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13/06/2022 | FRANCE | N°20LY03293

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 13 juin 2022, 20LY03293


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Macot-la-Plagne à lui verser les sommes de 76 721,04 et 750 euros, assorties des intérêts légaux et de leur capitalisation, au titre des préjudices qu'il a subis du fait de la réalisation par cette commune d'une tranchée sur une route départementale.

La caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Macot-la-Plagne à lui verser les

sommes de 11 039,79 et 1 091 euros au titre des débours et de l'indemnité forfai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Macot-la-Plagne à lui verser les sommes de 76 721,04 et 750 euros, assorties des intérêts légaux et de leur capitalisation, au titre des préjudices qu'il a subis du fait de la réalisation par cette commune d'une tranchée sur une route départementale.

La caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Macot-la-Plagne à lui verser les sommes de 11 039,79 et 1 091 euros au titre des débours et de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1900346 du 15 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2020, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 3 et 11 mai 2021, M. C... A..., représenté par Me Chevassus, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900346 du 15 septembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner la commune de La Plagne Tarentaise à lui verser la somme globale de 76 721,04 euros majorée des intérêts de droit à compter du 25 octobre 2018 et avec capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Plagne Tarentaise une somme de 750 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du même code.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que la matérialité des faits et le lien de causalité avec un ouvrage public ou qu'une carence fautive du maire dans ses pouvoirs de police, n'étaient pas établis ;

- la commune engage sa responsabilité pour dommage de travaux publics ou carence fautive du maire dans ses pouvoirs de police générale, lui ouvrant droit à la réparation intégrale de son préjudice.

Par un mémoire, enregistré le 24 novembre 2020, la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, agissant pour le compte des caisses locales déléguées pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, représentée par Me Neri, demande à la cour de condamner la commune de La Plagne Tarentaise à lui verser la somme de 11 039,79 euros au titre de ses débours, assortie des intérêts légaux, celle de 1 091 euros au titre de l'indemnité prévu à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et celle de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle est fondée à demander le remboursement des débours définitifs exposés en cas d'engagement de la responsabilité de la commune de La Plagne Tarentaise.

Par trois mémoires, enregistrés le 7 avril 2021, le 4 mai 2021 et le 28 mai 2021, la commune de La Plagne Tarentaise, représentée par Me Jacquot, conclut au rejet de la requête et des demandes de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, appelle en garantie l'entreprise nouvelle Eric Perrière et demande à la cour de condamner le requérant à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa responsabilité n'est pas engagée car l'entretien de la route incombe au département, la signalisation du chantier était adéquate, la tranchée ne constituait pas un danger excédant ceux auxquels l'usager doit s'attendre et M. A... a fait preuve d'un manque de vigilance lors du franchissement de la tranchée ;

- la société nouvelle Eric Perrière la garantira des conclusions éventuellement prononcées à son encontre car le marché de travaux publics mettait la signalisation routière du chantier à la charge de l'entrepreneur et la réception des travaux n'empêche pas que sa responsabilité contractuelle soit recherchée au vu de l'article 14.3 du cahier des clauses administratives particulières ;

- les demandes du requérant devront être écartées ou réduites à de plus justes proportions.

Par des mémoires, enregistrés le 5 janvier 2021 et le 27 mai 2022, la société nouvelle Eric Perrière, représentée par Me Chantelove, conclut au rejet de la requête de M. A... et de l'appel en garantie formée par la commune de La Plagne Tarentaise et à ce que M. A..., la commune de la Plagne et la SMACL soient condamnées à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- la commune de La Plagne Tarentaise n'engage pas sa responsabilité en l'absence de lien de causalité entre l'accident et les travaux litigieux, au vu de la signalisation adéquate du chantier et en raison du défaut de vigilance et d'attention de la victime ;

- sa responsabilité ne peut être recherchée compte tenu de la réception sans réserves des travaux réalisés dans les règles de l'art et dès lors que la signalisation routière incombe à la commune ;

- les demandes du requérant devront être écartées ou réduites à de plus justes proportions.

