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18/04/2023 | FRANCE | N°21LY04141

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 18 avril 2023, 21LY04141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 30 octobre 2018 par laquelle le conseil communautaire de Thonon agglomération a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Chens-sur-Léman.

Par un jugement n° 1900185 du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 décembre 2021 et 17 janvier 2023, ce dernier n'ayant p

as été communiqué, M. A... B..., représenté par le cabinet Berger Avocats et Associés, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 30 octobre 2018 par laquelle le conseil communautaire de Thonon agglomération a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Chens-sur-Léman.

Par un jugement n° 1900185 du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 décembre 2021 et 17 janvier 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. A... B..., représenté par le cabinet Berger Avocats et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du 30 octobre 2018 par laquelle le conseil communautaire de Thonon agglomération a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Chens-sur-Léman ; ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Thonon agglomération le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il mentionne qu'une magistrate a participé au délibéré alors qu'elle n'était pas présente lors de l'audience publique et qu'il n'est pas démontré que les magistrats visés sur le jugement ont effectivement signé la décision ;

- les modifications postérieures à l'enquête publique remettent en cause l'économie générale du projet de PLU et ne résultent d'aucune observation du public ou du commissaire-enquêteur ;

- les mesures de publicité de l'enquête publique ont été insuffisantes ;

- l'extension de l'urbanisation en zone UD est limitée de manière drastique, alors que ni les dispositions relatives au littoral, ni le PADD du PLU ni le SCOT n'exigent une protection aussi stricte et prévoient des restrictions de cette nature ; la parcelle lui appartenant est située dans un secteur très urbanisé et les restrictions de l'urbanisation n'y sont pas justifiées ;

- l'interdiction de créer des commerces en zone UD est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elle ne répond à aucun objectif prévu par le PADD.

Par des mémoires en défense enregistrés les 5 décembre 2022 et 17 janvier 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté d'agglomération Thonon agglomération, représentée par la SELARL Conseil Affaires publiques, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du requérant le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Paturat pour M. B... et de Me Djellal substituant Me Mollion pour la communauté d'agglomération Thonon Agglomération.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 3 février 2015, la commune de Chens-sur-Léman a initié la révision de son plan local d'urbanisme. Suite au transfert de sa compétence " urbanisme " par délibération du 15 décembre 2015 à la communauté de communes du Bas-Chablais et l'autorisation de poursuivre la procédure de révision de son PLU, le débat sur les orientations du PADD a été voté par délibération du 17 décembre 2016 du conseil communautaire de la communauté de communes du Bas-Chablais. Par une délibération du 28 novembre 2017, le conseil communautaire de Thonon agglomération, désormais compétent compte tenu de la fusion des communautés de communes du Bas-Chablais et des Collines du Léman, a arrêté le projet de plan local d'urbanisme (PLU), qui a été soumis à enquête publique du 7 mai au 8 juin 2018. M. B... relève appel du jugement du 19 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la délibération du 30 octobre 2018 de la communauté d'agglomération Thonon agglomération approuvant le PLU de Chens-sur-Léman.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative : " Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus ". Il ressort des mentions du jugement attaqué, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire, qu'il a été " délibéré après l'audience publique du 5 octobre 2021 " à laquelle siégeaient les trois magistrats dont les noms ont été précisés. Ces mentions suffisent à établir que la composition de la juridiction était la même tant à l'audience qu'au délibéré.

3. En second lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du même code : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort de la minute du jugement attaqué que celle-ci comporte, conformément aux dispositions précitées, la signature du rapporteur, du président de la formation de jugement et du greffier d'audience.

Sur la légalité de la délibération du 30 octobre 2018 :

4. En premier lieu, et en l'absence d'éléments nouveaux en appel, le moyen tiré de ce que les mesures de publicité de l'enquête publique ont été insuffisantes doit être écarté par les motifs retenus par les premiers juges qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par :/ 1° L'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à la majorité des suffrages exprimés après que les avis qui ont été joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire ou de la commission d'enquête aient été présentés lors d'une conférence intercommunale rassemblant les maires des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale et, le cas échéant, après que l'avis des communes sur le plan de secteur qui couvre leur territoire a été recueilli ;/2° Le conseil municipal dans le cas prévu au 2° de l'article L. 153-8. ".

6. En application de ces dispositions, à l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire enquêteur, est approuvé par le conseil municipal. Il est loisible à l'autorité administrative compétente de modifier le plan local d'urbanisme après l'enquête publique, sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet et, d'autre part, que cette modification procède de l'enquête publique, ces deux conditions découlant de la finalité même de la procédure de mise à l'enquête publique.

7. Il résulte d'une lecture combinée des pièces du dossier, et plus particulièrement du rapport du commissaire enquêteur, que les modifications du projet de PLU faites après l'enquête publique et relatives à la réduction de la zone Uc au chef-lieu sud au profit de la zone A et N, le classement de la zone Ud1 en zone Apa à Chens-le-Pont, le reclassement de la bande des 100 mètres sur un secteur limité déterminé et l'augmentation de la densité concernant l'OAP n° 2 résultent, contrairement à ce que soutient M. B..., des avis rendus par la chambre d'agriculture, les services de l'Etat et la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et procèdent, par suite, de l'enquête publique. Par ailleurs, ainsi qu'il a été retenu par les premiers juges, les modifications en cause, qui ne sont pas analysées par le requérant, sont limitées à certaines parcelles ou secteurs de faibles superficies et ne peuvent être considérées comme emportant une remise en cause de l'économie générale du PLU en litige.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...). " L'article L. 131-7 du même code dispose que : " En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme, les documents en tenant lieu et les cartes communales sont compatibles, s'il y a lieu, avec les documents énumérés aux 1° à 10° de l'article L. 131-1 et prennent en compte les documents énumérés à l'article L. 131-2. ".

