Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales la somme de 516 564,99 euros en réparation de ses préjudices consécutifs à la réalisation d'une arthroscopie au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne le 30 juillet 2010, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise confiée à un expert orthopédiste aux fins de déterminer l'origine de ses séquelles et, à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une expertise confiée à un expert orthopédiste aux fins de déterminer ses préjudices.
Par un jugement n° 1902071 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ainsi que les conclusions de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales relatives aux dépens.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2019, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 9 juillet, 9 septembre 2020 et 11 février 2021, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 septembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales la somme globale de 516 564,99 euros ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise confiée à un expert orthopédiste ou un rhumatologue aux fins de déterminer l'origine de ses séquelles ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une expertise confiée à un expert orthopédiste ou un rhumatologue aux fins de déterminer ses préjudices ;
5°) de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.
Il soutient que :
- contrairement aux conclusions du docteur Tallet, la chondrolyse n'est pas liée à un état antérieur qui aurait décompensé du fait de l'accident du travail du 9 mars 2010 ; le compte-rendu du professeur Farizon ne mentionne aucune lésion arthrosique dès lors que tous les éléments sont notés comme normaux à l'exception d'une lésion isolée du ménisque externe ; le docteur de la Garanderie et le docteur Monigard ont confirmé cette absence de mention de lésion arthrosique ; l'absence de tout état antérieur est confirmée par le docteur Girard-Chalumeau ; cette lecture radiologique du professeur Fessy et du docteur Chalumeau-Girard est confirmée à distance par un arthroscanner du genou réalisé le 1er septembre 2020 ;
- contrairement aux conclusions du docteur Raou, la chondrolyse n'est pas la conséquence de l'accident du travail du 9 mars 2010 ; il est singulier d'établir des lésions contemporaines de l'accident par des imageries ultérieures d'un an et demi et ce alors que les imageries contemporaines de l'accident ne montraient aucune atteinte ;
- la chrondrolyse est en rapport avec la chirurgie réalisée le 30 juillet 2010, ce que confirme une expertise réalisée par le docteur Sahuc et le docteur Heckel qui précise qu'il s'agit d'une complication de l'acte chirurgical non fautif ; si le tribunal administratif a exclu le lien causal entre la chondrolyse et la méniscectomie notamment en raison du délai d'apparition de la complication présentée, ni les experts, ni la littérature médicale ne mentionnent un délai de survenue qui serait rédhibitoire ; elle a eu des conséquences anormales au regard de son état de santé ou de son évolution prévisible ; il s'agit d'une complication rare ; en l'absence d'intervention, son état de santé serait resté à l'état décrit par le docteur Farizon alors que, depuis l'intervention, son état s'est aggravé ; la survenue prématurée des troubles a été précipitée par l'intervention ; le docteur Monigard a précisé que l'affirmation du docteur Tallet selon laquelle la chondrolyse survient dans 15 à 20 % dans les cas d'accident du travail, n'est corroborée par aucune référence ; s'agissant de la gravité, il justifie d'un arrêt temporaire de ses activités professionnelles pendant plus de six mois consécutifs ; il a été licencié et ne peut plus exercer la profession de jointeur plaquiste ;
Sur l'évaluation des préjudices :
S'agissant des préjudices patrimoniaux temporaires :
- il a été contraint d'engager des frais en ayant recours à un médecin conseil qui l'a assisté lors de l'expertise ; ces frais se sont élevés à la somme de 1 560 euros ;
- la perte de gains professionnels actuels du 30 août 2010 au 7 décembre 2014 s'élève à la somme de 61 340,16 euros ;
S'agissant des préjudices patrimoniaux permanents :
- la perte de gains professionnels s'élève à la somme de 13 935,79 euros et l'incidence professionnelle sera évaluée à la somme de 345 197,54 euros ;
- les frais de véhicule adapté seront évalués à la somme de 9 974 euros dès lors qu'un véhicule équipé d'une boite automatique coûte plus cher qu'un véhicule à boite manuelle et la consommation de carburant est plus élevée ;
S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux temporaires :
- le déficit fonctionnel temporaire sera évalué à hauteur de 10 317,50 euros ; les souffrances endurées seront évaluées à 15 000 euros ;
S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents :
- le déficit fonctionnel permanent sera évalué à 40 800 euros ;
- le préjudice d'agrément sera évalué à 10 000 euros ; il en va de même du préjudice esthétique.
