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22/06/2023 | FRANCE | N°22LY03304

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 22 juin 2023, 22LY03304


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 16 août 2021 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2109224 du 4 mars 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2022, Mme B..., repr

ésentée par Me Zoccali, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 16 août 2021 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2109224 du 4 mars 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2022, Mme B..., représentée par Me Zoccali, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 16 août 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement, les premiers juges n'ont pas fait état du certificat médical en date du 7 décembre 2021 ;

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité affectant le refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme A... épouse B... a été rejetée pour caducité par une décision du 12 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës, première conseillère,

- et les observations de Me Zoccali, représentant Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A... épouse B..., ressortissante du Kosovo née le 11 mars 1955, est entrée en France le 9 novembre 2015 selon ses déclarations, accompagnée de ses trois enfants majeurs. Le 9 novembre 2015, elle a sollicité le bénéfice de l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande par une décision du 7 mars 2017 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 juillet 2017. Par un arrêté du 12 février 2018, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français. Le 6 juin 2018, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 novembre 2019, le préfet du Rhône a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français. Par un jugement du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 12 novembre 2019 et a enjoint au préfet de réexaminer la situation de l'intéressée. Le 29 octobre 2020, Mme B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 août 2021, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B... relève appel du jugement du 4 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si les premiers juges n'ont pas fait état du certificat médical du 7 décembre 2021, ils ont recensé les principales pathologies dont souffre Mme B.... Par suite, le tribunal administratif a répondu de manière suffisante au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé et qu'il serait, pour ce motif, irrégulier.

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

4. Par un avis du 6 avril 2021, que le préfet s'est approprié, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques de son système de santé, et qu'elle peut voyager sans risque à destination de ce pays.

5. Il ressort des pièces médicales produites au dossier que Mme B... est atteinte d'un diabète insulino-dépendant de type II non équilibré compliqué de microangiopathies, d'une hypertension artérielle, d'une sténose carotidienne gauche, d'une anémie ferriprive, d'une insuffisance rénale de stade III, d'une neuropathie diabétique bilatérale, d'une hypothyroidie, d'une hernie discale et d'une cervicarthrose invalidante qui font l'objet d'un suivi et d'un traitement médical. Elle souffre également d'un état anxiodépressif majeur pour lequel elle bénéficie d'un soutien psychothérapeutique et d'un traitement psychotrope. Mme B... fait valoir que le traitement médical indispensable à son état de santé est indisponible au Kosovo. Si Mme B... produit, au soutien de ses allégations, une expertise médicale du 8 décembre 2022 précisant que " plusieurs traitements nécessaires au maintien d'un équilibre sur différentes pathologies ne semblent pas être commercialisés dans son pays d'origine au vu des classifications VIDAL ", cette pièce ne suffit pas, eu égard aux termes dans lesquels elle est rédigée, à remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. En outre, si la requérante produit une attestation du centre principal de médecine familiale de Viti au Kosovo et d'une pharmacie indiquant ne pas disposer de la totalité des traitements prescrits à l'intéressée, ces documents ne permettent pas d'établir que d'autres médicaments comportant des molécules équivalentes ne seraient pas effectivement commercialisés dans ce pays. Par ailleurs, le préfet du Rhône a indiqué en première instance, sans être contesté, qu'à Pristina, un hôpital spécialisé traite des affectations de la thyroïde et du diabète et que d'autres hôpitaux spécialisés dans le pays prennent en charge les pathologies psychologiques. Les autres pièces médicales produites par la requérante n'apportent aucun élément sur l'impossibilité pour l'intéressée d'avoir effectivement accès à des soins adaptés dans son pays d'origine. Par suite, le préfet du Rhône a pu rejeter la demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision en litige n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de la requérante.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme B... fait valoir qu'elle ne dispose plus d'attaches familiales au Kosovo et que ses enfants majeurs vivent en France. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme B... dispose d'attaches familiales au Kosovo où résident ses cinq frères et une sœur et où elle a vécu jusqu'à l'âge de soixante ans. Ses enfants majeurs sont en situation irrégulière et ont fait l'objet d'obligations de quitter le territoire français. Compte tenu de ce qui a été dit au point 5, elle n'établit pas l'indisponibilité de son traitement dans son pays d'origine. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à ses buts et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et familiale.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

9. En l'espèce, et eu égard notamment à la possibilité pour Mme B... de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, le préfet du Rhône n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Courbon, présidente de la formation de jugement,

Mme Caraës, première conseillère,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

La rapporteure,

R. Caraës

La présidente,

A. CourbonLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03304


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03304
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme COURBON
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-22;22ly03304 ?
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