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13/10/2022 | FRANCE | N°21LY03415

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 13 octobre 2022, 21LY03415


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Cantal, en date du 7 décembre 2020, portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2100051 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Yermia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Cantal, en date du 7 décembre 2020, portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2100051 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Yermia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen dans les mêmes conditions de délai et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, somme à verser à son conseil, à charge pour celui-ci de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 6, 5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et des dispositions des articles L. 313-15 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- saisi d'une demande d'admission au séjour le préfet était tenu, en application des stipulations du Protocole III de l'accord franco-algérien d'envisager les titres de séjour auxquels elle pouvait prétendre, en l'espèce du fait de son inscription scolaire, le certificat de résidence d'un an portant la mention " étudiant " dont elle remplissait les conditions sans que le défaut de visa de long séjour lui soit opposable compte tenu de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance et du fait qu'elle est entrée mineure en France en 2017, ou de se prononcer sur son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle est stéréotypée et entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2021, le préfet du cantal conclut au rejet de la requête.

Il expose qu'aucun des moyens soulevés par la requérant n'est fondé.

Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Conesa-Terrade, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 décembre 2020, le préfet du Cantal a refusé de délivrer un titre de séjour et a obligé Mme B..., ressortissante algérienne née le 11 octobre 2021, à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par la présente requête, Mme B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de défaut d'examen sérieux de la situation de la requérante ne sont pas établis comme l'ont jugé les premiers juges dont les motifs ne sont pas sérieusement contestés par la requérante. Dès lors, il y a lieu pour la cour de les adopter afin d'écarter ces moyens repris en appel.

3. Aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence portant la mention ''vie privée et familiale'' est délivré de plein droit : (...) 5 Au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. ". Aux termes du premier alinéa du titre III du protocole annexé à cet accord : " les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention "étudiant" ou "stagiaire" " . Les stipulations de l'accord franco-algérien régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. L'autorité administrative compétente peut, toutefois, délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

5. Il ressort de la lecture même de l'arrêté du 7 décembre 2020 que pour rejeter, par la décision contestée, la demande présentée par courrier le 8 juillet 2020 par Mme B... tendant à la délivrance d'un titre de séjour " pour travailler ", assortie d'un rapport de l'Aide sociale à l'enfance sollicitant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Cantal a relevé que l'intéressée, confiée à l'Aide sociale à l'enfance après l'âge de 16 ans, ne remplissait pas les conditions du 2°bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui régit les conditions dans lesquelles peut être délivrée la carte de séjour mention " vie privée et familiale " à l'étranger recueilli par l'Aide sociale à l'enfance au plus tard à l'âge de 16 ans.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., célibataire et sans enfant à la date de la décision contestée, a déclaré être entrée en France en août 2017, avant l'âge de seize ans, alors qu'elle était en voyage avec son père en Espagne, et aurait été, dans un premier temps, hébergée chez un oncle à Aurillac, avant d'être confiée à l'Aide sociale à l'enfance du Cantal après l'âge de seize ans, par une ordonnance de placement provisoire du 30 avril 2019, puis par un jugement du Juge des enfants du 10 septembre 2019. Le rapport de la structure d'accueil indique que " son père serait reparti en Algérie et aurait organisé sa venue en France en la confiant à un automobiliste qui l'aurait transportée jusqu'à Marseille ". Il résulte de la lecture de l'arrêté contesté que le refus d'admission au séjour est motivé, d'une part, par la circonstance que les éléments recueillis par la consultation du fichier INFOVISA faisaient apparaître que l'intéressée, ainsi que ses parents, avaient bénéficié de plusieurs visas de court séjour pour se rendre sur le territoire français, avant et après son placement à l'ASE, conduisant le préfet du Cantal à douter de la sincérité de ses déclarations, et d'autre part, au regard du caractère récent de son entrée alléguée sur le territoire français, qu'elle n'apportait pas la preuve de liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables en France, et qu'elle n'était pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie où demeurent ses parents. Ces circonstances n'étant pas sérieusement contestées, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, en refusant de lui délivrer un certificat de résidence, le préfet du Cantal n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui fondent son refus, ni méconnu les stipulations de l'article 6 5) de l'accord franco-algérien susvisé, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur un fondement précis, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet devait examiner tous les titres auxquels la requérante était susceptible de prétendre doit être écarté.

8. Dans la mesure où l'intéressée n'a pu justifier d'une formation professionnellement qualifiante de moins de six mois à la date de sa majorité, les pièces jointes à sa requête ne démontrant pas réalité de son inscription au lycée Jean Mermoz puisqu'il s'agit d'un dossier d'inscription complété manuellement par Mme B... dont il n'est pas établi qu'il aurait été validé, et le contrat d'apprentissage en CAP vente signé en septembre 2019 étant devenu caduc en l'absence d'autorisation de travail, elle n'entrait en tout état de cause pas dans les conditions d'admission exceptionnelle au séjour prévue par les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Ayant relevé que l'intéressée ne présentait aucun élément de nature à justifier l'octroi d'un titre de séjour, le préfet du Cantal a pu dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de Mme B... faute pour l'intéressée de faire valoir aucune considération humanitaire, ni aucun motif exceptionnel, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points précédents, refuser son admission exceptionnelle au séjour.

10. Pour écarter dans le cadre de la présente instance, les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français, il y a lieu pour la cour d'adopter les motifs retenus par les premiers juges, à l'encontre desquels la requérante ne présente aucune critique sérieuse.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Cantal.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022.

La rapporteure,

E. Conesa-Terrade

Le président,

F. PournyLa greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 21LY03415 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03415
Date de la décision : 13/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle CONESA-TERRADE
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : YERMIA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-13;21ly03415 ?
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