Vu les procédures suivantes :
I-Procédure contentieuse antérieure
L'association Monestier, association de droit privé à but non lucratif, créée sous le régime de la loi de 1901, gérant l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) du Val Montjoie, situé à Saint-Gervais-les-Bain, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté ARS n° 2018-14-0015 du 16 juillet 2018 par lequel le président du conseil départemental de la Haute-Savoie et le directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes ont décidé conjointement de placer cet établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sous administration provisoire.
Par un jugement n° 1804739 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistré sous le n°20LY02575 et un mémoire, enregistrés le 3 septembre 2020, et le 1er juillet 2021, l'association Monestier, représentée par Me Smallwood, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 juin 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) de faire droit à ses conclusions de première instance et d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté ARS n°2018-14-0015 du 16 juillet 2018 par lequel le président du conseil départemental de la Haute-Savoie et le directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes ont décidé de placer l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) du Val Montjoie, géré par l'association Monestier, sous administration provisoire ;
3°) de mettre à la charge conjointe de l'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes et du conseil départemental de Haute-Savoie une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure de contrôle est entachée d'un vice de procédure en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles, le département n'ayant pas signé l'ensemble des éléments procéduraux ;
- l'arrêté a été pris en méconnaissance du principe du contradictoire de la procédure et des droits de la défense en ce que les autorités administratives qui en sont les auteurs lui ont laissé un délai trop bref pour faire valoir ses observations, en l'absence de communication du rapport provisoire d'inspection ;
- l'arrêté est entaché d'illégalité du fait de l'illégalité de la mesure d'injonction du 9 avril 2018, les deux décisions prises sur le fondement des dispositions du même article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles constituant une opération complexe, le moyen tiré de l'exception d'illégalité étant par suite recevable ;
- la mission confiée à l'administrateur provisoire trop générale excédait le périmètre limitatif fixé par les articles L. 313-14 et R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles ;
- l'arrêté est entaché d'erreurs de fait et d'erreur d'appréciation dès lors que le placement de l'EHPAD sous administration provisoire constitue une mesure disproportionnée.
Par des mémoires, enregistrés les 4 mai et 20 juillet 2021, l'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes et le département de la Haute-Savoie représentés par Me Francia et Me Pons, concluent au rejet de la requête et à la condamnation de l'association Monestier à leur verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils exposent qu'aucun des moyens et des exceptions d'illégalité soulevés ne sont fondés.
II-Procédure contentieuse antérieure
L'association Monestier a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 janvier 2019 pris conjointement par le directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes et le président du conseil départemental de la Haute-Savoie portant renouvellement du mandat de l'administrateur provisoire de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) le Val Montjoie pour une durée de six mois.
Par un jugement n° 1901083 du 19 janvier 2021 le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 18 Mars 2021, l'association Monestier, représentée par Me Smallwood, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 janvier 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2019 pris conjointement par le directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes et le président du conseil départemental de la Haute-Savoie portant renouvellement du mandat d'un administrateur provisoire de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) le Val Montjoie à Saint-Gervais-les-Bains pour une durée de six mois ;
3°) de mettre à la charge conjointe de l'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes et du conseil départemental de Haute-Savoie la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'illégalité de l'arrêté initial de placement sous administration provisoire de l'EHPAD entache d'illégalité l'arrêté portant renouvellement du mandat de l'administrateur provisoire pour une durée de six mois ;
- le vice-président du conseil départemental ne disposait pas d'une délégation aux fins de signer l'acte préparatoire à la décision de renouvellement du placement de l'EHPAD sous administration provisoire ce qui entache l'arrêté d'une incompétence et l'a en tout état de cause privée d'une garantie ;
- le principe du contradictoire n'a pas été respecté et elle n'a pas bénéficié d'un délai raisonnable pour présenter ses observations préalablement à la mesure contestée ;
- l'arrêté est entaché d'un vice de forme en ce qu'il ne définit pas le périmètre limitatif des missions de l'administrateur provisoire ;
- les dispositions de l'article L. 313-14 et de l'article R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles ont été méconnues quant à l'étendue des missions de l'administrateur provisoire ;
- la mesure de prolongation n'est pas fondée ;
- la mesure est entachée d'erreurs de fait et d'erreur d'appréciation et est disproportionnée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2021, l'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes, représentée par son directeur général, et le département de Haute-Savoie, représenté par le président du conseil départemental, représentés par Me Francia et Me Pons, concluent au rejet de la requête et demandent de condamner l'association Monestier à leur verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils exposent qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de la santé publique ;
- la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, et notamment son article 1er ;
