projet, d'une part, le dossier de demande de permis de construire prévoit que les eaux pluviales seront dirigées vers une cuve de stockage avant leur rejet vers un exutoire existant conformément aux préconisations de l'étude géotechnique, et, d'autre part, suite au permis de régularisation du 23 septembre 2021, le projet en litige ne présente plus qu'une emprise au sol de 207 m², soit 29,87 % du tènement, la surface d'espaces verts s'établissant quant à elle à 486 m², soit 70,13 % de ce même tènement.

14. Enfin, conformément aux recommandations du service de restauration des terrains en montagne (RTM) de l'Isère, les pétitionnaires ont produit, à l'appui de leur demande, une attestation du géotechnicien, de l'architecte, et du pétitionnaire, décrivant l'ouvrage de gestion des eaux pluviales, qui n'est pas remis en cause en l'espèce quant à sa capacité et alors, ainsi qu'il a été dit, que le projet comporte un important pourcentage d'espaces verts perméables ou encore que la notice prévoit, s'agissant de l'aménagement des accès, que " l'ensemble des surfaces extérieures sera constitué de matériaux perméables aux eaux de ruissellement, à savoir de concassé fin style Balthazar ou similaire ". Il ne résulte pas des pièces du dossier que ces dispositifs seraient insuffisants pour répondre aux écoulements des eaux pluviales supplémentaires générés par le projet et aux risques en découlant.

15. Il résulte de ce qui précède qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, que les aménagements extérieurs des constructions ne contribueraient pas à limiter l'imperméabilisation des eaux pluviales au sens et pour l'application des dispositions des articles UB 4 et UB 13 du règlement du PLU alors applicable ni qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en raison des risques encourus.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article UB 11 du règlement du PLU, alors applicable, relatif à l'aspect extérieur des constructions : : " Dispositions générales d'architecture : les projets participeront par leur architecture à la mise en œuvre des objectifs de qualité environnementale (...) et réalisés avec des matériaux s'intégrant harmonieusement dans l'environnement naturel ou urbain. Les boiseries, enduits extérieurs et les matériaux de couverture et menuiseries devront respecter la tonalité générale du site environnant. Ainsi les couleurs vives sont à proscrire. / Les éléments de surface posés en toiture (type capteurs et dispositifs solaires) devront être intégrés harmonieusement à la toiture. / Pour les nouvelles constructions: Les autorisations d'occupation du sol seront refusées : /- si les toitures ne sont pas à deux pans au minimum (hors annexe), ou 1 pan si le nouveau bâti vient s'accoler et si elles ne s'harmonisent pas avec les toitures environnantes ; /- si les toits terrasses ne sont pas inclus ou accolés dans le corps général d'un bâtiment ou constituent un élément majeur de l'ensemble architectural, s'ils ne sont pas traités avec des matériaux de revêtement autres qu'une simple protection d'étanchéité. (...) ". Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".

17. Le projet en litige, tel que modifié en dernier lieu par le permis de régularisation délivré le 23 septembre 2021, consiste en la construction d'une habitation d'un volume simple et de style contemporain, en R+2 avec une toiture à deux pans, adaptée à la pente et implantée dans une zone peu urbanisée constituée de quelques maisons individuelles d'un volume similaire, et la terrasse et le mur de soutènement en zone A ont été supprimés. Si la teinte et les matériaux de la toiture " ardoisée ", de la façade et des menuiseries grises ne sont pas identiques aux quelques constructions présentes dans le secteur, ils s'intègrent dans la tonalité générale du site environnant, qui ne présente pas d'intérêt paysager ou architectural ou d'homogénéité particuliers. Il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet en litige, tel que résultant du permis de régularisation, méconnaît les dispositions précitées de l'article UB 11 du PLU alors applicables ni qu'il serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

18. En cinquième lieu, M. D... et Mme G... ne peuvent utilement invoquer, à l'encontre des permis en litige, la méconnaissance de l'orientation d'aménagement et de programmation paysagère du PLU approuvé le 20 décembre 2019, une telle orientation ayant été adoptée postérieurement aux permis de construire initial et modificatif en litige et le permis de régularisation ultérieur n'ayant pas modifié le volume et la teinte de la construction et étant ainsi sans incidence sur cette orientation.

19. En sixième lieu, aux termes de UB 11 du règlement du PLU alors applicable relatif aux remblais et déblais : /(...)/ La construction doit être adaptée au terrain naturel et étudiée en fonction de la pente. Les talus devront être le plus long possible pour retrouver la pente du terrain naturel. Cette règle ne s'applique pas pour l'accès aux garages enterrés ". Aux termes de l'article UB 12 du règlement du PLU alors applicable relatif au stationnement : " /(...)/ Le nombre de places de stationnement demandé devra être en extérieur, au plus proche de la voirie. /(...) ".

20. Si le projet en litige nécessite, ainsi qu'il a été relevé par l'étude géotechnique, des déblais de plus de 1 000 m3 sur une parcelle de moins de 700 m², les dispositions précitées du règlement du PLU ne régissent pas l'importance de ces déblais, fixant simplement des règles portant sur l'implantation des constructions au regard du terrain naturel et de la pente. De plus, les plans de coupe et de façade reproduits dans les dossiers de permis de construire initial, modificatif et de régularisation, qui n'emportent pas de modifications sur ce point, démontrent que, si le projet emporte d'importants déblais et la réalisation de murs de soutènement, ces derniers sont nécessités par l'encastrement du projet dans la pente et l'accompagnement de cette pente au niveau R+2, étant en outre relevé que l'accès au garage et le parking extérieurs sont au droit du chemin de Bas Montquaix conformément aux exigences précitées de l'article UB 12 du règlement du PLU.

21. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que le permis de régularisation du 23 septembre 2021 méconnaît les dispositions de l'article 7.1 des règles communes et de la zone UD 3 secteur 6 du PLUi de Grenoble-Alpes-métropole, doit, en l'absence d'éléments nouveaux en appel, être écarté par les motifs retenus par les premiers juges qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

22. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Quaix-en-Chartreuse, que M. D... et Mme G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête tendant à l'annulation des permis de construire délivrés les 5 février et 24 septembre 2019 ainsi que le permis de construire de régularisation du 23 septembre 2021.

Sur les frais du litige :

23. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter l'ensemble des conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes n° 21LY02817 et n° 22LY00699 de M. D... et Mme G... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. E... D... et Mme A... G..., à M. C... F..., à Mme B... H... et à la commune de Quaix-en-Chartreuse.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2023.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. K...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

Nos 21LY02817-22LY00699 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02817
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCP LACHAT MOURONVALLE GOUROUNIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-04;21ly02817 ?
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