9. Il ressort de la combinaison de ces dispositions que lorsque le territoire d'une commune, soumise aux dispositions particulières au littoral, est couvert par un schéma de cohérence territoriale mettant en œuvre ces dispositions, celui-ci fait obstacle à une application directe au plan local d'urbanisme des dispositions législatives particulières au littoral, la compatibilité du plan local d'urbanisme devant être appréciée au regard des seules orientations du schéma de cohérence territoriale. Ce principe ne fait toutefois pas obstacle, le cas échéant, à la possibilité pour tout intéressé de faire prévaloir, par le moyen de l'exception d'illégalité, les dispositions législatives particulières au littoral sur les orientations générales du schéma de cohérence territoriale.

10. D'une part, le territoire de la commune de Chens-sur-Léman, qui est soumis aux dispositions particulières au littoral, est couvert par le SCOT du Chablais qui met en œuvre ces dispositions, ce qui s'oppose à ce que la compatibilité du PLU soit appréciée directement au regard des dispositions législatives particulières au littoral, cette compatibilité devant être appréciée au regard des seules orientations du SCOT. Par suite, le moyen tiré de ce que les limitations introduites par le règlement de la zone UD, notamment sur le secteur UD2 où se trouvent les parcelles appartenant au requérant, ne seraient pas compatibles avec les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme relatives à l'urbanisation des espaces proches du rivage est inopérant.

11. D'autre part, le document d'orientations générales du SCOT du Chablais produit au dossier prévoit que " le principe d'extension limitée de l'urbanisation répond à la nécessité d'empêcher un développement important de l'urbanisation dans les secteurs sensibles que sont les espaces proches du rivage. Il a pour objectif de privilégier un développement du bâti en profondeur vers l'arrière de la commune et de freiner une extension parallèle du rivage de part et d'autre de l'urbanisation existante. Cette disposition s'applique dans les zones urbanisées et non-urbanisées des espaces proches du rivage. / Les critères pour juger qu'une extension est limitée sont notamment ; - la surface, même si aucun seuil n'est indiqué dans la loi, les opérations d'urbanisation ne doivent pas être surdimensionnées, - la densité, la localisation des constructions et la configuration des lieux, - l'étendue de la zone ouverte à l''urbanisation : il faut garder un rapport de proportion raisonnable avec l'environnement du projet d'extension de l'urbanisation ". Le PADD dans ses orientations générales des politiques de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques précise que " dans les espaces urbanisés, les nouvelles opérations devront s'intégrer harmonieusement dans le paysage (respect de la topographie, volumétrie adaptée des constructions, traitement des espaces libres et des jardins, ...). Le PLU met en place des prescriptions dans ces domaines. ". Eu égard à ces orientations, objectifs et caractéristiques, le règlement du secteur UD2 du PLU en litige, qui n'admet, sous conditions, que l'évolution et l'extension des constructions existantes à usage d'habitation dans la limite de 30 % de la surface de plancher existante à la date d'approbation du PLU, ainsi que deux constructions annexes avec une emprise au sol maximale cumulée de 40 m² par unité foncière, n'est pas incompatible avec les orientations générales du SCOT ni incohérent avec le PADD. Par ailleurs, et alors que les secteurs UD 2 concernés sont de nombre et de taille réduits et se trouvent dans un espace sensible et proche du rivage, M. B..., en se bornant à soutenir que ces dispositions de la zone UD sont trop restrictives, ne démontre pas qu'elles seraient excessives et non justifiées.

12. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger./Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire./Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ".

13. Le rapport de présentation du PLU en litige prévoit s'agissant de la zone UD que " cette zone d'une superficie totale d'environ 31,82 hectares a une vocation principalement résidentielle. Elle intègre principalement les extensions récentes à Chens le Pont, les espaces construits au bourg et situées en bordure du lac ainsi qu'une frange de constructions existantes le long de la limite communale de Messery. Elle comporte deux secteurs UD1 et UD2 qui n'ont pas vocation à se développer fortement. L'objectif principal de la règle d'urbanisme dans cette zone UD est d'autoriser une évolution très limitée de l'urbanisation. ". Par ailleurs, le PADD prévoit de favoriser le maintien et le développement de commerces et services de proximité dans le tissu urbain existant, en privilégiant la proximité du pôle de centralité de la mairie, la zone UD, qui a une vocation résidentielle, n'ayant quant à elle pas vocation à se développer. Compte tenu de l'ensemble de ces constats et objectifs, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de créer des commerces en zone UD est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, ni, et en tout état de cause, qu'elle méconnaît le principe d'égalité.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 30 octobre 2018 par laquelle le conseil communautaire de Thonon agglomération a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Chens-sur-Léman.

Sur les frais d'instance et les dépens :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération Thonon agglomération, qui n'est pas la partie perdante, verse à M. B... la somme qu'elle demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposé. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la communauté d'agglomération Thonon agglomération au titre des mêmes dispositions.

16. Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, aucuns frais de cette nature n'ayant été exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Thonon agglomération tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté d'agglomération Thonon agglomération.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 21LY04141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY04141
Date de la décision : 18/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL CAP - ME MOLLION

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-04-18;21ly04141 ?
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