- la loi n° 1996-314 du 12 avril 1996 et de relatives aux subventions, dotations et autres concours financiers de l'Etat et des collectivités locales aux associations ;
- l'ordonnance n° 58-896 du 23 septembre 1958 relative aux dispositions générales d'ordre financier ;
- l'ordonnance n° 2018-22 du 17 janvier 2018 relative au contrôle de la mise en œuvre des dispositions du code de l'action sociale et des familles et aux suites de ce contrôle ;
- la circulaire du 24 décembre 2002 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Conesa-Terrade, première conseillère,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Huret substituant Me Smallwood, représentant l'association Monestier, et de Me Pons, représentant l'agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes et le conseil départemental de la Haute-Savoie ;
Considérant ce qui suit :
1. L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) du Val Montjoie, situé sur la commune de Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie), est géré par l'association Monestier. A la suite de plusieurs inspections intervenues au cours des années 2016 et 2017, et du rapport d'inspection conjoint, déposé le 1er mars 2018, par la direction départementale des finances publiques et l'agence régionale de santé, le directeur général de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental de la Haute-Savoie ont, par courrier du 9 avril 2018, enjoint à l'association Monestier de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux dysfonctionnements constatés lors des opérations de contrôle et de fournir, dans un délai de 21 jours, les justificatifs des mesures prises à cet effet. Sur le fondement des éléments produits par l'association en réponse à cette demande, le directeur général de l'Agence régionale de santé Auvergne Rhône-Alpes et le président du conseil départemental de la Haute-Savoie ont, par arrêté conjoint n° 2018-14-0015 et n° 18-03644 du 16 juillet 2018, placé l'EHPAD du Val Montjoie sous administration provisoire pour une durée de six mois renouvelable, en application de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles. Sur le fondement des éléments du rapport de l'administrateur provisoire, présenté à l'issue de la période d'administration provisoire de six mois, le directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes et le président du conseil départemental de la Haute-Savoie ont, par arrêté conjoint du 15 janvier 2019, renouvelé le mandat de l'administrateur provisoire pour une durée de six mois. Par une requête enregistrée sous le n° 20LY02575, l'association Monestier relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté du 16 juillet 2018 plaçant de l'EHPAD du Val Montjoie sous administration provisoire pour une durée de six mois, en application du V de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles. Par une requête enregistrée sous le n° 21LY00829, l'association Monestier relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté conjoint du 15 janvier 2019 portant renouvellement pour une durée de six mois du mandat de l'administrateur provisoire sur le même fondement.
2. Les requêtes susvisées n° 20LY02575 et n° 21LY00829 présentées pour l'association Monestier concernent le même établissement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu pour la cour de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 20LY02575 :
En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté 16 juillet 2018 :
3. Les EHPAD, définis par les dispositions de l'article L. 313-12-1 du code de l'action sociale et des familles, qui effectuent des prestations prises en charge à la fois par l'aide sociale et par l'assurance maladie, sont soumis, en vertu des articles L. 313-1-1 et L. 313-3 du code de l'action sociale et des familles à une autorisation délivrée conjointement par le président du conseil départemental et par le directeur général de l'ARS. Ces autorités disposent d'un pouvoir de police à l'encontre des gestionnaires et les établissements et les services des organismes gestionnaires qui concourent dans le cadre de l'autorisation, à la gestion de ces derniers peuvent faire l'objet d'un contrôle dans les conditions prévues par l'article L. 313-13 du code de l'action sociale et des familles, aux termes duquel, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2018-22 du 17 janvier 2018 prise sur le fondement de l'article 304 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, entrée en vigueur dès sa publication, applicable aux procédures de contrôle et d'inspection en cours à cette date, et en conséquence applicable à l'espèce, le rapport final de contrôle de l'EHPAD de Val Montjoie ayant été remis en avril 2018 : " I.- L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation contrôle l'application des dispositions du présent code par les établissements (...) et par les autres services de leurs organismes gestionnaires qui concourent, dans le cadre de l'autorisation, à la gestion desdits établissements, services et lieux de vie et d'accueil. (...) III- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant de la compétence du directeur général de l'agence régionale de santé, les contrôles prévus à la présente section sont effectués par les personnels des agences régionales de santé mentionnés aux articles L. 1421-1 et L. 1435-7 du code de la santé publique et les autres personnes susceptibles de les assister./ IV.- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant de la compétence du président du conseil départemental, les contrôles prévus à la présente section sont effectués par les agents départementaux mentionnés à l'article L. 133-2 du présent code dans les conditions définies par la présente section./ V.- Pour les établissements, services et lieux de vie et d'accueil relevant d'une autorisation conjointe, les contrôles prévus à la présente section sont effectués de façon séparée ou conjointe par les agents mentionnés aux II à IV du présent article, dans la limite de leurs compétences respectives. VI.- Quelle que soit l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation, le représentant de l'Etat dans le département peut, à tout moment, diligenter les contrôles prévus à la présente section. (...) ".
