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29/06/2023 | FRANCE | N°21LY02783

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 29 juin 2023, 21LY02783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 28 novembre 2019 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne a prononcé son licenciement pour inaptitude physique et l'a radié des cadres à compter du 1er janvier 2020, ensemble la décision du 29 mars 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2004153 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par u

ne requête enregistrée le 11 août 2021, M. B..., représenté par Me Guérin, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 28 novembre 2019 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne a prononcé son licenciement pour inaptitude physique et l'a radié des cadres à compter du 1er janvier 2020, ensemble la décision du 29 mars 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2004153 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 août 2021, M. B..., représenté par Me Guérin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 juin 2021 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne de le réintégrer dans ses fonctions, de procéder à la reconstitution de sa carrière et de rétablir ses droits à pension et ses droits sociaux, dans le délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal s'est fondé sur l'article 76 de la loi du 9 janvier 1986 inapplicable en l'espèce et non soulevé par le requérant ;

- il appartenait au centre hospitalier d'adapter un poste à son état de santé, au sein même de son établissement ou dans un autre établissement, ou de procéder à son reclassement suivant les souhaits qu'il avait formulés en 2018 ;

- en prononçant son licenciement alors qu'il n'était pas définitivement inapte à l'exercice des fonctions, le centre hospitalier a commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article 29 du décret du 13 octobre 1988, ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les dispositions de l'article 75-1 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la période de préparation au reclassement des fonctionnaires titulaires hospitaliers ont été méconnues ;

- il n'a pas eu la possibilité de bénéficier d'un troisième renouvellement de sa disponibilité en méconnaissance des dispositions de l'article 29 du décret du 13 octobre 1988.

Par un mémoire enregistré le 19 novembre 2021, le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, représenté par Me Walgenwitz, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du requérant, en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en mentionnant l'article 76 de la loi du 9 janvier 1986, au lieu de l'article 71, le tribunal n'a commis qu'une simple erreur matérielle ;

- le requérant n'a jamais formellement présenté de demande de reclassement ;

- les dispositions de l'article 75-1 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la période de préparation au reclassement des fonctionnaires titulaires hospitaliers n'étaient pas applicables à la situation de l'intéressé ;

- l'intéressé étant inapte à l'exercice de ses fonctions, et cette inaptitude ayant perduré, en l'absence de demande de reclassement, c'est à bon droit qu'il a fait l'objet d'une mesure de licenciement.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 pris pour l'application de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et relatif au reclassement des fonctionnaires pour raisons de santé ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;

- les observations de Me Allala, représentant le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., titulaire du grade d'ouvrier principal de 2ème classe, en fonction au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, a été placé en congé de maladie ordinaire à compter du 25 juillet 2016, puis en disponibilité d'office pour raisons de santé, à compter du 25 juillet 2017, pour des périodes de six mois qui ont été renouvelées. Par décision du 28 novembre 2019, le directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne a prononcé son licenciement pour inaptitude physique et l'a radié des cadres à compter du 1er janvier 2020. M. B... a exercé un recours gracieux à l'encontre de cette décision, qui a été rejeté. M. B... relève appel du jugement du 14 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 1er du décret du 8 juin 1989 relatif au reclassement des fonctionnaires hospitaliers reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure d'exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis du médecin du travail, dans l'hypothèse où l'état du fonctionnaire n'a pas nécessité l'octroi d'un congé de maladie, ou du comité médical, si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un poste de travail correspondant à son grade dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l'intéressé d'assurer ses fonctions. "

3. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement.

4. La mise en œuvre du principe général du droit au reclassement implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi, y compris relevant d'une catégorie inférieure, si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions, soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement.

5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un compte-rendu daté du 11 janvier 2018, produit à l'instance, qu'au cours du mois de janvier 2018, M. B... s'est entretenu avec les services de la direction des ressources humaines du centre hospitalier en indiquant qu'il souhaitait reprendre une formation et qu'il s'intéressait à plusieurs domaines. Il ressort également des pièces du dossier que dans ses avis rendus le 8 mars 2018 et le 5 septembre 2018, le comité médical départemental de la Loire s'est prononcé sur le renouvellement du placement en disponibilité d'office pour raison de santé de l'intéressé, en précisant " Dans l'attente d'un poste de reclassement ". Enfin, dans l'avis qu'il a rendu le 2 mai 2019, le comité médical départemental de la Loire a proposé un renouvellement du placement en disponibilité pour maladie de M. B..., en indiquant que sa situation ne relevait pas de la retraite pour invalidité et sans se prononcer sur son inaptitude totale et définitive à l'exercice de toute fonction qui ne ressort d'aucune des pièces du dossier.

6. Le centre hospitalier fait valoir que le simple fait pour l'intéressé d'avoir formulé un souhait de reprendre une formation au cours de l'entretien qui s'est tenu en juin 2018 ne pouvait être interprété comme une demande de reclassement, et qu'il a invité l'intéressé, à plusieurs reprises, à présenter de manière expresse, une telle demande de reclassement.

7. Toutefois, la circonstance que l'intéressé n'aurait pas expressément présenté de demande de reclassement ne saurait à elle seule être assimilée à un refus de reprendre une activité professionnelle. Or, dès lors qu'il n'a à aucun moment manifesté de manière expresse et non équivoque son refus de reprendre une activité professionnelle, M. B..., qui n'était pas inapte de manière définitive à toute fonction bénéficiait du droit d'être reclassé. Par conséquent, le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, qui en outre n'établit pas que le reclassement de M. B... était impossible, ne pouvait refuser son reclassement au motif qu'il n'avait pas présenté de demande de reclassement. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que le centre hospitalier a commis une erreur de droit en décidant, pour ce motif, de le licencier pour raison de santé.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, ni d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".

10. Le présent arrêt implique nécessairement que le centre hospitalier procède à la réintégration et à la reconstitution de carrière de M. B.... Il y a lieu d'enjoindre au directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne de procéder à cette réintégration, et à la reconstitution juridique et financière de la carrière de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne.

12. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, le versement d'une somme de 1 200 euros à Me Guérin, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2004153 du 14 juin 2021 du tribunal administratif de Lyon et la décision du 28 novembre 2019 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne a prononcé le licenciement de M. B... pour inaptitude physique et l'a radié des cadres à compter du 1er janvier 2020, ensemble la décision du 29 mars 2020 rejetant son recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au directeur général du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne de réintégrer M. B... dans ses fonctions et de procéder à la reconstitution de la carrière de ce dernier, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne versera à Me Guérin une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente-assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2023.

La rapporteure,

P. Dèche

Le président,

F. Bourrachot,

La greffière,

AC. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transformation et de la fonction publiques, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02783
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : GUERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-29;21ly02783 ?
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