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06/08/2020 | FRANCE | N°18LY02279

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 06 août 2020, 18LY02279


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J... H... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 28 juillet 2016 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la délibération du 21 avril 2016 portant refus de délivrance d'une carte professionnelle.

Par un jugement n° 1605484 du 19 avril 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet

te délibération du 28 juillet 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J... H... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 28 juillet 2016 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé à l'encontre de la délibération du 21 avril 2016 portant refus de délivrance d'une carte professionnelle.

Par un jugement n° 1605484 du 19 avril 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette délibération du 28 juillet 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2018, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 4 octobre 2019 et le 20 décembre 2019, le CNAPS, représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 avril 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. H... devant le tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de mettre à la charge de M. H... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- par la délibération du 11 avril 2018, le collège du CNPAS a autorisé son président à engager toute action en justice au nom du CNAPS ;

- il n'apparait pas que la minute du jugement aurait été régulièrement signée conformément aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- concernant l'arrêté du 25 novembre 2015 du directeur de la police générale habilitant certains agents du CNAPS à accéder aux données à caractère personnel et informations enregistrées dans les fichiers autorisés, il s'agit d'un acte individuel dont l'entrée en vigueur n'est pas subordonnée à sa publication ; les dispositions de l'article R. 632-14 du code de la sécurité intérieure ne conditionnent pas la régularité de l'habilitation à la publication de l'arrêté portant habilitation ;

- le directeur de la police générale de la préfecture de police, M. D... E..., a reçu délégation du préfet de police pour signer les arrêtés d'habilitation des agents du CNAPS par arrêté du 21 octobre 2015 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de police du 23 octobre 2015 ainsi qu'au recueil des actes officiels de la ville de Paris du 30 octobre 2015 ;

- M. F... a effectué une consultation de niveau 2 qui est une consultation plus étendue ; le décret du 10 juin 2015 a permis aux agents du CNAPS spécialement et individuellement désignés d'obtenir cet accès étendu ;

- il ressort des pièces du dossier que le comportement de M. H... est incompatible avec l'exercice des fonctions d'agent de sécurité privée ; dans le cadre de l'enquête administrative, il apparaît que M. H... a été mis en cause en qualité d'auteur, le 9 mai 2014, pour des faits de tentative d'escroquerie, de contrefaçon ou de falsification de chèque commis entre le 12 et le 18 avril 2014 ; ces faits sont mentionnés sur les documents de l'enquête administrative et sur le document émanant des services de la gendarmerie ; ils ne sont pas contestés par M. H... qui tente seulement d'en atténuer la portée en faisant valoir qu'il aurait été abusé ; la circonstance qu'il n'aurait pas fait l'objet de poursuites ne saurait impliquer que ces faits ne seraient pas caractérisés ; ces faits sont contraires à l'honneur et à la probité et de nature à porter atteinte à la sécurité des biens ;

- le moyen tiré du défaut d'habilitation de l'agent qui a réalisé l'enquête administrative manque en fait dès lors que M. F... disposait d'une habilitation spéciale ; il figure sur la liste des personnes habilitées par le préfet de police aux termes de l'arrêté du 25 novembre 2015 et le numéro de matricule mentionné sur sa fiche d'habilitation correspond bien à celui qui est porté sur les documents de l'enquête ; dans tous les cas, une telle circonstance ne constitue pas un vice présentant un caractère substantiel susceptible d'avoir une incidence sur la légalité de la décision ;

- il ne s'est pas fondé uniquement sur les données du traitement dénommé " Traitement d'antécédents judiciaires " (TAJ) puisqu'il a sollicité les services de gendarmerie afin de bénéficier d'un complément d'information ;

- la procédure suivie est régulière dès lors que si les dispositions de l'article L. 230-8 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable à la date de la demande de renouvellement de sa carte professionnelle, c'est-à-dire avant l'intervention de la loi du 3 juin 2016, doivent être regardées comme faisant obstacle à la consultation des mentions ayant donné lieu à un classement sans suite pour insuffisance de charge, ces dispositions n'excluent pas la consultation des autres mentions du TAJ ; il est constant que M. H... a été mis en cause pour des faits de tentative d'escroquerie et contrefaçon ou falsification de chèque commis en avril 2014 ; le CNAPS a saisi, par une fiche navette, les services du parquet et l'absence de réponse du parquet ne saurait lui être imputée.