4. Aux termes de l'article L. 313-14 du même code dans sa rédaction applicable à l'espèce, issue de l'ordonnance précitée : " I.- Lorsque les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil méconnaissent les dispositions du présent code ou présentent des risques susceptibles d'affecter la prise en charge des personnes accueillies ou accompagnées ou le respect de leurs droits, l'autorité compétente en vertu de l'article L. 313-13 peut enjoindre au gestionnaire d'y remédier, dans un délai qu'elle fixe. Ce délai doit être raisonnable et adapté à l'objectif recherché. Elle en informe le conseil de la vie sociale quand il existe et, le cas échéant, le représentant de l'Etat dans le département, (...). Cette injonction peut inclure des mesures de réorganisation ou relatives à l'admission de nouveaux bénéficiaires et, le cas échéant, des mesures individuelles conservatoires, en application du code du travail ou des accords collectifs. / (...). V.- S'il n'est pas satisfait à l'injonction dans le délai fixé, l'autorité compétente peut alternativement ou consécutivement à l'application des II, III et IV précédents désigner un administrateur provisoire pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois, renouvelable une fois. Celui-ci accomplit, au nom de l'autorité compétente et pour le compte du gestionnaire, les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin aux difficultés constatées. Il dispose à cette fin de tout ou partie des pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'établissement, du service ou du lieu de vie et d'accueil, dans des conditions précisées par l'acte de désignation. (...). VI.- Dans le cas des établissements, services et lieux de vie et d'accueil soumis à autorisation conjointe, les procédures prévues au présent article peuvent être engagées et mises en œuvre à l'initiative de l'une des autorités compétentes, qui en informe les autres sans délai. (...) ". Le législateur a prévu que cet arsenal complet de contraintes, pouvant s'exercer sur les gestionnaires ainsi que les possibilités de leur substituer un administrateur provisoire, peut être mis en action, dans les cas d'autorisation conjointe, par chacune des autorités compétentes.
5. L'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles prévoit notamment que lorsque les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement d'un établissement méconnaissent la législation, présentent des risques susceptibles d'affecter la prise en charge des personnes accueillies ou mettent en cause le respect de leurs droits, les autorités de contrôle, qui sont les autorités ayant délivré l'autorisation, puissent prononcer une injonction aux responsables de la structure concernée dont la mise en œuvre est enfermée dans un délai qui lui impose de remédier aux difficultés et manquements constatés et, s'il n'est pas satisfait à cette injonction, puissent procéder à la désignation d'un administrateur provisoire pour une durée allant jusqu'à six mois, renouvelable une fois. L'administrateur provisoire est chargé d'accomplir, au nom de l'autorité compétente et pour le compte du gestionnaire, les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin aux difficultés constatées, cela lui conférant à cette fin et au sein de la structure les pouvoirs et attributions nécessaires. C'est cette dernière mesure qui a été mise en œuvre par l'arrêté litigieux du 16 juillet 2018.
S'agissant de la procédure de contrôle :
6. L'article 1er de la loi du 1er juillet 1901 dispose que " l'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices. Elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicables aux contrats et obligations ".
7. Aux termes de l'article 31 de l'ordonnance du 23 septembre 1958 susvisée : " (...)Tout organisme subventionné dont la gestion n'est pas assujettie aux règles de la comptabilité publique et, quelles que soient sa nature juridique et la forme des subventions qui lui ont été attribuées par l'Etat, une collectivité locale ou un établissement public, est soumis aux vérifications des comptables supérieurs du Trésor et de l'inspection générale des finances ainsi qu'au contrôle de la cour des comptes (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que l'association Monestier gère l'EHPAD le Val Montjoie, autorisé en 2004 et ayant ouvert ses portes en 2006, suite à d'importants travaux de réhabilitation qui ont permis à la structure de poursuivre l'accueil de patients en centre de soins de suite et de réadaptation. La dernière autorisation en 2014 a porté la capacité de l'établissement à 82 lits d'hébergement permanent dont 24 en unité de vie protégée, 2 lits d'hébergement temporaire et 6 places d'accueil de jour, à laquelle s'ajoute une unité de vie, correspondant à une résidence autonomie de 16 lits. L'association, qui ne gère que l'établissement de Val Montjoie, a cumulé les déficits du centre de soins de suite entre 2006 et 2012 et sa situation financière est devenue critique ce qui a conduit à l'ouverture d'une procédure judiciaire le 29 novembre 2013. Un plan de redressement par voie de continuation de l'association Monestier a été arrêté conformément au projet présenté par le groupe DocteGestio dans le cadre de sa stratégie de reprise d'établissements placés en redressement judiciaire, par jugement rendu le 17 octobre 2014 du tribunal de grande instance de Versailles, dans le ressort duquel la requérante avait son siège. Le groupe DocteGestio à but lucratif, créé en 1999, qui gère 238 établissements et dénombre 6 262 collaborateurs, a pour objet la gestion, l'exploitation et la commercialisation d'établissements notamment médicaux-sociaux. La branche médico-sociale du groupe compte 5 EHPA et 13 EHPAD, 46 services de maintien à domicile, 18 services de soins infirmiers à domicile et 7 structures dites de support. Selon le plan de redressement validé par le tribunal de grande instance de Versailles et le site internet de cette structure, l'exploitation des EHPAD dont celui de Val Montjoie est confiée à une structure dite AMAPA, marque commerciale de DG HELP, reprise en 2012 par le groupe DocteGestio, qui assure, les fonctions support de la branche médico-sociale du groupe. Le plan de redressement par voie de continuation de l'association, validé par le tribunal de grande instance de Versailles, prévoyait le maintien de l'association et l'entrée de l'AMAPA, DG HELP, DocteGestio, et deux dirigeants de ces structures au conseil d'administration de l'association Monestier.
