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01/06/2021 | FRANCE | N°20LY03158

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ere chambre - formation a 3, 01 juin 2021, 20LY03158


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A..., représentée par Me B..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le préfet de la Drôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement et, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la lecture en audience publique

de la décision de la Cour nationale du droit d'asile soit qu'il soit statué par o...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A..., représentée par Me B..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le préfet de la Drôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement et, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile soit qu'il soit statué par ordonnance, jusqu'à la notification de celle-ci .

Par un jugement n° 2005093 du 1er octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a suspendu l'exécution de l'arrêté du 5 août 2020 jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur le recours dirigé à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 mai 2020, mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à Me B..., avocate de Mme D... A..., sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour

I - Par une requête enregistrée le 30 octobre 2020 sous le n° 20LY03158 et un mémoire enregistré le 3 février 2021, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005093 du 1er octobre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a suspendu l'exécution de l'arrêté du 5 août 2020 jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur le recours dirigé à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 mai 2020 et mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... A... devant le tribunal.

Il soutient que l'audience du tribunal a eu lieu le 24 septembre 2020 et à cette date Mme A... n'avait pas encore déposé son recours auprès de la CNDA et c'est à tort que le premier juge a considéré que son passé douloureux avait une influence manifeste sur sa situation et a suspendu l'arrêté en litige.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 mai 2021, Mme A..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'Etat à verser à son conseil la somme de 1500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par une décision du 6 janvier 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme A....

II - Par une lettre enregistrée le 8 janvier 2021 au service de l'exécution des décisions de justice de la cour, Mme A..., représentée par Me B..., a demandé sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative qu'il soit ordonné au préfet de la Drôme d'exécuter le jugement n° 2005093 rendu le 1er octobre 2020 par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble en lui délivrant une attestation de demande d'asile dans un délai de quarante-huit heures sous astreinte définitive de 100 euros par jour de retard et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 3 février 2021, le préfet de la Drôme a conclu au rejet de la demande d'exécution et fait valoir qu'il n'avait pas l'obligation de délivrer une attestation de demandeur d'asile à Mme A... car la décision d'obligation de quitter le territoire n'avait pas été annulée mais seulement suspendue.

Par un mémoire enregistré le 8 mars 2021, Mme A..., représentée par Me B... a confirmé sa demande d'exécution.

Par ordonnance du 11 mars 2021, le président de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, sous le n° 21LY00753, pour qu'il soit statué sur la demande de Mme A... tendant à l'exécution de ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Déal, présidente de chambre ;

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes susvisées concernent un même jugement, sont relatives à la situation de la même personne et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par le même arrêt.

Sur la requête n° 20LY03158 :

2. Le préfet de la Drôme relève appel du jugement du 1er octobre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a suspendu l'exécution de l'arrêté du 5 août 2020 jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ait statué sur le recours dirigé à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 28 mai 2020 et mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à Me B..., avocate de Mme D... A..., sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. Aux termes de l'article L.743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. ".

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la fiche telem -ofpra produite par le préfet de la Drôme en première instance que la décision de l'OFPRA du 28 mai 2020 a été notifiée à Mme A... le 20 juillet 2020 et qu'elle a déposé le 24 juillet 2020 une demande d'aide juridictionnelle auprès de la CNDA. Toutefois cette fiche ne mentionne pas la date à laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a statué sur cette demande. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient le préfet de la Drôme à la date du jugement dont il fait appel le délai de recours devant la CNDA n'avait pas expiré.

5. En second lieu, le préfet de la Drôme n'apporte aucun élément permettant d'établir que le premier juge aurait porté une appréciation erronée sur la situation personnelle de Mme A... en lui permettant de se maintenir sur le territoire afin notamment de pouvoir présenter oralement son récit de vie devant la CNDA.

6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal Administratif de Grenoble a suspendu l'exécution de l'arrêté du 5 août 2020 jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur le recours dirigé à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 mai 2020 et mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais de l'instance :

7. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. En application de ces dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à Me B..., avocate de Mme A..., sous réserve de renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Sur la requête n° n° 21LY00753 :

8. Aux termes de l'article L.741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur: " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable (...). / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) " et aux termes de l'article R. 743-1 du même code alors en vigueur : " L'attestation de demande d'asile est renouvelée jusqu'à l'expiration du délai fixé à l'article L. 743-1. (...) Le premier renouvellement est effectué sur présentation de la lettre de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides mentionnée au troisième alinéa de l'article R. 723-1. Sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 743-2, en cas de recours contre une décision de l'office rejetant une demande d'asile, le renouvellement est effectué sur présentation de l'avis de réception d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile mentionné à l'article R. 733-8. (...)".

9. La suspension de l'exécution de la décision d'obligation de quitter le territoire du 5 août 2020 prononcée par le jugement dont Mme A... demande exécution a pour effet de permettre à cette dernière de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la CNDA ait statué sur le recours dirigé à l'encontre de la décision de l'OFPRA du 28 mai 2020. Il est constant que le recours de Mme A... à l'encontre de cette dernière décision a été enregistré à la CNDA le 1er octobre 2020. Dans ces conditions et en application des dispositions de l'article R.743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, le préfet de la Drôme était tenu de renouveler l'attestation de demande d'asile de Mme A.... Il y a donc lieu de lui enjoindre de procéder au renouvellement de cette attestation de demande d'asile dans un délai de cinq jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Sur les frais de l'instance :

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la Mme A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à Mme A... une attestation de demande d'asile dans un délai de cinq jours à compter de la notification du présent arrêt et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Me B..., avocate de Mme A..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet de la Drôme, à Me B... et à Mme D... A....

Délibéré après l'audience du 25 mai 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme F... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.

2

N° 20LY03158 - 21LY00753


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20LY03158
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Daniele DEAL
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : MATHIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-01;20ly03158 ?
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