Par un mémoire, enregistré le 18 septembre 2019, M. H..., représenté par Me I..., conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à l'annulation de la délibération du 28 juillet 2016 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé contre la délibération du 21 avril 2016 de la commission interrégionale d'agrément et de contrôle Sud-Est du CNAPS et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge du CNAPS en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'appel du CNAPS est irrecevable dès lors qu'il n'est pas établi que le président du collège du CNAPS a qualité pour représenter l'établissement et qu'il a recueilli l'autorisation du collège à cette fin ;

- la circonstance que l'expédition du jugement qui a été notifiée aux parties ne comporte pas les signatures est sans incidence sur la régularité du jugement ;

- le CNAPS ne démontre pas la réalité de la tentative d'escroquerie et contrefaçon ou falsification de chèque ; il a toujours contesté être l'auteur de ces faits et a été victime d'un faussaire habile qui a réussi à l'abuser ; le complément d'information dont se prévaut le CNAPS ne comporte ni le nom, ni la signature de son auteur, ni même l'en-tête d'un quelconque service de police ou de gendarmerie ; le classement sans suite auquel a donné lieu cette affaire confirme son innocence ;

- la seule mise en cause apparaissant sur les fichiers de police mais n'étant nullement démontrée ne saurait suffire à justifier un refus de carte professionnelle ;

- en arguant de l'absence d'élément venant au soutien des dénégations de M. H..., le CNAPS tente de renverser la charge de la preuve ;

- il n'a pas été prévenu de la consultation des fichiers de police ; il n'est pas établi que la lettre du 29 juin 2016 par laquelle le CNAPS l'informait de la consultation des fichiers de police aurait bien été reçue et ces fichiers ont été consultés le 21 juin 2016, avant que la lettre ne soit rédigée ;

- il n'est pas justifié que c'est bien M. F..., agent qui aurait réalisé l'enquête administrative et disposant d'une habilitation spéciale, qui a consulté les informations et ce alors que les initiales du nom de l'agent instructeur de l'enquête sont EG et ne correspondent pas à celles de M. G... F... ; il n'est pas établi que l'arrêté du 25 novembre 2015 du directeur de la police générale aurait été régulièrement publié et que le directeur de la police générale aurait lui-même reçu une délégation régulière et publiée ; il n'est pas établi que M. F... a été habilité pour le TAJ 2 et non pour le TAJ 1 ;

- la loi du 3 juin 2016 publiée au Journal officiel de la République française le 4 juin 2016 est d'application immédiate ; l'article 230-8 du code de procédure pénale, dans sa version antérieure, n'est pas applicable au présent litige ; en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 230-8 du code précité prévoyait déjà que les décisions de classement sans suite prises soit sur le fondement d'une insuffisance de charges soit sur un autre fondement ne pouvaient faire l'objet d'une consultation dans le cadre des enquêtes administratives ; il n'est pas démontré que l'affaire n'a pas fait l'objet d'un classement sans suite ; si le CNAPS prétend avoir saisi les services du parquet et de la police, il ne le démontre pas dès lors que la fiche navette n'est pas datée et son destinataire n'est pas précisé ; le complément d'information censé provenir des services de gendarmerie ne comporte ni le nom ni la signature de son auteur ni même l'en-tête d'un quelconque service de police ou de gendarmerie ;

- la décision méconnaît l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés dès lors que la décision n'a été prise qu'au vu de la mise en cause de M. H... ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il a travaillé pendant plusieurs années en qualité d'agent de sécurité à la parfaite satisfaction de ses employeurs.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., pour le CNAPS et celles de Me I..., représentant M. H....

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 juillet 2020, présentée pour le CNAPS ;

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 17 avril 2012, la commission régionale d'agrément et de contrôle Sud-Est a délivré à M. H... une carte professionnelle l'autorisant à exercer l'activité d'agent privé de sécurité dont la validité expirait le 16 avril 2017. Le 2 février 2016, M. H... a saisi la commission régionale d'agrément et de contrôle Sud-Est du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) d'une demande de renouvellement de sa carte professionnelle. Par une délibération du 21 avril 2016, la commission régionale d'agrément et de contrôle Sud-Est a refusé de délivrer à M. H... une carte professionnelle au motif que les conditions requises par les dispositions de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure n'étaient pas remplies. Le 16 juin 2016, M. H... a formé un recours préalable obligatoire auprès de la commission nationale du CNAPS qui, par décision du 28 juillet 2016, a rejeté son recours. Le CNAPS relève appel du jugement du 19 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 28 juillet 2016.

