La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/09/2022 | FRANCE | N°22LY00675

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 27 septembre 2022, 22LY00675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) La Grande Maison a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 23 juin 2020 du délégué de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dans le département du Rhône portant retrait et reversement de sa subvention, ainsi que les décisions des 17 juillet et 23 octobre 2020 rejetant ses recours gracieux, d'enjoindre à l'ANAH à lui verser le solde de sa subvention et de la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation des préjudices subis.



Par un jugement n° 2006662 du 29 décembre 2021, le tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société civile immobilière (SCI) La Grande Maison a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 23 juin 2020 du délégué de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) dans le département du Rhône portant retrait et reversement de sa subvention, ainsi que les décisions des 17 juillet et 23 octobre 2020 rejetant ses recours gracieux, d'enjoindre à l'ANAH à lui verser le solde de sa subvention et de la condamner à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation des préjudices subis.

Par un jugement n° 2006662 du 29 décembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 février 2022, la SCI La Grande Maison, représentée par la Selarl Abeille et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision de retrait et de reversement du 23 juin 2020 ainsi que les décisions des 17 juillet et 23 octobre 2020 rejetant ses recours administratifs ;

3°) de mettre à la charge de l'ANAH le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés du vice et du détournement de procédure ; il est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- la décision litigieuse est entachée de vices de procédure ; elle méconnaît les articles 17-B et 21 des règles générales de l'ANAH, aucun contrôle sur place n'ayant précédé le retrait en litige et la commission locale d'amélioration de l'habitat n'ayant pas été préalablement consultée ; les observations recueillies par l'ANAH dans le cadre de la procédure contradictoire préalable n'ont fait l'objet d'aucune analyse et n'ont pas été prises en considération ; la procédure contradictoire préalable au retrait n'a été que de pure forme ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;

- la décision litigieuse est entachée d'un détournement de procédure et traduit une attitude déloyale de l'ANAH dans un seul but répressif ; elle n'a commis aucune manœuvre frauduleuse ni effectué de fausses déclarations susceptibles de fonder le retrait de sa subvention ;

- la décision litigieuse est entachée d'erreur d'appréciation et est disproportionnée.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 ;

- l'arrêté du 1er août 2014 portant approbation du règlement général de l'Agence nationale de l'habitat ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Claire Burnichon, première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Bado, représentant la SCI La Grande Maison.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI La Grande Maison a sollicité l'attribution d'une subvention auprès de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) pour un logement à usage locatif dont elle est propriétaire à L'Arbresle. Une subvention d'un montant de 27 726 euros lui a été attribuée le 11 février 2019. Par décision du 23 juin 2020, l'ANAH lui a retiré le bénéfice de cette subvention et a ordonné le reversement des sommes déjà versées pour non-respect de ses engagements. Par un courrier du 10 juillet 2020, la SCI La Grande Maison a formé contre la décision du 23 juin 2020 un recours gracieux, qui a été rejeté par une décision du 17 juillet suivant. La SCI a aussi formé un recours hiérarchique par courrier du 31 août 2020, qui a été rejeté par décision de la directrice générale de l'ANAH du 23 octobre 2020. La SCI La Grande Maison relève appel du jugement du 29 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 juin 2020 et des décisions portant rejet de ses recours administratifs.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la société requérante soutient que les premiers juges ont omis de répondre aux moyens tirés du vice de procédure et du détournement de procédure, il ressort toutefois des écritures de première instance que ces moyens n'étaient pas soulevés devant eux. Par ailleurs, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble de l'argumentaire de la société La Grande Maison, en identifiant dans les écritures de première instance un moyen tiré de ce que la décision en litige a prononcé à tort le retrait et le reversement de la subvention pour absence de violation des dispositions du décret du 30 janvier 2002 et en écartant comme inopérant une large part de l'argumentaire de la société requérante, a suffisamment répondu aux points 4 et 5 du jugement au moyen soulevé. Son jugement n'est dès lors entaché d'aucune omission ni d'aucune insuffisance de motivation. Par ailleurs, la contestation de l'appréciation portée par les premiers juges sur la situation de la société requérante relève du bien-fondé et non de la régularité du jugement.

