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06/08/2020 | FRANCE | N°19LY00044

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 août 2020, 19LY00044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 et des majorations correspondantes.

Par un jugement nos 1702496 - 1702810 du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a prononcé la réduction des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 à concu

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 et des majorations correspondantes.

Par un jugement nos 1702496 - 1702810 du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a prononcé la réduction des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 à concurrence de, respectivement, 2 013,66 euros et 52 512 euros et des majorations correspondantes, et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 janvier 2019 et le 15 juin 2020, M. et Mme D..., représentés par Me G..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 5 novembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales demeurant à leur charge correspondant à l'imposition de la somme de 40 000 euros en tant que revenus distribués et des majorations correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration ne pouvait s'abstenir de solliciter la désignation, par la SARL Marché Vitamine, du bénéficiaire des revenus distribués en application de l'article 117 du code général des impôts ;

- elle n'établit ni l'existence ni l'appréhension des revenus distribués ;

- la somme en cause n'était pas imposable au titre de l'année 2014 ;

- les majorations pour manquement délibéré ne sont pas fondées.

Par un mémoire, enregistré le 15 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C..., présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme I..., rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a acquis le 31 juillet 2014 la moitié des parts sociales de la SARL Marché vitamine, qui exerce une activité de commercialisation de produits alimentaires à Sens, et a pour gérant et autre associé égalitaire M. A... E.... Cette société a fait l'objet, en 2016, d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 9 juin 2012 au 31 août 2015, étendue au 31 décembre 2015 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'issue de laquelle l'administration a constaté qu'elle avait contracté un prêt de 80 000 euros en vue de l'acquisition par MM. D... et A... E... de leurs parts sociales. Parallèlement à cette vérification de comptabilité, l'administration a procédé à un contrôle sur pièces de la déclaration de revenus souscrite par M. et Mme D... au titre de l'année 2014, à l'issue duquel elle a imposé la somme de 56 120 euros portée au crédit du compte courant d'associé ouvert dans les écritures de la SARL Marché vitamine en tant que revenus distribués sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et regardé la somme de 40 000 euros versée par la société à M. D... pour l'acquisition de ses parts comme une libéralité qu'elle a imposée entre les mains de son bénéficiaire sur le fondement du c de l'article 111 du même code. M. et Mme D... ont, en conséquence, été assujettis, selon la procédure contradictoire, à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2014, assortis de majorations, dont ils ont demandé la décharge. Par un jugement du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Dijon, à l'article 1er, a prononcé la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis à raison de l'imposition, au titre des revenus distribués, des sommes de 2 013,66 euros et 52 512 euros et des majorations correspondantes, et, à l'article 3, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 5 novembre 2018 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des impositions correspondant à l'imposition de la somme de 40 000 euros en tant que revenus distribués, et des majorations correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". Il résulte des dispositions précitées de l'article 117 du code général des impôts que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir cette personne morale à l'impôt sur le revenu à raison des sommes correspondantes, mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier.

3. Dès lors que M. D... a été identifié par l'administration fiscale comme le bénéficiaire des sommes qui lui ont été versées par la SARL Marché vitamine pour l'acquisition de ses parts dans la société, ainsi qu'il est exposé au point 5 et que l'intéressé l'a lui-même admis lors de la vérification de comptabilité de cette société, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la procédure d'imposition a été irrégulièrement conduite, faute pour l'administration fiscale d'avoir interrogé la SARL Marché vitamine, conformément aux dispositions de l'article 117 du code général des impôts, sur l'identité des bénéficiaires des revenus distribués en litige.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

5. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité de la SARL Marché vitamine, l'administration a estimé que M. D..., qui disposait d'une procuration générale accordée par le gérant de droit de la société ainsi que des moyens de paiement de cette société, qui prenait l'ensemble des décisions de gestion la concernant et qui s'est présenté à la vérificatrice comme le représentant de la société, devait être regardé comme le gérant de fait de cette dernière. L'administration a constaté que la société avait contracté auprès de la banque BRED, le 12 septembre 2014, un prêt bancaire d'un montant de 80 000 euros ayant pour objet le financement par la société de l'acquisition de son fonds de commerce et que ce prêt avait été comptabilisé par la société en tant que " prêt d'équipement ". Au cours du débat oral et contradictoire, M. D..., en sa qualité de représentant de la société, a indiqué que cette somme avait été employée par M. A... E... et par lui-même pour acquérir leurs parts de la société, et a produit la copie du contrat du 31 juillet 2014 par lequel ces parts leur ont été cédées au prix de 80 000 euros. L'administration a considéré que cette somme, qui correspondait à des dépenses personnelles des associés et n'avait pas été comptabilisée conformément à son objet réel, constituait une libéralité consentie par la société à ses associés, imposable entre les mains de ces derniers, à hauteur de leur quote-part dans le capital de la société, en tant qu'avantage occulte, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts.

6. L'indépendance des procédures menées à l'encontre de la SARL Marché vitamine, d'une part, et de ses associés, d'autre part, ne fait pas obstacle à ce que l'administration puisse tenir compte des éléments de fait établis dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société, et, notamment, des aveux de M. D..., pour démontrer l'existence et l'appréhension de revenus distribués imposables entre les mains du requérant. Si M. et Mme D... font par ailleurs valoir que le contrat d'acquisition des parts de la société a été conclu le 31 juillet 2014, avant que la SARL Marché vitamine ne souscrive le prêt auprès de la BRED, cette circonstance ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce que M. D... ait prélevé sur les fonds empruntés par la société le montant de l'avance qu'il avait consentie à cette dernière. En faisant valoir que la somme en litige, d'un montant de 40 000 euros, a été employée par M. D... pour la réalisation d'opérations personnelles, et en indiquant, sans être contredite, que ce dernier s'est comporté comme le gérant de fait de la société, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe dès lors que M. et Mme D... ont refusé les redressements, de l'existence des revenus distribués et de leur appréhension par l'intéressé.

7. Enfin, si les requérants font valoir que ces sommes doivent être réputées distribuées à la date de clôture de l'exercice de la SARL Marché vitamine, le 31 août 2015, il résulte de ce qui précède que l'administration apporte la preuve que la somme en litige a été mise à la disposition de M. D... à la date de souscription du prêt, le 12 septembre 2014. Par suite, l'administration a pu à bon droit imposer cette somme au titre de l'année 2014.

Sur les majorations pour manquement délibéré :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ".

9. Les compléments d'impôt sur le revenu demeurant en litige ont été assortis de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts en cas de manquement délibéré.

10. Pour justifier l'application de cette majoration, l'administration fait état de la nature des revenus occultés, d'un montant de 40 000 euros, qui ont permis au requérant de financer une dépense personnelle, de leur importance par rapport aux salaires portés sur sa déclaration de revenus, qui se limitaient à la somme de 10 000 euros et enfin de la circonstance que, en sa qualité de gérant de fait de la SARL Marché vitamine, M. D... ne pouvait en ignorer le caractère imposable. En se fondant sur ces éléments, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée de M. D... d'éluder l'impôt dû. Par suite, c'est à bon droit que le service a assorti les impositions en litige de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à l'imposition de la somme de 40 000 euros en tant que revenus distribués, et des majorations correspondantes.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme D... la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1 : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... D... et au ministre délégué en charge des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme J..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 août 2020.

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N° 19LY00044

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00044
Date de la décision : 06/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : LABETOULE ANGÉLIQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-06;19ly00044 ?
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