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24/02/2023 | FRANCE | N°21LY00986

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 24 février 2023, 21LY00986


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Dans l'instance n° 1905416, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation du titre exécutoire n° 588, d'un montant de 11 297,50 euros, émis à son encontre le 26 juin 2018 par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Dans l'instance n° 1905529, la SHAM a demandé au tribunal administratif de Lyon l

'annulation du titre exécutoire n° 607, d'un montant de 34 054 euros, émis à son e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Dans l'instance n° 1905416, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation du titre exécutoire n° 588, d'un montant de 11 297,50 euros, émis à son encontre le 26 juin 2018 par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Dans l'instance n° 1905529, la SHAM a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation du titre exécutoire n° 607, d'un montant de 34 054 euros, émis à son encontre le 26 avril 2019 par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Dans cette instance n° 1905529, l'ONIAM a demandé au tribunal, à titre reconventionnel, de condamner la SHAM à lui verser une somme de 11 297,50 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2018, avec capitalisation à compter du 13 juillet 2019, de condamner la SHAM à lui verser une somme de 34 054 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2019, avec capitalisation à compter du 17 mai 2020, de condamner la SHAM à lui verser une somme de 6 802,73 euros, au titre de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et de la condamner à lui rembourser les frais d'expertise.

Par un jugement n° 1905416 - 1905529 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé le titre exécutoire n° 607 émis par l'ONIAM le 26 avril 2019 à l'encontre de la SHAM, condamné la SHAM à verser à l'ONIAM une somme de 1 129,75 euros dans l'instance n° 1905416 et une somme de 3 405,40 euros dans l'instance n° 1905529 au titre de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée le 26 mars 2021 sous le n° 21LY00986 et un mémoire enregistré le 17 décembre 2021, l'ONIAM, représenté par Me Saumon, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1905416 - 1905529 du 2 février 2021 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SHAM devant le tribunal administratif de Lyon ;

3°) de condamner la SHAM à lui verser une somme de 11 297,50 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2018, avec capitalisation à compter du 13 juillet 2019 ;

4°) de condamner la SHAM à lui verser une somme de 34 054 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2019, avec capitalisation à compter du 17 mai 2020 ;

5°) de condamner la SHAM à lui verser une somme de 6 802,73 euros, au titre de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique ;

6°) de la condamner à lui rembourser les frais d'expertise ;

7°) de mettre à la charge de la SHAM la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ce qui concerne le titre exécutoire n° 2019-607, l'avis des sommes à payer mentionne le nom de l'auteur de l'acte, à savoir M. B..., et respecte les formes imposées par l'article L. 211-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui ne requièrent que la mention de l'auteur de l'acte ainsi que la signature de la personne bénéficiant d'une délégation de signature et non de celle qui a émis le titre. En tout état de cause, la méconnaissance de la formalité de la signature par l'auteur de l'acte lui-même n'a privé le redevable d'aucune garantie ;

- en ce qui concerne le remboursement des frais d'expertise, l'office n'est pas lié par le choix qu'il a fait de recouvrer sa créance principale par le biais du titre exécutoire et reste libre de solliciter le remboursement à titre reconventionnel des frais d'expertise ;

- la pénalité infligée sur le fondement de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique doit être portée à 15 % des sommes au regard de la responsabilité de plein droit des Hospices civils de Lyon (HCL) ;

- les sommes qu'il a versées doivent porter intérêts à compter de la date à laquelle elles ont été versées et la capitalisation des intérêts un an après cette date.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 avril 2021, la SHAM, représentée par Me Le Prado, conclut, par la voie de l'appel incident :

1°) à la réformation du jugement n° 1905416 - 1905529 du 2 février 2021 du tribunal administratif de Lyon sauf en ce qu'il a annulé le titre exécutoire n° 607 émis à son encontre par l'ONIAM le 26 avril 2019 et rejeté le surplus des demandes de l'ONIAM ;

2°) à l'annulation du titre exécutoire n° 588 émis à son encontre par l'ONIAM le 26 juin 2018 ;

3°) à la décharge du paiement des sommes correspondantes aux titre exécutoires n° 588 et n° 607 ;

4°) au rejet de la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon et de la requête de l'ONIAM ;

5°) à ce que soit mis à la charge de l'ONIAM le versement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la victime de la défaillance d'un produit ou d'un appareil de santé utilisé par le service public hospitalier ne peut engager la responsabilité sans faute de ce dernier que dans le cas où le producteur n'a pu être identifié et où l'établissement de santé n'a pas désigné son propre fournisseur ou le producteur ; ayant désigné le fabricant de la prothèse implantée, la responsabilité des HCL ne peut être engagée ;

- la défaillance de la prothèse n'est, en tout état de cause, pas établie, la seule implication du produit dans la réalisation du dommage ne suffisant pas à établir son défaut ;

- les préjudices subis par M. C... en lien avec la prothèse ont été surévalués par les premiers juges ;

- la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la santé publique ne pouvait lui être infligée compte-tenu de l'annulation du titre de recettes n° 607 émis le 26 juin 2018 ; en tout état de cause, la responsabilité des HCL n'étant pas évidente et les préjudices n'ayant pas été établis par les experts, elle pouvait légitimement refuser de suivre l'avis de la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CCI) ;

- les moyens soulevés par l'ONIAM ne sont pas fondés.