9. Il ressort des pièces du dossier que l'attention du directeur général de l'agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes a été attirée sur la gouvernance de l'EHPAD le Val Montjoie géré par l'association Monestier, et sur sa gestion budgétaire et financière ainsi que sur l'organisation de la prise en charge des résidents. En 2016, lors d'un contrôle de l'établissement de Val Montjoie, l'Inspection du travail a relevé une importante rotation au sein des effectifs. Le gestionnaire ne remplissant pas les obligations auxquelles il était tenu en vertu des dispositions du code de l'action sociale et des familles, en particulier, la transmission du compte administratif aux autorités de tarification, le directeur général de l'agence régionale de santé a diligenté une inspection, en application notamment des articles L. 313-13 et suivants du code de l'action sociale et des familles et de l'article L. 6116-1 du code de la santé publique, menée conjointement avec les services de la direction départementale des finances publiques de Haute-Savoie dans le cadre des dispositions de l'ordonnance n° 58-896 du 23 septembre 1958, notamment l'article 31, de la loi n° 1996-314 du 12 avril 1996 et de la circulaire du 24 décembre 2002 relatives aux subventions, dotations et autres concours financiers de l'Etat et des collectivités locales aux associations.
10. L'inspection annoncée par courrier du 24 octobre 2017, s'est déroulée sur site les 8 et 9 novembre 2017, en présence du président du groupe DocteGestio, également président de l'association Monestier, accompagné de membres du groupe DocteGestio et du personnel d'encadrement de l'EHPAD. Les opérations de contrôle ont notamment permis de constater d'une part, que l'association ne justifiait pas du dépôt en préfecture de la déclaration de modification de la liste des administrateurs, en méconnaissance des règles de transparence concernant le fonctionnement associatif, et d'autre part, l'existence d'un dysfonctionnent majeur avec une concentration des pouvoir aux mains d'une unique personne physique, dirigeant l'ensemble des entités intervenant dans la gestion de l'association et reconnaissant ne pas connaître le fonctionnement détaillé des structures qu'il dirige et déléguer aux directeurs en poste. Le contrôle a révélé une confusion certaine dans la chaîne de gouvernance de l'EHPAD entre l'association Monestier, liée à l'AMAPA selon une convention de prestation " portant sur la fourniture de services par DG HELP " et le groupe DocteGestio qui génère un risque majeur de détournement des moyens destinés au fonctionnement de l'EHPAD au profit de la société commerciale DG HELP. La réalité du caractère associatif, et donc du caractère non lucratif de la gestion de l'EHPAD est apparue douteuse au regard des modalités de gestion mises en œuvre reposant sur le recours aux prestations passées directement ou par personnes interposées avec l'un des administrateurs de l'association, en contradiction avec les dispositions de l'article 1er de la loi du 1er juillet 1901.
11. A l'issue des opérations de contrôle, l'agence régionale de santé a, par un courrier du 21 décembre 2017 valant lettre de pré-injonction, adressé à l'association requérante en sa qualité de gestionnaire de l'EHPAD du Val Montjoie, formulant plusieurs observations en termes de gouvernance associative, de pilotage de l'EHPAD et de gestion budgétaire et financière, demandé à l'association gestionnaire, au vu de la gravité des constats relevés et de leur incidence sur la prise en charge des résidents, de communiquer à l'agence dans un délai d'un mois un plan d'action pour y remédier. L'association a adressé, en réponse, le 22 janvier 2018 à l'agence régionale de santé un document de 62 pages apportant des explications sur les points soulevés et présentant des mesures destinées à y remédier. Le 1er mars 2018, la mission d'inspection a établi son rapport incluant les éléments de réponse communiqués par l'association le 22 janvier 2018.
12. Ce rapport, portant sur la gouvernance, la gestion financière, budgétaire et comptable et l'organisation de la prise en charge, relevait 18 écarts relatifs à la méconnaissance de la réglementation applicable et formulait 89 observations sur les dysfonctionnements porteurs de risques. L'ensemble des griefs, résumé dans la conclusion générale, mettait en exergue la concentration des pouvoirs par le président de l'association, ayant signé au titre de l'association gestionnaire une convention avec une société de service qui lui appartient pour accomplir les prestations relevant de la compétence de personnels financés dans le cadre de la convention tripartite pluriannuelle avec les autorités de tarification et faisant peser une lourde charge financière sur l'EHPAD. Le rapport souligne l'intervention confuse dans la direction et le pilotage de l'EHPAD du Val Montjoie de structures rattachées à la société DocteGestio et toutes gérées par le président de l'association Monestier, laissant dans les faits, une marge de manœuvre très limitée à la directrice de l'établissement d'hébergement, une qualité des prestations fournies par les fonctions support du groupe faisant défaut, une gestion de proximité inopérante, des manquements récurrents en matière budgétaire et financière sur lesquels les autorités de tarification ont appelé l'attention de l'établissement à de multiples reprises, l'absence de comptes administratifs et de rapports annuels d'activité, un défaut de suivi de la trésorerie présentant un risque de non maîtrise des dépenses, des documents budgétaires et comptables insatisfaisants et non appuyées de pièces justificatives probantes de nature à ôter tout caractère sincère aux documents comptables présentés, et témoignant d'un fort risque de dérapage dans la gestion des fonds publics. Il ressort également du rapport que la mission a constaté des dysfonctionnements et risques en termes de sécurité, notamment un manque de personnel par rapport à ce qui a été alloué dans le cadre de la convention tripartite pluriannuelle avec les autorités de tarification à l'origine de tensions dans l'organisation du travail, d'absentéisme et de rotation importante du personnel déjà mise en évidence par l'Inspection du travail en 2016.