Par un mémoire, enregistré le 18 janvier 2020, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le dommage subi par M. E... consistant en une réaction algodystrophique et une décompensation de phénomènes arthrosiques sur le plateau tibial externe du genou gauche ne sont pas imputables à l'arthroscopie réalisée le 30 juillet 2010 mais à un accident du travail survenu le 9 mars 2010 ; nonobstant le caractère isolé de cette lésion du ménisque externe, il existait une lésion antérieure imputable à l'accident du travail survenu le 9 mars 2010 ; la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a estimé, dans son avis du 17 septembre 2014, que le lien de causalité n'était pas établi entre l'arthroscopie et le dommage subi par M. E... ; le docteur Raou, l'expert judiciaire désigné par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne, confirme le rapport amiable et conclut à l'imputabilité exclusive des préjudices à l'accident du travail ; il existe bien deux rapports d'expertise concordants ; le docteur Girard-Chalumeau conclut à une lésion du ménisque externe antérieure à l'arthroscopie ; l'étude du docteur Fessy n'est pas contradictoire à l'ensemble des parties ; l'éloignement temporel est un des éléments à prendre en considération pour déterminer l'imputabilité du dommage subi à l'intervention chirurgicale ;
- en tout état de cause, le dommage subi n'est pas anormal ; il ressort du rapport d'expertise du docteur Tallet que la survenance du dommage présente une probabilité très élevée dans le cadre d'un accident du travail ;
- la demande d'expertise sera rejetée dès lors que les deux rapports d'expertise sont complets et ont été rendus après le respect du principe du contradictoire.
Par un courrier, enregistré le 24 février 2021, la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône a indiqué à la cour n'avoir aucune créance à faire valoir.
Le mémoire, enregistré le 26 mai 2021, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et M. E..., qui n'a pas souhaité ajouter à ses écritures.
Considérant ce qui suit :
1. Le 9 mars 2010, M. C... E..., né le 11 avril 1972, a ressenti un craquement et une vive douleur au genou gauche alors qu'il travaillait sur un chantier comme jointeur plaquiste. Le 29 mars 2010, une IRM a mis en évidence une lésion de la corne postérieure du ménisque externe. Le 30 juillet 2010, M. E... a subi au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne une régularisation du ménisque sous arthroscopie. Depuis l'intervention, M. E... souffre de douleurs invalidantes et les examens post-opératoires ont objectivé une algodystrophie survenue en fin d'année 2011 qui s'est amendée dans le courant de l'année 2013 et une chondrolyse consistant en une dégradation cartilagineuse. Il présente également un syndrome dépressif. Estimant que sa prise en charge par le centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne avait été inadaptée, M. E... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales de Rhône-Alpes d'une demande d'indemnisation des préjudices subis dans les suites de l'intervention du 30 juillet 2010. La commission régionale a ordonné une expertise confiée au docteur Tallet, chirurgien orthopédique et traumatologique. A la suite du dépôt du rapport d'expertise le 24 juin 2014, la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a estimé, par un avis du 17 septembre 2014, que les conditions d'une indemnisation par la solidarité nationale n'étaient pas satisfaites compte tenu de ce que la décompensation arthrotique était sans lien avec les soins et résultait du traumatisme initial et que la réaction algodystrophique avait guéri.
2. M. E... a également été examiné par le professeur Fessy, nommé en qualité de sapiteur du docteur Goldet, expert sollicité par l'assurance maladie de Rhône-Alpes, dans le cadre de l'évaluation du taux d'incapacité permanente en accident du travail, puis par le docteur Raou nommé par une ordonnance du 5 novembre 2015 du juge des référés du tribunal de grande instance de Saint Etienne.
3. M. E... relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que la somme de 516 564,99 euros soit mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et, à titre subsidiaire, à la désignation d'un expert.
Sur la mise en oeuvre de la solidarité nationale :
4. Aux termes de l'article L. 11421 du code de la santé publique : " II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. (...) ". Aux termes de l'article D. 1142-1 du même code, qui définit le seuil de gravité prévu par ces dispositions législatives, " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %.".
5. Il résulte de ces dispositions que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation des dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la double condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état, et que leur gravité excède le seuil défini à l'article D. 1142-1 du code de la santé publique. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Il en va ainsi des troubles, entraînés par un acte médical, survenus chez un patient de manière prématurée, alors même que l'intéressé aurait été exposé à long terme à des troubles identiques par l'évolution prévisible de sa pathologie. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.
6. Il résulte de l'instruction et notamment des différents rapports d'expertise que M. E... a subi, le 30 juillet 2010, au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, une régularisation de la corne postérieure du ménisque externe, que cette intervention a été réalisée dans les règles de l'art et que les soins ont été appropriés.
