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07/09/2020 | FRANCE | N°19LY01150

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 07 septembre 2020, 19LY01150


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Masson Marine a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer, à titre principal, la décharge ou, à titre subsidiaire, la réduction des compléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1801968 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 28 mars 2019 et le 8 novembr

e 2019, la SAS Masson Marine, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Masson Marine a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer, à titre principal, la décharge ou, à titre subsidiaire, la réduction des compléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1801968 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 28 mars 2019 et le 8 novembre 2019, la SAS Masson Marine, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 29 janvier 2019 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge ou, à titre subsidiaire, la réduction des compléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration ne pouvait, pour le calcul de la valeur locative des immobilisations corporelles entrant dans ses bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises, se fonder sur les dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts, dès lors qu'elle n'a pas bénéficié d'une cession d'établissement au sens de ces dispositions ;

- elle peut se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 14 et 16 de l'instruction publiée le 26 avril 1993 sous la référence 6-E-12-93 et des paragraphes 13 et 15 de l'instruction publiée le 10 septembre 1996 sous la référence 6-E-22-23, selon lesquels les dispositions de l'article 1518 B ne visent que les immobilisations qui ont fait l'objet d'un transfert de propriété dans l'acte d'apport, de fusion, de scission ou de cession, ainsi que des paragraphes 21 à 24 et 20 à 23 des mêmes instructions, qui précisent que lorsque les immobilisations font l'objet d'une démolition, d'une cession partielle ou d'une suppression, la valeur locative résultant de l'article 1518 B doit être réduite en proportion de la diminution de leur prix de revient comptable ;

- la base d'imposition doit être limitée à la valeur réelle des biens qu'elle a acquis ;

- l'évaluation des immobilisations de la SA ZF Masson retenue par l'administration ne tient pas compte de leur état réel et notamment du fait que ces biens étaient affectés par l'amiante et pollués lors de leur acquisition ;

- à titre subsidiaire, la part des immobilisations de la SA FZ Masson qu'elle a acquises doit être évaluée à 28,01 %, et non à 60 % comme retenu par l'administration au stade de la décision d'admission partielle de sa réclamation.

Par un mémoire, enregistré le 4 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme E..., rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Masson Marine, créée le 22 novembre 2005 pour reprendre l'activité de fabrication de pièces mécaniques pour la navigation maritime auparavant exercée par la SA ZF Masson, alors placée en redressement judiciaire, a acquis à cette fin, le 12 mars 2007, une partie des terrains, bâtiments et installations, situés 5 rue Henri Cavallier à Saint-Denis-lès-Sens (Yonne) de la SA ZF Masson au prix de 2 500 euros, l'autre partie de ces biens ayant été cédée à la SARL Ibre pour y poursuivre l'exploitation de l'activité de fabrication de freins exercée antérieurement. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SAS Masson Marine portant sur les années 2013 à 2016, l'administration a rectifié la valeur locative de l'établissement industriel exploité par la société en retenant la valeur plancher prévue à l'article 1518 B du code général des impôts, qu'elle a calculée à partir d'une base correspondant à 76,94 % des biens immobiliers figurant, pour un montant total de 2 637 601 euros, au bilan de la SA ZF Masson. La SAS Masson Marine, qui avait été imposée à la cotisation foncière des entreprises sur la base minimum prévue par l'article 1647 D du code général des impôts, a, en conséquence, été assujettie à des compléments d'imposition au titre des années 2013 et 2016 mis en recouvrement le 30 novembre 2017. A la suite de la réclamation, l'administration, compte tenu de nouveaux éléments apportés par la société, et, notamment, de la circonstance que les frais de séparation de la SA ZF Masson lui incombant équivalaient à 60 % du total de ces frais, a considéré que la valeur des immobilisations acquises par la société requérante se limitait à 60 % du total et a prononcé le dégrèvement, à due concurrence, d'une partie des compléments d'imposition auxquels elle a été assujettie. La SAS Masson Marine relève appel du jugement du 29 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2016.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. " Aux termes l'article 1518 B du même code : " A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération. (...) ". Aux termes de l'article 310 HA de l'annexe II à ce code : " Pour l'application de la cotisation foncière des entreprises et des taxes additionnelles : / (...) / - l'établissement s'entend de toute installation utilisée par une entreprise en un lieu déterminé, ou d'une unité de production intégrée dans un ensemble industriel ou commercial lorsqu'elle peut faire l'objet d'une exploitation autonome. ". Pour l'application de ces dispositions, un établissement doit être regardé comme ayant fait l'objet d'une cession lorsque le même redevable a acquis l'ensemble des éléments mobiliers et immobiliers qui étaient nécessaires à l'exercice autonome de l'activité par le cédant, en vue d'y exercer, avec ces moyens, sa propre activité.

