Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 du président de la métropole de Lyon lui retirant son agrément d'assistante maternelle, d'enjoindre à cette autorité administrative de lui délivrer un agrément d'assistante maternelle dans un délai de quinze jours et de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1801315 du 12 février 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 avril 2019 et un mémoire enregistré le 22 novembre 2019, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1801315 du 12 février 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 du président de la métropole de Lyon lui retirant son agrément d'assistante maternelle ;
3°) d'enjoindre au président de la métropole de Lyon de lui délivrer un agrément d'assistante maternelle dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- aucun avertissement ne figure à son dossier de sorte qu'elle ne pouvait, en application de l'article R. 421-26 du code de l'action sociale et des familles, faire l'objet d'un retrait d'agrément ;
- elle n'a commis aucun manquement grave ou répété s'agissant du nombre d'enfants accueillis ou de la sécurité de ceux-ci ;
- la décision de retrait de l'agrément est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense enregistrés le 22 juillet 2019 et le 17 janvier 2020, la métropole de Lyon, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 12 mai 2020 prise en application du second alinéa du II de l'article 16 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mai 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la métropole de Lyon.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., dont l'agrément en qualité d'assistante maternelle a été renouvelé le 4 juillet 2013 pour l'accueil simultané de quatre enfants dont deux âgés de plus de deux ans, relève appel du jugement du 12 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 janvier 2018 par laquelle le président de la métropole de Lyon lui a retiré cet agrément.
2. En premier lieu, aux termes du quatrième alinéa de l'article L 421-6 du code de l'action sociale et des familles : " Toute décision de retrait de l'agrément (...) doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés ".
3. La décision en litige vise les articles L. 421-6, R. 421-26 et R. 421-39 du code de l'action sociale et des familles, rappelle le déroulement de la procédure administrative préalable, expose de manière détaillée les observations formulées par Mme E... et mentionne que la sécurité des enfants n'est plus assurée au triple motif que Mme E... accueille plus d'enfants que ne l'autorise son agrément, qu'elle n'a pas déclaré aux services de la protection maternelle et infantile tous les enfants accueillis et que des problèmes de sécurité ont été repérés lors d'une visite à son domicile. Elle énonce ainsi les considérations de droit et de fait qui ont conduit à son adoption. Mme E..., contrairement à ce qu'elle soutient, est ainsi mise à même de la contester utilement devant le juge de l'excès de pouvoir. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit, par suite, être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 421-26 du code de l'action sociale et des familles : " Un manquement grave ou des manquements répétés aux obligations de déclaration et de notification prévues aux articles R. 421-38, R. 421-39, R. 421-40 et R. 421-41 ainsi que des dépassements du nombre d'enfants mentionnés dans l'agrément et ne répondant pas aux conditions prévues par l'article R. 421-17 peuvent justifier, après avertissement, un retrait d'agrément ". Aux termes de l'article R. 421-39 de ce code : " L'assistant maternel est tenu de déclarer au président du conseil départemental, dans les huit jours suivant leur accueil, le nom et la date de naissance des mineurs accueillis ainsi que les modalités de leur accueil et les noms, adresses et numéros de téléphone des représentants légaux des mineurs. Toute modification de l'un de ces éléments est déclarée dans les huit jours. L'assistant maternel tient à la disposition des services de protection maternelle et infantile des documents relatifs à son activité prévisionnelle, ainsi qu'à son activité effective, mentionnant les jours et horaires d'accueil des enfants qui lui sont confiés. Il informe le président du conseil départemental du départ définitif d'un enfant et, selon des modalités fixées par le conseil départemental, de ses disponibilités pour accueillir des enfants ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, par trois courriers en date des 19 juin 2007, 5 octobre 2010 et 16 octobre 2014, le président du conseil général du Rhône a, d'une part, rappelé à Mme E... ses obligations de respecter le nombre d'enfants autorisés par l'agrément qui lui a été délivré et de déclarer dans les huit jours toute arrivée ou départ d'enfants accueillis à son domicile et, d'autre part, l'a avertie qu'un nouveau manquement à ses obligations d'assistante maternelle pourrait avoir des conséquences quant au maintien de son agrément. Les manquements retenus à l'encontre de Mme E... et tirés du dépassement du nombre d'enfants autorisés par l'agrément et de l'absence de respect des obligations de déclaration prévues à l'article R. 421-39 du code de l'action sociale et des familles ont ainsi donné lieu à un avertissement préalable à l'engagement de la procédure de retrait de l'agrément. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme E... n'aurait pas fait l'objet d'un avertissement en méconnaissance des dispositions de l'article R. 421-26 du code de l'action sociale et des familles ne peut qu'être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) ". Aux termes de l'article L. 421-6 de ce code : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les entretiens avec un candidat à des fonctions d'assistant maternel ou avec un assistant maternel agréé et les visites à son lieu d'exercice doivent permettre d'apprécier, au regard des critères précisés dans le référentiel figurant à l'annexe 4-8 du présent code, si les conditions légales d'agrément sont remplies ". Selon cette annexe : " (...) Section 2 Les conditions matérielles d'accueil et de sécurité (...) Sous-section 1 Les dimensions, l'état du lieu d'accueil, son aménagement, l'organisation de l'espace et sa sécurité (...) II. _ En termes de sécurité, une vigilance particulière doit être apportée : 1° A la capacité à prévenir les accidents domestiques et les risques manifestes pour la sécurité de l'enfant (rangement des (...) objets potentiellement dangereux hors de la vue et de la portée de l'enfant accueilli), en proposant spontanément les aménagements nécessaires ou en acceptant ceux prescrits par les services départementaux de protection maternelle et infantile ; (...) 3° A la protection effective des espaces d'accueil et des installations dont l'accès serait dangereux pour l'enfant, notamment les escaliers, les fenêtres, les balcons, les cheminées, les installations électriques ou au gaz (...) ".
