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15/12/2022 | FRANCE | N°21LY00621

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 15 décembre 2022, 21LY00621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806071 - 1806072 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a constaté un non-lieu à statuer partiel en ce qui concerne les prélèvements sociaux et les majorations correspondantes et rejeté l

e surplus des conclusions de leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1806071 - 1806072 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a constaté un non-lieu à statuer partiel en ce qui concerne les prélèvements sociaux et les majorations correspondantes et rejeté le surplus des conclusions de leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Chareyre, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions demeurant à leur charge et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués par la SARL EFS conseils n'est pas rapportée par l'administration ;

- alors qu'ils ne disposaient pas de pouvoir décisionnaire au sein de la SARL EFS conseils et ne se sont pas comportés comme des gérants de fait, l'administration n'établit pas qu'ils avaient la qualité de maîtres de l'affaire ;

- l'administration n'établit pas qu'ils ont appréhendé les sommes en cause ;

- les factures émises par M. A..., relatives à l'achat de matériels dans l'intérêt de la société, ne procèdent pas d'une manœuvre frauduleuse de sorte que la majoration de 80 % prévue au c de l'article 1729 du code général des impôts ne peut être appliquée ;

- la majoration pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts ne peut être appliquée, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'ils auraient appréhendé les sommes en cause et qu'ils n'étaient pas titulaires d'une carte bancaire de la société.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL EFS conseils, créée le 6 octobre 2011, qui a eu pour activité la vente et l'installation de systèmes d'alarmes et d'énergies renouvelables jusqu'à sa mise en liquidation judiciaire le 24 février 2015 et dont Mme D... était la gérante et l'unique associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 6 octobre 2011 au 31 décembre 2013 à l'issue de laquelle l'administration a estimé que M. et Mme A..., respectivement, directeur technique et commercial et assistante " administration et direction des ventes " de cette société, étaient les maîtres de l'affaire et a imposé entre leurs mains, sur le double fondement du 1° de l'article 109-1 et de l'article 111 c) du code général des impôts les revenus distribués mis en évidence par ce contrôle. En conséquence de la réintégration de ces distributions dans leurs revenus imposables, M. et Mme A... se sont vu assigner, selon la procédure contradictoire, des compléments d'impôt sur le revenu au titre des années 2012 et 2013 qui, ainsi que les prélèvements sociaux corrélativement mis à leur charge, ont été assortis des majorations au taux de 40 % et de 80 % prévues au a) et au c) de l'article 1729 du code général des impôts. Par un jugement du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté un non-lieu à statuer partiel en ce qui concerne les prélèvements sociaux et majorations dégrevés en cours d'instance, a rejeté le surplus des conclusions de M. et Mme A... tendant à la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes. Ceux-ci relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'existence et le montant des distributions :

2. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : 1°) tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. (...) ".

3. Les compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, procèdent de l'imposition de sommes facturées par M. A... au titre de prestations fournies à la SARL EFS conseils comptabilisées en charges déductibles dont l'administration a estimé qu'elles étaient fictives, à des charges non engagées dans l'intérêt de cette société ainsi qu'à des charges non justifiées réintégrées dans les résultats imposables à l'impôt sur les sociétés que l'administration a regardées comme des revenus distribués. M. et Mme A... ayant régulièrement contesté les rectifications proposées, il appartient à l'administration fiscale, d'établir l'existence et le montant des bénéfices distribués par la société aux contribuables.

S'agissant des factures émises par M. B... A... :

4. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 28 avril 2015, que la SARL EFS conseils a porté en charges dans sa comptabilité des sommes correspondant à des factures émises par M. A.... L'administration fait valoir que ces dépenses ne pouvaient être déduites dès lors, d'une part, qu'à la date d'émission de ces factures, M. A... n'exerçait pas d'activité de vente à titre indépendant et n'était pas inscrit au registre du commerce et des sociétés de sorte qu'il n'était pas habilité à émettre des factures et, d'autre part, que les factures en cause ne correspondaient à aucune prestation réelle. Si les appelants soutiennent que les prestations facturées concernaient des biens précédemment acquis par une société dissoute dont M. A... était le gérant et font valoir que la société EFS conseils a revendu des biens de même nature sur des chantiers qu'elle a réalisés, ils ne contestent pas l'absence de qualité de M. A... pour établir des factures, une telle circonstance étant un indice suffisant pour mettre en doute la réalité de la prestation fournie. Au surplus, l'administration relève, sans être contredite, des incohérences entre la nature et les quantités des biens facturés par M. A... et ceux livrés aux clients de la société EFS conseils. Par suite, l'administration doit être regardée comme démontrant le caractère fictif des factures en cause. L'imputation en charges du montant de ces factures a ainsi indûment minoré le bénéfice de la SARL EFS conseils. L'administration était dès lors fondée à les réintégrer dans le résultat imposable et justifie l'existence et le montant des revenus distribués correspondants.

