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07/01/2021 | FRANCE | N°19LY01235

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 07 janvier 2021, 19LY01235


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la SARL Hôtel Mont Chéry a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision non datée par laquelle le maire de la commune des Gets n'a pas fait droit à sa demande de permis modificatif n° 3, et de condamner la commune des Gets à lui rembourser la somme de 362 315,28 euros versée au titre de la participation pour non réalisation d'aires de stationnement.

Par un jugement n° 1604486-1604487 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rej

eté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la SARL Hôtel Mont Chéry a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision non datée par laquelle le maire de la commune des Gets n'a pas fait droit à sa demande de permis modificatif n° 3, et de condamner la commune des Gets à lui rembourser la somme de 362 315,28 euros versée au titre de la participation pour non réalisation d'aires de stationnement.

Par un jugement n° 1604486-1604487 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 3 avril 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 20 juillet 2020, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SARL Hôtel Mont Chéry, représentée par la SELARL Cabinet Benoît A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 février 2019 ;

2°) d'annuler cette décision non datée du maire des Gets refusant d'instruire sa demande de permis modificatif ;

3°) de condamner la commune des Gets à lui rembourser cette somme de 362 315,28 euros ;

4°) de faire injonction à la commune des Gets de se prononcer dans un délai de deux mois sur sa demande de permis de construire modificatif et de rembourser dans le même délai la participation pour non réalisation d'aires de stationnement qu'elle a versée, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

5°) à titre subsidiaire de fixer la participation pour non réalisation d'aires de stationnement à vingt places manquantes ;

6°) de mettre à la charge de la commune des Gets la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- dans la mesure où le refus opposé à sa précédente demande de délivrance de permis modificatif a été annulé par jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2015, le maire des Gets devait, en application des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, se placer pour apprécier la possibilité de délivrer un permis de construire modificatif à la date du refus initial ; il ne pouvait par suite opposer l'achèvement des travaux ;

- sa demande tendait à la délivrance d'un permis de régularisation ;

- la participation pour non réalisation d'aires de stationnement doit être calculée en tenant compte, le cas échéant, des modifications apportées au projet ayant fait l'objet de permis modificatifs ;

- à la date du refus de permis de construire, la participation pour non réalisation d'aires de stationnement n'existait plus, de sorte qu'elle a droit au remboursement de l'intégralité de la somme acquittée ;

- elle est fondée à exciper de l'illégalité de la délibération du 3 juillet 2018 du conseil municipal des Gets instituant la participation financière pour non réalisation d'aires de stationnement, dès lors qu'elle fixe un montant par place supérieur à celui autorisé par l'article L. 332-7-1 du code de l'urbanisme ;

- compte tenu de la rédaction de l'article Ua 12 du règlement du PLU à la date du refus opposé par le maire des Gets, il ne pouvait être exigé que vingt places de stationnement ; à titre subsidiaire, la participation doit être déterminée sur ce fondement.

Par un mémoire enregistré le 19 juin 2020, la commune des Gets, représentée par la SELARL Philippe B... et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 22 juillet 2020, par une ordonnance en date du 22 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me A... pour la SARL Hôtel Mont Chéry ainsi que celles de Me E..., substituant Me B..., pour la commune des Gets ;

Considérant ce qui suit :

1. Le maire des Gets a délivré le 22 décembre 2008 à M. D... et Mme C... un permis de construire, transféré le 26 octobre 2011 à la SARL Hôtel Mont Chéry, en vue de la construction d'un immeuble comprenant des logements et des commerces. Ce permis était assorti d'une participation de 543 473 euros pour non-réalisation de trente-cinq places de stationnement. Le 28 août 2012, la SARL Hôtel Mont Chéry a déposé une demande de permis de construire modificatif portant à cinq au lieu de trois le nombre de locaux commerciaux, modifiant des façades et créant un châssis de toiture. Par arrêté du 11 février 2013, le maire des Gets a refusé de délivrer ce permis. Cette décision a été annulée par jugement du 31 décembre 2015 du tribunal administratif de Grenoble. Par un courrier du 5 avril 2016, la société a confirmé sa demande de délivrance d'un permis et sollicité la restitution, à hauteur de la somme de 362 315,28 euros, de la participation pour non réalisation de places de stationnement. Le maire des Gets a opposé un refus à ces deux demandes par une décision non datée. La SARL Hôtel Mont Chéry relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation du refus opposé à sa demande de permis modificatif et à la restitution de la participation qu'elle avait versée.