7. Il résulte des dispositions des articles L. 421-3 et L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. En vertu de l'article L. 3611-3 du code général des collectivités territoriales, s'agissant de la métropole de Lyon, le président du conseil de la métropole exerce les compétences dévolues en cette matière au président du conseil départemental.
8. D'une part, il résulte des trois courriers d'avertissement évoqués au point 5, qu'ont été constatés de la part de Mme E... dans l'exercice de son activité d'assistante maternelle agréée, entre 2007 et 2014, un défaut répété de communication des noms des enfants accueillis dans les conditions prévues par l'article R. 421-39 du code de l'action sociale et des familles et le dépassement du nombre d'enfants autorisé par son agrément. Si Mme E... a déclaré à l'administration, dans un document daté du 9 septembre 2016 et qui n'a été mis à jour par l'intéressée que le 25 septembre 2017, accueillir au total huit enfants sur cette période, il ressort des pièces du dossier, en particulier de données issues du service " Pajemploi " de l'Urssaf, que la requérante a été employée en qualité d'assistante maternelle par les parents de onze enfants entre les mois de septembre 2016 et janvier 2017, de dix enfants entre les mois de février et mars 2017, et de neuf enfants en mai 2017. En se bornant à faire état d'oublis, Mme E... ne conteste pas avoir manqué, de manière répétée, à l'obligation de déclaration à laquelle elle était tenue en application de l'article R. 421-39 du code de l'action sociale et des familles.
9. D'autre part, la décision attaquée fait également grief à Mme E..., en se fondant sur les mêmes relevés communiqués par l'Urssaf, d'avoir dépassé de manière significative le nombre de quatre enfants, dont deux âgés de plus de deux ans, que son agrément l'autorisait à accueillir simultanément, malgré les mises en garde qui lui avaient été adressées. Il ressort de ces relevés, repris dans la décision attaquée, qu'en particulier au cours du mois de juin 2017, Mme E... a accueilli durant quatorze jours, en moyenne sept heures par jour, un enfant âgé de quatre mois, qu'elle n'avait pas déclaré à l'administration, alors qu'elle a accueilli durant ce même mois, quatre autres enfants à temps plein entre dix-huit et vingt-deux jours. Dans ces conditions, alors qu'elle accueillait ponctuellement en outre trois autres enfants, Mme E... ne conteste pas sérieusement avoir dépassé le nombre maximum d'enfants qu'elle était autorisée à accueillir simultanément.
10. Enfin, il ressort des pièces du dossier que, lors d'une visite au domicile de Mme E... le 24 octobre 2017, les services de la protection maternelle et infantile ont constaté que la porte-fenêtre du salon, où jouaient les enfants accueillis, et donnant sur le balcon, était ouverte, sans protection, une table et des chaises étant adossées au garde-corps de ce balcon. A cet égard, selon le référentiel applicable aux assistants maternels, cité au point 6, l'assistant maternel doit apporter une vigilance particulière à la protection effective des installations dont l'accès serait dangereux pour l'enfant, notamment les balcons. Il a également été relevé, lors de cette visite, la présence dans la même pièce de deux pots de fleurs de taille importante placés sur des colonnes d'une hauteur de 40 cm, à la portée des enfants accueillis, et susceptibles de constituer un danger pour la sécurité de ceux-ci. Alors au demeurant que, contrairement à ce que soutient Mme E..., des remarques portant sur des éléments liés à la sécurité de son logement avaient déjà formulées lors de visites à son domicile effectuées en 2010 et en 2013, la requérante ne conteste pas que les éléments relevés dans la décision contestée sont susceptibles de compromettre la sécurité des enfants accueillis.
11. Eu égard à la nature et au caractère répété des manquements énoncés aux points 8 à 10, tant dans les obligations liées à l'activité d'assistante maternelle de Mme E... que dans les conditions d'accueil des enfants, et alors même que certains parents des enfants accueillis lui ont manifesté leur confiance, le président de la métropole de Lyon a pu légalement, sans fonder son appréciation sur des faits matériellement inexacts, estimer que les conditions d'accueil proposées par la requérante ne garantissaient pas la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis, et prononcer le retrait de son agrément.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions de sa requête tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... la somme demandée par la métropole de Lyon au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la métropole de Lyon présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et à la métropole de Lyon.
Délibéré après l'audience du 16 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 octobre 2020.
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N° 19LY01420