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06/08/2020 | FRANCE | N°18LY01330

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 06 août 2020, 18LY01330


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 16 août 2017 par lequel le préfet de l'Yonne lui a ordonné de se dessaisir de ses armes de catégorie C dans le délai de trois mois.

Par un jugement n° 1702615 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2018, M. B..., représenté par la SCP Revest Lequin Nogaret Durif, demande à la cour :

1°) d'annuler le j

ugement du tribunal administratif de Dijon du 5 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 août 2017 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 16 août 2017 par lequel le préfet de l'Yonne lui a ordonné de se dessaisir de ses armes de catégorie C dans le délai de trois mois.

Par un jugement n° 1702615 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2018, M. B..., représenté par la SCP Revest Lequin Nogaret Durif, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 5 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 août 2017 du préfet de l'Yonne en tant qu'il lui ordonne de se dessaisir de ses armes de catégorie C ;

3°) d'ordonner le retrait de son inscription au fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes.

Il soutient que :

- pour prendre sa décision, le préfet s'est exclusivement fondé sur la consultation du fichier des antécédents judiciaires en méconnaissance de l'article 10 alinéa 2 de la loi du 6 janvier 1978 ;

- la décision a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière faute pour le préfet d'établir que la personne qui a consulté le traitement des antécédents judiciaires avait été spécialement habilitée à cet effet ;

- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 août 2018, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

Un mémoire, enregistré le 14 mars 2019, présenté pour M. B... n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... ;

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 août 2017 du préfet de l'Yonne lui ordonnant de se dessaisir de ses armes de catégorie C dans le délai de trois mois.

2. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme des catégories B, C et D de s'en dessaisir. (...) Sauf urgence, la procédure est contradictoire. Le représentant de l'Etat dans le département fixe le délai au terme duquel le détenteur doit s'être dessaisi de son arme. ". Aux termes de l'article R. 312-67 du même code : " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L. 312-11 lorsque : (...) 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ; (...) ". Figure au nombre de ces traitements de données à caractère personnel, le traitement d'antécédents judiciaires (TAJ) prévu à l'article 230-6 du code de procédure pénale.

3. En premier lieu, aux termes de l'article 230-10 du code de procédure pénale, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Les personnels spécialement habilités des services de la police et de la gendarmerie nationales désignés à cet effet (...), peuvent accéder aux informations, y compris nominatives, figurant dans les traitements de données personnelles prévus par la présente section et détenus par chacun de ces services. L'habilitation précise la nature des données auxquelles elle autorise l'accès. L'accès, par tous moyens techniques mobiles, aux informations figurant dans les traitements de données personnelles prévus par la présente section est ouvert aux seuls personnels de la police et de la gendarmerie nationales et des douanes. (...) "

4. Le préfet de l'Yonne produit à l'instance un historique de la notification individuelle de droit d'accès aux applications (NIDA), qui décrit les droits de consultation des personnels concernés aux applications nationales de la police et de la gendarmerie et établit que le gendarme en charge de l'enquête administrative concernant M. B... bénéficiait d'une habilitation permettant d'accéder au TAJ. Le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière doit donc être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 : " Aucune autre décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une personne ne peut être prise sur le seul fondement d'un traitement automatisé de données destiné à définir le profil de l'intéressé ou à évaluer certains aspects de sa personnalité. " Il résulte de ces dispositions que lorsqu'une décision administrative est précédée d'une enquête administrative, destinée à vérifier que le comportement des personnes physiques intéressées n'est pas incompatible avec la détention d'une arme, elle ne peut être exclusivement fondée sur les données issues d'un traitement automatisé qui ne sont qu'un des éléments qu'apprécie l'autorité administrative pour prendre sa décision.

6. Il ressort des pièces du dossier que les services de gendarmerie ont complété leur recherche sur le TAJ par une enquête de terrain et en particulier auprès du maire délégué du lieu de résidence de M. B..., qui n'a au demeurant pas émis d'avis défavorable à la détention d'arme par celui-ci. Par ailleurs, le préfet de l'Yonne a pris l'attache du procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Auxerre afin de vérifier l'exactitude des mentions figurant sur ce fichier et les suites données aux procédures pénales. Enfin, le préfet a mis en oeuvre la procédure contradictoire préalable prévue par l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure permettant à M. B... de faire valoir ses observations concernant la mesure projetée et de produire toutes les pièces utiles. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Yonne se serait fondé sur la seule consultation du TAJ pour prendre sa décision manque en fait et doit être écarté.

7. En troisième lieu, il est constant que M. B... a, le 20 octobre 2014, exercé des violences physiques envers son épouse et sa soeur, ayant entraîné pour cette dernière une ITT (incapacité totale de travail) inférieure à 8 jours et a fait usage de son fusil de chasse pour tirer en l'air à deux reprises. Par une décision du 21 octobre 2014, le président du tribunal de grande instance d'Auxerre a condamné l'intéressé à trois mois d'emprisonnement délictuel avec sursis et mise à l'épreuve pendant dix-huit mois avec exécution provisoire. L'arme utilisée par M. B... a été confisquée et détruite. L'intéressé a, dès l'issue de sa mise à l'épreuve, acquis une nouvelle arme de chasse le 2 juin 2016. M. B..., qui produit à l'instance des attestations de son épouse, de son médecin traitant et du maire délégué de sa commune de résidence, soutient qu'il a respecté en tout point la condamnation prononcée à son encontre. Cependant, eu égard à la gravité des faits qui lui sont reprochés, le préfet de l'Yonne n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure en lui ordonnant de se dessaisir des armes de catégorie C en sa possession.

8. Il résulte de tout de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Evrard, président-assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 août 2020.

2

N° 18LY01330


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01330
Date de la décision : 06/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRAISSE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : DURIF

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-06;18ly01330 ?
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