Sur le refus de délivrer un permis de construire :

2. Si la construction achevée n'est pas conforme au projet autorisé, le titulaire du permis de construire conserve la faculté, notamment si une action civile tendant à la démolition ou à la mise en conformité de la construction a été engagée, de solliciter la délivrance d'un nouveau permis de construire destiné à la régulariser, qui doit porter sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé et respecter les règles d'urbanisme en vigueur à la date de son octroi.

3. Pour rejeter la demande de la SARL Hôtel Mont Chéry, l'invitant à statuer à nouveau sur sa demande du 28 août 2012, le maire des Gets a indiqué que les travaux autorisés par le permis de construire du 22 décembre 2008 étant achevés, il ne pouvait délivrer un permis de construire modificatif. Il est constant que la SARL Hôtel Mont Chéry a déposé une déclaration attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux le 7 novembre 2013. Toutefois, en sollicitant un nouvel examen de sa demande du 28 août 2012, portant sur des travaux qui ont été exécutés, ainsi que le reconnaît la commune des Gets, suite à l'annulation du premier refus de permis modificatif opposé par le maire des Gets, la SARL Hôtel Mont Chéry doit être regardée, dans les circonstances particulières de l'espèce et compte tenu de l'effet du temps, comme ayant entendu solliciter la délivrance d'un permis régularisant les travaux effectués. Le maire des Gets ne pouvait dans ces conditions refuser de faire droit à cette demande, au seul motif que les travaux ont été achevés, postérieurement au premier refus illégal opposé à la demande de permis modificatif. Par suite, la SARL Hôtel Mont Chéry est fondée à demander l'annulation de la décision non datée par laquelle le maire des Gets a refusé de faire droit à sa demande du 5 avril 2016 réitérant sa demande de permis en date du 28 août 2012.

4. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît susceptible de fonder l'annulation du refus opposé par le maire des Gets.

Sur la participation pour non-réalisation de places de stationnement :

5. Aux termes de l'article L. 123-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du permis de construire initial : " (...) Lorsque le plan local d'urbanisme impose la réalisation d'aires de stationnement, celles-ci peuvent être réalisées sur le terrain d'assiette ou dans son environnement immédiat. / Lorsque le bénéficiaire du permis (...) ne peut pas satisfaire aux obligations résultant de l'alinéa précédent, il peut être tenu quitte de ces obligations en justifiant, pour les places qu'il ne peut réaliser lui-même, soit de l'obtention d'une concession à long terme dans un parc public de stationnement (...) ou de la concession de places dans un parc privé de stationnement (...). / En l'absence d'un tel parc, le bénéficiaire du permis (...) peut être tenu de verser à la commune une participation en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement dans les conditions définies par l'article L. 332-7-1. ". L'article L. 332-7-1 du même code disposait : " La participation pour non-réalisation d'aires de stationnement (...) est fixée par le conseil municipal. Son montant ne peut excéder 12 195 euros par place de stationnement. Cette valeur (...) est modifiée au 1er novembre de chaque année en fonction de l'indice du coût de la construction publiée par l'Institut national de la statistique et des études économiques ". En vertu de l'article L. 332-28 du même code, la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement est prescrite par le permis de construire qui " en constitue le fait générateur " et " en fixe le montant ".

6. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées au point précédent que le fait générateur de la participation destinée à la réalisation de parcs publics de stationnement est la délivrance du permis de construire et que cette participation est liquidée selon les règles et au taux applicables à la date à laquelle le permis de construire a été accordé. La délivrance d'un permis modificatif, ou d'un permis de régularisation, ne peut constituer le fait générateur d'une nouvelle participation se substituant à la précédente que dans le cas où ce permis emporte une modification substantielle du permis initial.

