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13/07/2022 | FRANCE | N°20LY03803

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 13 juillet 2022, 20LY03803


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 95 000 euros, assortie des intérêts au taux légal.

Par un jugement n° 1909545 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2020, M. A... B..., représenté par Me Parisi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909545 du 22 septembre 2020 du

tribunal administratif de Lyon ;

2°) de condamner les hospices civils de Lyon à lui verser la somme d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 95 000 euros, assortie des intérêts au taux légal.

Par un jugement n° 1909545 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2020, M. A... B..., représenté par Me Parisi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909545 du 22 septembre 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de condamner les hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 25 000 euros, assortie des intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge des hospices civils de Lyon une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon n'a pas reconnu la faute de l'hôpital pour méconnaissance de l'article L. 1112-1 du code de la santé publique ;

* il a subi un préjudice d'établissement estimé à 25 000 euros.

Par un mémoire, enregistré le 12 octobre 2021, les hospices civils de Lyon, représentés par Me Le Prado, concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code de la santé publique ;

* la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

* le code de la justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Gayrard, président assesseur,

* les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

* et les observations de Me Parisi, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 20 novembre 1964, a été hospitalisé du 19 au 21 mai 2011 au centre hospitalier Lyon sud, faisant partie des hospices civils de Lyon (HCL), pour une endoscopie de contrôle à la suite de laquelle il déclare avoir présenté des saignements persistants au niveau de l'anus. Le 5 septembre 2011, un examen proctologique a mis en évidence une tumeur volumineuse allant du rectum à l'anus avec extension extradigestive et sur la prostate. Cette tumeur a été traitée par radiothérapie et chimiothérapie puis a été pratiquée le 10 février 2012 une pelvectomie totale avec cystectomie, colostomie et urétrectomie. Le 25 juin 2012, une métastasectomie pulmonaire droite par thoracotomie a été pratiquée suivie de nouvelles chimiothérapies et radiothérapies. M. B... a également souffert d'occlusions liées à une fistule anastomotique nécessitant une résection du grêle et une iléostomie terminale le 18 juillet 2013 et présente une insuffisance rénale chronique. Par ordonnance du 9 avril 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a ordonné une expertise dont le rapport a été déposé le 3 août suivant. La réclamation préalable de M. B... du 23 juillet 2019 a été expressément rejetée par les HCL le 11 octobre suivant. Par requête enregistrée le 10 décembre 2019, M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les HCL à lui verser la somme de 95 000 euros assortie des intérêts moratoires. Par un jugement n°1909545 du 22 septembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Sur la responsabilité :

2. Au préalable, en cause d'appel, M. B... n'invoque plus la faute tenant à un retard de diagnostic de sa tumeur mais uniquement le défaut d'information des HCL sur la possibilité de conserver des gamètes à l'origine d'un préjudice d'établissement qu'il évalue à 25 000 euros.

3. L'article L. 1111-2 du code de la santé publique dispose que : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus ". Indépendamment de la perte d'une chance de refuser un acte médical, le manquement des médecins à leur obligation d'informer le patient des risques courus lors de cet acte ouvre pour l'intéressé, lorsque ces risques se réalisent, le droit d'obtenir réparation des troubles qu'il a pu subir du fait qu'il n'a pas pu se préparer à cette éventualité, notamment en prenant certaines dispositions personnelles. L'existence d'un tel préjudice ne se déduit pas de la seule circonstance que le droit du patient d'être informé des risques de l'acte médical a été méconnu. Il appartient à la victime d'en établir la réalité et l'ampleur.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que M. B... a été informé des risques encourus en matière de fertilité en raison de l'intervention chirurgicale de pelvectomie totale réalisée le 10 février 2012 mais aussi des séances de chimiothérapie pratiquées à compter d'octobre 2011. Toutefois, le requérant fait grief aux HCL de ne pas l'avoir informé de la possibilité de réaliser à titre préventif un prélèvement de gamètes en vue de les conserver dans la perspective d'une fécondation in vitro. Même à regarder une telle information comme une action de prévention que les médecins des HCL auraient dû porter à sa connaissance conformément aux dispositions de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, il résulte de l'instruction que M. B... a fait lui-même une demande de conservation de sperme début janvier 2012 mais que la tentative de recueil effectuée au CECOS du groupement hospitalier Est des HCL le 9 mars 2012 a échoué. Si le requérant soutient que cet échec ait dû à la chimiothérapie, il n'est pas établi que ce traitement en soit la cause, le médecin du CECOS indiquant que le traitement à base de neuroleptiques que prenait l'intéressé depuis une dizaine d'années pour traiter une psychose était à l'origine de troubles de l'érection et de l'éjaculation et l'expert confirmant la survenue fréquente de troubles de l'érection et de l'éjaculation chez des patients soumis à des traitements neuroleptiques de longue durée. Enfin, il est constant que l'intéressé n'a pas réalisé de spermogramme et n'a pas souhaité pratiquer d'auto-injections intra-caverneuses pour restaurer les érections comme il lui a été proposé. Dans ces conditions, M. B... ne justifie pas que le défaut d'information reproché soit à l'origine du préjudice d'établissement allégué. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 s'opposent à ce que les HCL, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, versent une quelconque somme à M. B..., au titre de frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

6. Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 500 euros sont laissés à la charge de l'Etat, au titre de l'aide juridictionnelle totale dont bénéficie M. B..., partie perdante tenue aux dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 500 euros, sont laissés à la charge de l'Etat, au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, aux hospices civils de Lyon et à la société hospitalière d'assurances mutuelles.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2022, à laquelle siégeaient :

* M. Pourny, président de chambre,

* M. Gayrard, président assesseur,

* Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022.

Le rapporteur,

J-P GayrardLe président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 20LY03803 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03803
Date de la décision : 13/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-02-03 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Service public de santé. - Établissements publics d'hospitalisation. - Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. - Absence de faute. - Information et consentement du malade.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SARL LE PRADO - GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-07-13;20ly03803 ?
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