3. Il résulte de l'instruction, et notamment des jugements du tribunal de commerce de Sens du 3 novembre 2005 et du 14 novembre 2005 concernant respectivement la cession des activités de fonderie et de fabrication de freins de la SA ZF Marine à la SARL Ibre, d'une part, et la cession de l'activité de fabrication de pièces pour la navigation maritime à la SAS Masson Marine, d'autre part, ainsi que de l'acte de cession du 12 mars 2007, que si la SA ZF Marine exerçait au sein de l'établissement, avant sa liquidation, la triple activité de fonderie, de fabrication de disques de freins pour les véhicules automobiles et de fabrication de réducteurs et hélices pour la navigation maritime, chacune de ces branches d'activité, constituées d'unités de production distinctes, pourvues de l'ensemble des éléments servant à l'exploitation et susceptibles de faire l'objet d'une exploitation autonome, pouvait être regardée comme constituant un établissement au sens des dispositions de l'article 310 HA de l'annexe II au code général des impôts. Il résulte de l'instruction que la SAS Masson Marine a acquis l'ensemble des immobilisations, composées des immeubles ainsi que de matériels et biens mobiliers, et, notamment, de matériels de production, que la SA ZF Marine détenait et utilisait pour les besoins de son activité de fabrication de pièces mécaniques pour la navigation maritime, et qu'elle a ainsi bénéficié du transfert des moyens nécessaires à l'exercice autonome de cette activité, incluant les bâtiments, les contrats de travail, les contrats commerciaux, les machines et le matériel de production ainsi que les serveurs informatiques.

4. Si la SAS Masson Marine fait valoir que les biens immobiliers en cause contenaient de l'amiante à la date de leur acquisition, il résulte de l'instruction, et, notamment, du jugement du tribunal de commerce de Sens du 14 novembre 2005, qui qualifie le risque lié à la présence d'amiante de " limité ", que ce risque concerne uniquement un contentieux résultant de l'activité antérieure de la SA ZF Marine. Aucun élément du dossier n'établit que les immeubles en litige ne pouvaient, à la date de leur acquisition, faire l'objet d'une utilisation immédiate sans la réalisation d'importants travaux de remise en état.

5. La circonstance, invoquée par la société requérante, tirée de ce que la cession des activités de la SA ZF Masson a été ordonnée par deux jugements du tribunal de commerce de Sens au profit de deux redevables distincts demeure sans incidence sur la qualification de l'opération de cession d'établissement, au sens de l'article 1518 B du code général des impôts, dès lors que la cession consentie au profit de la SAS Masson Marine emporte, à elle seule, cession d'une branche complète et autonome d'activité. Par suite, l'administration a pu faire application de l'article 1518 B du code général des impôts pour déterminer la valeur locative des immobilisations industrielles exploitées par la SAS Masson Marine au titre des années 2013 à 2016.

6. En deuxième lieu, la SAS Masson Marine soutient que ses bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises ont été exagérées.

7. Il résulte de l'instruction, et, notamment, de l'acte de cession du 12 mars 2007 que les biens immobiliers acquis par la SAS Masson Marine auprès de la SA ZF Masson consistent en " un ensemble immobilier industriel comprenant bâtiments industriels, bureaux avec aire de circulation et de stationnement, et le terrain sur lequel ces bâtiments sont édifiés ", d'une superficie de 10,552 hectares, un bâtiment de restauration collective et la moitié indivise d'un immeuble de 45,21 ares.