7. Il résulte de l'instruction que la demande de permis modificatif du 28 août 2012, réitérée par la SARL Hôtel Mont Chéry, ne portait que sur des modifications ponctuelles de façades et de châssis, ainsi que sur des aménagements intérieurs modifiant le nombre de commerces. Dans ces conditions, compte tenu de leur ampleur très limitée, la délivrance éventuelle d'un permis modificatif ou de régularisation ne saurait constituer le fait générateur d'une nouvelle participation. La SARL Hôtel Mont Chéry ne peut ainsi solliciter la restitution de la participation versée au motif qu'à la date du refus qui lui a été opposé, la participation pour non-réalisation d'aires de stationnement n'existe plus.

8. La SARL Hôtel Mont Chéry fait également valoir, à titre subsidiaire, qu'eu égard aux dispositions du plan local d'urbanisme (PLU) applicables à la date de sa demande de permis de régularisation, le montant de sa participation doit être réduit. Les modifications apportées au projet étant toutefois sans lien avec le nombre et la superficie des logements, elle ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir de ces circonstances nouvelles pour solliciter une réduction de sa participation à ce titre. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le nombre de places requises pour les commerces à la date du permis modificatif, soit un total de quarante-et-une (deux places pour chacun des établissements, soit un total de dix, plus trente-et-une places au titre des stationnements requis par tranche de 25 m2 de surface de plancher) serait inférieur à celui envisagé dans le permis initial, soit quarante, le calcul présenté par la SARL Hôtel Mont Chéry étant entaché d'une erreur matérielle. Au demeurant, l'augmentation du nombre de commerces envisagée ne peut conduire à une réduction de la participation mise à la charge de la société, laquelle ne saurait résulter de la seule modification des dispositions du plan local d'urbanisme applicables aux stationnements. Dans ces conditions, la demande de réduction de la participation sollicitée par la SARL Hôtel Mont Chéry ne peut qu'être rejetée.

9. Enfin, le moyen selon lequel la délibération du 3 juillet 2008 du conseil municipal des Gets aurait fixé un montant de participation supérieur à celui autorisé par les dispositions de l'article L. 332-7-1 du code de l'urbanisme manque en fait et doit être, en tout état de cause, écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Hôtel Mont Chéry est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en ce qu'elle tendait à l'annulation de la décision non datée par laquelle le maire des Gets a refusé de lui délivrer un permis de construire de régularisation.

Sur l'injonction :

11. Aux termes de l'article L. 9112 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. "

12. L'annulation de la décision refusant de délivrer un permis de régularisation à la SARL Hôtel Mont Chéry implique que, comme le demande la requérante, le maire des Gets procède au réexamen de sa demande. Il y a lieu d'impartir au maire des Gets un délai de deux mois pour statuer à nouveau sur cette demande. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la SARL Hôtel Mont Chéry au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société requérante, qui n'est pas partie perdante, verse à la commune des Gets la somme qu'elle demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision non datée du maire des Gets refusant de délivrer un permis de régularisation à la SARL Hôtel Mont Chéry ainsi que, dans cette mesure, le jugement du 7 février 2019 du tribunal administratif de Grenoble, sont annulés.

Article 2 : Il est fait injonction au maire des Gets de statuer à nouveau sur la demande de la SARL Hôtel Mont Chéry dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt.

Article 3 : Les conclusions des parties sont rejetées pour le surplus.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Hôtel Mont Chéry et à la commune des Gets.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Daniel Josserand-Jaillet, président de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme G... F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2021.

2

N° 19LY01235

fp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01235
Date de la décision : 07/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

68-03-025-02-02-01-06 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Octroi du permis. Permis assorti de réserves ou de conditions. Objet des réserves ou conditions. Participations financières imposées aux constructeurs.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CABINET BENOIT FAVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-01-07;19ly01235 ?
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