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10/02/2022 | FRANCE | N°21LY00932

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 10 février 2022, 21LY00932


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai de trente jours à compter de la n

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2007983 du 25 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 22 mars 2021 et le 5 août 2021, M. A... B..., représenté par Me Lantheaume, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions de la préfète de l'Ain du 19 octobre 2020 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " subsidiairement de réexaminer sa demande dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est irrégulière pour non-conformité de la signature électronique au référentiel général de sécurité mentionné au I de l'article 9 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 ;

- cette décision méconnait l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est entré en France en 2014, s'est marié le 13 juillet 2019 avec une ressortissante marocaine, titulaire d'une carte de résident de dix ans et mère de deux enfants nés le 5 septembre 2009 et le 17 janvier 2011 et dont le père est décédé, avec laquelle il a eu un fils né le 14 avril 2020 ; une procédure de regroupement familial le séparerait durablement de sa famille ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité entachant la décision portant refus de séjour et pour violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant en le séparant de son fils et alors que les enfants de son épouse sont scolarisés ;

- les décisions accordant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire, enregistré le 27 juillet 2021, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête :

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile ;

- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gayrard, président assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 19 octobre 2020, la préfète de l'Ain a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... B..., né le 20 mai 1985 en Algérie, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Par jugement du 25 février 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours en excès de pouvoir contre cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, il n'est pas établi que l'arrêté litigieux ait été signé électroniquement. Par suite, il ne peut utilement invoquer une méconnaissance du I de l'article 9 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives. Au surplus, le moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, faute pour le requérant d'expliquer la non-conformité à un référentiel général de sécurité qu'il allègue.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

4. D'une part, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet et le tribunal administratif de Lyon pouvaient à bon droit retenir que l'intéressé relevait de la catégorie des algériens pouvant bénéficier du regroupement familial, nonobstant la circonstance que la procédure soit longue ou difficile. Il s'ensuit également que le requérant ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien qui vise le ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial.

5. D'autre part, M. B... fait valoir qu'il est entré en France le 3 septembre 2014, qu'il s'est marié le 13 juillet 2019 avec une ressortissante marocaine, titulaire d'une carte de résident de dix ans et mère de deux enfants nés le 5 septembre 2009 et le 17 janvier 2011 et dont le père est décédé, avec laquelle il a eu un fils né le 14 avril 2020. Toutefois, l'intéressé ne justifie pas d'une communauté de vie avec son épouse antérieure à avril 2019 et son mariage célébré le 13 juillet 2019 est récent par rapport à la décision attaquée. S'il fait valoir qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation des deux enfants de son épouse, qui ont perdu leur père en 2014, il n'apporte guère d'éléments pour justifier d'une telle prise en charge qui est récente au regard de la décision attaquée. Le requérant n'est pas dénué d'attaches familiales en Algérie, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. Il ne justifie d'aucun élément d'intégration dans la société française. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit. Il s'ensuit que le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut être écarté.

En ce qui concerne les autres décisions attaquées :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Le requérant soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait l'intérêt supérieur de ses enfants de rester en France avec leur père. Toutefois, s'il souligne que son épouse et ses deux enfants ont la nationalité marocaine, il ne démontre pas l'impossibilité que le noyau familial puisse se reformer en Algérie alors qu'ainsi qu'il a été indiqué au point 2, l'intéressé peut aussi temporairement revenir dans son pays d'origine dans l'attente du bénéfice de son droit au regroupement familial. Si le requérant fait valoir que les deux enfants de son épouse sont scolarisés en France, il n'est pas établi qu'ils ne pourraient poursuivre leur scolarité en Algérie. Par suite, le moyen tiré d'une violation de l'article 3-1 de la convention peut être écarté.

8. En deuxième lieu, eu égard aux points précédents ne relevant aucune illégalité entachant la décision portant refus de séjour, le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français du fait de l'illégalité de la décision précitée ne peut qu'être écarté. Le requérant ne peut davantage exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions accordant un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination.

9. Il découle de tout ce qui précède que les conclusions de M. B... à fin d'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2020 de la préfète de l'Ain doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées à titre d'injonction ou au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter sa requête en ce compris ses conclusions en fin d'injonction ou présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Conesa-Terade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.

N° 21LY00932 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00932
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : LANTHEAUME

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-10;21ly00932 ?
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