Sur la recevabilité de l'appel formé par la CNAPS :

2. Aux termes de l'article R. 632-4 du code de la sécurité intérieure, " Le collège délibère sur : (...) 11° les actions en justice et les transactions (...). Le collège peut déléguer à son président certaines des attributions prévues au 10ème et au 11ème, lorsque le montant financier engagé se situe en dessous d'un seuil qu'il détermine et qui ne peut être supérieur à 100 000 euros. ".

3. Par délibération du 11 avril 2018, le collège du CNAPS a donné délégation à sa présidente, en application du 16ème alinéa de l'article R. 632-4 du code de la sécurité intérieure, pour engager au nom du CNAPS toutes les actions en justice devant toutes les juridictions dès lors que le montant financier engagé n'excède pas 100 000 euros. Par suite, le moyen tiré de ce que l'appel du CNAPS est irrecevable faute d'établir que la présidente du collège du CNAPS a qualité pour représenter l'établissement et qu'elle a recueilli l'autorisation du collège à cette fin manque en fait et doit être écarté.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

4. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure : " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles (...) ". Aux termes de l'article L. 612-20 du même code : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : (...) 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents des commissions nationale et régionales d'agrément et de contrôle spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes moeurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées (...) ".

5. Il résulte des dispositions précitées que lorsqu'elle est saisie d'une demande de renouvellement d'une carte professionnelle pour l'exercice de la profession d'agent privé de sécurité, l'autorité administrative compétente doit apprécier si la personne qui sollicite ce renouvellement remplit toujours les conditions posées par les dispositions précitées en procédant à une enquête administrative. Cette enquête, qui peut notamment donner lieu à la consultation du traitement automatisé de données à caractère personnel mentionné à l'article R. 40-23 du code de procédure pénale, vise à déterminer si le comportement ou les agissements de l'intéressé sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes moeurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat, et s'ils sont ou non compatibles avec l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité. Pour ce faire, l'autorité administrative procède, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à une appréciation globale de l'ensemble des éléments dont elle dispose. A ce titre, si l'existence de poursuites ou de sanctions pénales est indifférente, l'autorité administrative est en revanche amenée à prendre en considération, notamment, les circonstances dans lesquelles ont été commis les faits qui peuvent être reprochés au pétitionnaire ainsi que la date de leur commission.

6. Pour confirmer le refus de renouvellement de la carte professionnelle d'agent privé de sécurité, la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS s'est fondée sur le motif tiré de ce que M. H... a été mis en cause en qualité d'auteur pour des faits de tentative d'escroquerie, contrefaçon ou falsification de chèque à Eybens (38) le 12 avril 2014. A l'appui de sa décision, la commission produit un extrait du fichier du traitement des antécédents judiciaires (TAJ) qui fait état d'une tentative d'escroquerie commise entre le 12 et le 18 avril 2014 à Eybens, de la contrefaçon ou falsification de chèque commis le 12 avril 2014 à Eybens, une fiche navette à destination de l'autorité administrative faisant état d'une procédure pour tentative d'escroquerie et contrefaçon ou falsification de chèque et un complément d'information des services de police portant la mention " demande d'enquête de moralité CNAPS " du 10 février 2016 et mentionnant que " la communauté de brigades d'Eybens " s'est déplacée pour interpeller M. H... qui " le 12 avril 2014, a déposé un chèque établi par la BNP Paribas au nom de Cetelem SA d'un montant de 6 000 euros sur un compte lui appartenant à la Société générale, que le chèque a été refusé par la banque au motif de falsification et que la responsable de la banque a indiqué que M. J... H... a l'intention de se présenter l'après-midi même dans le cadre d'un rendez-vous avec un conseiller ". M. H... conteste la matérialité des faits relevés à son encontre en indiquant qu'il a été victime d'un faussaire. Toutefois, et nonobstant la circonstance que le complément d'enquête ne comporte pas l'en-tête du service, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces faits sont inexacts alors en outre que M. H... n'apporte aucun élément de nature à confirmer ses allégations quant à la circonstance qu'il aurait été victime d'un faussaire ou encore que la procédure judiciaire aurait fait l'objet d'un classement sans suite. Par suite, les faits pour lesquels il a été mis en cause doivent être regardés comme suffisamment établis.

7. Compte tenu de ce qui a été dit au point 6, c'est à tort que, pour annuler le refus de renouvellement de la carte professionnelle d'agent privé de sécurité de M. H..., le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur le motif tiré du défaut de matérialité des faits de tentative d'escroquerie, contrefaçon ou falsification de chèque commis à Eybens le 12 avril 2014.

