Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013, 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1902538 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Dijon a réduit les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. A... au titre de l'année 2015 dans la catégorie de capitaux mobiliers et des contributions sociales à concurrence de, respectivement, 21 860 euros et 17 488 euros, a déchargé l'intéressé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales correspondant à ces réductions en base et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 24 août 2021 et un mémoire, non communiqué, enregistré le 1er mai 2022, M. A..., représenté par Me Fiorese, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- compte tenu de la nature des traitements envisagés par l'administration, la SARL Le Parisien n'était pas en situation de les réaliser de sorte qu'elle n'avait d'autre alternative que de confier au service le soin d'exécuter ces traitements ; les traitements sollicités auprès de la société n'étaient pas compréhensibles ; la procédure d'imposition est ainsi intervenue en méconnaissance du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ;
- l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, ni aucune autre disposition, n'autorisait l'administration à se faire remettre l'ensemble des fichiers informatiques internes à l'entreprise, au-delà des seuls fichiers relatifs aux écritures comptables, notamment les données issues de la caisse enregistreuse ;
- la méthode de reconstitution mise en œuvre par l'administration était incompréhensible et que les éléments reconstitués par le service n'étaient pas vérifiables et n'ont ainsi pas permis le déroulement normal du débat oral et contradictoire ;
- les irrégularités dont est entachée la procédure d'imposition de la SARL Le Parisien ont une incidence sur l'imposition personnelle de son gérant ;
- la méthode de reconstitution utilisée par l'administration, trop complexe, approximative et mise en œuvre à partir d'un nombre de produits trop réduit, est entachée d'anomalies et d'incohérences révélant un manque de pertinence et l'absence de fondement des résultats reconstitués ;
- l'administration n'a pas exposé les motifs pour lesquels elle a procédé, pour reconstituer les chiffres d'affaires de la SARL Le Parisien, au partage des produits, boissons et plats proposés à la clientèle ni la méthode utilisée pour procéder à cette opération de partage, de sorte qu'il ne peut discuter utilement de la pertinence des traitements informatiques effectués ;
- s'agissant des produits qui sont à la fois revendus en l'état et incorporés dans d'autres plats, la méthode retenue est entachée de lacunes méthodologiques qui ont eu pour effet d'amplifier les écarts observés ;
- l'administration a insuffisamment pris en en compte les pertes, les offerts ainsi que la consommation du personnel ;
- les travaux de valorisation des écarts réalisés par l'administration sont dénués de sens ;
- l'extrapolation effectuée par l'administration, qui a consisté à appliquer un taux d'insuffisance constaté sur les recettes de la partie de la comptabilité vérifiée à celles de la partie non vérifiée, est dépourvue de valeur probante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Le Parisien, qui exploite un restaurant à Beaune (Côte-d'Or) et dont M. A... est l'unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er avril 2012 au 31 janvier 2016 et, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos en 2013, 2014 et 2015. A l'issue du contrôle, la vérificatrice, après avoir écarté la comptabilité de la société qu'elle a estimé non probante et procédé à la reconstitution de ses chiffres d'affaires par application de la méthode dite de " comptabilité matière ", a réintégré dans les résultats des exercices vérifiés les omissions de recettes révélées par la reconstitution. En conséquence du rehaussement des bénéfices imposables de la SARL Le Parisien, l'administration a assujetti M. A..., au titre des années 2013 à 2015, à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, notifiés selon la procédure contradictoire, résultant de la réintégration des sommes regardées comme distribuées dans ses revenus imposables qu'elle a imposées entre ses mains sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. Par un jugement du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Dijon, après avoir accueilli la demande de l'administration tendant à ce que soient substituées, comme fondement légal de cette rectification, les dispositions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts à celles du c. de l'article 111 du même code, a réduit les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales assignées à M. A... au titre de l'année 2015 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, respectivement, de 21 800 euros et de 17 488 euros, a déchargé l'intéressé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, des cotisations de contributions sociales et des majorations correspondant à ces réductions en base et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En vertu du principe d'indépendance des procédures, les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur les impositions personnelles mises à la charge des bénéficiaires des revenus de capitaux mobiliers distribués par cette société. Par suite, M. A... ne peut utilement faire valoir, pour contester les impositions en litige, que la procédure de vérification de comptabilité de la SARL Le Parisien était irrégulière. Dès lors, ce moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ".
