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28/10/2021 | FRANCE | N°21LY00959

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 28 octobre 2021, 21LY00959


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2020 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, d'enjoindre sous astreinte au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours ou de réexamine

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2020 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office, d'enjoindre sous astreinte au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours ou de réexaminer sa situation sous un mois en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.

Par un jugement n° 2002376 du 11 février 2021, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du préfet de Saône-et-Loire du 30 juillet 2020 (article 1er), a enjoint au préfet de Saône-et-Loire de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le mois suivant la notification du jugement (article 2), a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 4).

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 mars 2021 et le 12 mai 2021, le préfet de Saône-et-Loire demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande formée par M. C... devant le tribunal administratif de Dijon.

Il soutient que ni la durée de présence irrégulière en France de l'intéressé, qui ne justifie pas d'une intégration particulière et dispose d'attaches personnelles en Azerbaïdjan, ni la présence en France de son ex-conjointe et d'enfants majeurs, à l'éducation desquels il ne démontre pas avoir contribué, ne peuvent justifier la délivrance d'un titre de séjour au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2021, M. C..., représenté par Me Bochnakian, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,

- et les observations de Me Bochnakian, représentant M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant d'Azerbaïdjan né en 1960, est entré irrégulièrement en France le 22 avril 2012. Sa demande de protection internationale a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 26 février 2014. Par un arrêté du 30 juillet 2020, le préfet de Saône-et-Loire, statuant sur une demande déposée en juillet 2017, a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office. Le préfet relève appel du jugement du 11 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté, à la demande de M. C..., au motif qu'il portait une atteinte excessive à ses intérêts privés et familiaux.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, M. C..., alors âgé de 60 ans, était présent depuis un peu plus de 8 ans sur le territoire français, où il a rejoint ses deux enfants respectivement nés le 9 novembre 1987 et le 25 mars 1990 de son union avec Mme B... E..., tous les trois présents en France depuis une vingtaine d'années, reconnus réfugiés et désormais de nationalité française. S'il est séparé de Mme E..., il cohabite depuis septembre 2014, soit depuis près de six ans, avec son fils, A..., atteint de schizophrénie et reconnu invalide avec un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80%, qu'il assiste notamment dans son suivi médical et qui déclare sans être contredit avoir entrepris de rechercher son père à l'issue d'une hospitalisation en 2011. Il ressort d'un certificat médical du psychiatre de A... que la présence de son père a clairement contribué à l'amélioration clinique et l'absence de rechute du patient, dont l'état n'a plus nécessité d'hospitalisation depuis l'emménagement de M. C.... Par ailleurs, le préfet de Saône-et-Loire ne conteste pas que la fille de l'intimé a donné naissance à un fils qui était âgé de 6 ans en 2020 et avec lequel il entretient des liens réguliers depuis sa naissance. Dans ces circonstances particulières, en dépit de la majorité des enfants et alors même que M. C... disposerait encore d'attaches personnelles en Azerbaïdjan et n'a pas exécuté une précédente mesure d'éloignement intervenue le 3 novembre 2014, le préfet de Saône-et-Loire, qui n'a pas davantage fait usage de la faculté de la mettre à exécution d'office alors que la nouvelle adresse de l'intéressé lui avait été transmise par le centre d'accueil des demandeurs d'asile, n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour du 30 juillet 2020 ne porte pas d'atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Saône-et-Loire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé son arrêté du 30 juillet 2020 refusant de délivrer à M. C... un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant l'Azerbaïdjan comme pays de destination, et lui a enjoint de délivrer ce titre.

Sur les frais liés au litige :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de Saône-et-Loire est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. D... C... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... C....

Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 octobre 2021.

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N° 21LY00959

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00959
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme DECHE
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BOCHNAKIAN LARRIEU-SANS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-28;21ly00959 ?
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