Sur la décision du 23 juin 2020 :

3. En premier lieu, la SCI La Grande maison soutient pour la première fois en appel que la décision en litige est insuffisamment motivée et a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'ANAH a conditionné la visite de contrôle à la location de l'appartement en méconnaissance de l'article 17-B du règlement de l'ANAH et que ce retrait est intervenu en méconnaissance de l'article 21 du même règlement qui prévoit une consultation préalable de la commission locale d'amélioration de l'habitat. Toutefois, la société requérante n'avait invoqué en première instance que des moyens de légalité interne. Par suite, les moyens de légalité externe tirés du défaut de motivation et du vice de procédure relèvent d'une cause juridique nouvelle en appel et sont irrecevables.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 321-21 du code de la construction et de l'habitation : " Le retrait et le reversement total ou partiel peuvent également être prononcés en cas de non-respect des prescriptions de la présente section ou des conventions conclues en application des articles L. 321-4 et L. 321-8, ou de toute autre convention liée au bénéfice des aides de l'agence, selon les modalités fixées par le règlement général de l'agence (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 15-A du règlement général de l'ANAH : " Les logements pour lesquels la subvention est accordée doivent (...), conformément à l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, répondre aux caractéristiques de décence ", lesquelles sont notamment définies à l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains : " Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires : / (...) 7. Les pièces principales, au sens du troisième alinéa de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation, bénéficient d'un éclairement naturel suffisant et d'un ouvrant donnant à l'air libre ou sur un volume vitré donnant à l'air libre ".

5. Pour retirer à la SCI " La Grande maison " le bénéfice de la subvention qui lui avait été initialement accordée, l'ANAH s'est fondée sur les dispositions précitées de l'article R. 321-21 du code de la construction et de l'habitation et sur la circonstance que le logement en cause ne respectait pas, s'agissant de la création d'une pièce de vie aveugle louée en tant que chambre, les caractéristiques de décence définies dans le décret susvisé du 30 janvier 2002.

6. En signant la convention type avec l'ANAH le 23 février 2018, la société requérante s'est engagée à ce que le logement loué et dont les travaux de rénovation ont été subventionnés, respecte les caractéristiques de décence définies dans le décret du 30 janvier 2002. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle a procédé à la mise en location d'un logement de type F3 comportant une pièce de vie aveugle créée et louée en tant que chambre, en méconnaissance de ses engagements. Les circonstances que cette pièce dispose de fenêtrons donnant sur la pièce de vie et qu'elle dispose d'une ventilation mécanique ne suffisent pas à considérer que le logement était conforme aux caractéristiques de décence rappelées ci-dessus.

7. En troisième lieu, si la société requérante fait état de nombreux dysfonctionnements ou malentendus avec la maîtrise d'œuvre entre la conception du projet et la demande de subvention et précise qu'elle ignorait la nécessité de supprimer cette troisième pièce au moment du dépôt de la demande de subvention alors qu'elle n'a pu bénéficier d'une visite de contrôle de l'ANAH avant la mise en location qui lui aurait permis de lever ces malentendus, ces circonstances sont sans incidence sur le bien-fondé de la décision.

8. En quatrième lieu, la subvention en litige étant accordée globalement pour la rénovation d'un seul appartement, la société bénéficiaire ne saurait invoquer un droit à un paiement proportionnel, en cas d'exécution partielle des travaux convenus. Par suite, la SCI La Grande Maison n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige de retrait et de reversement serait entachée d'erreur d'appréciation ou de disproportion.

9. En dernier lieu, alors que le motif de la fraude n'est pas le fondement de la décision de retrait, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de l'absence de démarche frauduleuse ni à soutenir que l'ANAH a entaché sa décision d'un détournement de procédure en poursuivant un objectif répressif à son égard.

10. Il résulte de ce qui précède que la SCI La Grande Maison n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il suit de là que ses conclusions aux fins d'annulation doivent être rejetées et par voie de conséquences ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI La Grande Maison est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI La Grande Maison et à l'Agence nationale de l'habitat.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, présidente,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.

La rapporteure,

C. Burnichon La présidente,

M. A...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY00675


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00675
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

38-03-03-01 Logement. - Aides financières au logement. - Amélioration de l'habitat. - Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL ABEILLE et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-27;22ly00675 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award