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27/09/2022 | FRANCE | N°21LY00341

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 27 septembre 2022, 21LY00341


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le maire de Teyssières, agissant au nom de l'Etat, a retiré l'arrêté du 14 décembre 2017 leur refusant la délivrance d'un permis de construire en vue de la construction d'une piscine et d'une structure attenante, et a refusé de nouveau de délivrer le permis sollicité.

Par un jugement n° 1804187 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande

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Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 février 2021, M. B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le maire de Teyssières, agissant au nom de l'Etat, a retiré l'arrêté du 14 décembre 2017 leur refusant la délivrance d'un permis de construire en vue de la construction d'une piscine et d'une structure attenante, et a refusé de nouveau de délivrer le permis sollicité.

Par un jugement n° 1804187 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 février 2021, M. B... D... et Mme A... C..., épouse D..., représentés par la Selarl Eydoux Modelski Bastille Avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 décembre 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 18 janvier 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Teyssières la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté en litige doit être regardé comme procédant au retrait du permis tacite dont ils bénéficiaient le 19 décembre 2017 ;

- l'arrêté du 14 décembre 2017 n'était pas entaché d'illégalité, la qualité du signataire de l'acte pouvant être aisément identifiée ;

- l'arrêté du 18 janvier 2018 est insuffisamment motivé ;

- le terrain est situé en continuité de l'urbanisation existante, de sorte que le motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme est infondé ;

- en refusant de délivrer le permis de construire au motif que le projet méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire, enregistré le 7 avril 2022, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'elle s'en rapporte, s'agissant de la réponse aux moyens soulevés en appel, aux écritures de première instance du préfet de la Drôme.

Par courrier en date du 29 juin 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre l'arrêté du 18 janvier 2018 en tant qu'il retire le précédent refus du 14 décembre 2017, qui constituent dans cette mesure des conclusions nouvelles en appel.

Par mémoire enregistré le 1er juillet 2022, M. et Mme D... ont présenté leurs observations en réponse au moyen.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Eydoux, représentant M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D... ont déposé le 19 octobre 2017 une demande de permis de construire en vue de régulariser la construction d'une piscine et d'une structure en bois attenante, sur un terrain situé dans le hameau d'Alençon, sur la commune de Teyssières. Par un arrêté du 14 décembre 2017, qui doit être regardé, compte tenu de sa date de notification, comme procédant au retrait du permis tacite dont bénéficiaient les pétitionnaires, le maire de la commune, agissant au nom de l'Etat, a refusé de délivrer le permis de construire sollicité. Par un arrêté du 18 janvier 2018, le maire a, d'une part, retiré ce premier arrêté de retrait de permis tacite et, d'autre part, refusé à nouveau de délivrer le permis de construire. Cet arrêté, en tant qu'il prononce le retrait de l'arrêté du 14 décembre 2017 est devenu définitif, faute d'avoir été contesté. Les requérants, qui précisent leurs conclusions dans leurs observations produites en réponse au moyen d'ordre public soulevé par la Cour, relèvent appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 18 janvier 2018, en tant seulement qu'il refuse de leur délivrer un permis de construire.

2. Pour refuser de délivrer ce permis de construire, le maire de Teyssières s'est fondé, d'une part, sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme applicables dans les communes situées en zone de montagne, d'autre part, sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en raison de l'existence de risques liés à des mouvements de terrain et à l'absence de prise en compte des eaux de ruissellement.

3. En premier lieu, aux termes de l'article L 122-5 du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes, ainsi que de la construction d'annexes, de taille limitée, à ces constructions, et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. " Aux termes de l'article L. 122-5-1 du même code : " Le principe de continuité s'apprécie au regard des caractéristiques locales de l'habitat traditionnel, des constructions implantées et de l'existence de voies et réseaux. "

4. Il ressort des pièces du dossier que le lieu-dit hameau d'Alençon où s'implante le projet est constitué de quelques constructions constituant un groupe de constructions existant, au sens des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme. Si la piscine et la structure attenante sont séparées de la construction la plus proche, distante de onze mètres, par un étroit chemin rural en terre, ce chemin, par ses caractéristiques, ne saurait constituer une rupture d'urbanisation. Dans ces conditions, le projet s'implante en continuité avec le groupe de constructions existant. Par suite, le motif tiré de ce que le projet méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme est entaché d'illégalité.

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

6. En vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modification nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

7. D'une part, le maire de Teyssières a fait état de la pente du terrain et de mouvements de terrain recensés dans le secteur. Toutefois, ces mouvements de terrain ont été constatés sur un secteur distant de plus de deux cent mètres, sur un autre versant, sans qu'aucun élément ne soit produit par l'Etat en défense justifiant de ce que, en raison de la nature des sols sur le terrain en cause, de tels mouvements pourraient y survenir, ni d'ailleurs que des dispositions législatives ou règlementaires y soumettraient les projets de construction à une étude de sol préalable. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le bloc de béton soutenant la piscine projetée doit être installé sur une plateforme préexistante, constituée selon la notice de la demande, d'une roche stable et homogène. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet serait affecté par un risque de glissement de terrain.

8. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'évacuation des eaux résiduelles de la piscine pourrait présenter, compte tenu de la configuration des lieux, un danger pour la sécurité publique, alors même que le terrain est situé entre deux chemins de terre ouverts à la circulation publique. Par ailleurs, et alors que les requérants font valoir qu'ils envisagent d'évacuer ces eaux par un puits perdu, dont l'insuffisance n'est pas démontrée, et qu'il aurait été ainsi en tout état de cause légalement possible d'accorder le permis en l'assortissant, le cas échéant, de prescriptions, le maire de Teyssières, en opposant un refus au nom de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

9. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît susceptible, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation de l'arrêté en litige.

10. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande et à demander, outre l'annulation de ce jugement, celle de l'arrêté du 18 janvier 2018 en tant qu'il leur refuse la délivrance d'un permis de construire, ce qui aura pour effet de faire renaître le permis tacite dont bénéficiaient les intéressés.

Sur les frais d'instance :

11. La commune de Teyssières n'étant pas partie à l'instance, les conclusions des requérants tendant à la mise à sa charge des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont mal dirigées et ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1804187 du 8 décembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble et l'arrêté du 18 janvier 2018 du maire de Teyssières, agissant au nom de l'Etat, sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et Mme A... C..., épouse D..., ainsi qu'au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.

La rapporteure,

C. VinetLa présidente,

M. E...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00341
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SELARL EYDOUX - MODELSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-27;21ly00341 ?
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