Un mémoire enregistré le 28 juin 2021, présenté pour la commune de La Plagne Tarentaise et la SMACL n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Un mémoire, enregistré le 28 novembre 2021 a été présenté pour les héritiers de M. A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de la justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gayrard, président assesseur,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Chantelove, représentant la société nouvelle Eric Perrière.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., né le 24 janvier 1952, a été victime d'un accident de vélo le 12 juillet 2015 alors qu'il circulait sur la route départementale 223 sur le territoire de la commune de La Plagne Tarentaise. Il a déclaré que la roue avant de son vélo s'est enfoncée dans une tranchée non signalée et insuffisamment comblée avec du sable, découlant de travaux en cours sur le système d'évacuation et de traitement des eaux pluviales réalisés par l'entreprise nouvelle Eric Perrière pour le compte de la commune de Macot-la Plagne, laquelle a fusionné le 1er janvier 2016 avec les communes de Bellentre, de La Côte-d'Aime et de Valezan pour former la commune nouvelle de La Plagne Tarentaise. Par ordonnance du 8 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a ordonné une expertise médicale dont le rapport a été déposé le 8 novembre 2017. M. A... a adressé le 26 octobre 2018 une réclamation préalable à la commune de La Plagne Tarentaise qui l'a expressément rejetée par décision du 24 décembre 2018. Par requête enregistrée le 17 janvier 2019, M. A... a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la condamnation de la commune de La Plagne Tarentaise à lui verser la somme globale de 76 721,04 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, au titre de ses préjudices. La caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme a demandé la condamnation de la collectivité territoriale à lui rembourser ses débours pour un montant de 11 039,79 euros et lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion. Enfin, la commune a appelé en garantie l'entreprise nouvelle Eric Perrière des éventuelles condamnations prononcées à son encontre. Par jugement du 15 septembre 2020, dont M. A... a relevé appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ces demandes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la responsabilité :

2. Au préalable, M. C... A... est décédé en cours d'instance le 16 mai 2021. L'affaire étant en état d'être jugée, il y a lieu d'y statuer alors même que ses ayants-droits, Mme F... E..., son épouse, Mme D... A..., sa fille, et M. B... A..., son fils, ont indiqué ne pas entendre reprendre l'instance initiée par leur époux ou père, selon acte du 29 novembre 2021.

3. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit de l'entretien normal de l'ouvrage, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

4. D'abord si la commune de La Plagne Tarentaise soutient que l'entretien normal de la voirie incombe au département de la Savoie, maitre d'ouvrage de la RD 223, sont en cause en l'espèce la signalisation et la réalisation de travaux publics réalisés pour le compte de la commune dans un but d'utilité publique, susceptibles d'engager sa responsabilité pour dommage de travaux publics. Ensuite, contrairement à ce que soutient la commune, la tranchée récemment réalisée dans le cadre de ces travaux, ayant été partiellement comblée par du sable et présentant un dénivelé par rapport à la chaussée en bitume, constituait un danger excédant celui auquel un usager d'un véhicule à deux roues normalement attentif peut s'attendre à rencontrer. Les photographies réalisées peu après l'accident et les attestations suffisamment circonstanciées et concordantes produites par M. A... établissent le lien de causalité entre sa chute et cette tranchée. Enfin, il résulte de l'instruction, et notamment des pièces susmentionnées, que la tranchée partiellement comblée n'a pas fait l'objet d'une signalisation adéquate par la seule présence d'une balise rouge et blanche sur le bas-côté. En effet, l'attestation du responsable du centre technique municipal de la commune établie le 10 août 2015 et celle de l'entreprise nouvelle Eric Perrière établie le 11 août 2015 affirmant que la signalisation du chantier avait été déposée le 15 juillet 2015, ainsi que les pièces contractuelles mettant la signalisation routière du chantier à la charge de l'entrepreneur, ne peuvent être regardées comme apportant la preuve de la réalité de la signalisation du danger le 12 juillet 2015, au vu des pièces produites par M. A... sus indiquées. Il n'est pas contesté que les cônes de balisage présents sur les photographies produites ont été posés par le service départemental d'incendie et de secours lors de la prise en charge de M. A.... Dans ces conditions, la commune de La Plagne Tarentaise n'apporte pas la preuve de l'entretien normal du chantier réalisé pour son compte. Toutefois, l'accident ayant eu lieu en plein jour et la victime ayant déjà emprunté la voie le matin pour se rendre à un restaurant d'altitude, et l'obstacle se situant juste en amont d'un virage en épingle, la commune est fondée à soutenir que M. A... aurait dû faire preuve de davantage d'attention pour le franchissement de la tranchée et a ainsi commis une faute. Il y a lieu de déclarer la commune responsable à hauteur des trois-quarts des conséquences dommageables subies du fait de l'accident et d'en laisser un quart à la charge de la victime.

