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05/08/2021 | FRANCE | N°20LY00343

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 05 août 2021, 20LY00343


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... épouse G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 3 mai 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Saône-et-Loire a rejeté son recours gracieux tendant à ce que soit reconsidérée la décision du 2 août 2018 par laquelle ce président a refusé de faire droit à sa demande de délivrance d'un agrément pour l'enfant mineur, C... B..., recueilli par acte de " kafala ", d'enjoindre au département de Saône-et-Loire de réexaminer la demande d'ac

cueil de cet enfant dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... épouse G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 3 mai 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Saône-et-Loire a rejeté son recours gracieux tendant à ce que soit reconsidérée la décision du 2 août 2018 par laquelle ce président a refusé de faire droit à sa demande de délivrance d'un agrément pour l'enfant mineur, C... B..., recueilli par acte de " kafala ", d'enjoindre au département de Saône-et-Loire de réexaminer la demande d'accueil de cet enfant dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 30 euros par jour de retard et de mettre à la charge du département de Saône-et-Loire la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1901531 du 31 octobre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 janvier 2020 et un mémoire enregistré le 1er novembre 2020, Mme G..., représentée par Me F..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 31 octobre 2019 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision du président du conseil départemental de Saône-et-Loire du 3 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au département de Saône-et-Loire de réexaminer sa demande d'accueil de l'enfant Hichem B... dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département de Saône-et-Loire la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir ;

- les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- le département ne s'est pas conformé à la pratique administrative tenant à ce que les services départementaux émettent un avis sur les conditions d'habitabilité et de ressources des postulants afin de pouvoir solliciter un visa auprès des autorités consulaires françaises.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2020, le département de Saône-et-Loire, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- aucune disposition ne prévoit qu'il devait établir un rapport social en vue d'accueillir un mineur dans le cadre d'une " kafala " décidée par une juridiction étrangère ;

- le droit de recueil légal ne valant pas adoption en droit français, il ne pouvait instruire une demande d'agrément qu'il n'avait la compétence de délivrer, selon les dispositions du code de l'action sociale et des familles, qu'au titre d'une procédure d'adoption proprement dite ;

- il ne tenait d'aucune disposition le pouvoir de se prononcer sur la demande d'agrément de la requérante ;

- la décision contestée n'ayant aucun effet sur le droit de Mme G... d'accueillir son petit-fils, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé.

Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, à hauteur de 25 %, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

- et les observations de Me A..., représentant le département de Saône-et-Loire.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 24 juillet 2018, Mme G..., de nationalité française, a sollicité du département de Saône-et-Loire la délivrance d'un " agrément " afin de recueillir son petit-fils mineur, C... B..., ressortissant algérien né le 4 avril 2002, dont la tutelle et la prise en charge lui avaient été confiées par un jugement de " kafala " du tribunal d'Oran du 7 septembre 2017. Par une décision du 2 août 2018, le président du conseil départemental de Saône-et-Loire a rejeté cette demande au motif que l'agrément en vue d'une adoption ne peut être sollicité que pour les Etats qui reconnaissent cette procédure, au nombre desquels ne figure pas l'Algérie et que, pour le recueil légal d'enfant par " kafala ", les services départementaux se bornent à réaliser des investigations relatives aux capacités d'accueil du " kafil " de l'enfant. Par un courrier du 29 octobre 2018, Mme G... a demandé au président du conseil départemental de Saône-et-Loire de reconsidérer sa position et de diligenter une enquête sociale relative, entre autres, à ses conditions de ressources, de logement, de santé et de filiation en qualité d'accueillant afin de pouvoir déposer une demande de visa de long séjour au bénéfice de l'enfant à recueillir. Le 3 mai 2019, le président du conseil départemental a confirmé que la demande de Mme G... ne relevait pas d'un agrément en vue d'une adoption et que le département n'avait pas à établir de rapport social en vue de l'accueil d'un mineur dans le cadre d'un acte de " kafala " décidé par une juridiction étrangère. Mme G... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 3 mai 2019.

Sur l'étendue du litige :

2. En demandant l'annulation de la décision du 3 mai 2019 portant rejet du recours gracieux formé contre la décision du 2 août 2018, Mme G... doit être regardée comme ayant nécessairement entendu solliciter également l'annulation de cette décision refusant de faire droit à sa demande du 24 juillet 2018 tendant à " l'obtention d'un agrément tendant au recueil légal selon procédure de kafala " de son petit-fils mineur.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, la méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, qui sont relatives aux conditions de délivrance d'un certificat de résidence aux ressortissants algériens, est sans incidence sur la légalité des décisions contestées prises par le président du conseil départemental de Saône-et-Loire. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, si Mme G... fait valoir que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues, elle n'apporte, à l'appui de ce moyen, aucune précision de nature à en établir le bien-fondé. Ce moyen doit, par suite, être écarté.

5. En dernier lieu, si l'article L. 225-17 du code de l'action sociale et des familles dispose qu'un agrément est nécessaire à l'accueil d'un enfant étranger en vue de son adoption, il en va autrement s'agissant de l'accueil d'un enfant confié par un acte de " kafala ", pour lequel aucun agrément n'est requis. Mme G... n'est pas davantage fondée à invoquer la pratique administrative de certaines autorités départementales consistant à procéder à une enquête sociale avant de recueillir un enfant confié par " kafala ", qui ne repose sur aucun texte, ni à en demander le bénéfice devant le juge de l'excès de pouvoir.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le département de Saône-et-Loire au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme G... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de Saône-et-Loire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... épouse G... et au département de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 août 2021.

2

N° 20LY00343


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00343
Date de la décision : 05/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Aide sociale - Différentes formes d'aide sociale - Aide sociale à l'enfance.

Famille - Adoption.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : OULARBI SAÏD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-08-05;20ly00343 ?
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