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06/10/2022 | FRANCE | N°21LY01846

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 octobre 2022, 21LY01846


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'enjoindre à l'administration fiscale de lui communiquer les relevés de comptes bancaires obtenus des établissements bancaires sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions supplémentaires, de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803459 du 6 avril 2021, le tribu

nal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'enjoindre à l'administration fiscale de lui communiquer les relevés de comptes bancaires obtenus des établissements bancaires sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions supplémentaires, de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1803459 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2021, M. A..., représenté par Me Plahuta, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'enjoindre à l'administration fiscale de lui communiquer les relevés de comptes bancaires obtenus des établissements bancaires sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions supplémentaires ;

3°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas eu connaissance de la notification de la proposition de rectification ;

- l'administration a refusé de lui communiquer les relevés bancaires obtenus par la vérificatrice auprès d'établissements bancaires en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- il a été privé des moyens de combattre la présomption que l'administration lui oppose, l'administration refusant de lui communiquer les relevés des comptes bancaires lui permettant de démontrer que la somme en cause ne procède pas d'un trafic de stupéfiants ;

- la somme de 116 450 euros ne relève pas du champ d'application de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts ; l'administration n'établit pas que la somme litigieuse serait un produit direct de l'une des cinq infractions visées au 2 de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts ; les sommes proviennent des rémunérations salariales antérieures.

Par mémoire, enregistré le 25 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 5 novembre 2012, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Bonneville a informé l'administration fiscale en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales de la découverte, lors d'une perquisition effectuée le 24 septembre 2012 dans le cadre d'une information judiciaire ouverte pour acquisition, détention, transport, offre ou cession non autorisées de stupéfiants, d'une somme en espèces de 116 450 euros dans un coffre loué par M. A... dans un agence bancaire de Cluses (Haute-Savoie). M. A... a fait l'objet, à partir d'octobre 2013, d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 2010, 2011 et 2012 à l'issue duquel l'administration a taxé cette somme sur le fondement de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts en tant que revenu présumé tiré d'une activité illicite. En conséquence, M. A... a été soumis à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de l'année 2012. Les impositions mises à sa charge ont été assorties de la majoration de 80 % prévue à l'article 1758 du code général des impôts en cas d'application de l'article 1649 quater-0 B bis du code. M. A... relève appel du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, une notification de redressements, pour être régulière, doit être effectuée à la dernière adresse communiquée par le contribuable à l'administration fiscale. En cas de changement de domicile, il appartient au contribuable d'établir qu'il a fait les diligences nécessaires pour informer l'administration de sa nouvelle adresse.

3. M. A... soutient qu'il n'a pas été destinataire de la proposition de rectification. Toutefois, l'administration produit un avis de réception du courrier recommandé contenant la proposition de rectification du 13 février 2014 qui lui a été adressé indiquant que le pli a été distribué le 17 février 2014. Cet avis de réception comporte le nom et prénom de l'intéressé ainsi que l'adresse de distribution qui correspond à la dernière adresse communiquée par le contribuable à l'administration. Si M. A... soutient également que la signature figurant sur l'avis de réception n'est pas la sienne, il ne l'établit pas. Dès lors, le moyen tiré de la notification irrégulière de la proposition de rectification doit être écarté.

4. En second lieu, il résulte des dispositions de L. 76 B du livre des procédures fiscales que le droit pour le contribuable de demander la copie des documents que l'administration a obtenus en exerçant son droit de communication auprès de tiers, à l'occasion d'une procédure de contrôle et dont sont issus des éléments qu'elle a effectivement utilisés pour fonder les rectifications d'impôt envisagées, ne peut être mis en œuvre qu'avant la mise en recouvrement des impositions, laquelle résulte de l'émission par le comptable public compétent d'un titre de perception rendu exécutoire dans les conditions réglementaires. Il résulte de l'instruction que M. A... a demandé tardivement, le 17 juin 2016, la communication des relevés bancaires obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice du droit de communication auprès des établissements bancaires en charge de ses comptes, soit après que les impositions en litige ont été mises en recouvrement le 30 avril 2014. En outre, M. A..., auquel l'administration a régulièrement notifié, ainsi qu'il a été dit au point précédent, une proposition de rectification motivée lui offrant un délai de trente jours pour présenter ses observations, a été mis à même de produire tout élément utile pour contester la taxation envisagée. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il a été privé des moyens de combattre la présomption de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts ne peut qu'être écarté.

Sur l'application de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts :

5. Aux termes de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsqu'il résulte des constatations de fait opérées dans le cadre d'une des procédures prévues aux articles 53, 75 et 79 du code de procédure pénale et que l'administration fiscale est informée dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101 ou L. 135 L du livre des procédures fiscales qu'une personne a eu la libre disposition d'un bien objet d'une des infractions mentionnées au 2, cette personne est présumée, sauf preuve contraire appréciée dans le cadre des procédures prévues aux articles L. 10 et L. 12 de ce même livre, avoir perçu un revenu imposable équivalent à la valeur vénale de ce bien au titre de l'année au cours de laquelle cette disposition a été constatée. / La présomption peut être combattue par tout moyen et procéder notamment de l'absence de libre disposition des biens mentionnés au premier alinéa, de la déclaration des revenus ayant permis leur acquisition ou de l'acquisition desdits biens à crédit. / 2. Le 1 s'applique aux infractions suivantes : a. crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-39 du code pénal ; (...) ".

6. Le régime d'imposition prévu par les dispositions de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts ne vise pas à imposer les profits issus de la revente ou du transport de produits illicites, mais à taxer le revenu imposable qui, correspondant à la valeur vénale des biens visés par ces dispositions, est présumé avoir été perçu par les personnes qui les détiennent et sont coupables des infractions mentionnées par ces dispositions. Il appartient alors au contribuable de combattre cette présomption, en établissant par exemple qu'il n'a pas eu en réalité la disposition des biens ou des sommes d'argent en cause.

7. M. A... fait valoir que l'administration n'établit pas que la somme de 116 450 euros serait le produit direct de l'une des cinq infractions visées au 2 de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts et soutient qu'elle provient de rémunérations salariales antérieures.

8. Aux termes de l'article 222-37 du code pénal : " Le transport, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition ou l'emploi illicites de stupéfiants sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 7 500 000 euros d'amende. ".

9. Il résulte de l'instruction que, par un jugement du 3 octobre 2013, le tribunal correctionnel de Bonneville a déclaré M. A... coupable des faits de transport, détention, offre ou cession et acquisition de stupéfiants entre septembre 2009 et septembre 2012 et a ordonné la confiscation de l'intégralité des scellés. Se fondant sur les dispositions précitées, l'administration fiscale a réintégré à son revenu imposable la valeur de la somme en espèces de 116 450 euros saisie lors de la perquisition et mise sous scellés. En se bornant à soutenir que cette somme provient de rémunérations salariales antérieures sans d'ailleurs produire aucun élément de nature à justifier cette allégation alors qu'il a reconnu dans le procès-verbal de première comparution que l'argent déposé dans ce coffre provenait en partie du trafic pour lequel il a été condamné. M. A... ne combat pas utilement les constatations selon lesquelles il a eu la libre disposition de cette somme. C'est dès lors par une exacte application de ces dispositions que son revenu imposable a été évalué à 116 450 euros au titre de l'année 2013.

10. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'enjoindre à l'administration de faire droit à sa demande de communication de M. A..., que celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2022.

La rapporteure,

R. Caraës

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaire de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01846


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01846
Date de la décision : 06/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-01-03 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Questions communes.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : PLAHUTA B.

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-06;21ly01846 ?
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