En ce qui concerne les préjudices :

5. Le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause. Si la victime du dommage décède sans que ses droits aient été définitivement fixés, c'est-à-dire, en cas de litige, avant qu'une décision juridictionnelle définitive ait fixé le montant de l'indemnisation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers. Cependant, le préjudice subi par la victime, ayant cessé au moment du décès, doit être évalué à la date de cet événement, y compris lorsque le décès est lié au fait ouvrant droit à indemnisation, auquel cas d'ailleurs ce décès peut être pris en compte au titre du droit à réparation des proches de la victime.

6. S'agissant des dépenses de santé, la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme justifie avoir exposé des débours d'un montant de 11 039,79 euros.

7. S'agissant des frais divers, M. A... justifiait avoir versé des honoraires à un médecin pour l'assister pendant les opérations d'expertise pour une somme de 700 euros. Si M. A... demandait également le remboursement de frais de transport pour des soins, comme l'oppose la société nouvelle EricPerrière, le seul tableau produit faisant état de plusieurs trajets entre son domicile et Bourg-Saint-Maurice ou Saint-Jean-de-Maurienne ne suffit pas à justifier du lien de causalité entre ces déplacements et des soins induits par l'accident, à l'exception de ceux indiqués dans le rapport d'expertise concernant les interventions chirurgicales effectuées à l'hôpital de Bourg-Saint-Maurice. Dès lors, il sera fait une exacte appréciation du préjudice correspondant à ces frais de déplacement en le fixant à 257 euros.

8. S'agissant des frais d'assistance par tierce personne, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les besoins de M. A... s'établissaient à 2 heures par jour pendant le premier mois suivant le retour à domicile le 18 juillet 2015 puis à une heure par jour les deux mois suivants. Contrairement à ce que soutient la commune, la victime n'a pas à justifier du recours à un professionnel de l'aide à domicile pour obtenir la réparation de son préjudice. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant, sur la base d'un coût horaire de 13 euros et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés annuels et jours fériés, la somme de 1 834,25 euros.

9. S'agissant de la perte de gains professionnels, M. A... faisait valoir que sa fracture du fémur l'avait empêché d'assurer son emploi saisonnier récurrent de moniteur de ski. M. A... a perçu la somme de 25 909,71 euros pour la saison 2014/2015 et celle de 30 606,11 euros pour la saison 2016/2017, soit un revenu de référence de 28 258 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. A... a bénéficié d'un versement d'indemnités journalières provenant d'une assurance de prévoyance, la société Gras Savoye, pour un montant de 12 780 euros qu'il convient de déduire. Si la société nouvelle Eric Perrière soutient que des prestations de même nature ont pu être versées à l'intéressé au titre d'autres arrêts de travail, ce dernier n'a demandé que la perte de gains professionnels découlant de son activité de moniteur de ski. Il s'ensuit que M. A... avait droit à la somme de 15 478 euros à ce titre.