13. Le rapport relève que la réponse du 22 janvier 2018 du président de l'association Monestier au courrier du directeur général de l'agence régionale de santé ajoute à la confusion constatée dans la gouvernance et le pilotage de l'association gestionnaire et manque d'éléments probants sur les réponses apportées aux dysfonctionnements relevés. Il conclut que le caractère ancien et répétitif des dysfonctionnements et manquements constatés interroge sur la capacité et la volonté de la structure gestionnaire à rétablir un fonctionnement soucieux de la qualité de la prise en charge des résidents, par du personnel sécurisé dans sa pratique professionnelle, et répondant aux impératifs de fonctionnement d'un EHPAD.
14. Par un courrier du 9 avril 2018 transmettant ce rapport d'inspection à l'association requérante, le président du conseil départemental de la Haute-Savoie et le directeur général de l'agence régionale de santé ont enjoint l'association Monestier de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux dysfonctionnements constatés dans un délai de 21 jours. L'association Monestier a répondu par courrier du 2 mai 2018, accompagné d'un rapport de 61 pages intitulés " Réponses au rapport d'inspection établi par le DDFIP et l'ARS " prenant acte de ce qu'elle n'avait pas satisfait à l'ensemble des obligations réglementaires lui incombant dans le cadre de l'autorisation administrative accordée. Le 7 mai 2018, le président de l'association a exposé, devant le représentant du directeur général de l'agence régionale de santé en Haute-Savoie et les auteurs du rapport d'inspection, les mesures proposées que le gestionnaire entendait prendre en réponse à l'injonction, détaillées dans le document du 2 mai 2018 adressé aux autorités de tarification. Par deux courriers du 26 juin et du 4 juillet 2018, l'association gestionnaire informait les autorités de tarification du suivi du plan d'action présenté.
15. Au regard de l'insuffisance de ces mesures, le directeur général de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental ont décidé, sur le fondement des dispositions du V de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles, par l'arrêté du 16 juillet 2018 de placer l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes du Val Montjoie, géré par l'association Monestier, sous administration provisoire pour une durée de six mois.
S'agissant de la légalité externe de l'arrêté du 16 juillet 2018 :
Quant aux moyens tirés de vices de procédure et de la méconnaissance des droits de la défense :
16. Si l'arrêté litigieux a été pris à l'issue d'une procédure d'inspection et après injonction du directeur général de l'agence régionale de santé et du président du conseil départemental de Haute-Savoie de présenter un plan d'action dans un délai de 21 jours, il n'est pas le résultat d'une opération complexe. Les moyens tirés de vices de procédure entachant la procédure de contrôle et de la méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense préalablement à l'injonction du 9 avril 2018 sont, par suite, inopérants à l'encontre de l'arrêté litigieux.
17. La requérante soutient que, suite à l'injonction des autorités de tarification compétentes de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux dysfonctionnements constatés dans le rapport final d'inspection joint à leur courrier du 9 avril 2018, le délai de 21 jours qui lui a été accordé pour présenter son plan d'action était trop bref pour qu'elle puisse utilement faire valoir ses observations. Il ressort, toutefois, des circonstances exposées aux points précédents que l'association requérante a pris connaissance des griefs reprochés relatifs aux manquements constatés, détaillés dans le rapport d'inspection du 1er mars 2018 dont elle a eu communication dans la lettre d'injonction du 9 avril 2018 prononcée, préalablement à la décision de placement sous administration provisoire litigieuse adoptée conjointement par le directeur général de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental de Haute-Savoie, ce qui n'est pas contesté, et qu'elle a pu exposer dans le délai imparti adapté à l'urgence de la situation, le plan d'action qu'elle entendait mettre en œuvre, par écrit dans le document qu'elle a adressé le 2 mai 2018 aux autorités de contrôle, et oralement lors de la réunion organisée, à sa demande, le 7 mai 2018 avec ces dernières et les rédacteurs du rapport d'inspection. C'est d'ailleurs au terme de cette procédure contradictoire effectivement mise en œuvre, au cours de laquelle l'association requérante a été mise à même de présenter utilement ses observations dans un délai suffisant, garantie par les dispositions du code de l'action sociale et des familles dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 17 janvier 2018 dont l'objectif est de renforcer les droits de la défense au profit des structures contrôlées, que les autorités compétentes ont décidé de placer l'EHPAD du Val Montjoie sous administration provisoire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire et des droits de la défense ne peut qu'être écarté.
Quant à l'exception d'illégalité de l'injonction du 9 avril 2018 :
18. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché, peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.