S'agissant des charges non engagées dans l'intérêt de la société :

5. L'administration a réintégré dans le résultat de la SARL EFS conseils des frais de téléphonie engagés pour le compte de M. A... avant qu'il ne soit salarié de cette société, des frais de restaurant, de vêtements, de pressing, de réparation et d'entretien d'un véhicule n'appartenant pas à la société, des cadeaux, l'achat de produits et d'une pompe à chaleur pour piscine ainsi que l'achat d'une fenêtre et de frais de travaux de vitrerie au motif que ces dépenses n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'exploitation. Si les appelants soutiennent que les frais de téléphonie au profit de M. A..., à hauteur de la somme de 2 944,04 euros, que la société a portée en charges, ont été exposés dans l'intérêt de l'entreprise en ce qu'il devait être joignable eu égard aux fonctions qu'il exerçait, ils ne contestent pas, ainsi que le relève l'administration, que les frais en cause ont été exposés avant que M. A... ne soit engagé dans l'entreprise le 1er octobre 2012. Les requérants ne contestent pas que les autres dépenses n'ont pas été supportées dans l'intérêt de l'entreprise. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les sommes en cause ont été réintégrées au résultat de la société si bien que l'administration justifie l'existence et le montant de revenus distribués correspondants.

S'agissant des charges non justifiées :

6. L'administration a réintégré dans le résultat imposable de la SARL EFS conseils des charges non justifiées au nombre desquelles figurent notamment des frais de déplacement de M. A... et qui sont seuls contestés par les appelants. Pour expliquer ces frais, M. et Mme A... se bornent à faire état de tableaux concernant les mois de janvier, mars et juillet 2013, récapitulant un certain nombre de déplacements, sans au demeurant préciser le nom du salarié concerné par ceux-ci, et de plannings hebdomadaires du service commercial, indiquant les lieux des chantiers visités. Le ministre fait toutefois valoir, sans être contredit, que les mentions portées sur ces tableaux établis par la société, qui ne concernent qu'une partie de la période vérifiée, présentent des incohérences entre eux et ne permettent pas de rapprocher les déplacements effectués par M. A... en lien avec les chantiers de l'entreprise. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a pu regarder la réalité et le montant de ces charges comme non établis et procéder à leur réintégration.

En ce qui concerne l'appréhension des revenus distribués :

7. En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable, qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

8. Pour retenir que M. et Mme A..., qui faisaient l'objet d'une imposition commune, devaient être regardés comme les maîtres de l'affaire et avaient, à ce titre, appréhendé les distributions effectuées par la SARL EFS conseils, l'administration soutient qu'au cours des années en litige, ils ont exercé la direction de fait de la société, en lieu et place de la gérante de droit et associée unique.

9. Il résulte, en premier lieu, de l'instruction, notamment de notes de services et de courriers électroniques, dont la teneur reprise dans la proposition de rectification n'est pas sérieusement contestée, que M. A..., en sa qualité de directeur technique et commercial de la SARL EFS conseils, était l'unique interlocuteur et le seul décisionnaire pour toutes les questions d'ordre technique et de service après-vente tandis que son épouse, dont une note indique qu'elle exerçait les fonctions de directrice administrative, s'est vue confier l'intégralité de la gestion administrative, y compris dans les relations de la société avec son comptable. S'il ne ressort pas de ces éléments que M. A... a eu, dans sa sphère de compétence de directeur technique et commercial, des pouvoirs plus importants que ceux normalement dévolus à un cadre salarié de son niveau, il est établi que Mme A..., qui a été embauchée en qualité d'assistante administrative des ventes, a exercé, dans les faits, des responsabilités de directrice administrative et financière de la SARL EFS conseils allant au-delà de la fonction d'assistante qu'elle était censée assurer en vertu de son contrat de travail. Il est constant qu'elle était d'ailleurs officiellement présentée en interne comme investie des fonctions de directrice administrative de la société au cours de la période vérifiée.