10. S'agissant de l'incidence professionnelle, si M. A... faisait valoir que l'expert a retenu une diminution des activités sportives antérieures et que, dans le cadre professionnel, et il a dû notamment renoncer à accompagner des clients pour faire du hors-piste, l'augmentation de ses gains tirés de son activité de moniteur de ski lors de la saison 2016/2017, l'existence d'antécédents médicaux tels une gonarthrose et enfin l'âge de la victime à la date de consolidation ne permettent pas de retenir une incidence professionnelle liée à l'accident.

11. S'agissant du déficit fonctionnel temporaire, l'expert indique un déficit fonctionnel temporaire total lors des hospitalisations du 12 au 18 juillet 2015, le 24 novembre 2015 et le 26 septembre 2016, soit 9 jours, un déficit fonctionnel temporaire de 50 % du 19 juillet au 19 octobre 2015, soit 93 jours, un déficit fonctionnel temporaire de 30 % du 20 octobre 2015 au 23 novembre 2015 et du 25 novembre 2015 au 15 avril 2016, soit 178 jours, un déficit fonctionnel temporaire de 10 % du 16 avril 2016 au 25 septembre 2016, soit 163 jours, un déficit fonctionnel temporaire de 20 % du 27 septembre au 27 octobre 2016, soit 31 jours, et enfin un déficit fonctionnel temporaire à 10 % du 28 octobre au 1er décembre 2016, soit 35 jours. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant la somme de 2 158,40euros, sur la base d'un taux journalier de 16 euros.

12. S'agissant des souffrances endurées, elles ont été estimées par l'expert à 3,5 sur 7. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à 4 500 euros.

13. S'agissant du préjudice esthétique, si l'expert a distingué un préjudice temporaire de trois mois tenant à une boiterie et une cicatrice estimé à 3 sur 7 et un préjudice permanent estimé à 1 sur 7, il sera fait une évaluation globale de ce chef de préjudice en l'évaluant à 1 000 euros.

14. S'agissant du déficit fonctionnel permanent, il a été fixé à 10 % par l'expert. Compte tenu de son décès en cours d'instance, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à 4 000 euros.

15. S'agissant du préjudice d'agrément, si l'accident a diminué les capacités de M. A... à pratiquer des activités sportives, compte tenu de son antécédent médical de gonarthrose, de sa reprise de son activité de moniteur de ski dès la saison 2016/2017 et de son décès en cours d'instance, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à 1 000 euros.

16. Il découle des points 6 à 15 que le préjudice global de M. A... s'établit à 41 967,44 euros, dont 11 039,79 euros concernant les dépenses de santé. Eu égard à la part de responsabilité laissée à la commune de La Plagne Tarentaise, celle-ci doit être condamnée solidairement avec son assureur, la SMACL, à verser la somme de 23 195,74 euros aux ayants-droit de M. A.... La commune sera également condamnée à verser la somme de 8 279,84 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme. La première somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de la réclamation préalable de M. A..., soit le 25 octobre 2018 ; la seconde sera assortie des intérêts légaux à compter du premier mémoire de la caisse devant les premiers juges, soit le 26 juin 2020.

17. En application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et de l'arrêté du 14 décembre 2021, il y a lieu de condamner la commune de la Plagne Tarentaise à verser la somme de 1 114 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

18. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond mais la demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière puis, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. M. A... a demandé la capitalisation des intérêts dès son mémoire introductif d'instance enregistré le 17 janvier 2019 au greffe du tribunal administratif de Grenoble. Il s'ensuit que la capitalisation prend effet au 25 octobre 2019, date à laquelle il est dû au moins une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance ultérieure. La caisse primaire d'assurance maladie du Rhône a demandé la capitalisation des intérêts dans son mémoire enregistré le 26 juin 2020. Par suite, la capitalisation a pris effet au 26 juin 2021, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière, ainsi qu'à chaque échéance ultérieure.

