Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'EURL Arc en Ciel a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er août 2011 au 31 juillet 2014.
Par un jugement nos 1801001, 1801020 du 11 mai 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 et 13 juillet 2021, l'EURL Arc en Ciel, représentée par Me Rougé Guichard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification porte atteinte au secret des données fiscales en faisant référence à des propositions de rectification relatives à d'autres entreprises ;
- la reconstitution de recettes est erronée, dès lors que le poids des ingrédients retenu par l'administration pour la fabrication des sandwichs est inférieur à celui pratiqué, le restaurant étant connu pour ses plats copieux ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a validé le rejet de sa comptabilité, en se fondant sur l'article 54 du code général des impôts, sans avoir vérifié qu'elle était soumise aux dispositions de l'article 53 A du même code ; elle est fondée à se prévaloir de l'article 286-I-3° du code général des impôts, qui admet, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et alors qu'elle réalise des opérations au comptant inférieures à 76 euros, d'inscrire globalement des opérations en comptabilité en fin de journée.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. L'EURL Arc en Ciel, dont le gérant et unique associé est M. B... A..., exploite un établissement de restauration rapide. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er août 2011 au 31 juillet 2014, à l'issue de laquelle le vérificateur, après avoir écarté sa comptabilité comme non probante et procédé à une reconstitution de ses recettes, l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 et a mis à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'ensemble de la période sous revue. L'EURL Arc en Ciel relève appel du jugement du 11 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à décharge de ces impositions ainsi que des pénalités correspondantes.
2. Si l'EURL Arc en Ciel fait valoir que la proposition de rectification qui lui a été adressée le 10 juillet 2015 fait référence à d'autres sociétés, il ressort de la lecture de ce document que ces mentions constituent de simples erreurs de plume, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait porté atteinte au secret des données fiscales d'entreprises tierces.
3. Aux termes de l'article 53 A du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 302 septies A bis, les contribuables, autres que ceux soumis au régime défini à l'article 50-0, sont tenus de souscrire chaque année, dans les conditions et délais prévus aux articles 172 et 175, une déclaration permettant de déterminer et de contrôler le résultat imposable de l'année ou de l'exercice précédent. (...) ". Aux termes de l'article 54 du même code : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. (...) ". Aux termes de l'article 286 de ce même code : " I. Toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée doit : (...) 3° Si elle ne tient pas habituellement une comptabilité permettant de déterminer son chiffre d'affaires tel qu'il est défini par le présent chapitre, avoir un livre aux pages numérotées sur lequel elle inscrit, jour par jour, sans blanc ni rature, le montant de chacune de ses opérations, en distinguant, au besoin, ses opérations taxables et celles qui ne le sont pas. / Chaque inscription doit indiquer la date, la désignation sommaire des objets vendus, du service rendu ou de l'opération imposable, ainsi que le prix de la vente ou de l'achat, ou le montant des courtages, commissions, remises, salaires, prix de location, intérêts, escomptes, agios ou autres profits. Toutefois, les opérations au comptant peuvent être inscrites globalement en comptabilité à la fin de chaque journée lorsqu'elles sont inférieures à 76 € pour les ventes au détail et les services rendus à des particuliers. Le montant des opérations inscrites sur le livre est totalisé à la fin du mois. / Le livre prescrit ci-dessus ou la comptabilité en tenant lieu, ainsi que les pièces justificatives des opérations effectuées par les redevables, notamment les factures d'achat, doivent être conservés selon les modalités prévues au I de l'article L102 B du livre des procédures fiscales ; les pièces justificatives relatives à des opérations ouvrant droit à une déduction doivent être d'origine ; (...) ".
4. Le vérificateur a constaté, au cours du contrôle, que les recettes de l'entreprise, qui ne dispose pas de caisse enregistreuse, étaient retracées dans un tableau mentionnant, pour chaque jour, de manière globale, le montant des ventes par catégorie de prix et selon la nature des règlements effectués, sans détail quant à la désignation des articles vendus, et que ces recettes étaient ensuite enregistrées en comptabilité en fonction du taux de taxe sur la valeur ajoutée, par des écritures mensuelles globales. En l'absence de tout justificatif du détail des recettes permettant d'opérer un rapprochement entre les ventes, les achats et les stocks, l'administration était fondée à regarder la comptabilité présentée comme non probante et à reconstituer son chiffre d'affaires.
5. L'EURL Arc en Ciel, qui ne relève pas du régime applicable aux micro-entreprises prévu à l'article 50-0 du code général des impôts, fait partie des entreprises mentionnées à l'article 53 A du même code et est soumise, par conséquent, aux obligations de présentation des documents comptables prévues à l'article 54. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le vérificateur s'est fondé sur les dispositions de cet article pour rejeter la comptabilité présentée lors du contrôle.
6. Si l'EURL Arc en Ciel fait valoir qu'elle était autorisée, en vertu du 3° de l'article 286 du code général des impôts, à procéder à une inscription globale de ses recettes inférieures à 76 euros en fin de journée, cette mesure de tempérament, au demeurant applicable uniquement en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ne la dispensait pas de produire, à l'appui de la comptabilité présentée, les pièces justificatives de ses recettes.
7. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis de la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ".
8. La comptabilité de l'EURL Arc en Ciel comportant de graves irrégularités et les impositions ayant été établies conformément à l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires dans sa séance du 5 octobre 2016, il appartient à l'EURL Arc en Ciel de démontrer le caractère exagéré des impositions mises à sa charge.
9. Si la société requérante fait valoir que les quantités d'ingrédients retenues par le service vérificateur pour procéder à la reconstitution de ses recettes, pourtant déterminées avec son gérant, sont insuffisantes, dès lors que l'établissement qu'elle exploite est connu pour proposer des plats copieux à sa clientèle, elle ne l'établit pas en se bornant à produire un constat d'huissier, établi postérieurement au contrôle, le 2 juillet 2021.
10. Il résulte de ce qui précède que l'EURL Arc en Ciel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'EURL Arc en Ciel est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Arc en Ciel.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Courbon, présidente-assesseure,
Mme Caraës, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023.
La rapporteure,
A. Courbon
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02307