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27/02/2020 | FRANCE | N°19LY03219

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 27 février 2020, 19LY03219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 11 avril 2019 du préfet de l'Allier lui retirant son titre de séjour, d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui restituer son certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 200 euros par jour de retard, subsidiairement de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de grande instance d'Evry sur sa requête en relèvement de l'interdiction définitive de

territoire le frappant et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 0...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 11 avril 2019 du préfet de l'Allier lui retirant son titre de séjour, d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui restituer son certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 200 euros par jour de retard, subsidiairement de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de grande instance d'Evry sur sa requête en relèvement de l'interdiction définitive de territoire le frappant et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903137 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 août 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903137 du 11 juillet 2019 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 avril 2019 du préfet de l'Allier lui retirant son titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui restituer son certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) subsidiairement, de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de grande instance d'Evry sur sa requête en relèvement de l'interdiction définitive de territoire le frappant ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- dans la motivation de son jugement, le tribunal administratif n'a pas tenu compte de la particularité du cas de l'espèce ni de ce que la décision attaquée était entachée d'une violation du contradictoire ;

- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de procéder au retrait de ce titre ;

- il ne lui est pas possible de vérifier la compétence de l'auteur de la décision de retrait du titre de séjour dans la mesure où le retrait lui est notifié seulement au moyen d'un procès-verbal de police ;

- la décision attaquée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- il n'a pas été en mesure de faire valoir ses observations préalablement au retrait, en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;

- les dispositions des articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ont été méconnues ;

- la décision contestée n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- le retrait contesté est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- il a introduit une requête en relèvement de l'instruction du territoire le frappant devant le tribunal de grande instance d'Evry ; il y a lieu de surseoir à statuer sur la légalité de la décision attaquée dans l'attente de la décision de cette juridiction.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 septembre 2019, le préfet de l'Allier conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, le retrait de titre de séjour effectué par les services de police est une mesure d'application de l'interdiction judiciaire du territoire ; aucune décision administrative n'est intervenue de sorte que la requête est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, il se trouvait en situation de compétence liée pour la prononcer ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 20 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code pénal ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Pin, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né en 1952, indique être entré en France en 1977. Le préfet de l'Allier lui a délivré, en dernier lieu le 25 juin 2018, un certificat de résidence d'une durée de validité d'un an. Le 11 avril 2019, alors qu'il revenait d'un séjour dans son pays d'origine, les services de la police aux frontières de l'aéroport Lyon Saint-Exupéry lui ont refusé l'accès au territoire, ont procédé au retrait matériel de son titre de séjour à la suite d'instructions données par la préfecture de l'Allier et le tribunal de grande instance d'Evry, puis l'ont placé en zone d'attente. Par un jugement du 11 juillet 2019, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de retrait de son titre de séjour révélée par le procès-verbal de police établi le 11 avril 2019.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si M. C... soutient que les premiers juges n'auraient pas tenu compte de la particularité de son cas, un tel moyen qui touche au bien-fondé du jugement, est en tout état de cause sans incidence sur la régularité de celui-ci.

3. En second lieu, à supposer qu'en soutenant que le tribunal administratif n'a pas pris en considération le moyen tiré de la méconnaissance du contradictoire qu'il avait invoqué M. C... ait entendu se prévaloir d'une omission à statuer, les premiers juges, qui ont écarté à bon droit ce moyen comme inopérant ainsi qu'il sera dit au point 7, n'étaient, en tout état de cause, pas tenus d'y répondre.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article 131-30 du code pénal : " Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit. L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion ". Aux termes de l'article R. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le titre de séjour est retiré : (...) 6° Si son détenteur fait l'objet d'une décision judiciaire d'interdiction du territoire (...) ".

5. Aussi longtemps que la personne condamnée n'a pas obtenu de la juridiction qui a prononcé la condamnation pénale le relèvement de la peine complémentaire que constitue l'interdiction judiciaire du territoire, laquelle est imprescriptible, l'autorité administrative est tenue de pourvoir à son exécution.

6. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 10 juillet 1987, le tribunal de grande instance d'Evry a déclaré M. C... coupable d'emploi non autorisé de stupéfiants, d'offre ou cession non autorisée de stupéfiants, de détention sans autorisation d'arme ou de munition et de port ou transport sans motif légitime de munition ou d'arme, l'a condamné en conséquence à une peine de trois ans d'emprisonnement et a prononcé à titre complémentaire une interdiction définitive du territoire français. Ainsi il n'était plus légalement autorisé à séjourner sur le territoire national tant que la condamnation qui le visait produisait ses effets. M. C... n'établit pas avoir, à la date de la décision contestée, obtenu le relèvement de la décision judiciaire d'interdiction du territoire français. Il n'a d'ailleurs formé auprès du tribunal de grande instance d'Evry une requête en relèvement que postérieurement à cette date.

7. Il résulte des dispositions précitées du 6° de 1'article R. 311-14 du code de 1'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative était tenue, ainsi que le fait valoir en défense le préfet de l'Allier, de pourvoir à son exécution en procédant au retrait du titre de séjour du requérant sans qu'il lui appartienne de porter une appréciation ni sur les faits établis par le juge pénal ni sur les conséquences de cette décision judiciaire. En l'espèce, la confiscation par les services de la police aux frontières du titre de séjour dont M. C... était porteur le 11 avril 2019, manifeste l'existence d'une décision de retrait prise en application de ces dispositions. Il s'ensuit que doivent être écartés comme inopérants les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée, du défaut de motivation de la décision de retrait, du défaut de saisine de la commission du titre de séjour, du défaut de respect de la procédure contradictoire, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article L. 313-11 (7°) et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé, du défaut d'examen particulier de sa situation et du détournement de pouvoir.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de grande instance d'Evry en relèvement ni de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 6 février 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pommier, président de chambre,

M. Drouet, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 27 février 2020.

2

N° 19LY03219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03219
Date de la décision : 27/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POMMIER
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : FENZE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-02-27;19ly03219 ?
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