19. En application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles, l'injonction constitue une des mesures de police administrative susceptibles d'être mises en œuvre par les autorités compétentes en vertu de l'article L. 313-13 du même code, dans l'hypothèse où celles-ci relèveraient des dysfonctionnements dans la gestion de l'établissement. Ces mêmes dispositions prévoient que s'il n'est pas satisfait à l'injonction de remédier aux dysfonctionnements liés à la méconnaissance des dispositions du code dans les conditions d'installation, d'organisation ou de fonctionnement de l'établissement dans le délai fixé, les autorités compétentes peuvent désigner un administrateur provisoire pour une durée qui ne peut excéder six mois. Par suite, l'injonction adressée par les autorités tarifaires compétentes à l'association gestionnaire de l'EHPAD de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux dysfonctionnements constatés dans le délai qu'elles fixent, ne constitue pas la base légale de l'arrêté litigieux. L'association requérante ne peut dès lors utilement exciper de l'illégalité de l'injonction prononcée le 9 avril 2018 par les autorités tarifaires compétentes à l'encontre de l'arrêté litigieux.
Quant au vice de forme :
20. Enfin, il ressort de la lecture même de l'arrêté que les missions dévolues à l'administrateur provisoire, nommé par l'arrêté litigieux, sont exposées de manière suffisamment précises. Le moyen doit, par suite, être écarté comme manquant en fait.
S'agissant de la légalité interne de l'arrêté du 16 juillet 2018 :
Quant au périmètre des missions dévolues à l'administrateur provisoire :
21. Aux termes de l'article R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles : " L'administrateur provisoire désigné en application de l'article L. 313-14 ou de l'article L. 313-14-1 exerce sa mission dans les conditions prévues à l'article R. 331-6. Dans le cadre de la mise en œuvre des injonctions faites en application de l'article L. 313-14 ou de l'article L. 313-14-1, l'administrateur provisoire procède, en matière de gestion des personnels, au licenciement individuel, à la remise à disposition ou à la mutation des personnels si ces mesures sont urgentes ou nécessaires, afin de permettre le retour à un fonctionnement normal de l'établissement ou du service. ". Aux termes de l'article R. 331-6 du même code : " (...) L'administrateur provisoire est habilité à recouvrer les créances et à acquitter les dettes de l'établissement. ". L'administrateur provisoire est en charge d'accomplir au nom de l'autorité publique et pour le compte du gestionnaire, tous les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin à la situation constatée. Il dispose à cette fin et au sein de la structure des pouvoirs et attributions nécessaires. L'acte de désignation de l'administrateur doit définir les conditions de mise en œuvre de sa mission.
22. Il résulte de ce qui vient d'être dit aux points précédents que, dans le cadre de l'arrêté portant placement de l'établissement du Val Montjoie sous administration provisoire pour une durée de six mois, les missions confiées par les autorités compétentes à l'administrateur provisoire pour mettre fin aux dysfonctionnements constatés sont conformes aux dispositions précitées du V de l'article L. 313-14 et de l'article R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles et n'excèdent pas le périmètre nécessaire à la résolution des dysfonctionnements constatés, afin de permettre, selon la lettre même du texte, le retour à un fonctionnement normal de l'établissement. De même, les pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'établissement accordés à l'administrateur provisoire sont prévus par les dispositions du V de cet article. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté comme manquant en fait.
Quant à l'erreur de fait et à l'erreur d'appréciation :
23. L'association requérante, qui ne peut utilement invoquer des circonstances postérieures à l'arrêté litigieux, se prévaut du plan d'action présenté suite à l'injonction prononcée par les autorités tarifaires compétentes et soutient que l'essentiel des manquements reprochés étaient d'ores et déjà résolus ou étaient en passe de l'être. Elle soutient qu'en conséquence la nomination d'un administrateur provisoire n'était pas justifiée et est entachée d'erreurs de fait et d'erreur d'appréciation dès lors que le placement de l'établissement de Val Montjoie constitue une mesure disproportionnée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'association Monestier a, dans sa lettre du 22 janvier 2018, indiqué partager l'analyse faite par les inspecteurs de l'agence régionale de santé et de la direction départementale des finances publiques sur certains points notamment en ce qui concerne la concentration des pouvoirs au sein de l'association, les carences comptables au regard de la législation applicable, l'absence de signalement de faits de maltraitance par la direction, la fréquence élevée de renouvellement des effectifs et la présence de multiples intervenants dans le pilotage et le fonctionnement de l'établissement. Dans ces conditions, l'association requérante ne conteste pas sérieusement la matérialité des dysfonctionnements et des manquements constatés, ni le caractère justifié du placement sous administration provisoire de l'établissement contrôlé qu'elle gère, eu égard à la gravité de ces derniers sur la sécurité et la qualité de la prise en charge des résidents de l'EHPAD du Val Montjoie. Les moyens tirés de l'erreur de fait, de d'erreur d'appréciation et du caractère disproportionné de la mesure doivent, par suite, être écartés.
24. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Monestier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
25. Il y a lieu de mettre à sa charge le versement au profit de l'Agence régionale de santé, d'une part, et du département de Haute-Savoie, d'autre part, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la requête n° 21LY00829 :
En ce qui concerne la régularité du jugement n° 1901083 du 19 janvier 2021 :
26. L'association requérante soutient que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire et se sont bornés à confirmer le bien-fondé de l'arrêté litigieux portant prolongation du placement de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sous administration provisoire au seul motif que cette possibilité est prévue par l'article L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles. Toutefois, il résulte de la lecture du jugement attaqué et notamment des points 4 et 5 que les premiers juges ont répondu, en l'écartant comme manquant en fait, au moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire. S'agissant du bien-fondé de la mesure contestée, il résulte de la lecture des points 9 et 10 que les premiers juges n'ont pas omis de motiver le caractère fondé en droit comme en fait de l'arrêté contesté en relevant que l'article L. 313-14, en prévoyant la possibilité d'un renouvellement pour six mois du placement sous administration provisoire, régit les cas pour lesquels une seule période de six mois ne suffit pas, comme au cas d'espèce, à remédier aux dysfonctionnements constatés, le rapport de l'administrateur provisoire déposé le 18 décembre 2018 concluant à la nécessité de pérenniser les actions conduites dans le cadre de l'administration provisoire de l'établissement afin notamment de parvenir à un équilibre financier par une maîtrise des dépenses centralisées. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté dans toutes ses branches comme manquant en fait.
En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté 15 janvier 2019 :
27. Il ressort des pièces du dossier que l'administrateur provisoire nommé par l'arrêté initial du 16 juillet 2018, après avoir constaté lors de sa première visite, une situation de péril imminent pour les résidents, a, dans une note d'étape, en particulier relevé une situation financière déséquilibrée et insincère et un état des dettes d'exploitations estimé à 1,5 millions d'euros et des factures non honorées d'un montant de 250 000 euros au début de l'administration provisoire. Dans ces conditions l'administrateur provisoire a axé son action sur la résolution de l'urgence. Dans son rapport du 18 décembre 2018, il a pointé les liens complexes entre l'association gestionnaire, la société AMAPA et le groupe DocteGestio, entitées liées par des conventions dont les coûts sont excessifs par rapport aux prestations fournies, des irrégularités comptables et financières avec des charges ayant donné lieu à des mandatements sans faire l'objet de décaissements correspondants, une clef de répartition financière entre la résidence autonomie et l'EHPAD nettement désavantageuse pour ce dernier, le pouvoir extrêmement restreint de la direction locale de l'EHPAD en matière de signature des contrats et de négociation des conditions salariales ne permettant pas de répondre de manière directe aux besoins de l'établissement sur un territoire où il existe une forte tension du marché du travail, une politique de recrutement fondée pour partie sur une logique de suppression de postes et aboutissant à une situation de non-retour et maltraitance institutionnelle par défauts d'effectifs, un défaut d'outil de management pour donner du sens au travail des équipes et l'absence de dispositif adapté et efficace pour la gestion des ressources humaines. Transmis à l'appui du rapport de l'administrateur provisoire, un plan d'action relatif aux différentes exigences de fonctionnement de l'établissement met l'accent sur les actions conduites en matière de recrutement et les améliorations apportées au management de l'EHPAD, l'amélioration des conditions de vie des personnes âgées, l'amélioration des conditions de prise en charge et notamment la mise en place de plans de soins, de systèmes de traçabilité des soins, un audit du circuit du médicament, l'amélioration des conditions de facturation tant pour les fournisseurs que pour les résidents.
28. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier conjoint des autorités compétentes, du 27 décembre 2018, communiquant à l'association Monestier le rapport définitif de l'administrateur provisoire en date du 18 décembre 2018 et le plan d'action ainsi que la note d'étape du 7 novembre 2018, le directeur général de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental de Haute-Savoie ont informé l'association Monestier de leur projet de renouvellement de l'administration provisoire pour une durée de six mois en l'invitant à faire valoir ses observations d'ici le 10 janvier 2019. Les autorités compétentes ont estimé que les éléments de réponse aux observations formulées transmis par l'association, par courrier du 9 janvier 2019, ne permettaient pas de lever l'ensemble des inquiétudes concernant la capacité de l'association à gérer la structure. Elles ont estimé que des risques graves continuaient de peser sur la sécurité des résidents, en raison d'une organisation antérieure inadaptée qu'il convenait de faire évoluer et d'une situation financière dégradée remettant en cause la continuité du service.
29. Il ressort des pièces du dossier que pour décider par l'arrêté du 15 janvier 2019 pris conjointement par le directeur général de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental de Haute-Savoie, de renouveler l'administration provisoire de l'EHPAD du Val Montjoie, à compter de la date de fin de l'administration provisoire initiale, soit le 18 janvier 2019, pour une période six mois, les autorités compétentes se sont fondées sur les constats suivants : la nécessité de remédier à l'absence de direction stable depuis la reprise de l'EHPAD le Val Montjoie décidée par le jugement du 17 octobre 2014 du tribunal de grande instance de Versailles, qui avait suscité pour les personnels la perte de sens de leur mission, l'obligation de conduire des actions ou de consolider certaines avancées notamment par le recrutement du médecin coordinateur, la stabilisation du personnel, et l'impossibilité de mettre en œuvre des actions correctives concertées visant à résoudre les dysfonctionnement du fait des divergences de point de vue, à l'issue de six mois d'administration provisoire entre l'administrateur provisoire et l'association Monestier, cette dernière n'étant pas en mesure d'assurer le fonctionnement de l'EHPAD Val Montjoie, ni d'assurer des conditions d'accompagnement adaptées aux usagers à la suite des six premiers mois d'administration provisoire. La requête est dirigée contre la mesure mise en œuvre par l'arrêté litigieux du 15 janvier 2019.