4. Il résulte de l'instruction que, pour reconstituer les chiffres d'affaires de la SARL Le Parisien, la vérificatrice a procédé à l'établissement d'une comptabilité matière à partir, d'une part, des factures d'achats et des inventaires, permettant de déterminer le nombre d'achats revendus par catégories de produits et, d'autre part, des relevés de ventes issus de la caisse enregistreuse du restaurant à partir d'une majorité de produits représentant, selon les exercices, entre 68 % et 74 % du chiffre d'affaires. Elle a estimé que le rapprochement du nombre des achats revendus et des ventes déclarées faisait apparaître l'existence, d'une part, de ventes non comptabilisées pour certaines catégories d'articles lorsque le nombre d'achats revendus était supérieur aux ventes déclarées et, d'autre part, pour d'autres catégories, d'achats non comptabilisés lorsque le nombre de ventes déclarées était supérieur aux achats revendus. L'administration a alors déterminé les montants de recettes correspondant aux ventes non déclarées d'achats comptabilisés, d'une part, et d'achats non comptabilisés, d'autre part. Le service a justifié avoir retenu, parmi l'ensemble des produits vendus, un échantillon de produits pour lesquels il disposait d'éléments fiables pour procéder à une telle reconstitution. Les investigations auxquelles l'administration a procédé ont permis de recueillir, ainsi qu'il a été dit, des données sur plus des deux tiers des ventes effectuées au cours de la période vérifiée, ce qui constituait, dans les circonstances de l'espèce, un échantillon suffisamment représentatif permettant de reconstituer le chiffre d'affaires de l'ensemble des exercices concernés. Le service a ainsi pu procéder valablement à la valorisation des écarts entre les quantités facturées et les quantités déstockées. Si M. A... fait valoir que la reconstitution opérée par la vérificatrice comportait des erreurs, le requérant admet lui-même que l'administration a rectifié les rehaussements initialement envisagés dans la proposition de rectification afin de prendre en considération les éléments qui avaient été relevés par la société. Contrairement à ce que soutient M. A..., ces anomalies ponctuelles que la société avait signalées ne sauraient, par elles-mêmes, révéler un défaut de pertinence de la méthode de reconstitution mise en œuvre. Il ne résulte pas de l'instruction que les opérations de reconstitution des chiffres d'affaires de la SARL Le Parisien auraient présenté une complexité telle qu'elle le priverait de la possibilité d'en discuter utilement. Si M. A... fait valoir que la méthode de reconstitution ne tient pas compte du fait que certaines marchandises peuvent être revendues en l'état ou être transformées pour être incorporées dans des plats comme la viande de poulet ou de bœuf entrant dans la composition de plats cuisinés, ont été exclues de la reconstitution, il résulte des mentions, non contestées, figurant dans la réponse aux observations présentées par la société que celle-ci avait précisé que la confection des plats se limitait à la décongélation de plats cuisinés, ne comportant pas la transformation des produits carnés achetés par la société. En outre, l'administration a retenu un taux de perte et d'offerts de 15 % pour les bières, de 10 % pour les ventes de vin au verre, de 5 % pour les vins vendus en bouteille, et de 2 % pour les produits autres que les boissons et a évalué la consommation du personnel à hauteur de 25 euros par repas, ces éléments n'apparaissant pas, au vu de l'instruction, insuffisants. Il résulte de ce qui précède que l'administration, qui ne pouvait se fonder sur la seule comptabilité de la société qui n'était pas probante, apporte la preuve qui lui incombe que la méthode utilisée par elle, qui repose sur les données propres à l'entreprise, n'est ni radicalement viciée dans son principe, ni entachée d'approximation qui la rendrait excessivement sommaire.
5. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme rapportant la preuve qui lui incombe de l'existence et du montant des recettes non déclarées par la SARL Le Parisien et restant en litige, lesquelles, n'ayant été ni mises en réserve ni incorporées au capital, ne sont pas demeurées investies dans la société et sont ainsi constitutives de distributions consenties par cette dernière, sont imposables sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts entre les mains de M. A... en sa qualité de maître de l'affaire qu'il ne conteste pas.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023.
Le rapporteur,
F.-X. Pin
Le président,
D. PruvostLa greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02866