8. Pour évaluer la valeur locative des immobilisations de la SAS Masson Marine, l'administration, faute de disposer d'un inventaire détaillé des biens acquis par la société auprès de la SA ZF Masson, a estimé la valeur de ces biens de façon forfaitaire, en appliquant au montant total des immobilisations comptabilisées par la SA ZF Masson au titre de l'exercice clos en 2004 une clé de répartition correspondant aux surfaces relatives des biens immobiliers acquis par la société requérante et la SARL Ibre. Le prorata de 76,94 % de la valeur locative d'origine des biens de la SA ZF Masson, appliqué initialement à la société requérante sur la base des constatations effectuées à l'occasion d'une première vérification de comptabilité dont elle a été l'objet au titre des années 2006 et 2007, a été ramené à 60 %, pour les années en litige, dans le cadre de la réclamation préalable, à la suite de la production par la société requérante d'un courrier de la SA ZF Masson du 12 septembre 2006 indiquant que les frais de séparation de cette société lui incombant équivalaient à 60 % du total de ces frais.

9. En l'absence de tout élément permettant d'attribuer les immobilisations reprises respectivement par la SARL Ibre et la SAS Masson Marine à chacune de ces sociétés, l'administration était en droit de calculer les bases d'imposition selon la méthode de répartition forfaitaire sollicitée par la société requérante dans sa réclamation. Il ne résulte ni du tableau des immobilisations produit par la SAS Masson Marine, qui a été établi a posteriori et n'est corroboré par aucun élément précis ou probant, ni des documents qu'elle produit, intitulés " plans de division ", dont le caractère exhaustif n'est pas établi, que, contrairement à ce que mentionne l'acte de cession du 12 mars 2007, la superficie des biens immobiliers lui appartenant se limiterait à 1,56 hectare et que la part des immobilisations qu'elle a acquises au sein de l'ensemble des immobilisations de la SA ZF Masson se limiterait à 28 % au lieu des 60 % retenus en dernier lieu par l'administration. Dès lors, la SAS Masson Marine n'établit ni que la part du total des immobilisations de la SA ZF Marine dont elle a fait l'acquisition, évaluée par l'administration à 60 % au regard des éléments produits par la société elle-même, est excessive, ni que ses bases d'imposition comprennent des biens dont elle n'avait pas la disposition.

10. En dernier lieu, et pour les motifs exposés au point 4, il ne résulte pas de l'instruction que l'évaluation des immobilisations de la SAS Masson Marine retenue par l'administration ne tiendrait pas compte de l'état réel de ces biens, et notamment, du fait qu'ils étaient affectés par l'amiante au titre de la période en litige.

Sur l'interprétation de la loi fiscale :

11. La SAS Masson Marine se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 14 et 16 de l'instruction publiée le 26 avril 1993 sous la référence 6-E-12-93 et des paragraphes 13 et 15 de l'instruction publiée le 10 septembre 1996 sous la référence 6-E-22-23, selon lesquels les dispositions de l'article 1518 B ne visent que les immobilisations qui ont fait l'objet d'un transfert de propriété dans l'acte d'apport, de fusion, de scission ou de cession, ainsi que des paragraphes 21 à 24 et 20 à 23 des mêmes instructions, qui précisent que lorsque les immobilisations font l'objet de modifications susceptibles d'augmenter leur valeur locative, le supplément de valeur locative à leur attribuer doit être calculé selon les règles de droit commun et s'ajoute à l'évaluation résultant de l'application de l'article 1518 B et que, lorsqu'elles font l'objet d'une démolition, d'une suppression ou d'une cession partielle, la valeur locative résultant de l'article 1518 B doit être réduite en proportion de la diminution de leur prix de revient comptable. Toutefois, ces instructions ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle qui a été appliquée dans le présent arrêt.

12. Il résulte de ce qui précède que la SAS Masson Marine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Masson Marine est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Masson Marine et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 septembre 2020.

2

N° 19LY01150

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01150
Date de la décision : 07/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : HENRY MARIE-PIERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-09-07;19ly01150 ?
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