8. Il y a lieu toutefois pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens invoqués en première instance et en appel par M. H....

Sur la légalité de la décision du 28 juillet 2016 :

9. Aux termes de l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction alors applicable, " Les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation, prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant soit les emplois publics participant à l'exercice des missions de souveraineté de l'Etat, soit les emplois publics ou privés relevant du domaine de la sécurité ou de la défense, soit les emplois privés ou activités privées réglementées relevant des domaines des jeux, paris et courses, soit l'accès à des zones protégées en raison de l'activité qui s'y exerce, soit l'utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux, peuvent être précédées d'enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales intéressées n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées ".

10. Aux termes de l'article R. 234-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa version alors applicable, " Les personnes qui font l'objet d'une enquête administrative en application de l'article R. 114-1 du présent code sont informées de ce que cette enquête donne lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 230-6 du code de procédure pénale. / Lorsque l'enquête administrative qui donne lieu à la consultation fait suite à une demande de décision de l'intéressé, celui-ci en est informé dans l'accusé de réception de sa demande prévu aux articles L. 112-3 et L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration. / Dans les autres cas, l'intéressé est informé lors de la notification de la décision administrative le concernant. ". Aux termes de l'article R. 114-1 du même code, " La liste des décisions pouvant donner lieu, en application de l'article L. 114-1, à des enquêtes administratives préalables est fixée aux articles R. 114-2 à R. 114-5. "

11. Il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 29 juin 2016, la commission nationale du CNAPS a accusé réception du recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 21 avril 2016 de la commission régionale d'agrément et de contrôle Sud-Est, et dont aucune disposition législative ou réglementaire n'impose la notification par lettre recommandée avec accusé de réception, et a informé M. H... que l'instruction de son recours nécessitait la réalisation d'une enquête administrative, susceptible de donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 230-6 du code de procédure pénale. La circonstance que la consultation du traitement dénommé " TAJ " a eu lieu le 21 juin 2016, soit antérieurement à l'accusé de réception informant M. H... de la consultation des traitements automatisés de données personnelles, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie en vue de l'adoption de la décision contestée.

12. Aux termes de l'article R. 632-14 du code de la sécurité intérieure, " Le directeur transmet au préfet du siège de la commission nationale, ou locale la liste des agents pour lesquels il sollicite l'habilitation de consulter, aux fins et dans les conditions fixées par les articles L. 612-7, L. 612-20, L. 612-22, L. 612-23, L. 622-7, L. 622-19, L. 622-21, L. 622-22 et L. 625-2 du présent code, les traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales ou, aux fins et dans les conditions fixées par l'article R. 611-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celui relevant des dispositions de l'article R. 611-1 de ce même code. ".

13. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'instruction du recours de M. H..., les informations relatives aux antécédents judiciaires de l'intéressé contenues dans le TAJ ont été consultées le 21 juin 2016 par un agent du siège du CNAPS portant le matricule n° 750026C, qui avait été habilité individuellement, aux termes de l'arrêté du directeur de la police générale du 25 novembre 2015, à accéder " aux données à caractère personnel et informations enregistrées dans les traitements autorisés par les textes réglementaires " au niveau TAJ 2, niveau le plus étendu d'accès, en vue de l'instruction des demandes d'autorisations et d'agréments pour l'exercice d'une activité privée de sécurité. L'arrêté du 25 novembre 2015 du directeur de la police générale, qui avait reçu délégation du préfet de police pour signer les arrêtés d'habilitation des agents du CNAPS par arrêté du 21 octobre 2015 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de police du 23 octobre 2015 et au recueil des actes officiels de la ville de Paris du 30 octobre 2015, procède à l'habilitation individuelle des agents pour accéder aux données contenues dans le TAJ et ne présente pas un caractère réglementaire et, par suite, n'a pas à faire l'objet d'une publication. Il s'ensuit que, et alors que les initiales de l'instructeur E.G. sont celles de l'agent qui a sollicité un complément d'information auprès des services de police lors de l'instruction de la demande initiale devant la commission régionale et non de celui qui a procédé à la consultation du TAJ lors de l'instruction du recours devant la commission nationale, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière du fait de l'absence d'habilitation de l'agent ayant consulté les informations relatives aux antécédents judiciaires de M. H... contenues dans le TAJ manque en fait et doit être écarté.