II - Par une requête enregistrée le 2 avril 2021 sous le n° 21LY01030 et un mémoire ampliatif enregistré le 21 avril 2021, la SHAM, représentée par Me Le Prado demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1905416 - 1905529 du 2 février 2021 du tribunal administratif de Lyon sauf en ce qu'il a annulé le titre exécutoire n° 607 émis à son encontre par l'ONIAM le 26 avril 2019 et rejeté le surplus des demandes de l'ONIAM ;

2°) d'annuler le titre exécutoire n° 588 émis à son encontre par l'ONIAM le 26 juin 2018 ;

3°) de la décharge du paiement des sommes correspondantes aux titre exécutoires n° 588 et n° 607 ;

4°) de rejeter les demandes présentées pour l'ONIAM devant le tribunal administratif de Lyon ;

5°) de mettre à la charge de l'ONIAM le versement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient des moyens identiques à ceux, analysés ci-dessus, contenus dans son mémoire en défense présenté dans l'instance n° 21LY00986.

La requête a été communiqué à l'ONIAM qui n'a pas produit à l'instance.

Vu les autres pièces de ces deux dossiers.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bentéjac, première conseillère,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Demailly, substituant la SARL Le Prado-Gilbert, représentant la société Relyens Mutual Insurance venant aux droits de la SHAM.

Une note en délibéré, enregistrée le 2 février 2023, a été présentée pour l'ONIAM dans l'instance n° 21LY00986.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 21 mars 1958, a bénéficié, le 20 août 2013 de la pose d'une valve biologique lors d'une intervention réalisée au sein des Hospices civils de Lyon. Cette prothèse, s'étant révélée défectueuse a été remplacée par un modèle identique le 18 avril 2015. M. C... a souhaité l'indemnisation des préjudices résultant de cette prise en charge et a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation (CCI) Rhône-Alpes qui, par un avis du 13 septembre 2017, a considéré que la responsabilité des Hospices civils de Lyon était engagée du fait de la défectuosité du matériel et, en conséquence, a invité la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), assureur des HCL, à faire une offre d'indemnisation à M. C.... En l'absence d'offre d'indemnisation de la SHAM, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) s'est substitué à celle-ci sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et a versé les sommes de 11 297,50 euros et 34 054 euros à M. C.... L'ONIAM a ensuite émis le 26 juin 2018 un titre exécutoire n° 588 d'un montant de 11 297,50 euros et le 26 avril 2019 un titre exécutoire n° 607 d'un montant de 34 054 euros pour le recouvrement des sommes versées à M. C....

2. Par deux instances enregistrées sous les numéros 1905416 et 1905529, la SHAM a sollicité l'annulation des deux titres exécutoires n° 588 et n° 607 émis par l'ONIAM ainsi que la décharge de l'obligation de payer en résultant. L'ONIAM, à titre reconventionnel, a sollicité la condamnation de la SHAM à lui verser une somme de 11 297,50 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2018, avec capitalisation à compter du 13 juillet 2019 et une somme de 34 054 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 mai 2019, avec capitalisation à compter du 17 mai 2020 correspondant aux indemnités versées à M. C.... Il a également demandé que la SHAM lui verse une somme de 6 802,73 euros au titre de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et lui rembourse les frais d'expertise devant la CCI. Par jugement n° 1905416 - 1905529 du 2 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé le titre exécutoire n° 607 émis par l'ONIAM le 26 avril 2019 à l'encontre de la SHAM, condamné la SHAM à verser à l'ONIAM une somme de 1 129,75 euros dans l'instance n° 1905416 et une somme de 3 405,40 euros dans l'instance n° 1905529, au titre de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique, et rejeté le surplus des demandes. L'ONIAM relève appel de ce jugement et la SHAM sollicite également la réformation de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses demandes.

3. La requête n° 21LY00986 et la requête n° 21LY01030 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le titre n° 607 émis le 26 avril 2019 et le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) / Toute décision prise par l'une des autorités mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ".

5. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que les titres exécutoires émis par l'ONIAM, établissement public administratif de l'Etat, doivent être signés et comporter les prénom, nom et qualité de leur auteur et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier, en cas de contestation, qu'ils comportent la signature de l'émetteur. Lorsque le bordereau est signé non par l'ordonnateur lui-même mais par une personne ayant reçu de lui une délégation de compétence ou de signature, ce sont, dès lors, le nom, le prénom et la qualité de cette personne qui doivent être mentionnés sur le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif, de même que sur l'ampliation adressée au redevable.