Sur l'appel en garantie de la commune de La Plagne Tarentaise :

19. La fin des rapports contractuels entre le maître d'ouvrage et l'entrepreneur, consécutive à la réception sans réserve d'un marché de travaux publics, fait obstacle à ce que, sauf clause contractuelle contraire, l'entrepreneur soit ultérieurement appelé en garantie par le maître d'ouvrage pour des dommages dont un tiers demande réparation à ce dernier, alors même que ces dommages n'étaient ni apparents ni connus à la date de la réception. Il n'en irait autrement - réserve étant faite par ailleurs de l'hypothèse où le dommage subi par le tiers trouverait directement son origine dans des désordres affectant l'ouvrage objet du marché et qui seraient de nature à entraîner la mise en jeu de la responsabilité des constructeurs envers le maître d'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil - que dans le cas où la réception n'aurait été acquise à l'entrepreneur qu'à la suite de manœuvres frauduleuses ou dolosives de sa part. Chaque commande d'un marché de travaux à bons de commande donne lieu à des prestations propres pouvant faire l'objet d'une réception et d'un règlement dès leur réalisation.

20. D'une part, il n'est pas contesté que les travaux publics sur le système d'évacuation et de traitement des eaux pluviales réalisés par la société nouvelle Eric Perrière pour le compte de la commune de Macot-la-Plagne, en exécution du marché à bons de commande passé le 20 mars 2014 ont donné lieu à une réception sans réserves révélée par le paiement d'une facture du 25 juillet 2015.

21. D'autre part, si la commune se prévaut d'un article 14.3 du cahier des clauses administratives particulières stipulant que l'entrepreneur doit justifier qu'il a contracté " une assurance au titre de sa responsabilité civile garantissant les tiers en cas d'accidents ou de dommages causés par l'exécution des travaux ", une telle clause ne vaut pas extension de responsabilité contractuelle de l'entrepreneur au-delà de la réception des travaux.

22. Il découle des points précédents que l'appel en garantie formé par la commune de La Plagne Tarentaise dirigé contre la société nouvelle Eric Perrière ne peut être accueilli.

Sur les frais du litige :

23. Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 750 euros selon ordonnance du président du tribunal administratif de Grenoble du 28 décembre 2017, sont mis à la charge de la commune de La Plagne Tarentaise.

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 s'opposent à ce que M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une quelconque somme à la commune de La Plagne Tarentaise au titre de frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de La Plagne Tarentaise une somme de 1 500 euros à verser aux ayants-droit de M. A... et à la CPAM du Puy-de-Dôme. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de la société nouvelle Eric Perrière présentées sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1900346 du 15 septembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La commune de La Plagne Tarentaise et la SMACL sont condamnées solidairement à verser aux ayants-droit de M. A... une somme de 23 195,74 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2018 et de leur capitalisation à compter du 25 octobre 2019 et à chaque échéance annuelle.

Article 3 : La commune de La Plagne Tarentaise est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 8 279,84 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 juin 2020 et de leur capitalisation à compter du 26 juin 2021 et à chaque échéance annuelle, ainsi que l'indemnité forfaitaire de gestion de 1 114 euros.

Article 4 : La commune de La Plagne Tarentaise versera aux ayants-droit de M. A... et à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 750 euros, sont mis à la charge de la commune de La Plagne Tarentaise.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié aux ayants-droit de M. A..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, à la commune de La Plagne Tarentaise, à la société SMACL assurances et à la société nouvelle Eric Perrière.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2022.

Le rapporteur,

J.-P. GayrardLe président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 20LY03293 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03293
Date de la décision : 13/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-03-02 Travaux publics. - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. - Lien de causalité. - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : JACQUOT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-13;20ly03293 ?
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