14. Aux termes de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale, dans sa rédaction alors applicable, " I.- Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi du 21 janvier 1995 et aux articles L. 114-1, L. 234-1 et L. 234-2 du code de la sécurité intérieure, les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par les personnels de la police et de la gendarmerie habilités selon les modalités prévues au 1° et au 2° du I de l'article R. 40-28. /Cette consultation peut également être effectuée par : - des personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat. L'habilitation précise limitativement les motifs qui peuvent justifier pour chaque personne les consultations autorisées. Lorsque la consultation révèle que l'identité de la personne concernée a été enregistrée dans le traitement en tant que mise en cause, l'enquête administrative ne peut aboutir à un avis ou une décision défavorables sans la saisine préalable, pour complément d'information, des services de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, du ou des procureurs de la République compétents. Le procureur de la République adresse aux autorités gestionnaires du traitement un relevé des suites judiciaires devant figurer dans le traitement d'antécédents judiciaires et relatif à la personne concernée. Il indique à l'autorité de police administrative à l'origine de la demande si ces données sont accessibles en application de l'article 230-8 ; -les agents individuellement désignés et spécialement habilités des services spécialisés de renseignement mentionnés à l'article R. 234-2 du code de la sécurité intérieure ".

15. M. H... soutient que la décision en litige méconnaît l'article R. 40-29 du code de procédure pénale dès lors qu'il n'est pas établi que la saisine des services de police ou de gendarmerie pour complément d'information et du procureur de la République pour demande d'informations sur les suites judiciaires ont été effectuées.

16. Cependant, le CNAPS produit au soutien de la décision de refus de renouvellement de la carte professionnelle d'agent de sécurité privé un complément d'enquête de moralité établi par les services de police à Lyon le 10 février 2016 qui avait été sollicité par la commission régionale d'agrément et de contrôle Sud-Est ainsi qu'une " fiche-navette à destination de l'autorité administrative " adressée au parquet lors de l'instruction de la demande par la commission régionale. En l'absence de tout changement dans les circonstances de fait retenues par la commission nationale d'agrément et de contrôle entre la date de la décision de la commission régionale et la date de la décision de la commission nationale, la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNPAS n'était pas tenue, à la suite de la consultation du TAJ le 21 juin 2016, de saisir à nouveau les services de la police nationale ou les unités de la gendarmerie nationale pour complément d'information et le procureur de la République à fin de demande d'information sur les suites judiciaires.

17. La circonstance que la décision en litige est fondée sur les informations issues du TAJ n'est pas seule de nature à révéler que l'auteur de la décision en litige n'aurait pas procédé à un examen complémentaire particulier de la situation personnelle de M. H... ni qu'il se serait abstenu d'exercer son pouvoir d'appréciation, en se croyant à tort lié par lesdites informations et ce alors qu'un complément d'information a été sollicité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision méconnaît l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 doit être écarté.

18. Si M. H... soutient que les faits litigieux ont donné lieu à un classement sans suite, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucun commencement de preuve. Par suite, la commission nationale a pu légalement se fonder sur les faits de tentative d'escroquerie, de contrefaçon ou falsification de chèque ci-dessus évoqués pour lesquels l'enquête administrative a révélé que l'intéressé avait été mis en cause, et ce alors même qu'aucune condamnation pénale n'était intervenue à la date de la décision. Compte tenu de ce que le comportement de M. H... peut être qualifié de contraire à l'honneur et à la probité et eu égard au caractère récent des faits à la date de la décision litigieuse, et nonobstant la circonstance qu'un employeur indique que l'intéressé s'est montré sérieux et ponctuel, la commission nationale n'a pas entaché sa décision de refus de renouvellement de la carte professionnelle d'une erreur d'appréciation en estimant que le comportement de M. H... est incompatible avec l'exercice d'une activité d'agent privé de sécurité.

19. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa régularité, que le CNAPS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 28 juillet 2016 par laquelle il a refusé de renouveler à M. H... sa carte professionnelle l'autorisant à exercer l'activité d'agent privé de sécurité.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du CNAPS, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. H... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. H... la somme demandée par le CNAPS au titre des frais exposés par lui sur le fondement des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 19 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération de la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité du 28 juillet 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. H... devant le tribunal administratif de Grenoble et les conclusions présentées par le CNAPS sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au conseil national des activités privées de sécurité et à M. J... H....

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Evrard, président-assesseur,

Mme A..., premier conseiller,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 août 2020.

2

N° 18LY02279


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY02279
Date de la décision : 06/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRAISSE
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : HAMMERER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-06;18ly02279 ?
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