S'agissant du moyen tiré de l'exception d'illégalité :
30. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'association requérante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'arrêté du 16 juillet 2018 portant placement de l'EHPAD du Val Montjoie sous administration provisoire à l'encontre de l'arrêté du 15 janvier 2019 portant renouvellement de ce placement sous administration provisoire pour une durée de six mois décidé en application des dispositions précitées du V de l'articles L. 313-14 du code de l'action sociale et des familles.
S'agissant de la légalité externe de l'arrêté :
Quant au vice de procédure allégué :
31. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire, au nom du président du conseil départemental de Haute-Savoie, du courrier du 27 décembre 2018 communiquant à l'association requérante le rapport définitif de l'administrateur provisoire et le plan d'action, l'informant du projet de renouvellement de l'administration provisoire pour une durée de six mois et l'invitant à faire valoir ses observations avant le 10 janvier 2019 est sans incidence sur la légalité de l'arrêté litigieux.
Quant au moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire :
32. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que, préalablement à la prise de l'arrêté litigieux, l'association requérante a été mise à même de présenter utilement ses observations dans un délai suffisant, ce qu'elle a d'ailleurs fait. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire doit être écarté comme manquant en fait.
Quant au vice de forme ;
33. En arrêtant à l'article 3 que l'administrateur provisoire sera chargé au nom du directeur général de l'agence régionale de santé et du président du conseil départemental de Haute-Savoie et pour le compte de l'association gestionnaire Monestier d'accomplir les actes d'administration urgents ou nécessaires, et de mettre en œuvre les mesures ayant fait l'objet d'injonction par les autorités administratives pour mettre fin aux dysfonctionnements constatés, d'une part, et à l'article 4 de l'arrêté contesté qu'il aura pour missions générales d'accomplir les actes d'administration nécessaires au bon fonctionnement de l'établissement, de poursuivre le plan d'action, déjà engagé, en respectant l'échéancier indiqué qu'il s'est donné, de transmettre l'état réalisé des recettes et des dépenses pour l'année 2018, et de transmettre l'état prévisionnel des recettes et des dépenses pour l'année 2019, d'autre part, en précisant qu'il dispose à ce titre de tout ou partie des pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'établissement dans des conditions précisées dans sa lettre de mission, l'arrêté litigieux n'est entaché d'aucun vice de forme quant à la définition des missions incombant à l'administrateur provisoire.
S'agissant de la légalité interne de l'arrêté contesté :
34. Comme il a été dit précédemment, en application des articles R. 331-6 et R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles, l'acte de désignation de l'administrateur provisoire en charge d'accomplir au nom de l'autorité publique et pour le compte du gestionnaire, tous les actes d'administration urgents ou nécessaires pour mettre fin à la situation constatée, cela lui conférant à cette fin et au sein de la structure les pouvoirs et attributions nécessaires, doit définir les conditions de mise en œuvre de sa mission.
35. Au cas d'espèce, il ressort de la lecture de l'arrêté portant renouvellement pour une durée de six mois de l'administration provisoire de l'établissement du Val Montjoie que les missions confiées par les autorités compétentes à l'administrateur provisoire pour mettre fin aux dysfonctionnements constatés et qui, selon son rapport, perdurent à l'issue de la première période d'admission provisoire de six mois, sont conformes aux dispositions précitées du V de l'article L. 313-14 et de l'article R. 331-7 du code de l'action sociale et des familles et n'excèdent pas le périmètre nécessaire à la résolution des dysfonctionnements constatés, afin de permettre, selon la lettre même du texte, le retour à un fonctionnement normal de l'établissement. De même, les pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'établissement accordés à l'administrateur provisoire sont prévus par les dispositions du V de cet article. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté comme manquant en fait.
36. L'association requérante, qui ne peut utilement invoquer des circonstances postérieures à l'arrêté contesté, soutient, sans l'établir, que les circonstances de fait ayant conduit à la nomination d'un administrateur provisoire ne seraient pas matériellement établies. Toutefois, elle ne conteste pas sérieusement les motifs de fait justifiant le renouvellement du placement de l'établissement sous administration provisoire pour une durée de six mois. Le moyen doit, par suite, être écarté.
37. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la situation de l'établissement et les risques pour les résidents accueillis justifient la mesure en litige et confirme le bien-fondé de l'arrêté. Par suite le moyen tiré de l'erreur d'appréciation et du caractère disproportionné de la mesure doit être écarté.
38. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association Monestier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
39. Il y a lieu de mettre à sa charge le versement au profit de l'agence régionale de santé, d'une part, et du département de Haute-Savoie, d'autre part, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 20LY02575 de l'association Monestier est rejetée.
Article 2 : La requête n° 21LY00829 de l'association Monestier est rejetée.
Article 3 : L'association Monestier est condamnée à verser respectivement à l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes, d'une part, et au département de Haute-Savoie, d'autre part, une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Monestier, au ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, à l'agence régionale de santé Auvergne Rhône Alpes, et au président du conseil départemental de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président-assesseur,
Mme Conesa-Terrade, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2022.
La rapporteure,
E. Conesa-TerradeLe président,
F. Pourny
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
Nos 20LY02575-21LY00829