Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... ... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler, d'une part, l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le président du conseil départemental de l'Ain a prononcé le retrait de son agrément d'assistante familiale, d'autre part, l'arrêté du 19 août 2019 par lequel le président du conseil départemental de l'Ain a prononcé son licenciement et d'enjoindre au président du conseil départemental de l'Ain de lui délivrer un nouvel agrément d'assistante familiale et de conclure avec elle un nouveau contrat de travail dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1907466 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 29 juillet 2019 et du 19 août 2019 et rejeté le surplus des demandes de Mme G....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 décembre 2020 et un mémoire enregistré le 18 octobre 2021, non communiqué en l'absence d'élément nouveau, le département de l'Ain, représenté par Me Pontier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la requête de Mme G... ;
3°) de mettre à la charge de Mme G... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions ont été prises par une personne bénéficiant d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
- elles ne sont entachées d'aucune erreur d'appréciation compte-tenu de la gravité des faits, eux-mêmes suffisamment établis, sur lesquels elles se fondent.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2021, Mme G..., représentée par Me Marie, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du département de l'Ain le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par le département de l'Ain ne sont pas fondés ;
- elle a obtenu un nouvel agrément et accueille de nouveaux enfants.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bentéjac, première conseillère,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Marie, représentant Mme G... et celles de Me Bado, représentant le département de l'Ain.
Considérant ce qui suit :
1. Le président du conseil département de l'Ain a, par arrêté du 29 juillet 2019, retiré l'agrément de Mme G..., assistante familiale au sens de l'article L. 421-2 du code de l'action sociale et des familles, en raison de faits graves s'étant déroulés à son domicile et mettant en cause un membre de son entourage. Par arrêté du 19 août 2019, il a prononcé son licenciement. Par un jugement du 17 novembre 2020, dont le département de l'Ain fait appel, le tribunal administratif de Lyon a annulé ces deux décisions.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) ". Aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit : / 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif (...) ". Enfin, aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 421-6 du même code : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait (...) / Toute décision de retrait de l'agrément (...) doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. A cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être.
4. Il ressort des pièces du dossier que la jeune B..., âgée de 8 ans au moment des faits, confiée à la garde de Mme G... en qualité d'assistante familiale, a indiqué à une autre enfant, dans le bus assurant le transport scolaire, avoir été victime de faits d'attouchements sexuels de la part du fils de Mme G.... Interrogée par son institutrice qui trouvait l'enfant inquiet et " mal à l'aise ", ces mêmes déclarations ont été rapportées à l'identique quelques jours plus tard. L'institutrice a alors encouragé l'enfant a révélé l'incident à Mme G..., ce que l'enfant a fait le soir-même. Le lundi suivant, celle-ci, interrogée par son institutrice sur les suites de la révélation, a indiqué avoir été isolée une grande partie du week-end par Mme G..., cette dernière ayant mis en doute les propos de l'enfant. L'enfant a toutefois réaffirmé ses déclarations auprès de l'enseignante. Aussi, dans ce contexte, compte-tenu des déclarations concordantes et constantes de l'enfant qui, au regard de son âge et des troubles qu'elle présentait n'aurait pas été, selon les professionnels, en capacité de maintenir à plusieurs reprises avec cohérence ses déclarations alors que l'occasion lui en a été donnée, et alors même qu'ils ont donné lieu à un classement sans suite de l'enquête judiciaire, le président du conseil départemental a pu estimer sans commettre d'erreur d'appréciation que les conditions d'accueil par Mme G... ne permettaient plus de garantir, dans les circonstances de l'espèce, la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs qui lui avaient été confiés.
5. Il résulte de ce qui précède que le département de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a considéré que l'existence d'un risque n'était pas suffisamment établie et a annulé l'arrêté du 29 juillet 2019 du président du conseil départemental de l'Ain et, par voie de conséquence, la décision de licenciement du 19 août 2019 de la même autorité.
6. Dès lors, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme G... devant le tribunal administratif de Lyon et devant la cour.
Sur la légalité des décisions :
En ce qui concerne l'arrêté du 29 juillet 2019 :
7. Mme A... D..., responsable du service accueil du jeune enfant et parentalité, a reçu, par arrêté du 25 juillet 2019, rendu exécutoire le même jour, délégation pour signer, au nom du président du conseil départemental de l'Ain et en l'absence de M. E... et de Mme H..., tous les actes entrant dans son domaine de compétences en matière d' " Enfance- famille- protection maternelle et infantile ", à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions retirant l'agrément accordé à un assistant familial ni les mesures afférentes à la procédure d'un tel retrait. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le 29 juillet 2019, date à laquelle la décision contestée a été signée, M. E... et Mme H... n'étaient pas absents. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 29 juillet 2019 a été pris par une personne ne bénéficiant pas d'une délégation de compétence doit être écarté.
En ce qui concerne l'arrêté du 19 août 2019 :
8. En premier lieu, M. F... E..., directeur général adjoint de la solidarité, a reçu, par l'arrêté précité du 25 juillet 2019, rendu exécutoire le même jour, délégation pour signer au nom du président du conseil départemental, notamment, l'ensemble des décisions relatives aux assistants maternels, assistants familiaux du conseil départemental. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 29 juillet 2019 a été pris par une personne ne bénéficiant pas d'une délégation de compétence doit être écarté.
9. En second lieu, en l'absence d'illégalité de l'arrêté du 29 juillet 2019, l'arrêté du 19 août 2019, pris sur son fondement, ne peut être annulé par voie de conséquence.
10. Il résulte de ce qui précède que le président du conseil départemental de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de retrait d'agrément en date du 29 juillet 2019 ainsi que la décision de licenciement en date du 19 août 2019.
11. La présente décision n'implique toutefois pas nécessairement le retrait de l'agrément délivré à Mme G... en exécution du jugement du tribunal administratif de Lyon dès lors qu'il appartient, au département de l'Ain, d'apprécier, aux vues des circonstances de droit et de fait pertinentes, s'il y a lieu, le cas échéant, de procéder au retrait de ce nouvel agrément.
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de l'Ain, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme G..., au titre des frais exposés par elle et compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme G... la somme demandée par le département de l'Ain, au même titre.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1907466 du tribunal administratif de Lyon du 17 novembre 2020 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme G... devant le tribunal administratif de Lyon et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions du département de l'Ain présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... G... et au département de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Bentéjac, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.
La rapporteure,
C. Bentéjac
Le président,
F. Pourny
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne à la préfète de l'Ain, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03756