6. En l'espèce, le titre n° 607 mentionne que son émetteur est M. D... B..., directeur de l'ONIAM mais comporte la signature de Mme A... de Martin de Viviès, directrice adjointe de l'ONIAM. Par suite, et alors même que Mme de Martin de Viviès bénéficiait d'une délégation de signature, le titre exécutoire, qui ne comporte pas les prénom, nom et qualité de son auteur, méconnaît les dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration. Il résulte de ce qui précède que l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a annulé le titre de recette en cause.

En ce qui concerne le bien-fondé des titres :

S'agissant de la responsabilité du centre hospitalier Lucien Hussel :

7. Sans préjudice d'éventuels recours en garantie, le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise.

8. Il résulte de l'instruction, notamment des deux rapports d'expertise diligentés par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales Rhône-Alpes que M. C... a dû subir, en avril 2015, au sein des Hospices civils de Lyon, une intervention en raison d'une insuffisance aortique majeure. Au cours de cette intervention, devant le constat de ce que la valve biologique Trifecta n° 27 précédemment implantée en août 2013 était le siège d'une large déchirure en regard du stent droit-gauche, il a été procédé à la mise en place d'une nouvelle prothèse biologique, Trifecta n° 23. S'il résulte effectivement une incertitude sur l'origine de cette déchirure, les experts, qui ont écarté une infection d'origine nosocomiale et une infection initiale de la valve par mycobactérie non tuberculeuse, au regard du caractère négatif des nombreux prélèvements réalisés et de l'absence de fièvre du patient, ont retenu que l'hypothèse la plus probable était celle d'un défaut structurel de la valve, le seul constat de cette déchirure témoignant d'une défectuosité du matériel implanté. Contrairement à ce que soutient la SHAM, assureur des HCL, le délai de moins de deux années entre les deux interventions ne saurait caractériser la réalisation d'un risque inhérent au produit implanté expliquant la dégénérescence rapide de la prothèse. Dans ces conditions, la SHAM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la responsabilité de plein droit des HCL était engagée du fait de la défaillance de la valve biologique.

S'agissant de l'évaluation des préjudices :

9. Quant au déficit fonctionnel temporaire, l'expert a retenu un déficit fonctionnel temporaire de 50 % du 22 avril 2015 au 7 juin 2016, date de consolidation de l'état de M. C.... Si l'expert indique, dans le second rapport un déficit fonctionnel temporaire de classe 1 durant cette période, une telle mention, au regard du taux de déficit fonctionnel permanent de 20 % retenu par ailleurs résulte d'une erreur matérielle dont il convient de ne pas tenir compte. Ainsi, en octroyant la somme de 3 097,50 euros, l'ONIAM n'a pas fait une appréciation exagérée de ce chef de préjudice.

10. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise établi devant la CCI que M. C..., âgé de cinquante-huit ans à la date de consolidation de son état de santé présente une gêne fonctionnelle au niveau du membre supérieur droit en lien avec le changement de prothèse correspondant à un déficit fonctionnel permanent évalué à 20 %. En allouant la somme de 26 254 euros, l'ONIAM n'a pas fait une évaluation excessive de ce chef de préjudice.

11. Quant à l'incidence professionnelle, si les experts indiquent que l'atteinte sensitive ne rend pas M. C... inapte à l'exercice de son activité dans son entreprise, il résulte toutefois de l'instruction que, compte-tenu de la gêne occasionnée, elle rend l'exercice d'une profession plus pénible. En évaluant à la somme de 5 000 euros l'incidence professionnelle résultant de cette atteinte sensitive, l'ONIAM n'a pas surévalué ce chef de préjudice.

12. Quant au préjudice d'agrément, il résulte des rapports d'expertise que, avant l'intervention en cause, M. C... s'adonnait à la pratique régulière de la marche. Ainsi, la SHAM n'est pas fondée à contester la somme de 2 100 euros versée à M. C... au titre du préjudice d'agrément.

13. Les autres postes de chefs de préjudice n'étant pas contestés, la SHAM n'est, dès lors, pas fondée à contester les sommes de 11 297,50 euros et de 34 054 euros mises à sa charge par les titres exécutoires litigieux.

En ce qui concerne la décharge de l'obligation de payer :

14. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre.

15. Il résulte de ce qui précède que si l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé le titre exécutoire n° 607 d'un montant de 34 054 euros émis à l'encontre de la SHAM le 26 avril 2019, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de la somme en litige.