10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction et notamment d'échanges de courriels en 2013 entre Mme A... et le cabinet comptable de la société et un fournisseur, de notes de service prises en 2013, signées pour certaines par la gérante et pour d'autres " la direction " avec des signatures sans nom, la présentant en interne comme l'unique interlocutrice de l'équipe technique, comme la seule responsable de l'administration sociale, fournisseurs, salaires, acomptes et tous documents administratifs et comme la directrice administrative de la SARL EFS conseils et l'enregistrement en comptabilité de contraventions à son nom en 2013, que Mme A..., qui a été embauchée par la SARL EFS conseils à compter du 1er octobre 2014, a exercé son activité dans la société avant même d'avoir été engagée. La prise en charge par la SARL EFS conseils de frais de téléphonie à partir de décembre 2011 établit que M. A..., embauché à compter du 1er octobre 2012, a, lui aussi, exercé une activité pour le compte de la SARL EFS conseils avant son engagement en qualité de salarié.

11. Il résulte en troisième lieu de l'instruction que Mme A... a été, avant la création de la SARL EFS conseils dont Mme D... est la gérante et l'associée unique, la gérante de la SARL Koream, dont Mme D... était, à l'époque, salariée avec des fonctions d'assistante de direction, société qui exerçait la même activité que la SARL EFS conseils et a repris des contrats de cette société, jusqu'au 24 janvier 2008, et qu'après cette date, M. A... l'a remplacée à la direction de la SARL Koream, ce jusqu'au 3 novembre 2011, date de la mise en liquidation judiciaire de cette société, quelques jours seulement après la création de la SARL EFS conseils.

12. En quatrième lieu, si les requérants produisent, pour la première fois en appel, quelques courriers électroniques émanant de Mme D..., ceux-ci, eu égard à leur teneur, ne permettent pas de tenir pour établi que la gérante statutaire était impliquée dans la gestion de la société et exerçait un quelconque contrôle sur la marche de l'affaire, s'agissant notamment des relations avec la clientèle, les fournisseurs et le personnel. Celle-ci, dont il apparaît qu'elle a eu une activité négligeable, a d'ailleurs reconnu, au cours du recours hiérarchique, n'avoir aucune compétence technique en matière d'énergies renouvelables. Enfin, la rémunération mensuelle de M. A..., d'un montant d'environ 3 500 euros, était supérieure à celle de la gérante statutaire qui était d'environ 1 400 euros.

13. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. et Mme A... exerçaient des pouvoirs plus importants que ceux dévolus à des cadres salariés dans une entreprise de taille moyenne et que, par leur participation étroite à la gestion de la société, ils doivent être regardés comme en étant gérants de fait. S'il est constant que Mme D... était la seule détentrice de la signature sociale sur le compte bancaire de la société, il résulte de l'instruction que M. et Mme A... avaient la disposition de la carte bancaire de la SARL EFS conseils au moyen de laquelle ils ont payé des dépenses personnelles en Corse, où ils avaient une résidence secondaire, et effectué des retraits d'espèces enregistrés en comptabilité comme des notes de frais de M. A....

14. Eu égard à l'ensemble de ces éléments précis et concordants tirés du fonctionnement de l'entreprise, l'administration établit non seulement que M. et Mme A... ont disposé conjointement des pouvoirs les plus étendus au sein de la SARL EFS conseils dont ils ont assuré, ensemble, la direction effective aux lieu et place de la gérante statutaire et mais aussi, compte tenu du rôle négligeable de la gérante statutaire et du fait qu'elle était l'unique détentrice du capital de la société, ce qui a permis à M. A... de facturer à la SARL EFS conseils des prestations fictives ne correspondant à aucun chantier identifié, enregistrées en comptabilité entre janvier 2012 et septembre 2013, que les intéressés ont été en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui leur sont propres. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'administration a pu à bon droit regarder M. et Mme A..., soumis à une imposition commune, comme les seuls maîtres de l'affaire. Elle apporte, ainsi, la preuve de l'appréhension par les intéressés des revenus distribués par la SARL EFS conseils.

Sur le bien-fondé des majorations :

15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses (...) ".

