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29/06/2023 | FRANCE | N°22LY03565

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 29 juin 2023, 22LY03565


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 23 juin 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a refusé le séjour au titre de l'asile, a abrogé l'attestation de demande d'asile de l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 2201808 du 7 octobre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a, dans un article 2, rejeté cette d

emande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 7 décembre 2022 et régular...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 23 juin 2022 par lequel le préfet de la Côte-d'Or lui a refusé le séjour au titre de l'asile, a abrogé l'attestation de demande d'asile de l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 2201808 du 7 octobre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a, dans un article 2, rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 7 décembre 2022 et régularisée le 13 janvier 2023, M. D..., représenté par Me Si Hassen, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 7 octobre 2022 ainsi que les décisions susvisées ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'incompétence ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de la décision du 16 mai 2022 de la Cour nationale du droit d'asile et que cette décision n'est pas définitive ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2023, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Rannou, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'appelant la somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 14 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

- et les observations de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant centrafricain né le 1er septembre 1977, est entré régulièrement en France le 18 décembre 2019. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 17 novembre 2021, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), par décision du 16 mai 2022. Par un arrêté du 23 juin 2022, le préfet de la Côte-d'Or lui a refusé le séjour au titre de l'asile, a abrogé l'attestation de demande d'asile de l'intéressé et, sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office. M. D... relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen commun aux décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. Si le requérant soutient que les décisions susvisées édictées le 23 juin 2022 sont entachées d'incompétence, il ressort d'un arrêté du 4 avril 2022, publié au recueil des actes administratifs spécial n° 21-2022-027 de la préfecture de Côte-d'Or le 6 avril 2022 et produit par le préfet en première instance, que le préfet de la Côte-d'Or a donné délégation à Mme A... C..., cheffe du service de l'immigration et de l'intégration, à l'effet de signer les décisions en litige en cas d'absence ou d'empêchement de M. E... B.... Si M. D... soutient que le préfet de la Côte-d'Or ne démontre pas avoir été empêché pour signer ces décisions, il ne ressort pas de l'arrêté susvisé que la délégation donnée à M. B... pour signer les décisions en litige le serait en cas d'empêchement du préfet mais il en ressort au contraire qu'elle a été édictée en raison des fonctions de directeur de l'immigration et de la naturalisation de ce dernier. Par suite, le moyen soulevé ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci ". Aux termes de l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ".

4. Si M. D... soutient que la décision portant refus de séjour au titre de l'asile est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de la décision de la CNDA du 16 mai 2022, la lecture en audience publique de la décision de la CNDA à l'encontre d'un demandeur d'asile met fin au droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français et permet légalement au préfet de prendre une décision l'obligeant à quitter le territoire français sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans que la circonstance que le demandeur ait introduit un pourvoi en cassation contre la décision de la CNDA, lequel n'a pas d'effet suspensif, puisse y faire obstacle. Le moyen doit, par suite, être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Compte tenu de la légalité de la décision portant refus de séjour au titre de l'asile opposée à M. D..., ce dernier n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

6. M. D... réitère en appel le moyen tiré de la méconnaissance par la décision susvisée des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans apporter aucun élément nouveau de fait ou de droit ni critiquer les motifs par lesquels le premier juge a écarté ce moyen. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

7. En raison de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. D... ne saurait soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale pour défaut de base légale.

8. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

9. M. D... soutient qu'il encourt des risques de torture et de décès en cas de retour dans son pays d'origine où sa mère a été assassinée et où il a subi des violences le 12 décembre 2019 qui l'ont poussé à fuir son pays. Toutefois, si l'appartenance de M. D... à l'ethnie chrétienne Mbati, son statut de déserteur de l'armée centrafricaine et le fait qu'il a exercé des fonctions au sein de la garde rapprochée " des plus hautes autorités de son pays " ont été établis devant la CNDA, l'intéressé n'apporte pas devant la cour, à l'appui de ses craintes en cas de retour, d'éléments tendant à démontrer qu'il serait réellement et personnellement soumis à des risques de tortures ou de traitements inhumains au sens des stipulations précitées. Il ne ressort pas en outre des pièces du dossier que sa mère aurait été assassinée ainsi qu'il l'allègue en raison de son départ de l'armée ou des fonctions qu'il a exercées. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision en litige méconnaît ces stipulations doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. D.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le paiement des frais exposés par l'Etat au titre de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de la Côte-d'Or présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 juin 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03565

KC


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03565
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-29;22ly03565 ?
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