Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2019 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a retiré sa carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 23 janvier 2019, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement, d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la date de notification du jugement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1900701 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 mai 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 avril 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 8 janvier 2019 lui retirant la carte de séjour pluriannuelle dont il bénéficiait et l'obligeant à quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il remplissait, avant même l'introduction des dispositions législatives régissant l'octroi de la carte de séjour pluriannuelle, l'ensemble des conditions pour se voir délivrer une carte de résident ; il aurait dû être mis en possession d'une carte de résident à la date d'expiration de son troisième titre de séjour, soit le 13 octobre 2016 ; les dispositions relatives à la délivrance de la carte de séjour pluriannuelle, entrées en vigueur postérieurement à cette date, ne lui étaient donc pas applicables, de sorte que le préfet a méconnu le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ; les dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
- le tribunal s'est fondé, pour rejeter sa demande de première instance, sur un défaut d'intégration républicaine alors que le préfet n'avait pas retenu un tel motif à son encontre ;
- il n'est pas à l'origine de la rupture de la communauté de vie ; la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle et familiale.
La requête a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par ordonnance du 18 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 4 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. François-Xavier Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant dominicain né en 1969, est entré en France le 15 novembre 2013, à la suite de son mariage contracté avec une ressortissante française, sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour d'un an. En dernier lieu, il s'est vu délivrer, en application du 2° de l'article L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour pluriannuelle d'une durée de deux ans, valable du 24 janvier 2017 au 23 janvier 2019. A la suite d'une enquête diligentée par le service départemental du renseignement territorial de la Haute-Savoie, le préfet de ce département a mis en oeuvre une procédure contradictoire informant M. C... de son intention de procéder au retrait de son titre de séjour. Par un arrêté du 8 janvier 2019, le préfet de la Haute-Savoie a retiré le titre de séjour pluriannuel dont bénéficiait M. C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 11 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour pluriannuelle a une durée de validité de quatre ans, sauf lorsqu'elle est délivrée : (...) 2° Aux étrangers mentionnés aux 4°, 6° et 7° de l'article L. 313-11 ainsi qu'à l'article L. 313-13. Dans ce cas, sa durée est de deux ans ; (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. (...) ".
4. M. C... fait valoir qu'à l'expiration de son titre de séjour échu le 13 octobre 2016, il remplissait les conditions posées au 3° de l'article L. 314-9 précité de sorte qu'il aurait dû se voir délivrer, à compter de cette date, une carte de résident en application de ces dispositions et non pas une carte de séjour pluriannuelle. Toutefois, une telle circonstance ne pouvait être utilement invoquée qu'à l'encontre de la décision du 24 janvier 2017 portant délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle d'une durée de deux ans à M. C... en tant que le préfet n'avait pas fait droit à sa demande de carte de résident, à supposer qu'il ait sollicité un tel titre. En revanche, un tel moyen est sans incidence sur la légalité de la décision contestée portant retrait de ladite carte de séjour pluriannuelle. En tout état de cause, l'attribution de la carte de résident prévue au 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celle de la carte de séjour pluriannuelle sont soumises à la même condition tenant à l'absence de cessation de la communauté de vie entre les époux depuis le mariage. Enfin, le moyen invoqué par M. C... selon lequel le préfet de la Haute-Savoie aurait entaché sa décision de délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle d'une rétroactivité illégale est, pour les mêmes motifs, et en tout état de cause, inopérant à l'encontre de la décision portant retrait de cette carte. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une rétroactivité illégale de la décision d'octroi de la carte de séjour pluriannuelle ne peuvent qu'être écartés.
5. En deuxième lieu, la motivation de l'arrêté litigieux fait apparaître que le préfet de la Haute-Savoie s'est livré à un examen complet de la situation personnelle de M. C....
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., sans enfant, ne justifie d'une présence sur le territoire français que depuis le mois de novembre 2013 et ne conteste pas ne plus avoir de communauté de vie avec son épouse, ressortissante française. Si M. C... fait valoir que le préfet ne s'est pas fondé, dans la décision attaquée, sur l'avis réservé émis par le maire d'Annecy-le-Vieux le 20 septembre 2016 quant au respect de la condition d'intégration républicaine, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que les premiers juges puissent la prendre en considération en tant qu'élément d'appréciation versé par le préfet à l'appui de ses écritures de première instance. Les circonstances qu'il bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée, que deux de ses soeurs vivent régulièrement en France, et qu'il n'est pas à l'origine de la rupture de la vie commune avec son épouse ne sont pas suffisantes pour établir qu'en retirant à M. C... le titre de séjour dont il bénéficiait, alors que l'intéressé n'établit pas ne plus avoir de liens familiaux en République dominicaine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans, le préfet de la Haute-Savoie aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette décision. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de la Haute-Savoie n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle du requérant.
8. Il résulte de ce qui précède M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller,
Lu en audience publique le 5 décembre 2019.
2
N° 19LY01724