En ce qui concerne la majoration pour manœuvres frauduleuses :

16. Les pénalités pour manœuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle.

17. L'administration a appliqué la majoration de 80 % prévues par les dispositions citées au point 11 aux rehaussements dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers issus de la comptabilisation de factures fictives par la SARL EFS conseils. Il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'il est établi que M. A... a émis des factures qui ne correspondaient à la livraison d'aucun matériel alors, au surplus, qu'il n'était pas habilité à le faire. Il suit de là que M. et Mme A... ont mis en œuvre un procédé ayant pour but d'égarer l'administration dans l'exercice de son pouvoir de contrôle. Par suite, l'administration établit l'existence de manœuvres frauduleuses de nature à justifier, par application de l'article 1729 du code général des impôts, la majoration de 80 % dont a été assorti le montant des distributions issues de ces factures.

En ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré :

18. La pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance intentionnelle par le contribuable de ses obligations déclaratives.

19. Pour établir ce manquement délibéré, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations, et d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt. Si l'administration se fonde également sur des éléments tirés du comportement du contribuable pendant la vérification, la mention d'un tel motif, qui ne peut en lui-même justifier l'application d'une telle pénalité, ne fait pas obstacle à ce que le manquement délibéré soit regardé comme établi dès lors que les conditions rappelées ci-dessus sont satisfaites.

20. Pour appliquer la majoration de 40 % pour manquement délibéré aux revenus provenant de charges non engagées dans l'intérêt de la SARL EFS conseils ainsi que de charges comptabilisées par cette société et non justifiées, l'administration a retenu que M. et Mme A..., en leur qualité de maîtres de l'affaire de la société, ne pouvaient ignorer l'existence et le montant des revenus qu'ils avaient perçus. Dans ces conditions, eu égard à ce qui a été dit précédemment, l'administration doit être regardée comme établissant la volonté des contribuables d'éluder les impositions dont ils étaient redevables, et par suite, comme justifiant l'application des majorations en litige aux rappels d'imposition correspondant.

21. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. Leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente assesseure,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022.

Le rapporteur,

F.-X. Pin

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00621


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00621
Date de la décision : 15/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES. - REVENUS DISTRIBUÉS. - NOTION DE REVENUS DISTRIBUÉS. - IMPOSITION PERSONNELLE DU BÉNÉFICIAIRE. - PRÉSOMPTION DE DISTRIBUTION (ART. 109, 1-1° CGI) - MAÎTRES DE L'AFFAIRE - PREUVE APPORTÉE EN L'ESPÈCE - COUPLE DE SALARIÉS.

19-04-02-03-01-01-02 Epoux salariés d'une société disposant conjointement des pouvoirs les plus étendus au sein de la société dont ils ont assuré, ensemble, la direction effective aux lieu et place de la gérante statutaire devant être regardés comme les gérants de fait de cette société et, eu égard aux éléments précis et concordants tirés du fonctionnement de l’entreprise, comme ayant été en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui leur sont propres compte tenu du rôle négligeable de la gérante statutaire et unique détentrice du capital dans la gestion de la société. Preuve apportée, en l'espèce, que les époux, soumis à une imposition commune, se sont comportés en maîtres de l'affaire quand bien même la gérante statutaire était la seule détentrice de la signature sociale sur le compte bancaire de la société.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 26 novembre 2003, X., n°255532, C, s'agissant d'un salarié jouissant d'une complète autonomie, disposant du compte bancaire de la société et étant le seul interlocuteur des clients, regardé comme le seul maître de l'affaire....

[RJ2]

CE (na) 16 mars 2020, 433098, refus d'admission d'un pourvoi contre un arrêt jugeant que c'est à bon droit que l'administration a pu regarder deux membres d'un même foyer fiscal comme maîtres de l'affaire....

[RJ3]

Comp 2ème ch., 7 avril 2022, Y., 20LY02893, C (devenu définitif) jugeant que ni le fait qu'une contribuable possède avec son époux la totalité du capital d'une société dont elle détient elle-même 99 % des parts, ni le fait qu'elle et son époux ont perçu des dividendes de la société ne suffisent à établir, en l'absence d'éléments tirés du fonctionnement de l'entreprise permettant de considérer qu'elle disposait seule ou conjointement avec son époux des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, que l'intéressée, qui n'en était pas la gérante statutaire, ou le couple se comportait en maître de l'affaire.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : CHAREYRE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-12-15;21ly00621 ?
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