Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 21 janvier 2022 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de l'admettre provisoirement au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 90 jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera reconduite d'office.
Par un jugement n° 2201147 du 31 mars 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 12 octobre 2022, Mme A..., représentée par Me Adja Oke, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et dans l'attente, lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'un droit au travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce conseil, le cas échéant, de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'état de santé de son fils nécessite des soins dont le défaut entrainerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et il ne pourra en Côte d'Ivoire bénéficier effectivement d'une prise en charge médicale adaptée à son état de santé ; ainsi, le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 425-9 et L 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a également méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de l'admettre au séjour ;
- la décision fixant un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité du refus de l'admettre au séjour ainsi que de celle de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de l'admettre au séjour ainsi que de celle de l'obligation de quitter le territoire français.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 14 septembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
- les observations de Me Adja Oke, représentant Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., née le 1er février 1983, de nationalité ivoirienne, est entrée en France le 22 août 2018, selon ses déclarations, accompagnée de son fils mineur. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 22 février 2019. Ce refus a été confirmé, le 6 février 2020, par la Cour nationale du droit d'asile. Le 1er février 2021, elle a sollicité la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour en raison de l'état de santé de son fils, né le 1er juillet 2018. Par décisions du 21 janvier 2022, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre provisoirement au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 90 jours sur le fondement des dispositions du 3° et du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays à destination duquel elle sera reconduite d'office. Mme A... relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité de la décision de refus d'admission au séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9. ". Aux termes de l'article L. 425-9 du même code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de destination, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tout élément permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de destination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. Dans son avis du 28 juin 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé du fils de la requérante nécessite une prise en charge médicale et que son défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié était effectivement disponible en Côte d'Ivoire. Si la requérante fait valoir que les médicaments Singulair et Flixotide contenu dans le traitement délivré à son fils ne sont pas disponibles en Côte d'Ivoire, cette affirmation, fondée sur une liste des " médicaments essentiels " établie par ce pays, ne saurait suffire par elle-même et à elle seule à établir que l'enfant de l'intéressée ne pourrait poursuivre un traitement approprié à son état de santé dans ce même pays, sous sa forme actuelle ou sous une forme équivalente. De même, les éléments produits par la requérante concernant le système de santé en Côte d'Ivoire, ainsi que sur la mauvaise qualité de l'air dans ce pays ne suffisent pas à établir que son fils ne pourrait bénéficier effectivement d'une prise en charge adaptée à son état de santé dans ce pays, ni que cet état de santé se trouverait aggravé, alors même qu'il n'y a jamais vécu. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus d'admission au séjour en litige aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 425-9 et L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".
6. La décision litigieuse n'a ni pour objet ni pour effet de séparer la requérante de son fils dès lors qu'elle peut repartir avec lui en Côte d'Ivoire pour y poursuivre leur vie et que, comme il a été dit, il n'est pas établi que l'état de santé de son fils ne pourrait effectivement être pris en charge dans ce pays. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. Il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour n'est pas établie. Le moyen tiré de l'illégalité de cette décision que la requérante invoque, par la voie de l'exception, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit, dès lors, être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant un délai de départ volontaire :
8. Il résulte de ce qui précède que ni l'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour ni celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est établie. Le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions que la requérante invoque, par la voie de l'exception, à l'encontre de la décision fixant un délai de départ volontaire doit, dès lors, être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. Il résulte de ce qui précède que ni l'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour ni celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est établie. Le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions que la requérante invoque, par la voie de l'exception, à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi doit, dès lors, être écarté.
10. Il résulte de ce tout qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie du présent arrêt en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
F. Bourrachot,
La greffière,
AC. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03008
KC