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11/06/2020 | FRANCE | N°19LY04121

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 11 juin 2020, 19LY04121


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 6 juin 2019 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans les quinze jours à compter du jugement ou, à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1904430 du 10 octo

bre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a admis provisoirement Mme B... épouse D......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 6 juin 2019 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans les quinze jours à compter du jugement ou, à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1904430 du 10 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a admis provisoirement Mme B... épouse D... à l'aide juridictionnelle et a rejeté le surplus des conclusions de sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 novembre 2019, Mme B... épouse D..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 octobre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 juin 2019 du préfet de la Drôme ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt ou, à défaut, de réexaminer sa demande de titre de séjour.

Elle soutient que :

Sur la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :

- la décision est entachée d'un défaut de motivation et défaut d'examen particulier de sa situation dès lors que le préfet ne lui a pas demandé de produire des justificatifs quant à sa présence en France depuis le 11 juillet 2016 ; elle s'est maintenue sur le territoire français depuis cette date ; elle réside de façon stable en France avec son époux et leur enfant ; elle est enceinte de 14 semaines ;

- la décision méconnait le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle est mariée et un enfant est issu de son union avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour valable dix ans ; elle est bien intégrée ; elle est enceinte de leur second enfant ;

-la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; leur fils est né en France et y a tous ses repères ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination :

- ces décisions seront annulées par voie de conséquence de l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour.

Par un mémoire, enregistré le 7 janvier 2020, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Mme A... B... épouse D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B... épouse D..., ressortissante algérienne née le 16 juin 1989, est entrée en France en 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 2 février 2019, elle a épousé M. D..., titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans, après avoir obtenu la main-levée de l'opposition à leur mariage par un jugement du tribunal de grande instance de Valence du 9 octobre 2018. Le 31 octobre 2018 et le 18 mars 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du 6 juin 2019, le préfet de la Drôme a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme D... relève appel du jugement du 10 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. La circonstance que le préfet n'aurait pas demandé à la requérante des justificatifs de sa présence en France ne saurait équivaloir à un défaut de motivation de la décision contestée.

3. Il ne ressort pas des termes de la décision attaquée que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée.

4. Mme D... fait valoir qu'elle s'est mariée avec un ressortissant algérien titulaire d'un titre de séjour de dix ans et que de cette union est né un enfant et qu'elle est enceinte d'un second enfant. Toutefois, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer sa vie privée et familiale. Mme D... ne peut se prévaloir d'une vie commune suffisamment stable et ancienne avec son époux, avec lequel elle avait décidé de se marier en 2016, mariage qui n'a pu être célébré que le 2 février 2019. Par ailleurs, rien ne s'oppose à ce que le couple, eu égard à sa nationalité commune, puisse développer s'il le désire une vie familiale en Algérie et ce alors que M. D... n'établit pas qu'il dispose d'un emploi en France. Il n'est pas établi que leur enfant né le 2 avril 2017, eu égard à son jeune âge, ne puisse vivre dans des conditions satisfaisantes en Algérie. En outre, Mme D... est entrée récemment en France et dispose d'attaches familiales en Algérie où résident ses parents et ses frères et sa soeur. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressée en France, et nonobstant la circonstance qu'elle était enceinte de son second enfant à la date de la décision attaquée, le préfet n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel ladite décision a été prise. Par suite, il n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Mme D..., en sa qualité de ressortissante algérienne dont la situation est régie entièrement par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de sa requête.

6. Contrairement à ce que soutient la requérante, le refus de délivrance d'un titre de séjour, qui n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de son fils ni de l'empêcher de pourvoir à son éducation et à ses intérêts matériels, n'implique pas la séparation durable de la famille ni la rupture des liens affectifs avec son enfant. Il existe de plus, en l'espèce, des possibilités de visite et de reconstitution de la cellule familiale en Algérie, pays dont la requérante et son époux, mais aussi leur enfant, ont la nationalité. Par suite, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet de la Drôme n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de son fils protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination :

7. Mme D..., n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour et ne pouvant donc obtenir l'annulation de ce refus, n'est pas fondée à demander l'annulation par voie de conséquence de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juin 2019. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... épouse D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... épouse D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 juin 2020.

4

N° 19LY04121


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04121
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : OURACHANE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-11;19ly04121 ?
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