En ce qui concerne les conclusions présentées par l'ONIAM :

S'agissant des conclusions indemnitaires :

16. Lorsqu'il cherche à recouvrer les sommes versées aux victimes en application de la transaction conclue avec ces dernières, l'ONIAM peut soit émettre un titre exécutoire à l'encontre de la personne responsable du dommage, de son assureur ou du fonds institué à l'article L. 426-1 du code des assurances, soit saisir la juridiction compétente d'une requête à cette fin. Toutefois, l'office n'est pas recevable à saisir le juge d'une requête tendant à la condamnation du débiteur au remboursement de l'indemnité versée à la victime lorsqu'il a, préalablement à cette saisine, émis un titre exécutoire en vue de recouvrer la somme en litige. Réciproquement, il ne peut légalement émettre un titre exécutoire en vue du recouvrement forcé de sa créance s'il a déjà saisi le juge ou s'il le saisit concomitamment à l'émission du titre.

17. En l'espèce, dès lors que l'ONIAM a choisi d'émettre deux titres exécutoires pour recouvrer la créance en lien avec la prise en charge de M. C... aux HCL, il n'est pas recevable à demander au juge, sur le fondement de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et postérieurement à l'émission de ces titres, la condamnation de la SHAM, assureur des HCL à lui verser les sommes de 11 297,50 euros et de 34 054 euros avec intérêts et capitalisation des intérêts.

18. Il résulte de ce qui précède que l'ONIAM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions indemnitaires.

S'agissant des pénalités :

19. Aux termes du cinquième alinéa de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique : " En cas de silence ou de refus explicite de la part de l'assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n'est pas assuré, le juge, saisi dans le cadre de la subrogation, condamne, le cas échéant, l'assureur ou le responsable à verser à l'office une somme au plus égale à 15 % de l'indemnité qu'il alloue. ".

20. D'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique que la pénalité prévue à cet article en cas de silence ou de refus de l'assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n'est pas assuré, ne peut être prononcée que par le juge. L'ONIAM ne peut donc, en l'état des dispositions applicables, émettre un titre exécutoire en vue du recouvrement de cette pénalité et doit, s'il entend qu'elle soit infligée, saisir la juridiction compétente d'une demande tendant au prononcé de la pénalité contre, selon le cas, l'assureur ou le responsable des dommages.

21. D'autre part, si l'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement l'extinction de la créance litigieuse au regard de la possibilité de régularisation par l'administration, la circonstance qu'un titre exécutoire émis par l'ONIAM pour le recouvrement des sommes versées aux victimes soit annulé ne permet pas, en l'absence de somme mise à la charge du débiteur, que la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la santé publique soit infligée à l'assureur. Par suite, dès lors que le titre exécutoire n° 607 a été annulé, l'ONIAM n'est pas fondé à demander que la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la santé publique soit infligée à l'assureur.

22. En revanche, s'agissant du titre exécutoire n° 588 qui n'est pas annulé, l'absence de toute proposition d'indemnisation par la SHAM justifie qu'il soit fait application de la pénalité prévue par les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique et que soit infligé à la SHAM, assureur des HCL, une pénalité correspondant à 10 % de la somme mise à sa charge par le titre en cause, soit la somme de 1 129 euros.

S'agissant des frais d'expertise :

23. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique : " (...) l'office est subrogé, à concurrence des sommes versées, dans les droits de la victime contre la personne responsable du dommage ou, le cas échéant, son assureur. Il peut en outre obtenir remboursement des frais d'expertise. ".

24. Dans le cadre du litige relatif à la contestation du titre exécutoire émis par l'ONIAM pour le recouvrement des sommes versées aux victimes, celui-ci peut solliciter, à titre reconventionnel, le remboursement des frais d'expertise exposés devant la CCI dès lors que la somme en litige n'a pas fait l'objet d'un état exécutoire. Par suite, conformément aux dispositions précitées, l'ONIAM peut obtenir, à titre reconventionnel, le remboursement des frais d'expertises qu'il a exposés devant la (CRCI) Rhône-Alpes pour un montant total de 870,66 euros et qui n'ont pas fait l'objet d'un état exécutoire.

S'agissant des frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SHAM, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'ONIAM, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme demandée par la SHAM au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La société hospitalière d'assurances mutuelles est condamnée à verser à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales la somme de 870,66 euros en remboursement des frais d'expertise.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 1905416 et 1905529 du 2 février 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 3 : Le surplus du jugement n° 1905416 et 1905529 du 2 février 2021 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Relyens Mutual Insurance, venant aux droits de la société hospitalière d'assurances mutuelles, et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Bentéjac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 février 2023.

La rapporteure,

C. Bentéjac

Le président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00986 - 21LY01030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00986
Date de la décision : 24/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques.

Responsabilité de la puissance publique - Recours ouverts aux débiteurs de l'indemnité - aux assureurs de la victime et aux caisses de sécurité sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Caroline BENTEJAC
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : JASPER AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-24;21ly00986 ?
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