7. Se plaignant de douleurs dans les suites opératoires, M. E... a subi, le 21 septembre 2010, une IRM objectivant l'absence de signe d'algodystrophie, l'existence d'une petite hydarthrose et une petite cellulite sous-rotulienne antérieure. Une nouvelle IRM réalisée le 21 septembre 2011 a mis en évidence de discrets remaniements de la corne postérieure du ménisque externe sous la forme d'une fissure horizontale oblique et d'un émoussement du bord libre et n'a pas retenu d'autres anomalies en dehors de signes discrets d'inflammation de l'appareil extenseur, compatibles avec un éventuel syndrome rotulien. Le 30 avril 2012, les conclusions d'une scintigraphie osseuse font état " d'une lésion intense autant vasculaire et autant tardive bien focalisée de topographie plutôt sous- chondrale sur le plateau tibial externe du genou gauche évoquant une origine traumatique et s'accompagnant d'une réaction algodystrophique modérée sur l'ensemble du genou gauche ". Le 9 mai 2012, une IRM de cuisse a confirmé l'existence d'un oedème séquellaire du plateau tibial externe et une nouvelle IRM du genou gauche, réalisée le 27 novembre 2013, a retrouvé des stigmates de fissures suturées du ménisque externe et a conclu à une chondropathie tibiale externe et rotulienne a minima. Un arthroscanner du 17 novembre 2014 a mis en évidence un début d'arthrose fémoro-tibiale externe.
En ce qui concerne le lien de causalité :
8. Le docteur Tallet, expert désigné par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, note que la réaction algodystrophique a guéri mais que " l'évolution ultérieure a été marquée par une décompensation de phénomènes arthrosiques sur le plateau tibial externe du genou gauche. L'origine de cette décompensation se situe dans le fait traumatique qui a entraîné un hyper appui sur le cartilage qui était déjà le siège de lésions arthrosiques débutantes comme en témoigne le compte rendu de l'arthroscopie du docteur Farizon qui fait état, au niveau du compartiment fémoro-tibial externe et plus précisément du tableau tibial externe d'un aspect dépoli ". Toutefois, il résulte de l'instruction et notamment du compte rendu de l'arthroscopie du genou que le docteur Farizon, qui a procédé à l'intervention litigieuse, n'a relevé que la lésion isolée du ménisque externe sans faire état d'aucune autre anomalie.
9. M. E... fait valoir que contrairement aux conclusions du docteur Raou, la chondrolyse n'est pas la conséquence de l'accident du travail du 9 mars 2010.
10. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du docteur Raou qui a été désigné par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne, que " la réussite d'un acte opératoire est conditionnée par de multiples facteurs indépendants de la seule qualité technique de réalisation de cet acte : le surpoids du patient, son âge, ses capacités biologiques à cicatriser, son psychisme, la nature de la lésion. Il convient de noter ici que les méniscectomies externes ont une plus grande fréquence de suites compliquées que les méniscectomies internes tels douleurs résiduelles, épanchement persistant, pincement articulaire précipitant le patient dans l'arthrose. (...) L'état séquellaire actuel (raideur modérée du genou gauche, arthrose fémoro-tibiale externe débutante objectivée par un arthroscanner du genou gauche en date du 17 novembre 2014) est le fait exclusif de l'accident du 9 mars 2010 au cours duquel la lésion méniscale externe s'est constituée avec, concomitamment, un traumatisme chondral du compartiment fémoro-tibial externe par écrasement. L'arthroscopie du 30 juillet 2010 n'intervient que comme un épiphénomène. Il n'existe aucun argument factuel pour attribuer l'état séquellaire actuel à une algodystrophie venue grever cette intervention. (...) Les préjudices dont peut se prévaloir M. E... sont à mettre sur le compte exclusif des lésions articulaires du genou gauche contemporaines de l'accident de travail du 9 mars 2010, à savoir contusions du plateau tibial externe, du condyle externe constatées sur les IRM 2011 et 2012 ainsi que sur la scintigraphie osseuse du 30 avril 2012 et d'une lésion méniscale externe à type de clivage horizontal ".
