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21/12/2020 | FRANCE | N°18LY00890

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 21 décembre 2020, 18LY00890


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Arthesis Diffusion a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner le centre hospitalier de Montluçon à lui verser la somme de 9 265,94 euros HT en paiement de loyers impayés pour la location et la maintenance d'équipements audiovisuels, ainsi que la somme de 30 924,72 euros HT en réparation du préjudice causé par l'utilisation des équipements au-delà de la date convenue.

Par un jugement n° 1502300 du 28 décembre 2017 ce tribunal a fait droit à sa demande.
>Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 mars 2018, le centre hospita...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Arthesis Diffusion a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner le centre hospitalier de Montluçon à lui verser la somme de 9 265,94 euros HT en paiement de loyers impayés pour la location et la maintenance d'équipements audiovisuels, ainsi que la somme de 30 924,72 euros HT en réparation du préjudice causé par l'utilisation des équipements au-delà de la date convenue.

Par un jugement n° 1502300 du 28 décembre 2017 ce tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 mars 2018, le centre hospitalier de Montluçon, représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement et de rejeter la demande présentée par la société Arthesis Diffusion devant le tribunal ;

2°) de mettre à la charge de la société Arthesis Diffusion la somme de 4 000 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- les bons de commande et les contrats litigieux ont été signés par le directeur adjoint de l'établissement, qui ne bénéficiait pas d'une délégation de signature le lui permettant ;

- les bons de commande ne comportaient aucun cachet de l'établissement ;

- aucune mise en concurrence n'a été mise en oeuvre ;

- le directeur adjoint a opéré un découpage artificiel des commandes ;

- le coût anormalement élevé des prestations n'a pas été justifié ;

- les contrats litigieux, qui ne prévoyaient pas de restitution du matériel loué, devaient emporter transfert de la propriété à leur terme pour le prix d'un loyer supplémentaire ;

- il s'en déduit que le prix de location était manifestement excessif, alors que la société Arthesis Diffusion n'établit pas que la durée de vie des équipements aurait été de huit ans ;

- les sommes demandées ne sont pas justifiées et la location pendant 48 mois couvre intégralement le prix de vente.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 mars 2019, la société Eiffage Energie Systèmes Arthesis, venant aux droits de la société Arthesis Diffusion, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Montluçon au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- la plainte déposée contre elle par le centre hospitalier a été classée sans suite ;

- le moyen tiré de l'absence de signature et d'identification des parties aux contrats n'est pas fondé ;

- s'agissant de l'indemnisation du préjudice constitué par la perte de loyers, le moyen tiré du caractère excessif des prix contractuels est inopérant dès lors que les premiers juges ont fait application des stipulations contractuelles ;

- le centre hospitalier ne conteste pas s'être approprié le matériel loué et n'établit pas qu'il aurait été défectueux pendant la période indemnisée par le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant le centre hospitalier de Montluçon et celles de Me D..., représentant la société Arthesis Diffusion ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Arthesis Diffusion a loué au centre hospitalier de Montluçon, en exécution de six bons de commande émis entre le 7 juin 2011 et le 16 février 2012 et autant de contrats signés par le directeur-adjoint de cet établissement, des équipements audiovisuels destinés à deux salles de visioconférence et pour les besoins de cinq autres services. Après le refus du centre hospitalier de s'acquitter de l'ensemble des factures émises, la société Arthesis Diffusion a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à engager la responsabilité contractuelle de l'établissement ou, à défaut ses responsabilités quasi-contractuelle et quasi-délictuelle. Par un jugement du 28 décembre 2017, le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier sur le fondement de sa responsabilité contractuelle à verser à la société Arthesis Diffusion, d'une part, la somme de 9 265,94 euros en réparation de son préjudice tenant à la perte de loyers subie jusqu'à la date d'échéance de location des matériels concernés et, d'autre part, la somme 30 924,72 euros en réparation de celui tenant à l'impossibilité de louer à nouveau ces matériels du fait de leur appropriation indue par le centre hospitalier de Montluçon. Ce dernier relève appel de ce jugement.

2. Lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel. Ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige. Par exception, il en va autrement lorsque, eu égard, d'une part, à la gravité de l'illégalité et, d'autre part, aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat. Ces circonstances doivent ainsi être directement liées au vice de passation retenu.

3. Il résulte de l'instruction que les six bons de commande et les contrats afférents ont été signés par le directeur des systèmes d'information du centre hospitalier de Montluçon. Si l'établissement soutient que ce directeur ne bénéficiait pas d'une délégation pour signer le bon de commande du 16 février 2012 pour l'équipement de la salle " pôle logistique " et le contrat afférent et qu'aucun des bons de commandes n'est revêtu du cachet de l'établissement, le centre hospitalier de Montluçon a exécuté normalement les contrats pendant plusieurs années, réglant ainsi les loyers trimestriels jusqu'au 26 octobre 2015, sans émettre d'objection. Le centre hospitalier invoque en outre l'absence de mise en concurrence pour l'attribution des contrats et le coût particulièrement élevé des prestations, sans néanmoins démontrer que son directeur des systèmes d'information l'aurait engagé à des conditions économiquement désavantageuses. Enfin, la plainte contre X déposée par le nouveau directeur auprès du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Montluçon a été classée sans suite en 2015. Eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, les irrégularités invoquées et les circonstances dans lesquelles elles ont été commises ne sauraient être regardées comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du récapitulatif de paiements produit par la société Arthesis Diffusion, dont l'exactitude n'est pas contestée par le centre hospitalier de Montluçon, que l'établissement reste redevable envers la société pour la période du 26 octobre 2015 au 1er avril 2016, terme des contrats, de la somme de 9 265,95 euros au titre des loyers échus et à échoir. Par ailleurs, si le centre hospitalier soutient que les contrats ne prévoyaient pas de modalité de restitution du matériel en fin de location et que les offres commerciales de la société Arthesis Diffusion portaient sur une location de quarante-huit mois avec option de rachat du matériel en fin de contrat, les conventions signées ne comportaient pas de clause de rachat et stipulaient seulement que les équipements devaient être rendus en fin de location. La société Eiffage Energie Systèmes Arthesis, venant aux droits de la société Arthesis Diffusion, fait valoir, sans être contestée, que la durée de vie des équipements conservés par le centre hospitalier était de huit ans. La somme de 30 924,72 euros que l'établissement a été condamné à verser par le jugement attaqué en réparation du dommage résultant de la perte de loyers futurs correspond à la recette HT dégagée par la location de ces équipements sur une période de vingt-quatre mois comme le demandait la société Arthesis Diffusion. Le centre hospitalier n'établit pas en tout état de cause que la location pendant quarante-huit mois de ces équipements couvrait intégralement le prix de vente. C'est dès lors à juste titre que le tribunal l'a condamné à verser la somme en cause.

5. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Montluçon n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à la demande de la société Arthesis Diffusion. Sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des frais du litige. Il y a lieu en revanche de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros à verser à ce même titre à la société Eiffage Energie Systèmes Arthesis.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Montluçon est rejetée.

Article 2 : Le centre hospitalier de Montluçon versera à la société Eiffage Energie Systèmes Arthesis la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Montluçon et à la société Eiffage Energie Systèmes Arthesis.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme C..., président assesseur,

M. Rivière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2020.

2

N° 18LY00890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00890
Date de la décision : 21/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Prix.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : BCV AVOCATS ASSOCIES - BROCHETON - COMBARET - VIAL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-21;18ly00890 ?
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