11. Toutefois, comme il a été dit au point 8, il résulte de l'instruction que le docteur Farizon, qui a procédé à l'intervention litigieuse, n'a relevé aucune anomalie du compartiment fémoro-patellaire et des compartiments fémoro-tibial interne et externe. Le rapport d'expertise établi par le professeur Fessy fait état, d'une part, de ce que, selon les radiographies du 10 mars 2010, il n'y a pas de lésion dégénérative notamment sur les schuss et, d'autre part, de ce que, selon le compte rendu opératoire, " il existe un condyle externe d'aspect normal. Le ménisque externe est régularisé. Le plateau tibial externe est considéré comme normal et non dépoli. Le pivot central est sain " et retient que " le patient a très probablement présenté une chondrolyse du plateau tibial externe séquellaire du geste arthroscopique comme on en voit parfois. (...) Toutes les séquelles résultent de l'accident du travail et de la complication non fautive ". Ces conclusions sont également identiques à celles du docteur Sahuc du 1er juin 2017, établies à la demande de l'assureur de M. E..., qui fait état de ce que " selon notre sapiteur, il s'agit bien d'une complication de l'acte chirurgical non fautif, mais qui est responsable de l'état actuel du genou de M. E... ", le sapiteur indiquant que " cette complication est non exceptionnelle dans les suites d'une arthroscopie. Il s'agit d'une complication non fautive imputable à la lésion méniscale externe ayant entraîné une chirurgie méniscale arthroscopique ". Ainsi, M. E... établit l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre les complications présentées et l'intervention de méniscectomie qu'il a subie du 30 juillet 2010.
En ce qui concerne les conditions d'engagement de la solidarité nationale :
12. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du docteur Raou que M. E... présente une raideur modérée du genou associée à des douleurs fémoro-tibiales externes. Le docteur Hivert fait état de " douleurs invalidantes de l'ensemble du genou gauche, limitant la marche à une dizaine de minutes entraînant une boiterie constatée lors de notre examen avec une attitude en genu valgum gauche, (...) et une limitation de la flexion du genou gauche à 90° ".
13. Si le docteur Hivert fait état dans son rapport critique du 7 décembre 2017 de ce que " l'acte médical réalisé le 30 juillet 2010 a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement ", il n'assortit cette affirmation d'aucune analyse quant aux répercussions d'une absence de traitement sur une lésion du ménisque externe et sur les capacités qu'aurait conservées M. E... malgré son traumatisme du ménisque et ce alors qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise du docteur Goldet et de son sapiteur le professeur Fessy que l'indication opératoire initiale était justifiée. Par suite, il n'est pas établi que les conséquences de l'intervention du 30 juillet 2010 sont notablement plus graves que celles auxquelles M. E... était exposé en l'absence de régularisation du ménisque sous arthroscopie. Il n'est pas davantage établi que les troubles présentés par M. E..., entraînés par l'intervention chirurgicale, seraient survenus de manière prématurée au regard de son état antérieur à l'intervention.
14. M. E... fait valoir que la chondrolyse constitue la réalisation d'un risque rare et présente une faible probabilité.
15. Si M. E... se prévaut d'un article " Chondrolyse fémoro-tibiale médiale rapide après méniscectomie arthroscopique " parue dans la revue de chirurgie orthopédique et traumatologique de novembre 2014, cet article ne fait référence qu'au cas de survenue rapide d'une chondrolyse après ménisectomie arthroscopique, ce qui n'est pas le cas de M. E....
16. Il résulte également de l'instruction que le rapport d'expertise du docteur Sahuc du 1er juin 2017 fait état de l'avis de son sapiteur, le docteur Heckel, qui a indiqué, le 19 mars 2017, que dans les suites de l'arthroscopie du genou gauche, M. E... a présenté une chondrolyse fémoro-tibiale externe et a précisé que " cette complication est non exceptionnelle dans les suites d'une arthroscopie ".
17. Si M. E... fait encore valoir que la survenue de l'algodystrophie présentait une faible probabilité en s'appuyant sur le rapport critique du docteur Monigard indiquant que " la plupart des rares études réalisées font plutôt état de complications comprises entre 1 et 3 % ", le professeur Fessy intervenant en qualité de sapiteur a précisé que, dans les suites opératoires, " le patient a présenté des douleurs et épanchement. Il est suspecté une algodystrophie possible mais il s'agit d'un tableau assez banal dans le contexte. "
18. Il en résulte qu'en l'espèce M. E... n'établit pas que la survenue d'une algodystrophie et d'une chondrolyse dont il a été victime dans les suites de l'intervention du 30 juillet 2010 présentait une probabilité faible.
19. Dès lors, les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale sur le fondement des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ne sont pas réunies.
20. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que M. E... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les dépens :
21. En l'absence de dépens engagés devant le tribunal administratif ou dans la présente instance, la demande de M. E... tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales doit être rejetée.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
22. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. E... sollicite le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juin 2021.
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N° 19LY04382